GRANULES DE SILICIUM POUR LA PREPARATION DE TRICHLOROSILANE ET
PROCEDE DE FABRICATION ASSOCIE
DOMAINE DE L' INVENTION
La présente invention concerne la chaine de fabrication du silicium pour l'industrie photovoltaïque. Elle concerne en particulier des granules de silicium, issus du recyclage des déchets de découpe de lingots de silicium (« kerfs ») et notamment adaptés pour la préparation de trichlorosilane (TCS) .
ARRIERE PLAN TECHNOLOGIQUE DE L' INVENTION
La chaine de fabrication du silicium de haute pureté requis pour l'industrie photovoltaïque est une succession complexe de procédés métallurgiques et chimiques.
Le matériau initial, le silicium métallurgique (MG-Si, pour « metallurgical grade Silicon ») , est issu d'une réaction de carboréduction du quartz mélangé à des réducteurs tels que de la houille réactive ou du charbon de bois, toujours accompagnés de bois. Le mélange est porté à des températures très élevées dans un four à arc électrique. Il subit différents affinages jusqu'à l'obtention du silicium métallurgique solidifié, soit sous forme de lingots, qui seront ensuite concassés, soit sous forme de granulés, de quelques centaines de microns de diamètre moyen. Le silicium métallurgique comporte de nombreuses impuretés :
- de type métallique (Fe, Al, C, Ti, ...) , dans des proportions bien supérieures à 200 ppm (ppm : partie par million en masse) ;
- de type dopant, par exemple phosphore (P) et bore (B) , dans des proportions supérieures à 20 ppm ;
de type organique (C) ou oxygène (O) , dans des proportions supérieures à 100 ppm.
Ce niveau d' impuretés étant incompatible avec les spécifications du silicium photovoltaïque, les granulés ou morceaux de silicium métallurgique sont ensuite traités chimiquement, par chloration ou hydrochloration ; à l'issue de ces procédés chimiques, on obtient un composé gazeux contenant du silicium : le trichlorosilane (HSÏC13, dit TCS) .
Le procédé de chloration s'opère dans un réacteur à lit fluide, dans lequel les granulés ou concassés de MG-Si sont mis en contact avec du chlorure d'hydrogène gazeux. La température et la pression dans le réacteur sont respectivement de l'ordre de 300°C et 4 bars. En sortie du procédé de chloration, du TCS est formé en proportion majoritaire ; sont également formés du tétrachlorure de silicium (STC) et autres composés chlorés contenant du silicium ou des impuretés.
Le procédé alternatif d'hydrochloration s'opère également dans un réacteur à lit fluide, à une température et une pression plus importantes (450°C, 10 à 50 bars) . Les granulés ou concassés de silicium métallurgique sont mis en contact avec du STC (SiC14) et de l'hydrogène. En sortie, du TCS est formé en moindre proportion par rapport à la réaction de chloration ; d'autres composés chlorés contenant du silicium ou des impuretés sont également produits.
Le TCS « impur » issu de l'un ou l'autre des procédés de chloration ou d'hydrochloration est ensuite purifié par une succession d'étapes de distillation. Ces étapes sont extrêmement longues et représentent une part élevée des coûts d'investissements et d'exploitation dans la chaîne de fabrication du silicium. En particulier, les impuretés de type dopants (P, B) sont très difficiles à éliminer et un fort taux de reflux (typiquement supérieur à 100) dans les colonnes de
distillation est nécessaire pour atteindre la pureté requise du TCS .
Le TCS purifié peut ensuite être transformé en morceaux ou grains de silicium de haute pureté constituant la matière première pour le tirage de lingots de qualité photovoltaïque (PV) . Cette matière première est communément appelée PCS (Poly Cristallin Silicon) .
Une première voie pour former le PCS consiste en la décomposition du TCS à haute température (environ 1200°C) dans un réacteur à cloche Siemens (« bell jar reactor ») ; le silicium se dépose progressivement sur un filament disposé à l'intérieur du réacteur, formant à l'issu du procédé un barreau de silicium d'une pureté typique de 6N (> 99, 9999%) à UN. Le barreau de haute pureté est ensuite concassé pour donner de gros morceaux de silicium (« chunks ») qui seront fondus pour le tirage des lingots .
