COMPOSITION DE CAOUTCHOUC A BASE D'ELASTOMERE DIENIQUE ET D'UN
NITRURE DE SILICIUM RENFORÇANT
La présente invention est relative aux compositions de caoutchoucs diéniques utilisables pour la fabrication de pneumatiques ou de produits semi-finis pour pneumatiques, en particulier de bandes de roulement de ces pneumatiques, ainsi qu'aux charges renforçantes susceptibles de renforcer de telles compositions de caoutchouc.
De façon à réduire la consommation de carburant et les nuisances émises par les véhicules à moteur, des efforts importants ont été réalisés par les concepteurs de pneumatiques afin d'obtenir des pneumatiques présentant à la fois une très faible résistance au roulement, une adhérence améliorée tant sur sol sec que sur sol humide ou enneigé et une très bonne résistance à l'usure.
De nombreuses solutions ont ainsi été proposées pour abaisser la résistance au roulement et améliorer l'adhérence des pneumatiques, mais celles-ci se traduisent en général par une déchéance très importante de la résistance à l'usure. Il est bien connu notamment que l'incorporation de charges blanches conventionnelles comme par exemple des silices ou alumines conventionnelles, de la craie, du talc, des argiles telles que la bentonite ou le kaolin, dans des compositions de caoutchouc utilisées pour la fabrication de pneumatiques et notamment de bandes de roulement, se traduit certes par un abaissement de la résistance au roulement et par une amélioration de l'adhérence sur sol mouillé, enneigé ou verglacé, mais aussi par une déchéance inacceptable de la résistance à l'usure liée au fait que ces charges blanches conventionnelles n'ont pas de capacité de renforcement suffisante vis-à-vis de telles compositions de caoutchouc. On qualifie généralement ces charges blanches, pour cette raison, de charges non renforçantes encore appelées charges inertes.
Une solution efficace à ce problème a été décrite notamment dans les demandes de brevet EP- A-0501227, EP-A-0735088 ou WO99/02602 qui divulguent des compositions de caoutchouc diénique renforcées de silices précipitées à haute dispersibilité (silices dites "HDS" pour "highly dispersible silica"), permettant de fabriquer des bandes de roulement ayant une résistance au roulement nettement améliorée, sans affecter les autres propriétés en particulier celles d'adhérence, d'endurance et surtout de résistance à l'usure. D'autres compositions présentant un tel compromis de propriétés contradictoires sont également décrites dans les demandes EP-A-0810258 et WO99/02602 avec à titre de charges blanches renforçantes, des charges alumineuses spécifiques à dispersibilité élevée.
Toutefois, la mise en oeuvre ("processabilité") des compositions de caoutchouc contenant ces charges blanches spécifiques, même lorsqu'elles sont du type hautement dispersibles, reste plus difficile que pour les compositions de caoutchouc chargées conventionnellement de noir de carbone. En effet, pour des raisons d'affinités réciproques, ces particules de charge blanche ont une fâcheuse tendance, dans la matrice élastomérique, à s'agglomérer entre elles. Ces interactions tendent à augmenter la consistance à l'état cru des compositions et donc à rendre leur mise en œuvre plus difficile qu'en présence de noir de carbone; elles ont aussi pour conséquence de limiter la dispersion de la charge et donc les propriétés de renforcement à un niveau sensiblement inférieur à celui qu'il serait théoriquement possible d'atteindre si toutes
les liaisons (charge blanche/élastomère) susceptibles d'être créées pendant les opérations de malaxage thermo-mécanique, étaient effectivement obtenues.
De surcroît, ces charges inorganiques du type siliceuses ou alumineuses présentent aussi l'inconvénient connu de perturber de manière sensible la cinétique de vulcanisation des compositions élastomériques, comparativement aux compositions conventionnelles chargées de noir de carbone. En particulier, dans le cas de silices, on sait que les durées de cuisson plus longues qui en résultent peuvent pénaliser la mise en œuvre industrielle des compositions élastomériques, comme celle des articles en caoutchouc les contenant.
Or, les Demanderesses ont découvert lors de leurs recherches qu'il existe des charges inorganiques spécifiques, autres que celles précitées, qui elles aussi peuvent être utilisées dans les compositions de caoutchouc comme de véritables charges renforçantes, c'est-à-dire sont capables de remplacer des noirs de carbone conventionnels pour pneumatiques. De manière inattendue, ces charges inorganiques spécifiques offrent non seulement une excellente capacité de mise en œuvre aux compositions de caoutchouc les contenant, mais encore une aptitude à la dispersion très élevée, toutes deux proches de celles disponibles avec des noirs de carbone.
En conséquence, un premier objet de l'invention concerne une composition de caoutchouc à base d'au moins (i) un élastomère diénique, (ii) une charge inorganique renforçante, (iii) un agent de couplage assurant la liaison entre la charge renforçante et l'élastomère, caractérisée en ce que ladite charge inorganique comprend un nitrure de silicium (ci-après dénommé "nitrure de silicium renforçant") ayant les caractéristiques suivantes: - (a) une surface spécifique BET comprise entre 20 et 200 m2/g;
(b) une taille moyenne (en masse) de particules (dw) comprise entre 10 et 350 nm.
Traditionnellement, on le sait, les nitrures de silicium ont été utilisés essentiellement dans les bandes de roulement des pneumatiques pour améliorer l'adhérence sur sol neigeux ou verglacé (voir par exemple JP-A-1985/258235, JP-A-1987/198503, JP-A- 1990/135241). Dans ces documents, les particules de nitrure de silicium choisies pour leur taille grossière et leur dureté très élevée ont pour fonction, non pas le renforcement, mais l'amélioration de l'adhérence par un effet de "griffe" bien connu sur neige ou glace. Les nitrures de silicium ont également été utilisés pour améliorer la conductivité thermique de divers types de matériaux, notamment des membranes des moules de cuisson de pneumatiques tel que décrit dans JP-A- 1986/040114. Là encore la taille des particules de nitrure de silicium est grossière. Il est également essentiel de noter que ces nitrures de silicium conventionnels sont toujours ajoutés à des compositions de caoutchouc qui contiennent par ailleurs une véritable charge renforçante comme le noir de carbone et/ou la silice.
L'invention a également pour objet un procédé d'obtention d'une composition de caoutchouc utilisable pour la fabrication de pneumatiques, dans lequel on incorpore à au moins un élastomère diénique, au moins une charge inorganique renforçante et un agent de couplage assurant la liaison entre la charge inorganique renforçante et l'élastomère, ce procédé étant caractérisé en ce que ladite charge inorganique comporte un nitrure de silicium ayant les caractéristiques suivantes:
(a) une surface spécifique BET comprise entre 20 et 200 m2/g;
(b) une taille moyenne (en masse) de particules dw comprise entre 10 et 350 nm,
et en ce qu'on malaxe thermomécaniquement le tout, en une ou plusieurs étapes, jusqu'à atteindre une température maximale comprise entre 110°C et 190°C.
L'invention a également pour objet l'utilisation d'une composition conforme à l'invention pour la fabrication d'articles finis ou produits semi-finis, ainsi que ces articles finis et produits semi-finis eux-mêmes, comportant une composition de caoutchouc conforme à l'invention, ces articles ou produits étant destinés à tout système de liaison au sol des véhicules automobiles, tels que pneumatiques, appuis internes de sécurité pour pneumatiques, roues, ressorts en caoutchouc, articulations élastomériques, autres éléments de suspension et antivibratoire.
L'invention a tout particulièrement pour objet l'utilisation d'une composition conforme à l'invention pour la fabrication de pneumatiques ou de produits semi-finis en caoutchouc destinés à ces pneumatiques, ces articles semi-finis étant notamment choisis dans le groupe constitué par les bandes de roulement, les sous-couches destinées par exemple à être placées sous ces bandes de roulement, les nappes d'armature de sommet, les flancs, les nappes d'armature de carcasse, les talons, les protecteurs, les chambres à air et les gommes intérieures étanches pour pneu sans chambre.
