(Invention de Henri, Martin Guinot et Jean Gardais.) On sait que la méthode classique de fabri cation de l'éther sulfurique par déshydrata tion catalytique de l'alcool au moyen de liqueurs sulfuriques présente certaines diffi cultés du fait de l'apparition de réactions se condaires qui viennent diminuer les rende ments: production d'éthylène due à l'action d'un réactif éthérifiant trop énergique et for mation d'acide sulfureux provenant de la.ré- duction de l'acide sulfurique par les_produits organiques en présence.
Ces deux réactions s'accompagnent toujours, d'ailleurs, d'un brunissement plus ou moins accentué du bain éthérifiant, ce qui décèle l'existence d'autres réactions secondaires, indésirables, telles que la résinification de l'acétaldéhyde transitoire- ment formée par oxydation de l'alcool.
Dans la pratique industrielle, les bains éthérifiants sont généralement constitués par un mélange, à volumes égaux, d'acide sulfu- rique à 66 Bé et d'alcool à 96,6 % (soit 70 parties en poids d'acide pour 30 d'alcool). Au départ, un tel mélange présente une très bonne activité, à la condition qu'on élimine par distillation l'eau et l'éther à mesure de leur formation.
Toutefois, son emploi ne per met pas d'éviter parfaitement les réactions secondaires signalées plus haut; la moindre variation de la proportion d'alcool ou de la température du mélange éthérifiant provoque une augmentation considérable des quantités d'éthylène et d'acide sulfureux, accompa gnée d'un noircissement intense du bain.
En outre, le plomb qui constitue générale ment le revêtement interne de l'éthérificateur est sévèrement corrodé, à ce point qu'il n'est pas rare d'observer sa mise hors service en moins de 24 heures; enfin, la pureté de l'éther obtenu laisse parfois à désirer. Pour remédier à ces inconvénients:, on a proposé d'opérer en milieu très anhydre en additionnant le bain éthérifiant d'un hydro carbure jouant le rôle d'entraîneur d'eau.
L'équilibre de la réaction se trouve alors constamment déplacé dans le sens favorable à une éthéiification rapide et on peut tra vailler à une température plus basse.
Cette méthode permet d'obtenir une très grande activité du bain éthérifiant; on peut, par exemple, en marche continue, réaliser une production journalière d'éther atteignant 15 fois le poids du bain mis en oeuvre, sans dépasser une température d'éthérification de 115 à 120 .
Toutefois, outre une dépense de vapeur accrue, l'inconvénient de ce mode opératoire réside dans la nécessité de prohiber le plomb, qui est attaqué par l'acide sulfurique anhydre, et même les aciers spéciaux qui sont vive ment corrodés lorsque, à la suite de fluctua tions quelconques dans le travail de distilla tion, le bain se trouve momentanément enrichi en eau. Il faut donc recourir à l'emploi de ré cipients émaillés dont la surface de chauffe est insuffisante et qui s'écaillent facilement.
La demanderesse a trouvé qu'on peut, par le procédé classique sans entraîneur, éviter tous ces inconvénients, à la condition d'utili ser des bains contenant une proportion d'eau bien déterminée et relativement importante, de manière qu'ils ne puissent pas corroder le plomb et que celui-ci puisse ainsi être utilisé comme revêtement. Elle a fait, en effet, cette constatation surprenante qu'au point de vue de la corrosion, tout se passe comme si le titre de l'acide sulfurique, c'est-à-dire le rapport et que la proportion d'alcool et d'éther exis- était seul en cause tant dans le mélange ne joue pratiquement aucun rôle à cet égard.
C'est ainsi que de l'acide sulfurique très concentré est toujours agressif, même s'il se trouve dilué dans une importante proportion, d'alcool et d'éther. Par contre, un acide ayant un titre inférieur à une valeur de 75 à<B>80%</B> est pratiquement sans action sur le plomb dans les conditions de température adoptées et une teneur en acide plus faible peut aussi donner de bons résultats.
L'invention a donc pour objet un procédé de fabrication continue de l'éther sulfurique par déshydratation d'alcool à l'aide d'acide sulfurique dans un bain maintenu à l'ébulli tion, avec élimination continue de l'éther produit, caractérisé en ce que la teneur du bain en eau est telle que le rapport
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corresponde à un acide sul furique hydraté de<B>80%</B> au plus et de 60 au moins.
La demanderesse a en effet trouvé que, contrairement à ce qu'on aurait pu sup poser, ces bains relativement riches en eau sont encore capables de provoquer l'éthérifi- cation de l'alcool avec une vitesse suffisante. C'est ainsi que de l'acide sulfurique à<B>60%</B> additionné de la quantité d'alcool absolu né cessaire pour obtenir une température- d'ébul lition de 130 (soit 5 % en poids) constitue un bain éthérifiant capable de produire en continu et par jour l'équivalent d'une fois et demie son poids d'éther. Avec de l'acide à 65%, la production atteint quatre fois le poids du bain, si l'on suppose encore main tenue la même température de 130 par addi tion de 12 % en poids d'alcool.
Avec de l'acide à<B>70%</B> additionné de<B>'-)0%</B> en poids d'alcool absolu la quantité journalière d'éther dépasse six fôis le poids du bain, quand on opère à 130 .
Pratiquement, il y a intérêt à se servir d'acide titrant 65 à<B>70%,</B> de manière à con server une bonne marge de sécurité concer nant la corrosion du plomb. Il suffit alors de soumettre les vapeurs sortant de l'éthérifica- teur à une rectification en vue de séparer l'éther de l'alcool et de l'eau qui l'accom pagnent.
