Procédé de photo-stabilisation de phycobiliprotéines dans un extrait aqueux, compositions contenant des phycobiliprotéines stabilisées et utilisation de phycobiliprotéines stabilisées.
Domaine technique
La présente invention concerne des extraits aqueux d'algues et de cyanobactéries contenant des protéines photosensibles. Plus précisément, l'invention concerne un procédé permettant de photo-stabiliser des protéines et plus particulièrement des phycobiliprotéines extraites d'algues et de cyanobactéries. L'invention concerne également des compositions cosmétiques et dermatologiques intégrant de telles phycobiliprotéines. L'invention concerne aussi une utilisation de ces extraits enrichis en phycobiliprotéines comme agents colorants. L'invention concerne également une composition neutraceutique intégrant de telles phycobiliprotéines. L'invention concerne aussi une utilisation de ces phycobiliprotéines comme agent antioxydant.
Etat de la technique
Les phycobiliprotéines sont des pigments photosynthétiques présents chez certaines algues et toutes les cyanobactéries. Ces pigments protéiques ont une capacité colorante allant du rouge au bleu. L'inconvénient de ces pigments est qu'ils sont sujets à une photo-dégradation leur faisant rapidement perdre leur capacité colorante à la lumière du jour. Ce processus photochimique conduit en effet à la dénaturation partielle ou totale de la molécule chromophore.
Certains de ces pigments sont utilisés pour leurs propriétés fluorescentes. On utilise généralement la phycocyanine, la phycoérythrine et l'allophycocyanine. Ces pigments servent alors notamment pour des
applications en immunodiagnostic, tel que pour des tests immunofluorescents. Ces pigments fluorescents sont destinés en particulier à remplacer les traceurs radioactifs utilisés dans les techniques d'immunodiagnostic. On connaît par le document US 6.046.014 un procédé de stabilisation de ces pigments fluorescents utilisant des piégeurs d'oxygène et de radicaux libres. Les phycobiliprotéines sont conjuguées à ces piégeurs par voie chimique. Dans le document US 5.695.990, on propose d'utiliser pour les applications en immunodiagnostic non pas les phycobiliprotéines, mais les phycobilisomes, structures macromoléculaires plus stables que les phycobiliprotéines.
De tels stabilisateurs ont un coût très important. Les procédés de stabilisation des phycobiliprotéines par ces stabilisateurs sont donc limités à des applications très spécifiques. Le document US 5.643.585 propose d'utiliser les phycobiliprotéines sous forme insoluble, plus stable.
On connaît également, comme stabilisateur de la phycocyanine, la bioptérine-glucoside. La phycobiliprotéine est stabilisée durant seulement quelques heures d'incubation sous radiations ultra-violettes lorsqu'elle est en présence de bioptérine-glucoside (Saito et al. 2003).
Problèmes rencontrés dans l'état de la technique
Ainsi, jusqu'à présent les stabilisateurs des phycobiliprotéines ne donnent pas entière satisfaction. Ils sont majoritairement trop chers pour être communément utilisés, quelque soit l'utilisation finale des phycobiliprotéines. Par ailleurs, il n'existe pas de données toxicologiques de ces stabilisateurs. Ils ne peuvent donc pas être directement utilisés pour des applications cosmétiques, neutraceutiques ou agro-alimentaires. Enfin, les phycobiliprotéines stabilisées jusqu'à présent ne le sont que sur un temps court, incompatible avec une application cosmétique, neutraceutique ou agro-alimentaire de ces pigments. Par exemple, la bioptérine-glucoside ne stabilise la phycocyanine que pendant 8 heures. La dénaturation de ces molécules conduisant à une perte partielle ou totale de leur fonction colorante ou antioxydante, leur utilisation reste limitée dans des produits
cosmétiques ou neutraceutiques produits en grandes quantités et stockés dans des conditions d'éclairement pouvant favoriser la photodégradation. Il est donc reconnu que la photosensibilité des phycobiliprotéines limite leur utilisation dans des produits stockés sous emballages translucides (Tapia et al. 1999).