L'invention a notamment pour objet les pneumatiques comportant une composition élastomérique conforme à l'invention et destinés à équiper des véhicules de tourisme, véhicules 4x4 (à 4 roues motrices), SUV ("Sport Utility Vehicles"), deux roues (notamment vélos ou motos), comme des véhicules industriels choisis parmi camionnettes, "Poids-lourd" - Le., métro, bus, engins de transport routier (camions, tracteurs, remorques), véhicules hors-la- route, engins agricoles ou de génie civil, avions, autres véhicules de transport ou de manutention.
L'invention concerne en particulier les bandes de roulement de pneumatiques, ces bandes de roulement pouvant être utilisées lors de la fabrication de pneumatiques neufs ou pour le rechapage de pneumatiques usagés ; grâce aux compositions de l'invention, ces bandes de roulement présentent à la fois une faible résistance au roulement, une très bonne adhérence et une résistance élevée à l'usure.
L'invention a également pour objet l'utilisation à titre de charge renforçante, dans une composition de caoutchouc diénique, d'un nitrure de silicium renforçant tel que défini ci- dessus.
L'invention a enfin pour objet un procédé pour renforcer une composition de caoutchouc diénique, caractérisé en ce qu'on incorpore à cette composition à l'état cru, par malaxage thermo-mécanique, un nitrure de silicium renforçant tel que défini ci-dessus.
L'invention ainsi que ses avantages seront aisément compris à la lumière de la description et de l'exemple de réalisation qui suit, ainsi que des figures 1 et 2 relatives à cet exemple qui représentent:
une courbe d'évolution de la taille d'agglomérats au cours d'une sonification pour une charge conforme à l'invention, courbe à partir de laquelle est déterminée la vitesse de désagglomération α (fig.l); une courbe de variation de module en fonction de l'allongement pour une composition de caoutchouc diénique, conforme à l'invention (fig.2.);
I. MESURES ET TESTS UTILISES
1-1. Caractérisation des charges renforçantes
Les charges décrites ci-après consistent de manière connue en des agglomérats de particules, susceptibles de se désagglomérer en ces particules sous l'effet d'une force externe, par exemple sous l'action d'un travail mécanique ou d'ultrasons. Le terme "particule" utilisé dans la présente demande doit être compris dans son sens générique habituel d'agrégat (encore appelé "particule secondaire"), et non dans celui de particule élémentaire (encore appelé "particule primaire") éventuelle pouvant former, le cas échéant, une partie de cet agrégat ; par "agrégat", il faut entendre de manière connue l'ensemble insécable (i.e., qui ne peut être coupé, divisé, partagé) qui est produit lors de la synthèse de la charge, en général formé de particules élémentaires (primaires) agrégées entre elles.
Ces charges sont caractérisées comme indiqué ci-après.
a) surface spécifique BET:
La surface spécifique ("aire massique") BET est déterminée par adsorption de gaz à l'aide de la méthode de Brunauer-Emmett-Teller décrite dans "The Journal ofthe American Chemical Society" Vol. 60, page 309, février 1938), plus précisément selon la norme française NF ISO 9277 de décembre 1996 [méthode volumétrique multipoints (5 points) - gaz: azote - dégazage: lheure à 160°C - domaine de pression relative p/po : 0.05 à 0.17].
b) taille moyenne des particules dv, :
La taille moyenne (en masse) des particules, notée dw, est mesurée de manière classique après dispersion aux ultrasons de la charge à analyser dans de l'eau déminéralisée.
La mesure est réalisée au moyen d'un sédimentomètre centrifuge à détection rayons X type "XDC" ("X Ray Disc Centrifuge Sedimentometer"), commercialisé par la société Brookhaven Instruments, dispositif connu utilisé notamment pour la caractérisation de particules de silice.
Le mode opératoire est le suivant. On réalise une suspension de 1 à 4g (par exemple 1.7g conviennent) d'échantillon de charge à analyser dans 40 ml d'eau, par action durant 8 minutes,
à 60% de puissance (60% de la position maxi du "output control"), d'une sonde ultrasons de 1500 W (sonificateur Vibracell 3/4 pouce commercialisé par la société Bioblock sous la référence M75450). Pour limiter réchauffement pendant la sonification, la suspension est placée de préférence dans un bain d'eau froide (par exemple à une température de 5 à 10°C). Après sonification, on introduit 15 ml de la suspension dans le disque en rotation; après sédimentation pendant 120 minutes, la distribution en masse des tailles de particules et la taille moyenne en masse des particules dw sont calculées de manière connue par le logiciel du sédimentomètre "XDC" (dw = ∑(m dj5) / ∑(nj d|4) avec n, nombre d'objets de la classe de taille ou diamètre dj)
c vitesse de désagglomération α:
La vitesse de désagglomération (notée α) est mesurée au test dit "test de désagglomération aux ultrasons", à 15% de puissance d'une sonde de 600 W (watts) fonctionnant ici en mode puisé (soit 1 seconde « ON », 3 secondes « OFF ») afin d'éviter un échauffement de la sonde à ultrasons durant la mesure. Ce test de principe connu, faisant notamment l'objet de la demande de brevet WO 99/28376, permet de mesurer en continu l'évolution de la taille moyenne (en volume) des agglomérats de particules durant une sonification (voir WO99/28376, WO99/28380, WO99/28391). Etant donné la très faible taille des objets observés, le mode opératoire a été adapté en recourant dans le cas présent à la méthode de Mie.
Le montage utilisé est constitué d'un granulomètre laser (type "Mastersizer S", commercialisé par Malvern Instruments - source laser He-Ne émettant dans le rouge, longueur d'onde 632,8 nm) et de son préparateur ("Malvern Small Sample Unit MSX1"), entre lesquels a été intercalée une cellule de traitement en flux continu (Bioblock M72410) munie d'une sonde ultrasons (Sonificateur 1/2 pouce type Vibracell de 600 W commercialisé par la société Bioblock sous la référence M72412).
Une quantité de 100 mg de charge à analyser est introduite dans 30ml d'eau. La suspension obtenue est introduite dans le préparateur avec 130 ml d'eau, la vitesse de circulation étant fixée à son maximum (environ 3 litres par minute).
Au moins trois mesures consécutives sont réalisées pour déterminer, selon la méthode de calcul connue de Mie [matrice de calcul Malvern 3RHD, établie avec un indice de réfraction complexe (par exemple n*= 2.02 + O.li pour le nitrure de silicium)], le diamètre initial moyen (en volume) des agglomérats, noté dv[0]. La sonification est ensuite établie à une puissance de 15%o (soit 15% de la position maxi du "tip amplitude") en mode puisé, caractérisé par une succession de séquences de 1 seconde de sonification (affichage « ON ») suivies de 3 secondes sans sonification (affichage « OFF »). On suit durant 9 minutes environ l'évolution du diamètre moyen en volume dv[t] en fonction du temps "t" à raison d'une mesure toutes les 10 secondes environ. Après une période d'induction (environ 3 min), il est observé que l'inverse du diamètre moyen en volume l/dv[t] varie linéairement, ou de manière sensiblement linéaire, avec le temps "t" (régime stable de désagglomération). La vitesse de désagglomération α est calculée par régression linéaire de la courbe d'évolution de l/dv[t] en fonction du temps "t", dans la zone de régime stable de désagglomération (en général, entre 3 et 9 minutes environ). Elle est exprimée en μm'Vmin.
1-2. Caractérisation des compositions de caoutchouc
Les compositions de caoutchouc sont caractérisées, avant et après cuisson, comme indiqué ci- après.
a) essais de traction:
Ces essais permettent de déterminer les contraintes d'élasticité et les propriétés à la rupture. Sauf indication différente, ils sont effectués conformément à la norme française NF T 46-002 de septembre 1988. On mesure en première élongation (i.e., sans cycle d'accommodation - les modules sont alors notés "M") les modules sécants vrais (i.e., calculés en se ramenant à la section réelle de l'éprouvette), exprimés en MPa, à 10% d'allongement (modules notés M10), 100% d'allongement (modules notés Ml 00) et 250% d'allongement (modules notés M250).
On mesure également les contraintes à la rupture (en MPa) et les allongements à la rupture (en %). Toutes ces mesures de traction sont effectuées dans les conditions normales de température (23 ± 2°C) et d'hygrométrie (50 ± 5% d'humidité relative), selon la norme française NF T 40-101 (décembre 1979).
