Procédé de fabrication du dichlorodiphényltrichloréthane
La présente invention a pour objet un procédé de fabrication amélioré du dichlorodiphényltrichlor- éthane ( D. D. T. ).
On sait que ce produit résulte de la condensation du monochlorobenzène avec le chloral, en présence d'acide sulfurique concentré suivant la réaction :
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On obtient finalment un mélange d'isomères, dont les principaux sont le dérivé para-para de formule ci-dessus (I) et le dérivé ortho-para
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L'isomère para-para de formule (I) pur fond à 108,5-109 C et représente habituellement 60 à 75, D/o du produit commercial alors que l'isomère orthopara de formule (II) fond à 74-74,5O C et n'en représente que 15 à 22 < '/o. Il en résulte que le produit commercial habituel a un point de solidification pouvant s'échelonner suivant les qualités de 87 à 91o C.
Seul le dérivé para-para a une réelle efficacité insecticide et l'on considère généralement que le point de solidification élevé du D. D. T. peut servir de critère à la fois pour sa pureté et son efficacité.
Un autre avantage de disposer de D. D. T. à point de solidification élevé réside dans sa meilleure broyabilité.
On utilise en effet dans la préparation de nombreuses spécialités insecticides le D^V. T. sous forme de poudre trèis fine. Cette poudre est obtenue par broyage du D. D. T. > > en présence ou non de charges, il est connu qu'un DD. T. > de point de solidification bas a tendance à colmater les broyeurs et à rendre ainsi onéreuse l'opération de conditionnement.
De nombreux travaux ont été entrepris en vue d'obtenir un D. D. T. i, ayant un point de solidifiction aussi élevé que possible. Un certain nombre ont porté sur l'amélioration du D. D. T. D technique obtenu habituellement.
C'est ainsi que l'on a proposé de traiter le produit commercial par l'acide sulfurique concentré, titrant entre 99 et 104,5 ID/o de SOHg, de façon à provoquer la sulfonation de l'isomère ortho qui y est contenu ; on élimine ensuite le dérivé sulfoné par lavage à l'eau.
Une autre technique, la plus courante, consiste à provoquer la recristallisation du D. D. T. z technique dans l'alcool méthylique ou le chlorobenzène par exemple. Il est ainsi possible d'obtenir, d'une part des cristaux enrichis en dérivés para-para, dont le point de solidification se situe entre 96 et 106 C, qui sont réservés à la préparation des insecticides pulvérulents, et d'autre part, après récupération du solvant, un D. D. T. à très bas point de solidification, qui peut néanmoins convenir à la préparation de certaines qualités d'insecticides sous forme liquide.
Cependant ces procédés ne donnent pas entière satisfaction. Ils nécessitent un appareillage et des frais supplémentaires, et n'évitent pas les pertes de matières premières dues à la formation du dérivé ortho.
D'autres travaux ont porté sur l'amélioration du mode de synthèse proprement dit.
Par exemple on a préconisé l'emploi entre-2 et +2", d'un catalyseur à base d'acides aromatiques po lysulfoniques contenant 2 à 4 groupes sulfoniques qui permettrait de limiter la sulfonation du chlorobenzène et par conséquent d'améliorer le rendement mais au prix d'une consommation onéreuse de ce catalyseur particulier.
Un mode de synthèse habituel connu consiste par exemple à ajouter à un mélange de 200 parties d'acide sulfurique à 98-99 /o, 74 parties de chloral, 124 parties ou plus de monochlorobenzène, maintenu à 200 sous agitation et 178 parties d'oléum à 104 oxo de S04H,. La durée totale de la réaction est de l'ordre de 5 h. Mais au bout d'une heure le D. D. T. précipite sous forme de particules d'une grosseur allant de celle d'un grain de riz à celle d'un ceuf, qui finissent par se déposer sur les surfaces de refroidissement, et rendent difficile la conduite de l'opération par la nécessité de nettoyages fréquents.