Buts de l'invention
Dans l'invention on cherche à fournir un stabilisateur des phycobiliprotéines avec un coût de revient peu élevé. On cherche également à ce que les phycobiliprotéines soient photo-stabilisées pendant une durée importante, allant de quelques jours à plusieurs mois. Par ailleurs, dans l'invention on cherche à fournir un procédé de stabilisation de réalisation simple et rapide, permettant d'obtenir dans un temps court une grande quantité de phycobiliprotéines stables. Le stabilisateur utilisé dans l'invention est par ailleurs non toxique. Ainsi, les phycobiliprotéines stabilisées par le procédé de l'invention peuvent être utilisées dans des applications tant cosmétiques que neutraceutiques, agroalimentaires, ou pharmaceutiques.
Figures
La figure 1 représente le spectre des longueurs d'onde des radiations lumineuses auxquelles ont été soumis des extraits aqueux ou hydroalcooliques d'algues et de cyanobactéries pour des essais de stabilisation. Ces spectres sont mesurés à l'intérieur de récipients contenant les extraits pour un éclairement émis par des tubes fluorescents Blanc Industrie Mazdafluor 3ÛW.
La figure 2 représente les cinétiques de décroissance de l'absorption de la lumière dans des extraits hydroalcooliques de phycoérythrine en fonction d'une intensité des flux lumineux auxquels ils sont soumis. La figure 3 représente les cinétiques de décroissance de l'absorption de la lumière dans des extraits hydroalcooliques de phycoérythrine en fonction de concentrations croissantes d'acide ascorbique, les extraits étant soumis à un flux lumineux de 150 μmoles quanta.m"2.s"1.
La figure 4 représente les cinétiques de décroissance de l'absorption de la lumière dans des extraits hydroalcooliques de phycocyanine en fonction de concentrations croissantes d'acide ascorbique, les extraits étant en présence d'un détergent inclus dans une formulation de shampooing et soumis à un flux lumineux de 125 μmoles quanta. m"2.s"1.
Sommaire de l'invention
L'invention concerne donc principalement un procédé de photo-stabilisation de phycobiliprotéines dans un extrait aqueux caractérisé en ce qu'il comprend l'étape suivante consistant à :
- ajouter dans l'extrait aqueux un excipient contenant de l'acide ascorbique.
L'invention concerne également une composition cosmétique ou dermatologique contenant dans un milieu physiologiquement acceptable un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées.
L'invention concerne également une composition neutraceutique contenant dans un milieu physiologiquement acceptable un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées.
L'invention concerne aussi une composition pharmaceutique contenant dans un milieu physiologiquement acceptable un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées.
L'invention concerne aussi une utilisation d'un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées en tant qu'agent colorant. L'invention concerne également une utilisation d'un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées en tant qu'antioxydant.
Description de l'invention
Les inventeurs ont découvert que l'acide ascorbique avait un effet stabilisateur sur les phycobiliprotéines. L'ajout d'acide ascorbique dans un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines permet de stabiliser sur un temps long ces pigments. Les pigments stabilisés par l'acide ascorbique peuvent alors être utilisés pour toutes sortes d'applications, tant pour leurs propriétés colorantes que pour leurs propriétés antioxydantes. Le fait que l'acide ascorbique soit reconnu comme non toxique par ingestion ou par
application cutanée permet d'utiliser les phycobiliprotéines stabilisées par l'acide ascorbique dans toutes sortes de compositions cosmétiques ou agroalimentaires.
L'invention a donc pour principal objet un procédé de photo-stabilisation de phycobiliprotéines dans un extrait aqueux caractérisé en ce qu'il comprend l'étape suivante consistant à :
- ajouter dans l'extrait aqueux un excipient contenant de l'acide ascorbique. Par photo-stabilisation on entend stabilisation structurelle et fonctionnelle d'une molécule pour une durée d'exposition à une lumière naturelle ou artificielle supérieure à la stabilité obtenue en absence d'application du procédé de stabilisation. Par la suite, on parlera indifféremment de molécules photo-stabilisées ou stabilisées.
Par phycobiliprotéines on entend les protéines pigmentaires photosynthétiques surnuméraires telles que les phycocyanines, les phycoérythrines, les allophycocyanines et leurs protéines associées.