Un traitement des enregistrements de traction permet également de tracer la courbe de module en fonction de l'allongement (voir figure 2 annexée), le module utilisé ici étant le module sécant vrai mesuré en première élongation (module "M").
b) test de "bound rubber":
Le test dit de "bound rubber" permet de déterminer la proportion d'élastomère, dans une composition non vulcanisée, qui est associée à la charge renforçante si intimement que cette proportion d'élastomère est insoluble dans les solvants organiques usuels. La connaissance de cette proportion insoluble de caoutchouc, liée à la charge renforçante au cours du mélangeage, donne une indication quantitative de l'activité renforçante de la charge dans la composition de caoutchouc. Une telle méthode a été décrite par exemple dans la norme française NF T 45-114 (juin 1989) appliquée à la détermination du taux d'élastomère lié au noir de carbone.
Ce test, bien connu de l'homme du métier pour caractériser la qualité de renforcement apportée par la charge renforçante, a par exemple été décrit dans les documents suivants: Plastics, Rubber and Composites Processing and Applications, Vol. 25, No7, p. 327 (1996) ; Rubber Chemistry and Technology, Vol. 69, p. 325 (1996).
Dans le cas présent, on mesure le taux d'élastomère non extractible au toluène, après un gonflement pendant 15 jours d'un échantillon de composition de caoutchouc (typiquement 300-350 mg) dans ce solvant (par exemple dans 80-100 cm3 de toluène), suivi d'une étape de séchage de 24 heures à 100°C, sous vide, avant pesée de l'échantillon de composition de caoutchouc ainsi traité. De préférence, l'étape de gonflement ci-dessus est conduite à la température ambiante (environ 20°C) et à l'abri de la lumière, et le solvant (toluène) est
changé une fois, par exemple après les cinq premiers jours de gonflement. Le taux de "bound rubber" (% en poids) est calculé de manière connue par différence entre le poids initial et le poids final de l'échantillon de composition de caoutchouc, après prise en compte et élimination, dans le calcul, de la fraction des composants insolubles par nature, autres que l'élastomère, présents initialement dans la composition de caoutchouc.
I CONDITIONS DE REALISATION DE L'INVENTION
Les compositions de caoutchouc selon l'invention sont à base des constituants suivants : (i) (au moins) un élastomère diénique, (ii) (au moins) une charge inorganique renforçante et (iii) (au moins) un agent de couplage assurant la liaison entre cette charge et cet élastomère diénique, ladite charge inorganique comprenant un nitrure de silicium renforçant tel que décrit en détail ci-après.
Bien entendu, par l'expression "composition à base de", il faut entendre une composition comportant le mélange et/ou le produit de réaction in situ des différents constituants de base utilisés, certains de ces constituants pouvant réagir et/ou étant destinés à réagir entre eux, au moins partiellement, lors des différentes phases de fabrication de la composition, ou lors de sa cuisson ultérieure.
II- 1. Elastomère diénique
Par élastomère ou caoutchouc "diénique", on entend de manière connue un élastomère issu au moins en partie (i.e. un homopolymère ou un copolymère) de monomères diènes (monomères porteurs de deux doubles liaisons carbone-carbone, conjuguées ou non).
De manière générale, on entend ici par élastomère diénique "essentiellement insaturé" un élastomère diénique issu au moins en partie de monomères diènes conjugués, ayant un taux de motifs ou unités d'origine diénique (diènes conjugués) qui est supérieur à 15% (% en moles).
C'est ainsi, par exemple, que des élastomères diéniques tels que les caoutchoucs butyle ou les copolymères de diènes et d'alpha-oléfines type EPDM n'entrent pas dans la définition précédente et peuvent être notamment qualifiés d'élastomères diéniques "essentiellement saturés" (taux de motifs d'origine diénique faible ou très faible, toujours inférieur à 15%).
Dans la catégorie des élastomères diéniques "essentiellement insaturés", on entend en particulier par élastomère diénique "fortement insaturé" un élastomère diénique ayant un taux de motifs d'origine diénique (diènes conjugués) qui est supérieur à 50%.
Ces définitions étant données, on entend en particulier par élastomère diénique susceptible d'être utilisé dans les compositions conformes à l'invention:
(a) - tout homopolymère obtenu par polymérisation d'un monomère diène conjugué ayant de 4 à 12 atomes de carbone;
(b) - tout copolymère obtenu par copolymérisation d'un ou plusieurs diènes conjugués entre eux ou avec un ou plusieurs composés vinyle aromatique ayant de 8 à 20 atomes de carbone;
(c) - tout copolymère ternaire obtenu par copolymérisation d'éthylène, d'une -oléfine ayant 3 à 6 atomes de carbone avec un monomère diène non conjugué ayant de 6 à 12 atomes de carbone, comme par exemple les élastomères obtenus à partir d'éthylène, de propylène avec un monomère diène non conjugué du type précité tel que notamment l'hexadiène-1,4, l'éthylidène norbornène, le dicyclopentadiène;
(d) - tout copolymère d'isobutène et d'isoprène (caoutchouc butyle), ainsi que les versions halogénées, en particulier chlorées ou bromées, de ce type de copolymère.
Bien qu'elle s'applique à tout type d'élastomère diénique, l'homme du métier du pneumatique comprendra que la présente invention, en particulier lorsque la composition de caoutchouc est destinée à une bande de roulement de pneumatique, est en premier lieu mise en œuvre avec des élastomères diéniques essentiellement insaturés, en particulier du type (a) ou (b) ci-dessus.
A titre de diènes conjugués conviennent notamment le butadiène-1,3, le 2-méthyl-l,3- butadiène, les 2,3-di(alkyle en C1-C )-l,3-butadiènes tels que par exemple le 2,3-diméthyl- 1,3-butadiène, le 2,3-diéthyl-l,3-butadiène, le 2-méthyl-3-éthyl-l,3-butadiène, le 2-méthyl-3- isopropyl-l,3-butadiène, un aryl-l,3-butadiène, le 1,3-pentadiène, le 2,4-hexadiène.
A titre de composés vinyle-aromatiques conviennent par exemple le styrène, l'ortho-, meta-, para-méthylstyrène, le mélange commercial "vinyle-toluène", le para-tertiobutylstyrène, les méthoxystyrènes, les chlorostyrènes, le vinylmésitylène, le divinylbenzène, le vinylnaphtalène.
Les copolymères peuvent contenir entre 99% et 20% en poids d'unités diéniques et de 1% à 80%) en poids d'unités vinylaromatiques. Les élastomères peuvent avoir toute microstructure qui est fonction des conditions de polymérisation utilisées, notamment de la présence ou non d'un agent modifiant et/ou randomisant et des quantités d'agent modifiant et/ou randomisant employées. Les élastomères peuvent être par exemple à blocs, statistiques, séquences, microséquencés et être préparés en dispersion ou en solution ; ils peuvent être couplés et/ou étoiles ou encore fonctionnalisés avec un agent de couplage et/ou d'étoilage ou de fonctionnalisation.
A titre préférentiel conviennent les polybutadiènes et en particulier ceux ayant une teneur en unités -1,2 comprise entre 4% et 80% ou ceux ayant une teneur en cis-1,4 supérieure à 80%, les polyisoprènes, les copolymères de butadiène-styrène et en particulier ceux ayant une teneur en styrène comprise entre 5%> et 50% en poids et plus particulièrement entre 20% et 40%, une teneur en liaisons -1,2 de la partie butadiénique comprise entre 4% et 65% , une teneur en liaisons trans-1,4 comprise entre 20%o et 80%, les copolymères de butadiène-isoprène et notamment ceux ayant une teneur en isoprène comprise entre 5%o et 90% en poids et une température de transition vitreuse ("Tg" - mesurée selon norme ASTM D3418-82) entre -40°C et -80°C, les copolymères isoprène-styrène et notamment ceux ayant une teneur en styrène comprise entre 5% et 50%) en poids et une Tg comprise entre -25°C et -50°C.