Une quantité importante de chlorobenzène est également sulfonée selon la réaction secondaire :
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si bien que l'acide résiduaire contient environ 33 9/o d'acide peraçhlorobenzène sulfonique. La récupération finale du D. D. T. nécessite en outre l'élimi- nation préalable d'une certaine quantité de mono chlorobenzène libre n'ayant pas réagi.
Pour éviter la précipitation du D. D. T. on a
proposé d'ajouter en fin de réaction une certaine quantité de monochlorobenzène qui agit comme sol vant. Mais on n'obtient ainsi qu'un produit médiocre fondant à 87-89 C. D'autre part, cette technique nécessite des frais supplémentaires pour la récupé- ration du monochlorobenzène libre.
Dans un autre procédé, utilisant de l'acide sul furique à 95-100 0/o et du monochlorobenzène, ce
, dernier dans la proportion de 5,5 à 6 parties en poids pour une partie de chloral, on opère en continu en fragmentant en phases distinctes la réaction de formation du D. D. T. : dans plusieurs réacteurs en forme, de-U. Le liquide circule dans l'appareil transportant avec lui les cristaux de DD. T. > > en suspension.
Mais le I). D. T. m ainsi obtenu reste de qualité médiocre et ce procédé est difficilement exploitable industriellement, car les appareils sont en quelques heures complètement bouchés.
Les procédés connus pour améliorer les conditions de synthèse du D. D. T en présence d'acide sulfurique entraînent donc une consommation supplé- mentaire de monochlorobenzène (ou parfois d'autres solvants) et conduisent cependant à un D. D. T. de qualité médiocre. Dans l'état actuel de la technique une amélioration réelle n'est obtenue qu'en utilisant un catalyseur dont la consommation grève le prix de revient.
Or, la titulaire, après étude approfondie de la réaction, a découvert des conditions de synthèse permettant, sans l'emploi de catalyseur, de réaliser simultanément les améliorations : -fabrication en continu du D. D. T ; -absence de monochlorobenzène libre dans le mé
lange réactionnel final ; -obtention directe du D. D. T. s-en ; -point de solidification plus élevé du D. D. T.
obtenu.
Le but de la présente invention est donc l'obten- tion d'un D. D. T. s-de qualité améliorée grâce à de nouvelles conditions de fabrication industrielle permettant en particulier d'éviter le colmatage des surfaces de refroidissement sans l'emploi de solvants auxiliaires.
La titulaire a mis en relief à cet effet l'existence d'un stade préliminaire, fugace mais réel, au cours duquel une première molécule de monochlorobenzène réagit avec une molécule de chloral pour produire divers isomères ortho et para du chlorophényltri chlorométhylcarbinol, suivant la réaction :
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Il se forme d'autant plus de paracarbinol que la température est plus basse.
Or, ces isomères du carbinol sont la cause essentielle de l'existence des divers isomères du D. D. T. > .
Par condensation d'une seconde molécule de monochlorobenzène sur du carbinol préparé synthétiquement, la demanderesse a en effet vérifié que cette condensation se fait presque exclusivement en position para, si bien que l'orthocarbinol donne de l'or thopara D. D. T. et que le paracarbinol donne du para-para < = D. D. T. . L'hypothèse la plus vraisemblable pour expliquer le phénomène est que le carbinol et ses dérivés (probablement le carbocation correspondant) ne peut se condenser en position ortho par suite de l'empchement stérique dû à la grosseur des substituants trichlorométhyl et parachlorophényl.
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Les efforts de la titulaire ont porté sur la déter mination des conditions optima de réaction dans un premier stade au cours duquel ne se formerait qu'un minimum d'isomère ortho-carbinol, la réaction s'achevant lors d'un ou de plusieurs stades ultérieurs, au cours desquels il ne se formerait pratiquement que du para-para D. D.