Par extrait aqueux on entend préparation obtenue par dissolution d'une substance dans un liquide solvant tel que l'eau ou l'alcool de différents titres. On entend également par extrait aqueux un extrait hydroalcoolique. Par excipient on entend substance gazeuse, liquide, solide ou pâteuse, plus ou moins inerte, à laquelle on incorpore un principe actif d'un produit, afin d'en faciliter la préparation ainsi que l'utilisation et d'en conditionner la consistance, la forme ainsi que le volume.
Par acide ascorbique on entend vitamine C ou tout autre dérivé hydrosoluble de la vitamine C, tels que le magnésium ascorbyl phosphate (utilisé en cosmétique), le sodium ascorbyl-2-O-phosphate, le calcium ascorbate, l'ascorbic acid 2-phosphate zinc, etc.
Dans un exemple particulier de réalisation de l'invention, l'extrait aqueux est un extrait cellulaire obtenu à partir d'algues et/ou de cyanobactéries. Par extraits cellulaires on entend des extraits cellulaires bruts obtenus après extraction, des extraits clarifiés obtenus par extraction-clarification par tout procédé de séparation de phases solides/liquides, des extraits purifiés obtenus par fractionnement des extraits bruts ou clarifiés par tout procédé de séparation liquide/liquide, par des procédés de précipitation ou d'ultrafiltration.
Par algues on entend tout organisme eucaryote photosynthétique du groupe des microalgues et macroalgues comportant des phycobiliprotéines dans leurs membranes photosynthétiques, récoltées ou cultivées en eau de mer ou en eau douce. Par cyanobactéries on entend tout microorganisme procaryote photosynthétique oxygénique contenant des phycobiliprotéines, récoltées ou cultivées en eau de mer ou en eau douce.
Il est possible de prévoir une étape préalable à l'ajout d'acide ascorbique consistant à clarifier l'extrait cellulaire, c'est à dire à le filtrer pour éliminer des particules trop volumineuses. Dans un exemple particulier l'extrait cellulaire clarifié comporte des particules inférieures à 0.45 μm, toutes les particules de diamètres plus importants ayant été filtrées. Dans un autre exemple l'extrait cellulaire clarifié comporte des particules inférieures à 0.1 μm. On prévoit d'ajouter dans l'extrait aqueux entre 0.01 et 1 % d'acide ascorbique en masse par volume (w/v). Préférentiellement on ajoute entre 0.1 et 0.5 % (w/v) d'acide ascorbique. En effet, des expériences, telles que décrites par la suite, montrent qu'une concentration d'acide ascorbique comprise entre 0.1 et 0.5 % suffit à stabiliser des phycobiliprotéines d'un extrait aqueux pendant au moins un mois. D'une manière générale, on prévoit d'ajouter dans l'extrait aqueux une quantité suffisante d'acide ascorbique pour stabiliser les phycobiliprotéines de l'extrait aqueux pendant la durée souhaitée.
L'invention concerne aussi une composition cosmétique ou dermatologique contenant dans un milieu physiologiquement acceptable un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées par le procédé de l'invention. Par composition cosmétique ou dermatologique on entend substance ou préparation destinée à être appliquée sur la peau, les cheveux, les dents ou les muqueuses buccales en vue de les nettoyer, de les protéger, de les maintenir en bon état, d'en modifier l'aspect, de les parfumer ou d'en corriger l'odeur.
Par milieu physiologiquement acceptable on entend milieu compatible avec la peau, y compris le cuir chevelu, les muqueuses, les yeux et les fibres kératiniques (cheveux) des êtres humains.
Il est possible de prévoir que la composition comprenne au moins un adjuvant parmi les dérivés du propylèneglycol, les sels marins ou les agents anioniques.
Par adjuvant on entend substance dépourvue d'activité biologique, mais capable d'améliorer les qualités physico-chimiques de la composition, par exemple pour rendre le produit plus efficace, soit en augmentant son activité, soit en favorisant sa pénétration ou sa fixation, par exemple, des agents mouillants, des agents dispersants, des agents émulsionnants, etc. L'invention concerne également une composition neutraceutique contenant dans un milieu physiologiquement acceptable un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées selon le procédé de l'invention. Par composition neutraceutique on entend toute composition contenant au moins une substance qui peut être considérée comme étant un aliment ou faisant partie d'un aliment et qui possède des propriétés bénéfiques pour la santé d'un organisme vivant, humain ou animal.
