Bains et procédé pour le polissage chimique de surfaces en acier inoxydable
La présente invention a pour objet la composition de bains pour le polissage chimique de surfaces en acier inoxydable.
Le polissage chimique des surfaces métalliques constitue une technique bien connue (Polissage électrolytique et chimique des métaux - W.J. Me G. TEGART - Dunod - 1960 - p. 122 et suivantes); elle consiste à traiter les surfaces métalliques à polir avec des bains oxydants. Pour le polissage chimique des aciers inoxydables austénitiques, on utilise généralement des bains comprenant un mélange, en solution aqueuse, d'acides chlorhydrique, phospho- rique et nitrique (brevet US-A-2662814). Pour améliorer la qualité du polissage, il est habituel d'incorporer à ces bains des additifs adéquats tels que des agents tensio-actifs, des régulateurs de viscosité et des agents de brillantage. Ainsi, dans le brevet US-A-3709824, on décrit une composition d'un bain pour le polissage chimique de surfaces en acier inoxydable, comprenant, en solution aqueuse, un mélange d'acide chlorhy¬ drique, d'acide nitrique et d'acide phosphorique, un régulateur de viscosité choisi parmi les polymères hydrosolubles, un surfactant et de l'acide sulfosalicylique à titre d'agent de brillantage.
Ces bains de polissage connus présentent la particularité d'attaquer le métal à très grande vitesse. Un traitement de polissage d'une surface en acier inoxydable avec de tels bains ne peut généralement pas excéder quelques minutes, sous peine d'engendrer des corrosions locales. Cette grande vitesse d'action des bains de polissage connus est un inconvénient, car elle les rend inutilisables pour certaines applications, notamment pour le polissage de la face interne des parois de cuves de grandes dimensions, telles que des chaudières, des autoclaves ou des cristalliseurs. Le temps nécessité pour le remplissage et la vidange de telles cuves étant en général largement supérieur à la
durée du traitement de polissage chimique optimum, il devient en effet impossible d'obtenir un poli uniforme de la paroi, certaines zones de celle-ci étant insuffisamment polies, d'autres étant profondément corrodées. La grande vitesse d'action des bains de polissage chimique connus rend par ailleurs le contrôle du polissage difficile.
Dans le brevet EP-B-19964 (SOLVAY & Cie), on décrit des bains de polissage chimique à action très lente, qui évitent dès lors les inconvénients précités. Ces bains connus comprennent, en solution aqueuse, un mélange d'acides chlorhydrique, nitrique et phosphorique, de l'acide sulfosalicylique, du chlorure d'alkyl- pyridinium et de la méthylcellulose. Ces bains de polissage connus à action lente sont conçus pour travailler à des tempéra¬ tures au moins égales à 45°C, généralement comprises entre 50 et 100°C.
L'invention vise à fournir des bains conçus pour réaliser un polissage chimique lent et efficace de surfaces en acier inoxy¬ dable, à des températures de travail inférieures à 50°C.
En conséquence, l'invention concerne des bains pour le polissage chimique de surfaces en acier inoxydable, comprenant, en solution aqueuse, un mélange d'acide chlorhydrique, d'acide nitrique et d'acide phosphorique, un acide hydroxybenzoïque éventuellement substitué, au moins un sel 'ammonium quaternaire et un additif sélectionné parmi l'acide perchlorique et les sels hydrosolubles de l'acide perchlorique.
Dans les bains selon l'invention, l'acide hydroxybenzoïque sert d'agent de brillantage. Il peut être non substitué tel que l'acide salicylique ou substitué tel que l'acide sulfosali¬ cylique. L'acide salicylique est préféré. e sel d'ammonium quaternaire est de préférence sélectionné parmi ceux qui comprennent au moins un radical alkyle à longue chaîne, substitué ou non substitué, contenant au moins quatre atomes de caroone. On préfère sélectionner des sels d'ammonium quaternaire dans lesquels le groupement alkyle à longue chaîne contient au moins 8 atomes de carbone, de préférence au coins 12 atomes de carbone, tels que les groupemeπe lauryle, cétyle et
stéaryle, par exemple. Des sels d'ammonium quaternaire spécia¬ lement recommandés appartiennent à la classe formée des sels hydrosolubles d'alkylpyridinium et des sels hydrosolubles d'ammonium quaternaire comprenant, en plus du radical alkyle à longue chaîne défini plus haut, au moins un autre radical alkyle substitué ou non substitué et/ou un radical benzyle substitué ou non substitué. Les halogénures sont préférés, en particulier les chlorures. Des exemples de sels d'ammonium quaternaire utili¬ sables dans les bains selon l'invention sont le chlorure de cétyltriméthylammonium, le chlorure de cétyldiméthylbenzyl- ammonium, le chlorure de distéaryldiméthylammonium, le chlorure de lauryldiméthylbenzylammonium, le chlorure de lauryltriméthyl- ammonium et les chlorures d'alkylpyridinium, notamment le chlorure de cétylpyridinium et le chlorure de laurylpyridinium. Ces sels d'ammonium quaternaire sont accessibles parmi les produits de la marque DEHYQUART (HE KEL).