T. z
La présente invention concerne donc un procédé de fabrication dich ? ordiphényltrichloréthane, en deux stades ou plus, s'effectuant dans des appareils distincts, par condensation du monochlorobenzène avec le chloral, en présence d'acide sulfurique concentré, ce procédé étant caractérisé par le fait que dans un premier stade, on met en présence le chloral ou une combinaison de celui-ci susceptible de l'engendrer lors de la réaction, le monochlorobenzène et une partie de l'acide sulfurique nécessaire dont la composition est comprise entre 3 ouzo d'eau et 3 O/o de SOg libre, la température du milieu réactionnel étant maintenue entre-3 et-r8"C,
et la durée de réac- tion étant inférieure à 1 h., afin qu'aucune précipi- tation de cristaux de dichlorodiphényltrichloréthane se produise, alors que dans un deuxième stade, dans lequel se produit la précipitation du dichlordiphényl- trichloréthane, on introduit dans un appareil contenant un pied de cuve de mélange réactionnel final, d'une part le mélange en cours d'évolution provenant du premier stade, d'autre part le restant de l'acide sulfurique nécessaire pour la condensation des réactifs introduits au premier stade, la température étant maintenue entre 0 et 20"C.
La mise en oeuvre du procédé selon l'invention peut se faire par voie discontinue ou continue, cette dernière ayant la préférence de la titulaire. Dans ce cas un troisième stade permettant d'achever la réac- tion est recommandé.
L'agent de condensation, en l'occurrence l'acide sulfurique, peut tre constitué en partie par une certaine quantité des eaux-mères issues du dernier stade, amenées au titre indiqué par addition d'oléum.
Il est introduit lentement et régulièrement au premier stade dans une proportion oscillant, de préférence, entre 50 et 80 /Q de la quantité totale nécessaire à la réaction. Pour un titre en eau inférieur à 3 o/oS la vitesse de réaction serait trop faible ; au-dessus de 3'Vo de SOl libre, la formation du D. D. T. risquerait d'tre trop rapide et d'amener la préci- pitation de cristaux, ce que l'on cherche précisément a éviter.
La réaction, très exothermique, exige des dispo sitifs d'agitation et de refroidissement appropriés.
En opérant selon le présent procédé, la fluidité du mélange permet de réaliser d'excellents échanges thermiques. La durée de contact entre les réactifs au premier stade de la fabrication est, de préférence, comprise entre 15 minutes et 45 minutes.
On a constaté que pour obtenir de bons résultats le rapport chloral/monochlorobenzène est assez étroit.
8 8
et
14,5 15,2
Pour 8 parties en poids de chloral il est avantageux d'employer une quantité de monochlorobenzène comprise entre 14,5 et 15,2 parties en poids. En-dessous de 14, 5 une partie du chloral tend à se décomposer, en dégageant de l'acide chlorhydrique, la liqueur acide devenant alors très rouge ainsi que les cristaux de D. D. T. . Au-dessus de 15,2 il peut rester du monochlorobenzène libre qui peut former une pâte avec le D. D. 1'. 5 > et causer des bouchages dans les faisceaux tubulaires.
Le liquide sortant du premier stade est conduit, de préférence, dans un ou plusieurs appareils contenant un pied de cuve important de mélange réac- tionnel final riche en cristaux fins de D. D. T. .
C'est ainsi, à titre d'exemple, qu'un volume de 8 litres de mélange réactionnel venant du premier stade peut tre introduit dans un pied de cuve de 40 litres environ de suspension. On introduit également dans ce ou ces appareils le restant de l'acide sulfu- rique nécessaire à la condensation des réactifs introduits dans le premier stade. Pendant l'achèvement de la réaction, le mélange réactionnel est maintenu de préférence entre +10 et +200 (:.