Une voie alternative consiste à transformer le TCS en monosilane (SiH4) puis à décomposer le monosilane dans un réacteur à lit fluide. Le SiH4 mis en contact avec des germes fins de silicium permet la formation de grains de silicium de haute pureté. Les grains de silicium dont la taille est supérieure à 400 microns peuvent être fondus avec les chunks pour le tirage des lingots de qualité photovoltaïque. Les grains de silicium de taille inférieure à 400 microns, qui représentent environ 10% de la production, ne peuvent pas être utilisés notamment du fait des envolements, incompatibles avec les composants électriques et mécaniques des équipements pour le tirage des lingots et du fait de leur forte proportion d'oxyde qui réduit l'efficacité des procédés de tirage.
Les lingots de silicium de qualité PV subissent ensuite plusieurs étapes de découpe : en premier lieu, une découpe des flans du lingot pour définir un bloc parallélépipédique, et en
second lieu une découpe du lingot en tranches. Ces découpes sont à l'origine de pertes importantes (kerf) , de l'ordre de 40 à 50% de la matière première en silicium de haute pureté.
Traditionnellement, la découpe était effectuée par sciage avec un abrasif à base de SiC et un lubrifiant organique (PEG pour polyéthylèneglycol). Le document WO2010127669 propose une solution pour recycler les kerfs issus de ce type de découpe. D'après la méthode décrite, les composants solides des kerfs comprenant des portions de silicium à la pureté requise sont compactés et façonnés en granulés ayant une taille appropriée ; ces granulés sont ensuite introduits dans un réacteur avec du chlorure d'hydrogène de manière à obtenir du trichlorosilane (TCS) et du tétrachlorure de silicium, les composants ferreux des kerfs sont convertis en chlorure de fer, tandis que les portions de Sic présentes se rassemblent dans la partie inférieure du réacteur sous forme de poussière.
En pratique, les kerfs contenant une majorité de SiC par rapport au silicium (deux tiers ou plus) , sont très difficiles à traiter et la mise en œuvre industrielle des solutions proposées s'avère complexe. L'agglomération de particules très fines (appelées « fines ») par un liant n'est pas efficace aux températures de réaction et lesdites particules très fines partent immédiatement du lit fluide. Enfin, l'accumulation de SiC ralentit très rapidement la productivité du réacteur.
Depuis quelques années, la découpe des lingots de silicium de qualité PV s'effectue avec un fil diamanté, l'eau ou le PEG étant utilisés comme lubrifiants. Les déchets (kerfs) sont majoritairement constitués de silicium, avec quelques impuretés liées à l'usure du fil diamanté. Il y a donc un intérêt croissant à récupérer et recycler ces kerfs pour réintroduire le silicium qu' ils contiennent dans la chaine de production du silicium photovoltaïque.
OBJET DE L' INVENTION
La présente invention concerne une solution alternative de recyclage des déchets de silicium. L'invention concerne en particulier des granules de silicium issus du recyclage des kerfs et notamment adaptés à la préparation de TCS . L'invention concerne également un procédé de fabrication de granules de silicium.
BREVE DESCRIPTION DE L' INVENTION
L' invention concerne un granule de silicium, notamment adapté pour la préparation de trichlorosilane (TCS) , qui présente une taille comprise entre 10 et 500 microns, et qui comprend :
• des dopants, parmi lesquels le phosphore ou le bore, dans une fraction massique inférieure à 5 ppm ;
• au moins un co-catalyseur, choisi parmi le fer, l'aluminium et le calcium, dans une fraction massique comprise entre 1 et 2500 ppm ;
• des impuretés métalliques, à l'exclusion du au moins un co-catalyseur, dans une fraction massique inférieure à 50 ppm.
Selon d'autres caractéristiques avantageuses et non limitatives de l'invention, prises seules ou en combinaison :
• la fraction massique d'oxygène est inférieure à 100 ppm.