Dans les bains selon l'invention, il convient que les quantités respectives du sel d'ammonium quaternaire, d'une part, et de l'additif sélectionné parmi l'acide perchlorique et ses sels hydrosolubles, d'autre part, soient réglées pour rendre possible une coadsorption sur la surface de l'acier à polir, tout en évitant de dépasser leur produit de solubilité. En règle géné¬ rale, il est opportun que les bains selon l'invention contiennent, par litre, entre 0,005 et 1 g du sel d'ammonium quaternaire et entre 0,001 et 0,5 mole de l'additif sélectionné parmi l'acide perchlorique et ses sels hydrosolubles.
Les quantités pondérales adéquates des divers constituants des bains selon l'invention dépendent de la nuance de l'acier inoxydable soumis au polissage ainsi que des conditions du polis- sage, notamment du profil de l'objet en acier soumis au polis¬ sage, de son volume, du volume du bain, de sa température et de l'agitation à laquelle on le soumet éventuellement. Elles doivent dès lors être déterminées dans chaque cas particulier par des essais de routine au laboratoire. Des exemples de bains conformes à l'invention, adaptés au polissage d'aciers inoxydables austéni- tiques alliés au chrome et au nickel, à des températures
comprises entre 20 et 50°C comprennent, par litre de solution aqueuse :
. entre 0,5 et 5 moles d'acide chlorhydrique (de préférence
1-3 moles), . entre 0,005 et 1 mole d'acide nitrique (de préférence
0,05-0,5 mole), . entre 0,005 et 1 mole d'acide phosphorique (de préférence
0,01-0,5 mole), . entre 0,0005 et 0,5 mole de l'additif sélectionné parmi l'acide perchlorique et les sels hydrosolubles de l'acide perchlorique
(de préférence 0,001-0,2 mole), . entre 0,001 et 5 g d'acide hydroxybenzoïque substitué ou non substitué (de préférence 0,005-0,3 g, dans le cas de l'acide non substitué), . entre 0,005 et 1 g du sel d'ammonium quaternaire (de préférence
0,02-0,2 g).
Les bains de polissage selon l'invention peuvent éventuel¬ lement contenir des additifs habituellement présents dans les bains connus pour le polissage chimique des métaux, par exemple des agents tensio-actifs, des alcools et des régulateurs de viscosité. Ils peuvent notamment comprendre un composé abiétique hydrosoluble qui est un composé chimique comprenant un radical abiétyle de formule générale :
ou un radical hydroabiétyle ou déhydroabiétyle.
Conformément à l'invention, le composé abiétique doit être soluble dans la solution aqueuse.
Des composés abiétiques utilisables dans les bains selon l'invention sont les abiétamines.
Des abiétamines spécialement recommandées pour les bains
selon l' invention sont celles de formule générale :
/ Xl
RjN \ *2 dans laquelle :
- Ri désigne un radical abiétyle, hydroabiétyle ou déhydro- abiétyle défini ci-dessus, - Xl désigne un radical comprenant au moins un groupe carbonyle, et
- X désigne un atome d'hydrogène ou un radical comprenant au moins un groupe carbonyle.