Dans le cas des copolymères de butadiène-styrène-isoprène conviennent notamment ceux ayant une teneur en styrène comprise entre 5% et 50% en poids et plus particulièrement comprise entre 10%» et 40%, une teneur en isoprène comprise entre 15%) et 60% en poids et plus particulièrement entre 20% et 50%», une teneur en butadiène comprise entre 5% et 50% en poids et plus particulièrement comprise entre 20% et 40%, une teneur en unités -1,2 de la partie butadiénique comprise entre 4% et 85%, une teneur en unités traris -1,4 de la partie butadiénique comprise entre 6% et 80%, une teneur en unités -1,2 plus -3,4 de la partie isoprénique comprise entre 5% et 70% et une teneur en unités trans -1,4 de la partie isoprénique comprise entre 10%) et 50%, et plus généralement tout copolymère butadiène- styrène-isoprène ayant une Tg comprise entre -20°C et -70°C.
Selon un mode préférentiel de réalisation de l'invention, l'élastomère diénique de la composition conforme à l'invention est choisi dans le groupe des élastomères diéniques fortement insaturés constitué par les polybutadiènes (BR), les polyisoprènes de synthèse (IR), le caoutchouc naturel (NR), les copolymères de butadiène-styrène (SBR), les copolymères de butadiène-isoprène (BIR), les copolymères de butadiène-acrylonitrile (NBR), les copolymères d'isoprène-styrène (SIR), les copolymères de butadiène-styrène-isoprène (SBIR), et les mélanges de ces élastomères.
La composition conforme à l'invention est notamment destinée à une bande de roulement pour pneumatique, qu'il s'agisse d'un pneumatique neuf ou usagé (cas d'un rechapage).
Lorsqu'une telle bande de roulement est destinée par exemple à un pneumatique tourisme, l'élastomère diénique est de préférence un SBR ou un coupage (mélange) SBR/BR, SBR/NR (ou SBR/IR), ou encore BR/NR (ou BR/IR). Dans le cas d'un élastomère SBR, on utilise notamment un SBR ayant une teneur en styrène comprise entre 20%) et 30% en poids, une teneur en liaisons vinyliques de la partie butadiénique comprise entre 15% et 65%, une teneur en liaisons trans-1,4 comprise entre 15% et 75% et une Tg comprise entre -20°C et -55°C, ce copolymère SBR, de préférence préparé en solution (SSBR), étant éventuellement utilisé en mélange avec un polybutadiène (BR) possédant de préférence plus de 90%> de liaisons cis-1,4.
Lorsque la bande de roulement est destinée à un pneumatique utilitaire tel que Poids-lourd, l'élastomère diénique est de préférence un élastomère isoprénique. On entend par "élastomère isoprénique", de manière connue, un homopolymère ou un copolymère d'isoprène, en d'autres termes un élastomère diénique choisi dans le groupe constitué par le caoutchouc naturel (NR), les polyisoprènes de synthèse (IR), les différents copolymères d'isoprène et les mélanges de ces élastomères. Parmi les copolymères d'isoprène, on citera en particulier les copolymères d'isobutène-isoprène (caoutchouc butyle - IIR), d'isoprène-styrène (SIR), d'isoprène-butadiène (BIR) ou d'isoprène-butadiène-styrène (SBIR). L'élastomère isoprénique est de préférence du caoutchouc naturel ou un polyisoprène de synthèse du type cis-1,4. Parmi ces polyisoprènes de synthèse, sont utilisés de préférence des polyisoprènes ayant un taux (%> molaire) de liaisons cis-1,4 supérieur à 90%), plus préférentiellement encore supérieur à 98%. Bien entendu, l'élastomère diénique peut être aussi constitué, en partie, d'un autre élastomère fortement insaturé tel que, par exemple, un élastomère SBR.
Selon un autre mode de réalisation avantageux de l'invention, notamment lorsqu'elle est destinée à un flanc de pneumatique, la composition conforme à l'invention peut contenir au moins un élastomère diénique essentiellement saturé, en particulier au moins un copolymère EPDM, que ce copolymère soit par exemple utilisé ou non en mélange avec un ou plusieurs des élastomères diéniques fortement insaturés cités précédemment.
Les compositions de l'invention peuvent contenir un seul élastomère diénique ou un mélange de plusieurs élastomères diéniques, le ou les élastomères diéniques pouvant être utilisés en association avec tout type d'élastomère synthétique autre que diénique, voire avec des polymères autres que des élastomères, par exemple des polymères thermoplastiques.
II-2. Charge renforçante
Le nitrure de silicium utilisé à titre de charge inorganique renforçante peut constituer la totalité ou une partie seulement de la charge renforçante totale, dans ce dernier cas associé par exemple à une autre charge inorganique renforçante telle que de la silice, ou à du noir de carbone conventionnel.
De préférence, il constitue la majorité, c'est-à-dire plus de 50% de la charge renforçante totale, ce pourcentage étant exprimé ici en volume et non pas en poids, pour tenir compte de la différence importante de densité entre un nitrure de silicium et une charge usuelle du type noir de carbone ou silice. Avantageusement, le nitrure de silicium renforçant peut constituer la totalité de la charge (inorganique) renforçante.
Dans la présente demande, on entend de manière générale par charge "renforçante" une charge capable de renforcer à elle seule, sans autre moyen qu'un agent de couplage intermédiaire, une composition de caoutchouc destinée à la fabrication de pneumatiques ; en d'autres termes, une charge inorganique qualifiée de renforçante est capable de remplacer, dans sa fonction de renforcement, une charge conventionnelle de noir de carbone de grade pneumatique.
La composition conforme à l'invention utilise donc, à titre de charge renforçante, un nitrure de silicium ayant les caractéristiques suivantes :
(a) une surface spécifique BET qui est comprise entre 20 et 200 m2/g ;
(b) une taille moyenne (en masse) de particules, notée dw, qui est comprise entre 10 et 350 nm.
Par nitrure de silicium, on entend tout composé répondant, aux impuretés près, à la formule connue Si3N , quelle que soit sa forme, cristalline ou amorphe.
Pour une surface BET inférieure à 20 m2/g, les compositions présentent certes une mise en œuvre facilitée et une hystérèse réduite, mais on observe une déchéance des propriétés à la rupture et une résistance à l'usure, en pneumatique, qui diminue ; pour des surfaces BET supérieures à 200 m2/g, la mise en œuvre à l'état cru devient plus difficile (plasticité Mooney plus élevée) et la dispersion de la charge s'en trouve dégradée. Pour des tailles dw trop élevées, supérieures à 350 nm, les particules se comportent comme des défauts qui localisent les contraintes et sont préjudiciables à l'usure ; des tailles dw trop petites, inférieures à 10 nm,
vont par contre pénaliser la mise en œuvre à l'état cru et la dispersion de la charge au cours de cette mise en œuvre.
Pour toutes les raisons exposées ci-avant, la surface BET est de préférence comprise entre 40 et 180 m2/g et la taille de particules dw est de préférence comprise dans un domaine allant de 20 à 300 nm et plus particulièrement de 20 à 250 nm.
La dispersibilité intrinsèque d'une charge peut être évaluée à l'aide du test de désagglomération aux ultrasons connu décrit au chapitre I précédent, par mesure de la vitesse de désagglomération α de cette charge. Préférentiellement, le nitrure de silicium renforçant précédemment décrit présente une vitesse α qui est supérieure à 1.10"3 μnrVmin mesurée au test de désagglomération à 15%) de puissance d'une sonde ultrasons de 600 W fonctionnant en mode puisé (1 seconde « ON » / 3 secondes « OFF »). Une telle caractéristique préférentielle garantit pour ce type de produit une très bonne aptitude, d'une part à s'incorporer dans la matrice lors du mélangeage avec l'élastomère, d'autre part à se désagglomérer afin de se disperser, sous une forme finement divisée, de façon homogène dans la matrice caoutchouteuse. Pour une telle vitesse α supérieure à 1.10"3 μm'Vmin, on a constaté que peu d'agglomérats microniques sont observés par réflexion en microscopie optique sur une coupe de composition caoutchouteuse préparée selon les règles de l'art.