L' invention concerne également une préparation pulvérulente comprenant des granules de silicium telles que ci-
dessus. La taille moyenne des granules dans ladite préparation pulvérulente est comprise entre 50 et 400 microns.
Selon un mode particulier de réalisation, la taille des granules de silicium dans la préparation pulvérulente est supérieure à 50 microns.
L' invention concerne également un procédé de fabrication de granules de silicium telles que ci-dessus, comprenant :
a) Une étape de fourniture de déchets de silicium issus de la découpe par fil diamanté de lingots de qualité photovoltaïque, lesdits déchets comprenant des particules de silicium couvertes d'une couche d'oxyde et mélangées à des impuretés en milieu aqueux, et/ou une étape de fourniture de déchets de silicium issus de substrats déclassés de l'industrie microélectronique ou photovoltaïque, concassés, lesdits déchets comprenant des particules de silicium couvertes d'une couche d' oxyde et mélangées à des impuretés ;
b) Une étape de traitement chimique des déchets pour séparer les particules de silicium de tout ou partie des impuretés, et sécher les particules de silicium pour former une poudre ;
c) Une étape de traitement métallurgique de la poudre pour fondre les particules de silicium et former un bain de silicium liquide ;
d) Une étape d' introduction d' au moins un co-catalyseur dans le bain de silicium liquide, dans une quantité telle que la fraction massique du co-catalyseur dans les granules soit comprise entre 1 et 2500 ppm ;
e) Une étape de solidification du silicium liquide pour former les granules de silicium.
Selon d'autres caractéristiques avantageuses et non limitatives de l'invention, prises seules ou selon toute combinaison techniquement réalisable :
• l'étape e) comprend une étape de granulation par refroidissement rapide de gouttes de silicium liquide ;
• l'étape e) comprend le déversement du silicium liquide dans une lingotière configurée pour permettre un refroidissement rapide, pour former un bloc de silicium solidifié ;
• le bloc de silicium solidifié est concassé pour former les granules de silicium ;
• le procédé de fabrication comprend une étape f) de séparation par tamisage ou par envolement, pour trier les granules de silicium par taille ;
• à l'étape d) , le au moins un co-catalyseur, choisi parmi le fer, l'aluminium et le calcium est introduit sous forme de métal ou d'alliage métallique dans le bain de silicium liquide ;
• l'étape a) comprend la fourniture de grains de silicium de taille inférieure à 400 microns, issus d'un réacteur à lit fluide basé sur la décomposition de monosilane, les grains étant mélangés aux déchets de silicium ;
• à l'étape c) , des grains de silicium de taille inférieure à 400 microns, issus d'un réacteur à lit fluide basé sur la décomposition de monosilane, sont fondus avec la poudre des particules de silicium ;
• l'étape a) comprend la fourniture de substrats déclassés de l'industrie microélectronique ou photovoltaïque, concassés et mélangés aux déchets de silicium issus de la découpe par fil diamanté de lingots de qualité photovoltaïque ;
l'étape c) des morceaux concassés de substrats déclassés de l'industrie microélectronique ou photovoltaïque sont fondus avec la poudre des particules de silicium.
L'invention concerne enfin un procédé d'obtention de trichlorosilane (TCS) par chloration ou par hydrochloration, utilisant une préparation pulvérulente telle que ci-dessus.
BREVE DESCRIPTION DES DESSINS
D' autres caractéristiques et avantages de l ' invention ressortiront de la description détaillée qui va suivre en référence aux figures annexées sur lesquelles : le tableau 1 présente la composition typique du silicium métallurgique selon l'état de la technique, composition mesurée par spectrométrie de masse à décharge luminescente ;
les tableaux 2a, 2b, 2c présentent des exemples de compositions de granules de silicium conformes à l'invention, composition mesurée par spectrométrie de masse à décharge luminescente ;
le tableau 3 présente la composition typique de particules de silicium dans une poudre issue de l'étape de traitement chimique du procédé de fabrication conforme à l'invention, composition mesurée par spectrométrie de masse à décharge luminescente ;
la figure 1 présente schématiquement l'étape de traitement chimique du procédé de fabrication conforme à l'invention ;
la figure 2 présente un exemple de distribution en taille de particules de silicium dans une poudre issue de l'étape de traitement chimique du procédé de fabrication conforme à l ' invention .