Dans un exemple particulier de réalisation de l'invention, on ajoute des extraits stabilisés dans la composition neutraceutique. En effet, l'acide ascorbique est une molécule autorisée en neutraceutique. L'invention concerne également une composition pharmaceutique contenant dans un milieu physiologiquement acceptable un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées selon le procédé de l'invention. Par composition pharmaceutique on entend composition contenant au moins une substance chimique qui peut être considérée comme possédant des propriétés bénéfiques pour la santé d'un organisme vivant, humain ou animal. Par composition pharmaceutique on entend également forme galénique, c'est à dire tout ce qui entoure le dosage de médicaments, leur stabilité, leur conservation et leur absorption.
L'invention concerne également une utilisation d'un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées selon le procédé de l'invention en tant qu'agent colorant dans une composition cosmétique ou dermatologique.
L'invention concerne également une utilisation d'un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées selon le procédé de l'invention en tant qu'antioxydant dans une composition neutraceutique. Par antioxydant, on entend substance capable de neutraliser ou de réduire les dommages causés par les radicaux libres dans l'organisme.
Procédés
1- Obtention d'un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines :
Dans l'invention, on prévoit d'enrichir en acide ascorbique un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines.
Les algues ou cyanobactéries utilisées peuvent être récoltées dans leur milieu naturel ou être cultivées spécifiquement. Pour obtenir un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines on peut par exemple procéder à une macération dans un milieu aqueux de la biomasse (algues et/ou cyanobactéries) contenant un solvant dont des propriétés permettent de faire migrer les phycobiliprotéines hors des cellules. On peut également utiliser des enzymes lysant les parois cellulaires, afin que les molécules contenues dans les cellules, dont les phycobiliprotéines, se retrouvent dans l'extrait aqueux.
Il est également possible de réaliser cet extrait aqueux en faisant éclater les structures cellulaires mises en suspension dans un milieu aqueux par traitements physiques au moyen d'un broyeur mécanique, d'un sonicateur ou de micro-ondes. Les molécules contenues dans les cellules, dont les phycobiliprotéines, se retrouvent ainsi dans l'extrait aqueux. Par exemple, chez les algues, les phycobiliprotéines se trouvent dans des thylakoïdes isolés, à la périphérie de la membrane cellulaire des cellules d'algues. Ces thylakoïdes assurent la photosynthèse grâce à la présence de divers pigments dont notamment des pigments surnuméraires que sont les phycobiliprotéines. On distingue la phycoérythrine de couleur rouge (absorption des radiations vertes), la phycocyanine de couleur bleue (absorption des radiations jaune-orangé) et l'allophycocyanine. Chez les Cyanobactéries, c'est la phycocyanine et l'allophycocyanine qui sont prépondérantes et qui donnent la couleur bleue à ces organismes. Selon les souches, la phycoérythrine sera ou non présente. On peut indifféremment utiliser la biomasse à l'état sec, frais ou congelé. Une fois les phycobiliprotéines extraites de la biomasse, on peut procéder si besoin à une clarification de l'extrait aqueux, afin par exemple d'éliminer une
partie plus ou moins importante des organites cellulaires des algues et/ou cyanobactéries.
On peut par exemple réaliser cette clarification par centrifugation 10000 g de l'extrait aqueux pendant 20 minutes environ. Les organites cellulaires se retrouvent dans le culot tandis que les phycobiliprotéines sont en suspension dans l'extrait aqueux clarifié.
Dans un autre exemple, on peut procéder à une clarification par microfiltration tangentielle. Une telle microfiltration permet de réduire les risques de colmatage du filtre. On optimise donc ainsi la clarification de l'extrait cellulaire.
Il est également possible de procéder à une filtration stérilisante, qui peut être préférée pour certaines applications ultérieures des phycobiliprotéines stabilisées. La filtration stérilisante est une filtration permettant d'éliminer tous les organites et micro-organismes indésirables, et notamment tous les micro-organismes ayant pu contaminer l'extrait aqueux.