De manière plus préférentielle, notamment lorsque les compositions de l'invention sont destinées à des bandes de roulement de pneumatiques présentant une faible résistance au roulement et une résistance élevée à l'usure, les nitrures de silicium renforçants utilisés vérifient au moins l'une des caractéristiques suivantes, de préférence les deux :
une surface BET comprise dans un domaine de 50 à 170 m2/g ; une taille de particules dw comprise dans un domaine de 20 à 250 nm.
Par ailleurs, pour une dispersibilité encore meilleure du nitrure de silicium renforçant dans la matrice de caoutchouc diénique, et donc pour un renforcement optimal, on préfère que sa vitesse de désagglomération α soit supérieure à 4.10"3 μm'Vmin.
Les particules de nitrure de silicium renforçant présentent en outre une bonne réactivité de surface, c'est-à-dire un taux élevé de fonctions hydroxyle de surface (-OH) réactives vis-à-vis de l'agent de couplage, ce qui est particulièrement favorable à la fonction de renforcement remplie par la charge, et donc aux propriétés mécaniques des compositions de caoutchouc de l'invention.
L'état physique sous lequel peut se présenter le nitrure de silicium renforçant est indifférent, que ce soit sous forme de poudre, de microperles, de granulés, de pellets, de billes ou toute autre forme densifiée, à la condition bien évidemment que le mode de densification n'altère pas les caractéristiques essentielles ou préférentielles préconisées pour cette charge.
Le nitrure de silicium renforçant décrit ci-dessus peut être utilisé seul ou associé à une autre charge inorganique renforçante, voire plusieurs, par exemple à une silice ou une alumine. On rappelle ici que, par opposition au noir de carbone conventionnel, doit être entendu par charge
"blanche" (parfois appelée aussi charge "claire") toute charge inorganique ou minérale, quelles que soient sa couleur et son origine (naturelle ou de synthèse).
Dans le cas d'une silice, on utilise de préférence une silice précipitée hautement dispersible, en particulier lorsque l'invention est mise en œuvre pour la fabrication de pneumatiques présentant une faible résistance au roulement ; comme exemples non limitatifs de telles silices hautement dispersibles préférentielles, on peut citer les silices Ultrasil 7000 et Ultrasil 7005 de la société Degussa, les silices Zeosil 1165MP, 1135MP et 1115MP de la société Rhodia, la silice Hi-Sil EZ150G de la société PPG, les silices Zeopol 8715, 8745 et 8755 de la Société Huber, des silices précipitées traitées telles que par exemple les silices "dopées" à l'aluminium décrites dans la demande EP-A-0735088 précitée. Si une alumine renforçante est utilisée, il s'agit préférentiellement d'une alumine hautement dispersible telle que décrite dans la demande EP-A-0810258 précitée, par exemple des alumines "Baikalox" "A125" ou "CR125" (société Baïkowski), "APA-100RDX" (société Condea), "Aluminoxid C" (société Degussa) ou "AKP-G015" (Sumitomo Chemicals).
Le nitrure de silicium renforçant, seul ou éventuellement associé à une autre charge inorganique renforçante, peut également être utilisé en coupage, i.e., en mélange, avec un ou plusieurs noirs de carbone conventionnels de grade pneumatique. Comme noirs de carbone conviennent tous les noirs de carbone, notamment les noirs du type HAF, ISAF, SAF, conventionnellement utilisés dans les pneumatiques et particulièrement dans les bandes de roulement des pneumatiques. A titre d'exemples non limitatifs de tels noirs, on peut citer les noirs NI 15, N134, N234, N330, N339, N347, N375.
La quantité de noir de carbone présente dans la charge renforçante totale peut varier dans de larges limites, cette quantité étant toutefois préférentiellement inférieure à la quantité de nitrure de silicium présente dans la composition de caoutchouc.
Dans les compositions conformes à l'invention, on utilise avantageusement, en association avec le nitrure de silicium renforçant, un noir de carbone en faible proportion, à un taux préférentiel compris entre 2 et 20 pce, plus préférentiellement compris dans un domaine de 5 à 15 pce (parties en poids pour cent parties d'élastomère). Dans les intervalles indiqués, on bénéficie des propriétés colorantes (agent de pigmentation noire) et anti-UV des noirs de carbone, sans pénaliser par ailleurs les performances typiques apportées par le nitrure de silicium renforçant.
De manière préférentielle, le taux de charge renforçante totale dans les compositions de l'invention est compris dans un domaine allant de 20 à 400 pce, plus préférentiellement de 30 à 200 pce en ce qui concerne aussi le taux de charge inorganique. L'optimum est en effet différent selon les applications visées: de manière connue, le niveau de renforcement attendu sur un pneumatique vélo, par exemple, est nettement inférieur à celui exigé sur un pneumatique pour véhicule de tourisme ou pour véhicule utilitaire tel que Poids-lourd. Lorsque les compositions de l'invention sont destinées à des bandes de roulement de pneumatiques, le taux de charge inorganique renforçante, donc de nitrure de silicium renforçant lorsque ce dernier constitue la totalité de cette charge inorganique renforçante, est
choisi de préférence supérieur à 50 pce, par exemple compris entre 50 et 150 pce, plus préférentiellement encore supérieur à 60 pce.
A titre d'exemples de nitrures de silicium renforçants susceptibles de convenir aux compositions de caoutchouc de l'invention, on citera notamment des nitrures de silicium obtenus de manière connue par une technique de CO2 laser CVD (Chemical Vapor Déposition) (voir par exemple FR-A-2677558) ; leur synthèse a été décrite en détail, notamment dans la publication suivante: "Synthèse de poudres ultrafines par laser", M. Cauchetier, Le Vide, N°243, Août-Septembre-Octobre (1988).
Un autre exemple de nitrure de silicium renforçant utilisable dans les compositions conformes à l'invention est le nitrure de silicium commercialisé par la société MarkeTech International Inc. (USA, Port Townsend - WA) sous la référence "NP-S1050".
II-3. Agent de couplage
Il est bien connu de l'homme du métier qu'il est nécessaire d'utiliser, pour une charge inorganique renforçante telle que par exemple une silice ou une alumine renforçante, un agent de couplage (charge blanche/élastomère), encore appelé agent de liaison, qui a pour fonction d'assurer la liaison ou "couplage" entre la charge blanche et l'élastomère, tout en facilitant la dispersion de cette charge inorganique au sein de la matrice élastomérique.
Le nitrure de silicium renforçant décrit précédemment nécessite, lui aussi, de l'emploi d'un tel agent de couplage pour assurer sa fonction de charge renforçante dans les compositions de caoutchouc conformes à l'invention.
Par agent de couplage, on entend plus précisément un agent apte à établir une connexion suffisante, de nature chimique et/ou physique, entre la charge considérée et l'élastomère ; un tel agent de couplage, au moins bifonctionnel, a par exemple comme formule générale simplifiée " Y-T-X ", dans laquelle:
Y représente un groupe fonctionnel (fonction "Y") qui est capable de se lier physiquement et/ou chimiquement à la charge inorganique, une telle liaison pouvant être établie, par exemple, entre un atome de silicium de l'agent de couplage et les groupes hydroxyle (OH) de surface de la charge inorganique (par exemple les silanols de surface lorsqu'il s'agit de silice);
X représente un groupe fonctionnel (fonction "X") capable de se lier physiquement et/ou chimiquement à l'élastomère, par exemple par l'intermédiaire d'un atome de soufre; - T représente un groupe permettant de relier Y et X.
Les agents de couplage ne doivent en particulier pas être confondus avec de simples agents de recouvrement de la charge considérée qui, de manière connue, peuvent comporter la fonction Y active vis-à-vis de la charge mais sont dépourvus de la fonction X active vis-à-vis de l'élastomère.
De tels agents de couplage, d'efficacité variable, ont été décrits dans un très grand nombre de documents et sont bien connus de l'homme du métier. On peut utiliser en fait tout agent de couplage connu pour, ou susceptible d'assurer efficacement, dans les compositions de caoutchouc diénique utilisables pour la fabrication de pneumatiques, la liaison ou couplage 5 entre une charge blanche renforçante telle que de la silice et un élastomère diénique, comme par exemple des organosilanes, notamment des alkoxysilanes polysulfurés ou des mercaptosilanes, ou encore des polyorganosiloxanes porteurs des fonctions X et Y précitées.