DESCRIPTION DETAILLEE DE L' INVENTION
L' invention concerne un granule de silicium spécialement adapté pour optimiser la production de trichlorosilane (TCS) , dans les procédés de chloration ou d'hydrochloration.
Le terme « granule » dans le cadre de la présente invention doit être compris au sens large, c'est-à-dire correspondant à un grain ou particule de petite taille, susceptible de présenter différentes formes notamment sphérique, arrondie, allongée ou anguleuse.
Le granule de silicium selon l'invention présente une taille comprise entre environ 10 microns et environ 500 microns. Ce que l'on appelle ici taille du granule est son « diamètre équivalent de Sauter ». Le « diamètre équivalent de Sauter » est le diamètre de la sphère qui se comporterait de manière identique lors d'une mesure granulométrique par une technique définie. On pourra notamment citer, à titre d'exemple, une technique de mesure par diffraction laser de type Malvern.
Le granule de silicium comprend une faible quantité de dopants, en particulier les dopants de type phosphore et bore ; chaque dopant représente une faction massique inférieure à 5 ppm. Notons que l'unité « ppm » (partie par million) sera utilisée dans la suite de la description comme toujours relative à une fraction massique.
Avantageusement, le granule de silicium contient également en faible quantité (inférieure à 5 ppm) d'autres dopants, par exemple arsenic, antimoine.
Le granule de silicium selon l'invention comprend en outre au moins un co-catalyseur choisi parmi le fer, l'aluminium et le calcium, dont la fraction massique est ajustable entre 1 et 2500 ppm, avantageusement entre 100 et 2000 ppm. On désigne comme co-catalyseur une impureté dont la présence est nécessaire dans la matrice de silicium pour favoriser en particulier une réaction de chloration ou d'hydrochloration. Ces co-catalyseurs sont en général présents dans des intermétalliques, aux joints de grains de silicium.
Les impuretés métalliques, en-dehors du au moins un co catalyseur, telles que par exemple le titane, le nickel, le zinc, le chrome, le magnésium, le manganèse, le vanadium, etc, sont présentes dans le granule de silicium en faible quantité, correspondant à des fractions massiques pour chaque impureté inférieure à 50 ppm, voire inférieure à 30 ppm, voire encore inférieure à 10 ppm.
Une préparation pulvérulente comprenant des granules de silicium selon l'invention est particulièrement favorable à la fabrication de TCS par les procédés de chloration ou d'hydrochloration, pour les raisons qui vont maintenant être exposées .
D'une part, les faibles fractions massiques de dopants et d'impuretés métalliques (hors co-catalyseurs) contenues dans les granules de silicium permettent de limiter drastiquement le nombre de cycles de distillation nécessaires à la purification du TCS. Rappelons que la distillation des composés phosphore et bore est particulièrement longue et complexe : les granulés ou concassés de silicium métallurgique habituellement utilisés en matière entrante des procédés de chloration ou d'hydrochloration contiennent typiquement 70 à 100 ppm de phosphore et 50 à 70 ppm de bore (tableau 1) . Les granules de silicium selon l'invention comprennent moins de 5 ppm de chacun de ces dopants. Le tableau
2a présente un tableau illustrant un exemple de composition d'un granule de silicium conforme à l'invention, mesurée par spectrométrie de masse à décharge luminescente (GDMS pour « glow discharge mass spectrometry ») : le bore est présent à hauteur de 0,4 ppm et le phosphore à 2 ppm soit en quantité plus de 30 fois plus faible que dans le silicium métallurgique. Le TCS fabriqué à partir de ce type de granule est ainsi beaucoup plus simple et rapide à purifier.
D'autre part, la réactivité des granules de silicium dans le lit fluide, lors des réactions de chloration et d'hydrochloration, est fonction de plusieurs paramètres autres que pression et température. En particulier :
• La teneur des granules en certaines impuretés « utiles » qui doivent alors être considérées comme co-catalyseurs,
• La nature et la quantité de catalyseurs additionnés, dans le lit fluide, à la masse réactive, c'est-à-dire aux granules de silicium.