Par organite on entend toute partie élémentaire différenciée de la cellule, tels que les mitochondries, appareils de Golgi, centrosomes, nucléoles, etc. Ainsi, on peut prévoir de filtrer l'extrait à 0.22 μm. Ainsi, tous les organites et micro-organismes dont le diamètre est supérieur ou égal à 0.22 μm seront retenus par le filtre. Une telle filtration est stérilisante puisqu'elle permet d'éliminer de l'extrait aqueux les éventuels micro-organismes présents dans l'extrait. La filtration stérilisante semble particulièrement indiquée pour une utilisation ultérieure de l'extrait aqueux dans des compositions cosmétiques ou neutraceutiques.
a- Procédé d'obtention d'un extrait aqueux contenant de la phycoérythrine : On cultive une microalgue Poφhyridium cruentum dans un milieu de culture contenant de l'eau de mer enrichie en NaN03, en engrais horticole liquide et en vitamines. (Porphyridium cruentum est une microalgue contenant un pigment rouge, la phycoérythrine) On récolte la biomasse constituée de Porphyridium cruentum par centrifugation 20000 g en mode continu pendant 10 à 20 minutes environ. On conserve la biomasse à -40°C.
On fait macérer la biomasse à +5°C dans un milieu aqueux pendant une durée comprise entre 1 heure et 24 heures, préférentiellement entre 5 heures et 7 heures.
On clarifie l'extrait aqueux par centrifugation 10000 g pendant 30 minutes, puis par filtration stérilisante à 0.22 μm.
On conserve l'extrait aqueux contenant la phycoérythrine dans une chambre froide à +5°C à l'abri de la lumière, ou plus spécifiquement à l'abri des radiations comprises entre 380 et 700 nm.
b- Procédé d'obtention d'un extrait aqueux contenant de la phycocyanine : On cultive une cyanobactérie Arthrospira (Spirulina) platensis dans un milieu de culture contenant de l'eau douce enrichie en NaNθ3, en engrais horticole liquide riche et en bicarbonate de sodium. (Arthrospira (Spirulina) platensis est une cyanobactérie contenant un pigment bleu vert, la phycocyanine). On récolte la biomasse constituée de Arthrospira (Spirulina) platensis par tamisage sur filtre de 40 μm. On conserve la biomasse à -40°C.
On fait macérer la biomasse à +5°C dans un milieu aqueux pendant une durée comprise entre 1 heure et 24 heures, préférentiellement entre 5 heures et 7 heures.
On clarifie l'extrait aqueux par microfiltration tangentielle à 0.1 μm. On stocke l'extrait aqueux contenant la phycocyanine dans une chambre froide à +5°C à l'abri de la lumière, ou plus spécifiquement à l'abri des radiations comprises entre 380 et 700 nm.
2- Procédé d'enrichissement en acide ascorbique d'un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines : -
On prélève une quantité voulue d'extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines. On enrichit l'extrait aqueux en acide ascorbique dans des quantités suffisantes pour obtenir l'effet stabilisateur recherché sur les phycobiliprotéines, la quantité d'acide ascorbique étant comprise entre 0.01 et 1 % masse/volume d'acide ascorbique.
Par exemple, on enrichit l'extrait aqueux en acide ascorbique à raison de 0.05 à 1 % masse/volume d'acide ascorbique, selon une durée de stabilisation des phycobiliprotéines recherchée.
L'enrichissement en acide ascorbique peut se faire en ajoutant directement dans l'extrait aqueux la quantité d'acide ascorbique pur sous forme de poudre. Il est également possible, dans un autre exemple de réalisation du procédé de l'invention de réaliser préalablement une solution mère contenant une concentration déterminée d'acide ascorbique en solution dans de l'eau. On prélève ensuite, selon les besoins, un volume d'acide ascorbique en solution, à partir de la solution mère, que l'on verse dans l'extrait aqueux contenant les phycobiliprotéines à stabiliser.
Cet enrichissement peut se faire dans des conditions variables selon les besoins et les conditions de manipulation. En effet, la vitesse de dégradation des phycobiliprotéines dépend particulièrement de la température ambiante à laquelle va avoir lieu l'enrichissement, du pH de l'extrait aqueux, de la concentration initiale en phycobiliprotéines et de l'intensité des flux lumineux auxquels l'extrait aqueux est soumis.