Des agents de couplage silice/élastomère, notamment, ont été décrits dans un grand nombre de lfr documents, les plus connus étant des alkoxysilanes bifonctionnels tels que des alkoxysilanes polysulfurés.
On utilise en particulier des alkoxysilanes polysulfurés, dits "symétriques" ou "asymétriques" selon leur structure particulière, tels que décrits par exemple dans les brevets US-A-3 842
15 111, US-A-3 873 489, US-A-3 978 103, US-A-3 997 581, US-A-4 002 594, US-A-4 072 701, US-A-4 129 585, ou dans les brevets plus récents US-A-5 580 919, US-A-5 583 245, US-A-5 650 457, US-A-5 663 358, US-A-5 663 395, US-A-5 663 396, US-A-5 674 932, US-A-5 675 014, US-A-5 684 171, US-A-5 684 172, US-A-5 696 197, US-A-5 708 053, US-A-5 892 085, EP-A-1 043 357 qui énoncent en détail de tels composés connus. 0
Conviennent en particulier pour la mise en œuvre de l'invention, sans que la définition ci- après soit limitative, des alkoxysilanes polysulfurés symétriques répondant à la formule générale (I) suivante:
5 (I) Z - A - Sn - A - Z , dans laquelle:
- n est un entier de 2 à 8 (de préférence de 2 à 5);
- A est un radical hydrocarboné divalent (de préférence des groupements alkylène en Cj- Ci8 ou des groupements arylène en C6-Cι , plus particulièrement des alkylènes en - 0 Cio, notamment en - en particulier le propylène);
- Z répond à l'une des formules ci-après:
R1 R1 R2
— Si— R1 ; — Si— R2 ; — Si— R2 ,
R2 R2 R2
5 dans lesquelles:
- les radicaux R1, substitués ou non substitués, identiques ou différents entre eux, représentent un groupe alkyle en -C^, cycloalkyle en C5-C18 ou aryle en C6-C18 (de préférence des groupes alkyle en Cι-C6, cyclohexyle ou phényle, notamment des 0 groupes alkyle en - , plus particulièrement le méthyle et/ou l'éthyle).
- les radicaux R2, substitués ou non substitués, identiques ou différents entre eux, représentent un groupe alkoxyle en Cι-C18 ou cycloalkoxyle en C5-C18 (de préférence
des groupes alkoxyle en Cι-C8 ou cycloalkoxyle en C5-C8, plus préférentiellement des groupes alkoxyle en Cj.-C , en particulier le méthoxyle et/ou l'éthoxyle).
Dans le cas d'un mélange d'alkoxysilanes polysulfurés répondant à la formule (I) ci-dessus, notamment des mélanges usuels disponibles commercialement, la valeur moyenne des "n" est un nombre fractionnaire de préférence compris entre 2 et 5, plus préférentiellement proche de 4. Mais l'invention peut être aussi avantageusement mise en œuvre par exemple avec des alkoxysilanes disulfurés (n = 2).
Comme alkoxysilanes polysulfurés, on citera plus particulièrement les polysulfurés (notamment les disulfurés, trisulfures ou tétrasulfures) de bis-(alkoxyl(d-C4)-alkyl(Cι- C4)silylalkyl(C!-C )), comme par exemple les polysulfurés de bis(3-triméthoxysilylpropyl) ou de bis(3-triéthoxysilylpropyl). Parmi ces composés, on utilise notamment le tétrasulfure de bis(3-triéthoxysilylpropyl), en abrégé TESPT, de formule [(C H5O)3Si(CH2)3S2]2 ou le disulfure de bis(triéthoxysilylpropyle), en abrégé TESPD, de formule [(C2H5O)3Si(CH2)3S] . Le TESPD est commercialisé par exemple par la société Degussa sous les dénominations Si266 ou Si75 (dans le second cas, sous forme d'un mélange de disulfure (à 75% en poids) et de polysulfurés), ou encore par la société Witco sous la dénomination Silquest Al 589. Le TESPT est commercialisé par exemple par la société Degussa sous la dénomination Si69 (ou X50S lorsqu'il est supporté à 50% en poids sur du noir de carbone), ou encore par la société Osi Specialties sous la dénomination Silquest A1289 (dans les deux cas, mélange commercial de polysulfurés avec une valeur moyenne pour n qui est proche de 4).
A titre d'exemples d'agents de couplage autres que les alkoxysilanes polysulfurés précités, on citera notamment des polyorganosiloxanes bifonctionnels tels que décrits par exemple dans la demande WO99/02602 précitée.
L'homme du métier saura ajuster la teneur en agent de couplage dans les compositions de l'invention, en fonction de l'application visée, de la nature de l'élastomère utilisé et de la quantité de nitrure de silicium renforçant, complété le cas échéant de toute autre charge inorganique employée à titre de charge renforçante complémentaire.
De manière à tenir compte des différences de surface spécifique et de densité des nitrures de silicium (et, le cas échéant, d'éventuelles autres charges inorganiques renforçantes associées) susceptibles d'être utilisés, ainsi que des masses molaires des agents de couplage, il est préférable de déterminer le taux optimal d'agent de couplage en moles par mètre carré de charge inorganique renforçante, pour chaque charge inorganique renforçante (nitrure de silicium plus, le cas échéant, charge inorganique complémentaire associée) utilisée ; ce taux optimal est calculé à partir du rapport pondéral [agent de couplage/charge inorganique renforçante], de la surface BET de la charge et de la masse molaire de l'agent de couplage (notée M ci-après), selon la relation connue suivante:
(moles/m2 charge inorganique) = [agent de couplage/charge inorganique] (1/BET) (1IM)
Préférentiellement, la quantité d'agent de couplage utilisée dans les compositions conformes à l'invention est comprise entre 10"7 et 10"5 moles par m2 de charge inorganique renforçante,
soit par m2 de nitrure de silicium renforçant lorsque ce dernier est utilisé sans charge inorganique renforçante associée. Plus préférentiellement encore, la quantité d'agent de couplage est comprise entre 5.10-7 et 5.10"6 moles par mètre carré de charge inorganique totale (nitrure de silicium plus, le cas échéant, charge inorganique complémentaire associée).
Compte tenu des quantités exprimées ci-dessus, de manière générale, le taux d'agent de couplage, ramené au poids d'élastomère diénique, sera de préférence compris entre 0,1 et 25 pce, plus préférentiellement compris entre 0,5 et 20 pce.
L'agent de couplage utilisé pourrait être préalablement greffé (via la fonction "X") sur l'élastomère diénique de la composition de l'invention, l'élastomère ainsi fonctionnalisé ou "précouplé" comportant alors la fonction "Y" libre pour le nitrure de silicium renforçant. L'agent de couplage pourrait également être préalablement greffé (via la fonction "Y") sur le nitrure de silicium renforçant, la charge ainsi "précouplée" pouvant ensuite être liée à l'élastomère diénique par l'intermédiaire des fonctions libres "X". On préfère toutefois utiliser l'agent de couplage à l'état libre (i.e., non greffé) ou greffé sur le nitrure de silicium renforçant, notamment pour des raisons de meilleure mise en œuvre des compositions à l'état cru.
Enfin, à l'agent de couplage peut être éventuellement associé un "activateur de couplage" approprié, soit un corps (i.e., un composé unique ou une association de composés) qui, mélangé avec cet agent de couplage, augmente l'efficacité de ce dernier. Des activateurs de couplage d'alkoxysilanes polysulfurés ont par exemple été décrits dans les demandes WO00/5300 et WO00/5301, consistant en l'association d'une guanidine substituée, en particulier la N,N'-diphénylguanidine (en abrégé "DPG"), avec une énamine ou un dithiophospate de zinc. Grâce au couplage amélioré avec l'élastomère, la présence de ces activateurs de couplage permettra par exemple de réduire le taux de charge inorganique renforçante.