Comme indiqué en introduction, la réaction suivante s'opère en chloration : Si + HCl
TCS + STC + impuretés et co produits .
En hydrochloration, la réaction est la suivante : Si + 2¾ + 3 STC
4 TCS + impuretés et co-produits.
La présence de co-catalyseurs spécifiques sous forme de composés intermétalliques dans les granules de silicium et dans des proportions choisies permet une activation plus efficace de la réaction chimique de chloration ou d'hydrochloration.
En chloration, le catalyseur le plus communément utilisé est le cuivre. Les teneurs en aluminium et fer des granules de la préparation pulvérulente selon l'invention sont alors
optimisées pour obtenir le taux de réaction maximum et la sélectivité en TCS la plus élevée.
Une préparation pulvérulente adaptée à un procédé de chloration présentera avantageusement une teneur en fer limitée, car le fer freine la sélectivité en TCS. Les granules de la préparation pulvérulente pourront par exemple présenter la composition du tableau 2b.
En hydrochloration, les co-catalyseurs les plus actifs seront le fer et l'aluminium, les quantités de fer devant être nettement plus élevées que pour la chloration. Le cuivre est également communément utilisé pour catalyser la réaction.
Par exemple, une préparation pulvérulente adaptée à un procédé d'hydrochloration pourra présenter la composition du tableau 2c. De manière avantageuse, avec du silicium à bas taux d'aluminium (par exemple lOOOppm) on pourra introduire du chlorure de cuivre sous forme de microbilles dont le d50 est environ 50ym, directement dans le réacteur à lit fluide, pour améliorer l'efficacité de la réaction.
Selon l'invention, les granules de silicium comprennent le (au moins un) co-catalyseur dans une fraction massique comprise entre 1 et 2500ppm de manière à catalyser efficacement, mais sans re-polluer inutilement le silicium : le procédé de fabrication du TCS à partir de ce type de granules est ainsi plus efficace, grâce à une réactivité améliorée et à une purification plus rapide, permettant des gains significatifs en énergie et en capacité de production.
Avantageusement, la taille moyenne des granules de silicium dans la préparation pulvérulente est comprise entre 50 et 400 microns. Par taille moyenne, également appelée d50, on
entend la taille qui est supérieure à la taille de 50% en volume des granules et inférieure à la taille de 50% en volume des granules .
La réactivité des granules de silicium dans le lit fluide de chloration ou d'hydrochloration est également fonction de la surface spécifique des particules, liée à leur d50. Un d50 compris entre 50 et 400 microns est tout à fait adapté à un procédé de chloration.
Pour une utilisation dans un procédé d'hydrochloration, la préparation pulvérulente selon l'invention ne contient que des granules de silicium de taille supérieure à 50 microns, les granules plus fins étant incompatibles avec le procédé d'hydrochloration pour des raisons pratiques de colmatages d'échangeurs de chaleur.
Les granules de silicium selon l'invention sont particulièrement adaptés à la fabrication de TCS par chloration ou hydrochloration, en ce qu'elles présentent une taille et une composition chimique favorisant l'efficacité et la réactivité des réactions de chloration et d'hydrochloration en lit fluide ; la faible teneur en dopants et en impuretés métalliques « non utiles à la réaction » (c'est-à-dire hors co-catalyseurs) limite par ailleurs les étapes subséquentes de purification du TCS.
Le caractère adapté résulte donc d'une combinaison de la taille des granules et de leur composition chimique, paramètres qui peuvent être optimisés et ajustés en fonction des particularités de chaque procédé de chloration ou d' hydrochloration .
Selon un autre aspect avantageux, la fraction massique d'oxygène contenu dans les granules de silicium est inférieure à 100 ppm. L'oxygène vient essentiellement de la couche d'oxyde
qui recouvre habituellement les granules de silicium. Une couche d'oxyde aussi mince que possible favorisera la réactivité de la réaction chimique dans le lit fluide du procédé de chloration ou d'hydrochloration, car le catalyseur sera plus rapidement en contact avec une surface de silicium et en particulier avec des intermétalliques (issus des co-catalyseurs) .