Des exemples de telles abiétamines, qui conviennent bien dans les bains selon l'invention, sont celles dans lesquelles l'un au moins des radicaux X^ et X est un radical de formule générale :
-CH2-R dans laquelle R2 désigne un reste alkyle linéaire ou cyclique, substitué ou non substitué, saturé ou insaturé, comprenant au moins un groupe carbonyle. Parmi ces composés, on préfère ceux dans lesquels le groupe -CH2- est relié à un groupe carbonyle du reste R2 par un atome de carbone portant au moins un atome d'hydrogène. De telles abiétamines substituées et le moyen de les obtenir sont décrits dans le brevet GB-A-734665. Des exemples d'abiétamines de ce type, utilisables dans les bains selon l'invention, sont celles dans lesquelles le reste alkyle R est sélectionné parmi les restes acétonyle, 2-céto butyle, 4-méthyl 2-céto pentényle-3, 4-hydroxy 4-méthyl 2-céto pentyle, 2-céto cyclopentyle, 4-hydroxy 2-céto pentényle-3, 2-céto cyclohexyle, 2,5-dicéto hexyle et 2-phényl 2-céto éthyle.
Les bains selon l'invention conviennent pour le polissage chimique de toutes surfaces en acier inoxydable austénitique. Ils sont spécialement adaptés au polissage des aciers austénitiques contenant entre 16 et 26 % en poids de chrome et entre 6 et 22 % en poids de nickel, tels que les aciers de nuances 18/8 et 18/10, exempts de molybdène (aciers AISI-304 et 304L) . Les bains selon l'invention présentent la particularité de réaliser le polissage
de tels aciers à vitesse lente, nécessitant généralement un temps de contact compris entre 5 et 12 heures. Ils peuvent être utilisés à toutes températures comprises entre 20°C et la tempé¬ rature d'ébullition. Ils présentent toutefois la particularité remarquable de présenter une excellente efficacité à des tempéra¬ tures inférieures à 50°C, généralement comprise entre 35 et 45°C, à la pression atmosphérique normale, ce qui facilite leur mise en oeuvre et simplifie les mesures à prendre pour assurer la salu¬ brité des ateliers de polissage. Les bains selon l'invention présentent l'avantage supplémentaire de réaliser des polissages de bonne qualité d'assemblages soudés selon les règles de l'art.
L'invention concerne aussi un procédé pour le polissage d'une surface en acier inoxydable, selon lequel on met la surface en contact avec un bain de polissage chimique conforme à l'invention.
Dans l'exécution du procédé selon l'invention, la mise sn contact de la surface métallique avec le bain peut être réalisée de toute manière adéquate, par exemple par immersion. Le temps de contact de la surface à polir avec le bain doit être suffisant pour réaliser un polissage efficace de la surface. Il ne peut toutefois pas excéder une valeur critique au-delà de laquelle le bain perd ses propriétés polissantes. Le temps de contact optimum dépend de nombreux paramètres tels que la nuance de l'acier, la configuration et la rugosité initiale de la surface à polir, la composition du bain, la température de travail, l'agitation éventuelle du bain au contact de la surface, le rapport entre l'aire de la surface à polir et le volume du bain; il doit être déterminé dans ch _^ue cas particulier par un travail de routine au laboratoire. Dans une forme d'exécution préférée du procédé selon l'invention, le bain est mis en oeuvre à une température comprise entre 20 et 50°C, de préférence entre 35 et 45°C, à la pression atmosphérique normale, et on maintient la surface à polir au contact du bain pendant un temps compris entre 5 et 12 heures. L'intérêt de l'invention va être mis en évidence à la lecture des exemples exposés ci-après.
Dans les exemples dont la description suit, on a utilisé des plaques en acier inoxydable de nuance 18/10 [acier allié au chrome (18,0 %) et au nickel (10,0 %) et exempt de molybdène]. Dans chaque exemple, la plaque a été immergée dans le bain de polissage, maintenu à une température sensiblement constante et soumis à une agitation modérée. A l'issue de la période d'immersion, la plaque a été retirée du bain, rincée à l'eau déminéralisée et séchée. On a mesuré les paramètres suivants : . la profondeur moyenne d'attaque du métal, définie par la relation
104 ûe = .ΔP
S.d où S désigne l'aire de la plaque (en cm^), d désigne la masse spécifique du métal (en g/cm^), ΔP désigne la perte en poids (en g) de la plaque pendant l'immersion dans le bain, Δe désigne la profondeur d'attaque (ym);
. la rugosité moyenne arithmétique Ra, qui est la déviation moyenne par rapport à la surface moyenne de la plaque (Encyclopedia of Materials Science and Engineering, Michael B. Bever, Vol. 6, 1986, Pergamon Press, pages 4806 à 4808 (page 4806) :
|dχ
les mesures étant effectuées avec un palpeur muni d'une pointe de 5 ym de diamètre et correspondant à une valeur de cut- off égale à 0,25mm; . la brillance de la surface. Exemple 1 (conforme à l'invention)
On a mis en oeuvre un bain de polissage conforme à l'invention, comprenant, par litre : . 1,5 mole d'acide chlorhydrique, . 0,2 mole d'acide nitrique,
0,2 mole d'acide phosphorique,
0,2 mole d'acide perchlorique,
0,1 g d'acide salicylique,
0,03 g du produit DEHYQUART C qui est un electrolyte contenant du chlorure de laurylpyridinium comme constituant principal
(DEHYQUART est une marque déposée de Henkel).