La quantité d'acide ascorbique ajoutée à l'extrait aqueux peut dépendre de la quantité initiale de phycobiliprotéines dans l'extrait aqueux, des conditions de manipulation, et de l'utilisation prévue de cet extrait. En effet, selon l'utilisation prévue une durée de stabilisation des phycobiliprotéines plus ou moins longue est attendue.
Compositions
1- Compositions cosmétiques :
On ajoute une quantité déterminée d'extrait . aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées par l'acide ascorbique dans une préparation pour faire du shampooing, du savon, du rouge à lèvres, une composition colorante pour les cheveux ou pour la peau, ou toute autre préparation nécessitant un agent colorant.
Par exemple, on ajoute un extrait aqueux contenant de la phycocyanine dans une préparation pour shampooing, afin de conférer une couleur bleue à ladite préparation.
Par exemple, on ajoute un extrait aqueux contenant de la phycoérythrine dans une préparation pour rouge à lèvres, afin de conférer une couleur rouge à ladite préparation.
On peut préalablement ajouter à l'extrait aqueux contenant les phycobiliprotéines un adjuvant contenant au moins par exemple du propylèneglycol, des sels marins ou des agents anioniques, selon les utilisations de l'extrait aqueux. Par exemple, le propylèneglycol est connu pour ses propriétés conservatrices qui protègent la phase grasse d'une émulsion en retardant un phénomène de rancissement et qui préviennent la formation d'odeurs. De plus, le propylèneglycol est connu pour ses propriétés bactériostatiques, qui peuvent être appréciées dans de telles compositions destinées à être appliquées notamment sur la peau.
2- Compositions neutraceutiques : On ajoute dans une composition une quantité souhaitée d'extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées par de l'acide ascorbique. Une quantité finale de phycobiliprotéines stabilisées dans la composition dépend de l'effet neutraceutique recherché, du mode d'administration, de la durée de conservation que l'on souhaite pour ladite composition... D'une manière générale, on ajoute une quantité suffisante d'extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées pour obtenir un effet neutraceutique souhaité.
Une composition neutraceutique de l'invention peut par exemple être une solution à boire, tel qu'un sirop, ou une gélule, ou une gomme à mâcher. La composition neutraceutique peut également être sous forme de poudre pour compléter par exemple une préparation culinaire.
La phycocyanine par exemple est connue pour avoir un pouvoir antioxydant vingt fois plus fort que l'acide ascorbique. Dans l'invention, la phycocyanine étant stabilisée par l'acide ascorbique, le pouvoir antioxydant de la composition neutraceutique finale est très élevé.
Dans le cas où l'extrait aqueux enrichi en phycobiliprotéines stabilisées est utilisé comme antioxydant dans une composition neutraceutique, on peut prévoir d'ajouter dans la composition une quantité suffisante d'adjuvant.
3- Compositions pharmaceutiques
On ajoute dans une composition une quantité souhaitée d'extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées par de l'acide ascorbique. Une quantité finale de phycobiliprotéines stabilisées dans la composition dépend de l'effet antioxydant ou colorant recherché, du mode d'administration, du temps de conservation que l'on souhaite pour ladite composition... D'une manière générale, on ajoute une quantité suffisante d'extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines stabilisées pour obtenir un effet souhaité. Une composition pharmaceutique de l'invention peut par exemple être un enrobage de médicament auquel on souhaite donner une couleur rouge ou bleue. On ajoute pour cela dans la composition une quantité déterminée d'extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines (conférant la couleur souhaitée à la composition) stabilisées. Une composition pharmaceutique de l'invention peut également être une solution à boire, tel qu'un sirop, ou une gélule, ou une gomme à mâcher.
Expériences 1- Expérience 1 : On cherche à caractériser la nature et l'intensité des radiations lumineuses responsables des processus de dégradation des phycobiliprotéines. Pour cela, on soumet un extrait aqueux contenant des phycobiliprotéines à une source de lumière artificielle (tubes fluorescents Blanc Industrie Mazdafluor 30W). La figure 1 représente le spectre en fonction des longueurs d'onde des radiations lumineuses reçues par des extraits aqueux ou hydroalcooliques contenant des phycobiliprotéines. Les mesures ont été effectuées à l'intérieur des récipients contenant ces extraits. Les extraits analysés à un pH proche de la neutralité (pH 6,9) sont incubés à une température d'environ 20°C. Sur la figure 1 , on voit bien que l'expérimentation a été menée avec des radiations de lumière visible, dépourvues de radiations ultra-violettes. Les expériences suivantes sont donc réalisées dans des conditions d'éclairement proches de celles qui prévalent lors d'un stockage en linéaire de commerces pour des produits sous emballage translucide.