Pour conserver une faible teneur en oxygène, la préparation pulvérulente selon l'invention est avantageusement conditionnée sous atmosphère neutre, par exemple sous azote, limitant ainsi tout contact avec une atmosphère riche en oxygène susceptible d'oxyder les granules de silicium.
L' invention concerne également un procédé de fabrication de granules de silicium.
Le procédé de fabrication comporte une étape a) de fourniture de déchets de silicium (kerfs) issus de la découpe par fil diamanté de lingots de qualité photovoltaïque. Lesdits déchets comprennent des particules de silicium couvertes d'une couche d'oxyde et mélangées à des impuretés en milieu aqueux ; ces impuretés comprennent des particules métalliques et potentiellement des additifs organiques.
Selon un mode de mise en œuvre particulier, l'étape a) pourra également comprendre la fourniture de grains de silicium issus d'un réacteur à lit fluide basé sur la décomposition de monosilane. Préférentiellement, ce sont les grains de taille inférieure à environ 400 microns qui seront fournis à l'étape a) , ceux-ci étant incompatibles avec les procédés de tirage des lingots PV, comme rappelé en introduction. Ces grains pourront être mélangés avec les déchets de silicium (kerfs) à l'étape a) du procédé. Notons que ces grains pourraient alternativement
être utilisés seuls (non mélangés aux kerfs) et subir les étapes subséquentes du procédé de fabrication.
Selon un autre mode de mise en œuvre particulier, l'étape a) peut comprendre la fourniture de substrats déclassés de l'industrie microélectronique ou photovoltaïque. Par substrat déclassé, on entend des substrats à base de silicium retirés d'une ligne de production du fait d'une casse, d'un défaut ou autre non-conformité, ou des substrats en fin de vie, et susceptibles d'être recyclés. A titre d'exemple, ces substrats déclassés pourront être des plaquettes de silicium monocristallin ou polycristallin comprenant des couches isolantes ou métalliques uniformes ou patternées formant tout ou partie de composants, des plaquettes de SOI (silicium sur isolant) , des panneaux solaires défectueux ou en fin de vie, etc .
Ces substrats déclassés pourront être concassés et poursuivre les étapes ultérieures du procédé selon l'invention, ou ils pourront être mélangés avec les déchets de silicium (kerfs) à l'étape a) du procédé avant de poursuivre les étapes du procédé.
Le procédé de fabrication comporte ensuite une étape b) de traitement chimique de la matière fournie à l'étape a) . Cette étape b) vise d'une part, à séparer les particules de silicium de tout ou partie des impuretés, et d'autre part, à sécher les particules de silicium de manière à former une poudre.
Les déchets de silicium (kerfs) se présentent sous forme d'une suspension d'environ 5% de particules de silicium et de particules métalliques dans un liquide aqueux complété d'additifs organiques solubles tels que du PEG par exemple. Une première opération consiste habituellement à séparer grossièrement la fraction liquide qui pourra être éventuellement recyclée sur le système de découpe. Le mélange pâteux résiduel
comporte alors typiquement des particules de silicium 1 couvertes d'une couche d'oxyde 2 et d'une couche de composés organiques 3, et des particules ou ions métalliques 4 (figure la) . Ce mélange pâteux subit alors l'étape de traitement chimique dont les séquences sont les suivantes :
• Disperser les impuretés 4 telles que les métaux ou particules provenant des supports de lingot résultant de la découpe par fil diamanté et les composés organiques 3 (figure lb) ;
• Filtrer les particules de silicium 1 de la phase solide pour éliminer liquide et impuretés (figure le) ;
• Répéter l'opération pour obtenir un agglomérat de particules de silicium contenant très peu de résidus polluants (impuretés) ;
• Traiter l'agglomérat de particules de silicium 1 avec une solution chimique minimisant ou diminuant la couche d'oxyde 2 se trouvant à la surface desdites particules 1, par « etching ». On pourra notamment appliquer des solutions à base d'acide fluorhydrique à l'agglomérat, puis le soumettre à plusieurs cycles de rinçage à l'eau ;
• Sécher l'agglomérat sous atmosphère inerte afin d'obtenir une poudre sèche, avantageusement conservée sous atmosphère inerte.