Les conditions opératoires furent les suivantes : volume du bain : 1940 cπH, aire de la surface soumise au polissage 87 cm2 , température 35°C, . durée de l'immersion 12 heures 30 minutes .
On a relevé les résultats suivants : . profondeur moyenne d'attaque : environ 25 ym ; . rugosité moyenne arithmétique : . avant le polissage : 0,3 ± 0,1 ym,
. après le polissage : 0,12 ± 0,02 ym, . brillance
. sous un angle de 30 degrés (selon la norme ASTM E430) : 40% . sous un angle de 20 degrés (selon la norme ASTM D523) : 25% Exemple 2 (conforme à l'invention)
On a mis en oeuvre un bain de polissage conforme à l'invention, contenant, par litre : . 1,5 mole d'acide chlorhydrique, . 0,2 mole d'acide nitrique, . 0,2 mole d'acide phosphorique, . 0,005 mole d'acide perchlorique . 0,1 g d'acide salicylique, . 0,075 g du produit DEHYQUART LDB (Henkel), qui est un electro¬ lyte contenant du chlorure de lauryldiméthylbenzylammonium comme constituant principal.
Les conditions opératoires furent les suivantes : . volume du bain : 970 cm^, • aire de la surface soumise au polissage : 87 cm2, . température : 35°C,
. durée de l'immersion : 5 heures 30 minutes.
On a relevé les résultats suivants : . profondeur moyenne d'attaque : 24 ym ; . rugosité moyenne arithmétique
. avant le polissage : 0,3 ym, . après le polissage : 0,12 ym. . Brillance [sous un angle de 20 degrés (selon la norme ASTM
D523)] : 25 % Exemple 3 (de référence)
On a répété l'essai de l'exemple 2 avec un bain de polissage chimique non conforme à l'invention, ne contenant pas d'acide perchlorique. Le bain comprenait, par litre : . 1,5 mole d'acide chlorhydrique, . 0,2 mole d'acide nitrique, . 0,2 mole d'acide phosphorique, . 0,1 g d'acide salicylique,
. 0,075 g du produit DEHYQUART LDB (Henkel), qui est un electro¬ lyte contenant du chlorure de lauryldiméthylbenzylammonium comme constituant principal.
Les conditions opératoires furent les suivantes :
. volume du bain 970 cm3,
. aire de la surface soumise au polissage 87 cm2,
. température 35°C,
. durée de l'immersion 6 heures.
On a relevé les résultats suivants : . profondeur moyenne d'attaque : 25 ym ; . rugosité moyenne arithmétique
. avant le polissage : 0,3 ym, . après le polissage : 0,3 ym. . Brillance [sous un angle de 20 degrés (selon la norme ASTM
D523)] : inférieure à I L Exemple 4 (de référence)
On a répété l'essai de l'exemple 2 avec un bain de polissage chimique non conforme à l'invention, ne contenant ni l'acide perchlorique, ni l'électrolyte. Le bain comprenait, par litre : . 1,5 mole d'acide chlorhydrique,
0,2 mole d'acide nitrique, 0,2 mole d'acide phosphorique, 0,1 g d'acide salicylique.
Les conditions opératoires furent les suivantes volume du bain 1940 cm3, aire de la surface soumise au polissage 87 cm2, température 35°C, durée de l'immersion 6 heures, 30 minutes.
On a relevé les résultats suivants : profondeur moyenne d'attaque : 25 ym ; rugosité moyenne arithmétique
. avant le polissage : 0,20 ym, . après le polissage : 0,25 ym. Brillance [sous un angle de 20 degrés (selon la norme ASTM D523)] : inférieure à 1 X.