2- Expérience 2 :
On souhaite mesurer une vitesse de dégradation de la phycoérythrine soumise à la lumière visible.
Pour cela, on soumet différents échantillons d'extraits aqueux clarifiés à 0.22 μm et contenant une même concentration initiale de phycoérythrine à une source de lumière artificielle, et à une température d'incubation de 20°C. Selon les expérimentations, les échantillons contiennent initialement de 60 à 700 mg.L"1 de phycoérythrine en solution dans du propylèneglycol à 50% w/v. Quatre échantillons sont incubés à différentes intensités du flux lumineux. Un premier échantillon est soumis à un flux lumineux de 25 μmoles quanta.m"2.s" 1. Un second échantillon est soumis à un flux lumineux de 60 μmoles quanta.m"2.s"1. Un troisième échantillon est soumis à un flux lumineux de 100 μmoles quanta. m"2.s"1. Enfin, un quatrième échantillon est soumis à un flux lumineux de 190 μmoles quanta.m"2.s"1.
La vitesse de dégradation de la phycoérythrine est mesurée par spectrophotométrie. La mesure de l'absorbance des échantillons en fonction du temps d'incubation permet de calculer la concentration de phycobiliprotéines non photodégradées dans les extraits aqueux au cours du temps.
Sur la figure 2 est représentée l'absorbance de la phycoérythrine à 566 nm (correspondant à une concentration initiale en phycoérythrine de 177 mg.L"1) dans les quatre échantillons d'extraits aqueux (axe des ordonnées) en fonction de la durée en jours (axe des abscisses) pendant laquelle les échantillons sont soumis à un flux lumineux.
L'échantillon soumis à un éclairement de 25 μmoles quanta. m"2.s"1 est quasiment stable, les phycobiliprotéines dégradées, n'excédant pas 25 % au bout de 10 jours. A l'inverse, l'échantillon soumis à un éclairement de 190 μmoles quanta. m" 2.s"1 subit une photodégradation importante et rapide de la phycoérythrine. La totalité de la phycoérythrine est dégradée en à peine 4 jours. Pour l'échantillon soumis à un éclairement de 100 μmoles quanta. m"2.s"1, la photodégradation est moins rapide, mais dès 10 jours près de 50% des phycobiliprotéines ont été dégradées.
On voit donc bien que la vitesse de dégradation de la phycoérythrine est proportionnelle à l'intensité du flux lumineux à laquelle l'échantillon est soumis.
Or, dans le commerce, un éclairement des rayons portant les produits est de l'ordre de 150 μmoles quanta.mAs"1. Dans les expériences qui suivent, les extraits aqueux analysés sont soumis à un flux lumineux de 150 μmoles quanta. m"2.s"\ au moyen par exemple d'une lampe fluorescente de type Blanc Industrie Mazdafluor.
3- Expérience 3 :
On cherche à mesurer l'effet de l'ajout de différentes concentrations d'acide ascorbique sur la stabilité d'extraits contenant des phycobiliprotéines en fonction du temps d'incubation à la lumière.
Pour cela, on utilise des échantillons d'extraits aqueux clarifiés à 0.1 μm obtenus à partir de Porphyridium cruentum et contenant de la phycoérythrine en solution dans du propylèneglycol à 50% w/v. Une concentration initiale en phycoérythrine dans les échantillons est de 190 mg.L"1-
On ajoute selon l'échantillon d'extrait aqueux 0 %, 0.5 % ou 1 % w/v d'acide ascorbique. Les échantillons sont mis à incuber à environ 20 °C, pour un pH proche de la neutralité et un trajet optique de 15 mm. Le flux lumineux auquel les échantillons sont soumis est de 150 μmoles quanta. m"2.s"1.