Dans le présent procédé, le D. D. T. précipite et se développe au deuxième stade sur les fins cristaux dispersés dans la masse, qui constituent ainsi des germes de cristallisation, ce qui évite le colmatage des surfaces de refroidissement. A ce stade le temps de contact est compris entre 1 h. 15 et 8 h.
Dans le cas d'une fabrication continue, un troisième stade peut tre mis en oeuvre ; on réduit alors le temps de contact au deuxième stade à environ 2 h. le mélange réactionnel s'écoulant dans un ou plusieurs appareils suivants, constituant le troisième stade, dans lequel le temps de contact peut varier de 2 à 5 h.
Un temps de réaction élevé améliore le rendement en < D. D. T. mais abaisse le point de soli dification de celui-ci.
Un temps de réaction court (2 h. 30 à 3 h.) conduit à un D. D. T. s-à haut point de solidification, mais le rendement est plus faible.
Avant le recylage de l'acide résiduaire, il est re commandable de séparer des impuretés huileuses.
Les cristaux de D. D. T. sont finalement séparés de leurs eaux-mères par tous procédés connus, puis lavés, neutralisés et sèches. Ils se présentent sous la forme de particules dont le diamètre moyen varie de 50 à 100 . Ils sont exempts de chloroben- zone et présentent un point de solidification se situant entre 92 et 960 C. Leur teneur en isomère ortho ne dépasse pas 15 /o.
Les exemples suivants illustrent l'application du procédé selon l'invention suivant le mode continu.
Exemple 1
Dans un réacteur agité, de 8 litres de capacité utile, maintenu entre-2 et + 80 C, on introduit par heure, en continu, les quantités de réactif ci-après : 6,86 litres de mélange monochlorobenzène-chloral (15 parties en poids de monochlorobenzène pour 8 parties en poids de chloral), 6,17 litres d'acide résiduaire recyclé, et 2,06 litres d'oléum à 22 /o.
Le mélange réactionnel constamment fluide, exempt de cristaux, déborde par trop-plein dans un 2e réacteur agité, de 40 litres de capacité utile, dans lequel on introduit aussi 2,74 litres d'oléum à 22 /0.
Dans ce réacteur constamment plein de mélange réactionnel et maintenu à 10 C par refroidissement à l'aide d'une saumure à 20 C, le D. D. T. formé se présentait sous la forme d'une poudre fine dispersée dans de l'acide peu coloré.
Le mélange réactionnel débordait en continu dans un 3e réacteur agité, refroidi à l'eau, maintenu à 15 C, constamment rempli du mélange réactionnel. Le D. D. T. était toujours sous forme d'une poudre fine dispersée dans l'acide et ne produisait aucun colmatage sur les surfaces réfrigérantes.
Le D. D. T. a été séparé des eaux-mères sulfoniques par filtration. Une certaine quantité d'acide sulfurique résiduaire a été recyclée, le restant éli- miné.
Cet acide contenait 17 /o d'acide parachlorobenzène sulfonique, 80,5"/e de H SO. et 2,5 10/o d'eau.
Le D. D. T. g a été ensuite dispersé dans 1'eau à raison de 50 kg dans 2001. Après agitation, il a été séparé par essorage des eaux-mères acides. Le gâteau a été de nouveau dispersé et agité violemment dans de 1'eau très légèrement basique afin d'éliminer tout l'acide retenu par les cristaux. On a terminé par un essorage et un séchage sous vide.
Le D. D. T. se présentait alors sous forme de fins cristaux amorphes ayant un point de solidification de 93,60 C. Le rendement à partir du chloral était de 88 /o.
Exemple 2
On a opéré de la mme façon que dans l'exemple 1, mais sans le troisième stade.
Le D. D. T. 2, obtenu présentait un point de solidification de 94,3O et le rendement à partir du chlo- ral était de 85 /o.
Avant de recycler l'acide résiduaire, il était né- cessaire de séparer les impuretés organiques qui précipitent lors du stockage au bout de quelques heures.