II-4. Additifs divers
Bien entendu, les compositions conformes à l'invention contiennent, outre les composés déjà décrits, tout ou partie des constituants habituellement utilisés dans les compositions de caoutchouc diénique destinées à la fabrication de pneumatiques, comme par exemple des plastifiants, des pigments, des agents de protection du type antioxydants, antiozonants, un système de réticulation à base soit de soufre, soit de donneurs de soufre et/ou de peroxyde et/ou de bismaléimides, des accélérateurs de vulcanisation, des activateurs de vulcanisation, des huiles d'extension, etc.. A la charge blanche renforçante de l'invention peut être également associée, si besoin est, une charge blanche conventionnelle non renforçante, comme par exemple des argiles, la bentonite, le talc, la craie, le kaolin.
Les compositions de caoutchouc conformes à l'invention peuvent également contenir, en complément des agents de couplage précités, des agents de recouvrement (comportant par exemple la seule fonction Y) de la charge inorganique renforçante ou plus généralement des agents d'aide à la mise en œuvre susceptibles de manière connue, grâce à une amélioration de la dispersion de la charge inorganique renforçante dans la matrice de caoutchouc et à un abaissement de la viscosité des compositions, d'améliorer leur faculté de mise en œuvre à l'état
cru, ces agents, utilisés par exemple à un taux préférentiel compris entre 0,5 et 3 pce, étant par exemple des alkylalkoxysilanes (notamment des alkyltriéthoxysilanes comme par exemple le 1-octyl-triéthoxysilane commercialisé par la société Degussa-Huls sous la dénomination Dynasylan Octeo ou le 1-hexa-décyl-triéthoxysilane commercialisé par la société Degussa- Hϋls sous la dénomination Si216), des polyols, des polyéthers (par exemple des polyéthylèneglycols), des aminés primaires, secondaires ou tertiaires (par exemple des trialcanol-amines), des polyorganosiloxanes hydroxylés ou hydrolysables, par exemple des α,ω-dihydroxy-polyorganosiloxanes (notamment des α,ω-dihydroxy-polydiméthylsiloxanes).
II-5. Préparation des compositions de caoutchouc
Les compositions sont fabriquées dans des mélangeurs appropriés, en utilisant deux phases de préparation successives bien connues de l'homme du métier : une première phase de travail ou malaxage thermo-mécanique (parfois qualifiée de phase "non-productive") à haute température, jusqu'à une température maximale (notée Tmax) comprise entre 110°C et 190°C, de préférence entre 130°C et 180°C, suivie d'une seconde phase de travail mécanique (parfois qualifiée de phase "productive") à plus basse température, typiquement inférieure à 110°C, par exemple entre 60°C et 100°C, phase de finition au cours de laquelle est incorporé le système de réticulation ou vulcanisation ; de telles phases ont été décrites par exemple dans les demandes EP-A-0501227, EP-A-0735088, EP-A-0810258, WO00/05300 ou WO00/05301 précitées.
Le procédé de fabrication selon l'invention est caractérisé en ce qu'au moins la charge renforçante et l'agent de couplage sont incorporés par malaxage à l'élastomère diénique au cours de la première phase dite non-productive, c'est-à-dire que l'on introduit dans le mélangeur et que l'on malaxe thermomécaniquement, en une ou plusieurs étapes, au moins ces différents constituants de base jusqu'à atteindre une température maximale comprise entre 110°C et 190°C, de préférence comprise entre 130°C et 180°C.
A titre d'exemple, la première phase (non-productive) est conduite en une seule étape thermomécanique au cours de laquelle on introduit, dans un mélangeur approprié tel qu'un mélangeur interne usuel, tous les constituants de base nécessaires, les éventuels agents de recouvrement ou de mise en œuvre complémentaires et autres additifs divers, à l'exception du système de vulcanisation. Une seconde étape de travail thermomécanique peut être ajoutée dans ce mélangeur interne, après tombée du mélange et refroidissement intermédiaire (température de refroidissement de préférence inférieure à 100°C), dans le but de faire subir aux compositions un traitement thermique complémentaire, notamment pour améliorer encore la dispersion, dans la matrice élastomérique, de la charge renforçante et de son agent de couplage. La durée totale du malaxage, dans cette phase non-productive, est de préférence comprise entre 2 et 20 minutes.
Après refroidissement du mélange ainsi obtenu, on incorpore alors le système de vulcanisation à basse température, généralement dans un mélangeur externe tel qu'un mélangeur à cylindres ; le tout est alors mélangé (phase productive) pendant quelques minutes, par exemple entre 5 et 15 min.
La composition finale ainsi obtenue est ensuite calandrée, par exemple sous la forme d'une feuille ou d'une plaque, notamment pour une caractérisation au laboratoire, ou encore extradée, pour former par exemple un profilé de caoutchouc utilisé pour la fabrication de semi-finis tels que des bandes de roulement, des nappes sommet, des flancs, des nappes carcasse, des talons, des protecteurs, des chambres à air ou des gommes intérieures étanches pour pneu sans chambre.
La vulcanisation (ou cuisson) est conduite de manière connue à une température généralement comprise entre 130°C et 200°C, sous pression, pendant un temps suffisant qui peut varier par exemple entre 5 et 90 min en fonction notamment de la température de cuisson, du système de vulcanisation adopté, de la cinétique de vulcanisation de la composition considérée ou encore de la taille du pneumatique.
Le système de vulcanisation proprement dit est préférentiellement à base de soufre et d'un accélérateur primaire de vulcanisation, en particulier d'un accélérateur du type sulfénamide. A ce système de vulcanisation de base viennent s'ajouter, incorporés au cours de la première phase non-productive et/ou au cours de la phase productive, divers accélérateurs secondaires ou activateurs de vulcanisation connus tels que oxyde de zinc, acide stéarique, dérivés guanidiques (en particulier diphénylguanidine), etc. Le soufre est utilisé à un taux préférentiel compris entre 0,5 et 10 pce, plus préférentiellement compris entre 0,5 et 5,0 pce, par exemple entre 0,5 et 3,0 pce lorsque l'invention est appliquée à une bande de roulement de pneumatique. L'accélérateur primaire de vulcanisation est utilisé à un taux préférentiel compris entre 0,5 et 10 pce, plus préférentiellement compris entre 0,5 et 5,0 pce en particulier lorsque l'invention s'applique à une bande de roulement de pneumatique.
Il va de soi que l'invention concerne les compositions de caoutchouc précédemment décrites tant à l'état dit "cru" (i.e., avant cuisson) qu'à l'état dit "cuit" ou vulcanisé (i.e., après réticulation ou vulcanisation).
Bien entendu, les compositions conformes à l'invention peuvent être utilisées seules ou en coupage (i.e., en mélange) avec toute autre composition de caoutchouc utilisable pour la fabrication de pneumatiques.
III. EXEMPLES DE REALISATION DE L'INVENTION
III- 1. Charges utilisées
Les caractéristiques des charges utilisées dans l'exemple qui suit sont résumées dans le tableau 1.
La charge A est un noir de carbone de grade pneumatique (N234), utilisé conventionnellement dans les bandes de roulement de pneumatiques. La charge B est un noir de carbone plus grossier (N550) utilisé conventionnellement en carcasse de pneumatique. La charge C est une silice conventionnelle à haute surface spécifique (BET d'environ 160 m2/g), charge inorganique de référence pour le renforcement des bandes de roulement des "Pneus Verts"
(silice "Zeosil 1165MP" de la société Rhodia). Enfin, la charge D est un nitrure de silicium renforçant, c'est-à-dire utilisable dans les compositions conformes à l'invention (caractéristiques a et b vérifiées).
5 La charge D est disponible commercialement (société MarkeTech International Inc. - référence "NP-S 1050").
On note que la charge D présente une taille de particules dw très inférieure à celle de la charge C. La surface BET du nitrure de silicium D est proche de celle de la silice C testée. Sa vitesse 10. de désagglomération α est avantageusement très élevée (supérieure à 4.10" μm" /min). L'aptitude à la désagglomération des noirs de carbone étant de manière connue excellente, très nettement supérieure à celle des autres charges, la mesure de la vitesse α pour les charges A et B n'est pas nécessaire.