Ces séquences du traitement chimique pourront notamment être réalisées selon des procédés chimiques de l'état de la technique tels que par exemple celui décrit par Lombardi dans la publication intitulée « High yield recycling process of Silicon kerf from diamond wire wafering » (24th European Photovoltaic
Solar Energy Conférence, 21-25 September 2009, Hamburg, Germany) .
Il résulte de cette étape b) de traitement chimique une poudre très fine, présentant une distribution en taille de
particules sensiblement gaussienne typiquement centrée sur 1 micron (d50 de l'ordre de 1 micron), telle qu'illustrée à titre d'exemple sur la figure 2. La composition chimique typique de cette poudre est illustrée dans le tableau 3. Son niveau de pureté est très bon : d'une part, parce que les particules de silicium viennent de la découpe de lingots de haute pureté et d'autre part, parce que le traitement chimique a permis d'isoler les particules de silicium de la plus grande partie des impuretés (particules métalliques et additifs organiques) présentes dans les déchets de découpe.
Dans le mode de mise en œuvre particulier où des substrats déclassés sont introduits en tant que déchets de silicium à l'étape a), lesdits substrats déclassés pourront subir une étape b) de traitement chimique permettant le retrait de tout ou partie des couches superficielles qu'ils comportent. Cette étape pourra comprendre des séquences connues de gravures sèches ou humides desdites couches, de rinçages et de séchages des substrats déclassés. Ils seront ensuite concassés pour subir, seuls ou mélangés à la poudre des particules de silicium issue d'autres déchets, l'étape c) suivante du procédé de fabrication .
Le procédé de fabrication comporte ensuite une étape c) de traitement métallurgique de la poudre très fine obtenue à l'étape b) . L'étape c) vise à fondre les particules de silicium de la poudre et à former un bain de silicium liquide.
La fusion de particules très fines de silicium est complexe à réaliser industriellement. L'augmentation de la surface spécifique avec la diminution du d50 et la présence d'une couche d'oxyde de silicium (Si02) très isolante à la surface des particules rendent l'opération délicate. Différents procédés de
fusion sont proposés dans l'art antérieur, notamment dans les documents US4354987 et EP0158563 et pourraient être utilisés dans le cadre de la présente invention.
Selon un mode de réalisation avantageux de l'invention, le traitement métallurgique de la poudre est réalisé dans un équipement de fusion à chauffage à induction, équipé d'un creuset en graphite. La température du creuset est montée à environ 1500°C. La poudre fine de particules de silicium est introduite dans le creuset par une ouverture supérieure. Le silicium formant les particules va fondre et s'écouler de la « coquille » formée par la couche d'oxyde pour alimenter un bain de silicium liquide. L'oxyde, restant à l'état solide, va s'agglomérer et flotter dans le bain de silicium liquide. Au moins un orifice aménagé au niveau du creuset permet l'écoulement continu du silicium liquide dans un canal prévu à cet effet. Nous verrons par la suite comment le silicium liquide en sortie de ce canal est mis en forme.
Selon un mode de mise en œuvre particulier, à l'étape c) , des grains de silicium, avantageusement de taille inférieure à 400 microns, issus d'un réacteur à lit fluide basé sur la décomposition de monosilane, peuvent être fondus avec la poudre des particules de silicium ou fondus seuls. Cela permet une réintroduction efficace de ces petits grains (10% de la production comme rappelé en introduction) dans la chaine de fabrication du silicium PV par lit fluide.
Le procédé de fabrication comporte en outre une étape d) d'introduction dans le bain de silicium liquide, d'au moins un co-catalyseur choisi parmi l'aluminium, le fer et le calcium. Cette étape vise à optimiser la teneur en un ou plusieurs co catalyseur ( s ) des granules de silicium issus du procédé de fabrication .