Sur la figure 3, on peut voir une absorbance de la phycoérythrine à 566 nm
(correspondant à une concentration initiale en phycoérythrine de 190 mg.L"1) dans les trois échantillons d'extraits aqueux (axe des ordonnées) en fonction du temps en jours (axe des abscisses) pendant lequel les échantillons sont soumis au flux lumineux de150 μmoles quanta. m"2.s"1.
Ainsi, on peut observer que l'échantillon dépourvu d'acide ascorbique subit une photo-dégradation rapide de la phycoérythrine. En effet, en 4 jours, la quantité de phycoérythrine non dégradée est divisée par deux. Au bout de 6 jours, la totalité de la phycoérythrine a subi une photodégradation.
Dans les échantillons contenant 0.5 % ou 1 % d'acide ascorbique, par contre, la phycoérythrine semble stabilisée. En effet, au bout de 18 jours, la quantité de phycoérythrine non dégradée est quasiment identique à la quantité initiale de ce pigment dans ces deux échantillons.
4- Expérience 4 :
Une expérience analogue à l'expérience 3 a été réalisée sur des échantillons d'extraits hydroalcooliques contenant de la phycocyanine, une phycobiliprotéine de couleur bleue extraite de cyanobactéries telles que Spirulina/ Arthrospira.
Les échantillons sont utilisés ici dans une composition cosmétique de type shampooing. Une telle composition contient notamment des détergents. Or, les milieux contenant des détergents sont connus pour être agressifs contre les pigments protéiques. On se place donc ainsi dans des conditions très défavorables pour la phycocyanine, afin de vérifier que l'ajout d'acide ascorbique la stabilise même lorsqu'elle est dans une telle composition. Des échantillons ont été incubés à 20°C environ, avec des concentrations différentes d'acide ascorbique, à un éclairement de 150 μmoles quanta.m"2.s" .
Sur la figure 4, on peut voir une absorbance de la phycocyanine en présence de détergent à 620 nm (correspondant à une concentration initiale en phycocyanine de 180 mg.L"1) dans six échantillons d'extrait aqueux (axe des ordonnées) par rapport au temps en jours (axe des abscisses) pendant lequel les échantillons sont soumis au flux lumineux de 150 μmoles quanta. m"2.s"1.
Un premier échantillon ne contient pas d'acide ascorbique. Dans cet échantillon la totalité de la phycocyanine est dégradée en 5 jours d'incubation à la lumière. Un second échantillon contient 0.05 % d'acide ascorbique. Dans un premier temps, la vitesse de dégradation est relativement lente. Mais au bout de 15 jours, la photodégradation s'accélère. Au temps 25 jours, environ 30 % des phycocyanines de l'échantillon sont photodégradées. Un troisième échantillon contient 0.1 % d'acide ascorbique. Un quatrième échantillon contient 0.2 % d'acide ascorbique. Un cinquième échantillon contient 0.5 % d'acide ascorbique. Un sixième échantillon contient 1 % d'acide ascorbique. Dans ces quatre échantillons, la phycocyanine est stabilisée de manière égale. La quantité de phycocyanines dans ces échantillons reste constante durant plus de 30 jours.
Il ressort de cette expérience qu'une concentration de 0.1 % d'acide ascorbique (w/v) suffit à stabiliser la phycocyanine dans la composition durant au moins un mois.
Les inventeurs ont montré que pour des concentrations plus élevées d'acide ascorbique (1 %), la phycocyanine contenue dans cette composition est photo-stabilisée sur plus de 5 mois.
Ainsi, les résultats de la stabilisation de la phycocyanine confirment en tout point ceux obtenus sur la phycoérythrine
5- Expérience 5 :
Dans un autre exemple, on a étudié la stabilisation de allophycocyanine.
Pour cela, on réalise un extrait brut aqueux à partir d'algues rouges ou de cyanobactéries.
On ajoute différentes concentrations d'acide ascorbique dans différents échantillons de cet extrait aqueux contenant de l'allophycocyanine.
On mesure la vitesse de dégradation de l'allophycocyanine dans les échantillons par des dosages spectrophotométriques.
Les résultats montrent que cette phycobiliprotéine est également protégée par la présence d'acide ascorbique.
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