15 La charge E est un nitrure de silicium non renforçant conventionnel. Il est disponible commercialement (société INTERCHIM sous la référence 0429429, lot Kl 1 Jl 1)
La figure 1 reproduit la courbe d'évolution [l/dv(t)=f(t)] de la taille des agglomérats, enregistrée au test de désagglomération aux ultrasons, pour la charge D. On voit bien sur cette 0 figure que le premier point enregistré correspond à la mesure du diamètre moyen initial dv(0), suivie (après mise en action de la sonde ultrasons) d'un passage progressif à un régime stable de désagglomération pendant lequel l'inverse de "dv" varie bien de manière sensiblement linéaire avec le temps "t" ; l'enregistrement des données est stoppé ici au bout de 8 à 9 minutes environ. On en déduit par un calcul élémentaire de régression linéaire, pris en charge 5 par le calculateur du granulomètre, la vitesse de désagglomération α dans la zone de régime stable de désagglomération (entre 3-4 min et 8-9 min).
III-2. Préparation des compositions
0 Les compositions testées ci-après sont préparées de manière connue, de la façon suivante : on introduit l'élastomère diénique (ou le mélange d'élastomères diéniques, le cas échéant) dans un mélangeur interne rempli à 80 %, dont la température initiale de cuve est d'environ 90°C; puis, après un temps approprié de malaxage, par exemple de l'ordre de 30 secondes, on ajoute tous les autres ingrédients, y compris la charge et l'agent de couplage associé, à l'exception du 5 système de vulcanisation. On conduit alors un travail thermomécanique d'une durée de 16 minutes environ, avec une vitesse moyenne des palettes de 70 tours/min, jusqu'à obtenir une température de tombée d'environ 140°C.
On récupère le mélange ainsi obtenu, on le refroidit puis on ajoute le système de vulcanisation 0 (soufre et accélérateur primaire type sulfénamide) sur un mélangeur externe (homo-finisseur) à 30°C, en mélangeant le tout (phase productive) pendant un temps approprié, compris entre 5 et 12 min selon les cas.
Les compositions ainsi obtenues sont ensuite calandrées sous la forme de plaques (épaisseur de 2 à 3 mm) de caoutchouc pour la mesure de leurs propriétés mécaniques. La vulcanisation 5 (cuisson) est effectuée à 150°C pendant 40 min, sous pression.
Dans tous les essais qui suivent, le nitrure de silicium renforçant est présent, dans les compositions conformes à l'invention, à un taux préférentiel supérieur à 70 pce; il constitue en outre la totalité ou plus de 90% en poids de la totalité de la charge renforçante, une fraction minoritaire (moins de 10%) de cette dernière pouvant être constituée par du noir de carbone.
III-3. Essai
Le but de cet essai est de démontrer qu'un nitrure de silicium renforçant tel que décrit supra peut au contraire prétendre au qualificatif de charge inorganique renforçante. On compare pour cela quatre compositions de caoutchouc diénique utilisables pour la fabrication de pneumatiques, en particulier de bandes de roulement de pneumatiques tourisme. L'élastomère diénique est un SSBR comportant 27% en masse de styrène, et dont les motifs polybutadiène sont pour 24% des motifs polybutadiène-1,2 et pour 46%> des motifs polybutadiène-1,4 trans. Ces quatre compositions sont identiques aux différences près qui suivent:
composition C-1 (témoin): charge A (noir de carbone, N234); composition C-2 (témoin): charge B (noir de carbone, N550) composition C-3 (témoin): charge C (silice), avec agent de couplage (TESPT) - composition C-4: charge conforme à l'invention (Si3N ), avec agent de couplage (TESPT) composition C-5 (témoin) : charge E, Si3N non conforme à l'invention, avec agent de couplage (TESPT)
Le noir de carbone choisi pour la composition témoin C-1 est un noir de grade pneumatique à très haut pouvoir renforçant, utilisé habituellement pour renforcer des bandes de roulement de pneumatiques tourisme.
Le noir de carbone choisi pour la composition témoin C-2 est un noir de grade pneumatique utilisé habituellement en carcasse de pneumatique. Dans les compositions C-4 et C-5, le nitrure de silicium est utilisé à iso-volume par rapport au noir de carbone (composition C-1). Quant à l'agent de couplage TESPT (Si69), il a été introduit à un taux correspondant à une couverture de surface totale des 71 pce de nitrure de silicium, soit environ 9.27.10"7 mole/m2 de nitrure de silicium pour la composition C-4 et des 80 pce de nitrure de silicium, soit environ 9.27.10"7 mole/m2 de nitrure de silicium pour la composition C-5. Les compositions C-1 et C-2 qui servent ici de références ne nécessitent pas, de manière connue, d'agent de couplage puisqu'elles sont renforcées par du noir de carbone.
Les tableaux 2 et 3 donnent successivement la formulation des différentes compositions (tableau 2 - taux des différents produits exprimés en pce), leurs propriétés avant et après cuisson à 150°C pendant 40 min (tableau 3). La figure 2 reproduit les courbes de module sécant vrai "M" (en MPa) en fonction de l'allongement (en %) ; ces courbes sont notées Cl à C5 et correspondent respectivement aux compositions de caoutchouc C-1 à C-5.
L'étude des différents résultats montre que la composition de l'invention présente après cuisson un niveau de renforcement supérieur à celui des compositions témoin, avec des modules supérieurs, notamment aux fortes déformations (M100 et M250), un rapport
M250/M100 voisin, des mesures sensiblement plus élevées au test de "bound rubber", autant d'indices de renforcement bien connus de l'homme du métier qui sont là pour attester de l'activité renforçante remarquable de la charge D, en présence de l'agent de couplage. La figure 2 annexée confirme bien les observations ci-dessus. Des résultats aussi remarquables que surprenants ne pouvaient être prévus par un homme du métier.
On constate par ailleurs qu'avec un nitrure de silicium conventionnel de taille grossière comme seule charge, charge E, on n'observe aucun effet renforçant : une mesure nulle au test de "bound rubber", un rapport M250/M100 très faible. En outre, la composition C-5 le contenant, présente une contrainte à la rupture très faible, preuve d'une cohésion quasi inexistante dans le mélange élastomérique et donc de l'absence de renforcement.
En conclusion, le nitrure de silicium spécifique de la composition conforme à l'invention confère à cette dernière des propriétés fort intéressantes, en particulier une capacité de renforcement remarquable et donc de résistance à l'usure au moins égale sinon supérieure à celle atteinte avec du noir de carbone ou une silice conventionnelle HDS, jusqu'ici inconnue avec les nitrures de silicium conventionnellement utilisés dans les compositions de caoutchouc pour pneumatiques de l'art antérieur.
La mise en œuvre industrielle et la cinétique de cuisson des compositions de l'invention, comparables de manière inattendue à celles des compositions de caoutchouc conventionnelles font des nitrures de silicium renforçants précédemment décrits une alternative fort avantageuse à l'emploi de charges inorganiques renforçantes telles que des silices HDS.
L'invention trouve ainsi des applications préférentielles dans les compositions de caoutchouc utilisables pour la fabrication de bandes de roulement de pneumatiques présentant à la fois une faible résistance au roulement et une résistance élevée à l'usure, en particulier lorsque ces bandes de roulement sont destinées à des pneumatiques pour véhicules tourisme ou pour véhicules industriels du type Poids-lourd.
Tableau 1
*La mesure n'a pu être prise, le nitrure de silicium de taille grossière sédimente trop vite. **la mesure de la vitesse de désagglomération n'a pas de sens sur une charge si grossière.
Tableau 2
(1) SBR solution avec 24% de motifs polybutadiène 1-2 ; 46% de motifs polybutadiène 1-4, 27% de styrène ; Tg = -48°C ; (Tg déterminée sur l'élastomère sec)
(2) TESPT ("Si69" de la société DEGUSSA-HULS);
(3) N-1,3 diméthylbutyl N-phénylparaphénylènediamine ("Santoflex 6-PPD" de la société Flexsys);
(4) N-cyclohexyl-2-benzothiazylsulfénamide ("Santocure CBS" de la société Flexsys).
Tableau 3