Cette optimisation se fait par additions contrôlées dans le bain de silicium liquide, en évitant l'ajout de dopants (phosphore et bore) ou d'autres impuretés métalliques « non utiles » (notamment pour les procédés de chloration ou hydrochloration) et non souhaitées dans le silicium PCS final. La nature du ou des co-catalyseurs introduits et la quantité dépendent de l'utilisation visée des granules de silicium, notamment pour la chloration ou l ' hydrochloration, et des conditions particulières de mise en œuvre de ces procédés.
L'étape d) permet d'ajuster la nature et la quantité de co-catalyseur ( s ) mélangées au bain de silicium liquide, et ainsi d'ajuster la fraction massique de co-catalyseur ( s ) dans les granules de silicium issus du procédé de fabrication selon l'invention ; un tel ajustement permet d'optimiser le taux de réaction des procédés de chloration ou d'hydrochloration et d'augmenter la sélectivité en TCS et la pureté du TCS produit.
Les quantités optimales de co-catalyseur ( s ) sont avantageusement introduites par dosage dans le bain de silicium liquide, sous forme de métal (Al, Fe) ou sous forme d'alliage (par exemple FeSi, SiCa...).
Le au moins un co-catalyseur est introduit à hauteur de 1 à 2500 ppm en fraction massique du silicium liquide, soit dans une quantité telle que sa fraction massique dans les granules de silicium issues du procédé de fabrication est comprise entre 1 et 2500 ppm ; avantageusement la fraction massique du co catalyseur est choisie entre 100 et 2000 ppm. Comme énoncé précédemment, la fraction massique de co-catalyseur dans les granules est ajustée en fonction des spécificités du procédé de chloration ou d'hydrochloration visé.
Le procédé de fabrication comporte ensuite une étape e) de solidification du silicium liquide visant à former les granules de silicium.
Selon un premier mode de réalisation, l'étape e) comprend une étape de granulation par refroidissement rapide des gouttes de silicium liquide sortant du canal de l'équipement de fusion. Les gouttes de silicium tombent sur une surface froide et subissent une force de centrifugation pour être dispersées avant leur regroupement dans une préparation pulvérulente : leur solidification (trempe) est rapide, ce qui assure une concentration uniforme du (ou des) co-catalyseur ( s ) sous forme de composés intermétalliques dans les granules. La taille des granules va essentiellement dépendre de la taille des gouttes de silicium liquide et de la vitesse de centrifugation. L'étape de granulation se fait sous atmosphère neutre (par exemple argon) de manière à éviter ou tout au moins limiter l'oxydation des granules de silicium.
Selon un deuxième mode de réalisation, l'étape e) comprend le déversement du silicium liquide par le canal de l'équipement de fusion, dans une lingotière configurée pour permettre un refroidissement rapide, de manière à former un bloc de silicium solidifié. En pratique la lingotière présente une forte épaisseur (par exemple 15 cm de fonte A 319) tandis que le bloc de silicium solidifié est de faible épaisseur (par exemple 5 cm) , ce qui assure un refroidissement rapide et donc une concentration relativement uniforme du (ou des) co-catalyseurs (sous forme de composés intermétalliques) dans le bloc de silicium solidifié. L'étape e) comprend ensuite une étape de concassage du bloc de silicium solidifié, sous atmosphère d'azote, pour former les granules de silicium.
Le procédé de fabrication selon l'invention peut en outre comprendre une étape f) de séparation par tamisage ou par envolement, pour trier les granules de silicium par taille. Il est ainsi possible d'assembler des préparations pulvérulentes de granules de silicium dont la taille moyenne (d50) est comprise entre 50 et 400 microns. Pour certaines utilisations particulières (notamment pour les procédés d'hydrochloration), cette étape de séparation permet d'assembler des préparations pulvérulentes dépourvues de granules de silicium de taille inférieure à 50 microns.
Bien-sur, l'invention n'est pas limitée aux modes de réalisation décrits et on peut y apporter des variantes de réalisation sans sortir du cadre de l'invention tel que défini par les revendications.