Une fois déterminée la composition con venable du bain, pour maintenir constante cette composition en marche continue afin d'éviter aussi bien une accumulation acciden telle d'eau qui ferait tomber rapidement la vitesse de réaction, qu'un manque d'eau, même momentané, susceptible de déclencher la corrosion du plomb et le dégagement d'éthylène et de gaz sulfureux, on peut, le chauffage de l'éthérificateur étant maintenu sensiblement constant, régler la température du bain à la valeur choisie (pratiquement 125 à 130 ) en agissant sur le débit d'alcool ali mentaire,
et en renvoyant dans l'éthérifica- teur de l'eau en quantité voulue pour mainte nir constant le volume du bain; une variation un peu importante de ce volume indiquerait un déréglage dont une analyse des vapeurs et, le cas échéant, du bain éthérifiant lui-même permettrait aussitôt de déceler l'origine. On arrive ainsi à un réglage presque mathéma tique de la marche de l'appareil. Le rende.-. ment est alors voisin du rendement théorique <B>(99%).</B> La quantité d'éthylène produite est très faible. En autre, il ne se forme pas trace de gaz sulfureux, ce qui permet de supprimer le saturateur habituellement utilisé.
Le bain éthérifiant se colore peu et, après plusieurs semaines de marche à plein régime, il est seu lement teinté en brun clair.
Quant à l'éther obtenu, sa pureté est sen siblement meilleure que celle du produit fa briqué par la méthode classique. Légèrement hydraté (0,7 à 0,8%), il ne renferme que des traces d'acide, d'aldéhyde et de peroxydes. Il ne contient pas trace de composés sulfu reux; quant au réactif de Nessler, il ne donne qu'une coloration jaune clair, alors que l'éther obtenu par la méthode classique prend en général rapidement, sous l'action de ce réactif, une forte coloration brime et le plus souvent noire.
Il est décrit ci-après, en regard du dessin annexé, à titre d'exemple seulement, un mode d'exécution du procédé selon l'invention.
La figure unique est un schéma de l'ap pareillage pour cette mise en aeuvre.
Dans la cuve d'éthérification 1, de 1200 litres de capacité, munie d'un dispositif de chauffage 2, on place 1000 kg d'acide sulfu rique à<B>68%</B> additionné de la quantité d'al cool absolu nécessaire pour amener le point d'ébullition du mélange au voisinage de 130 , soit 180 kg environ. Le mélange étant à l'ébullition, on introduit en continu dans la cuve 1, par le tuyau 3 et à .la vitesse voulue, l'alcool contenu dans le bac 4. L'alcool ali mentaire traverse au préalable la colonne de lavage 15 dont le rôle sera expliqué plus loin.
Les vapeurs dégagées de l'éthérificateur passent d'abord dans un brise-mousse 5, puis pénètrent dans la partie médiane de la co lonne 6, chauffée à la base en 7 et dans la quelle s'effectue-la rectification des vapeurs. Vers la partie supérieure de cette colonne, quelques plateaux au-dessous du sommet, on tire l'éther en vapeur par le tuyau 8. Après condensation en 9, l'éther est recueilli dans le bac 10. Sur les plateaux supérieurs de la colonne viennent se rassembler les impuretés volatiles, en particulier l'acétaldéhyde, qui, après condensation en 11, sont tirées en 12, à la vitesse voulue. A la base de la colonne, on tire par le tuyau 13 l'eau de la réaction.
Quant aux gaz incondensables constitués essentiellement par les petites quantités d'éthylène formées au cours de la réaction, ils se dégagent à la sortie du condensateur 11 par le tuyau 14.
Ces gaz étant saturés de va peurs d'éther qu'il convient de récupérer, on les envoie dans une première colonne de la vage 15, où ils sont lavés par l'alcool alimen taire, puis dans une deuxième colonne de la vage 16, où un arrosage d'eau récupère l'al cool entramé. L'éthylène débarrassé des pro duits solubles récupérables s'échappe en 17 et peut être recueilli dans un gazomètre.
Pour soulager le condenseur 11, qui tra vaille dans des conditions défavorables du fait de la basse température du produit à condenser, il est avantageux de prévoir un condenseur auxiliaire 18 qui est chargé de refroidir les vapeurs prélevées par le tuyau 19 aux 2/3 environ de la hauteur de la colonne et qui sont constituées, par un mélange d'éther et d'alcool. Une partie du cendensat retourne par le tuyau 20 sur le plateau de prélève ment, le reste étant renvoyé par le tuyau 21 dans l'éthérificateur.
Enfin, pour maintenir constante la teneur en eau du bain éthérifiant, un tuyau 22, muni d'un robinet, permet de renvoyer dans l'éthéri- ficateur une partie de l'eau de lavage prove nant de la colonne 16. On peut également utiliser à cet effet une partie des vinasses chaudes sortant en 13 à la base de la co lonne 6.
Il est bien entendu que l'invention n'est nullement limitée à l'utilisation de l'appa reillage qui vient d'être décrit, cette descrip tion n'étant donnée qu'à titre d'exemple non limitatif.
L'éther obtenu conformément à l'inven tion se caractérise, comme il a déjà été dit plus haut, par une pureté supérieure à celle du produit fabriqué par la méthode classique; de ce fait, il convient particulièrement bien comme matière première pour la fabrication de l'éther anesthésique.