NOUVELLE SOUCHE DE MICROALGUE DU GENRE ODONTELLA POUR LA PRODUCTION D'EPA ET DE DHA EN MODE
DE CULTURE MIXOTROPHE
L'invention se rapporte à une nouvelle souche de microalgue du genre Odontella, capable de croître en hétérotrophie et en mixotrophie, ainsi qu'à un procédé de sélection et de culture desdites microalgues, permettant une production d'acides gras polyinsaturés, notamment d'EPA et de DHA, en mode hétérotrophe ou mixotrophe.
Cette nouvelle souche se trouve être particulièrement utile pour produire de ΙΈΡΑ et du DHA, notamment dans un procédé de culture réalisé en mode mixotrophe, dans lequel l'apport de lumière s'effectue sous forme de flashs.
Préambule
Il est rappelé que les microalgues sont des microorganismes photosynthétiques à caractère autotrophe, c'est-à-dire ayant l'aptitude de croître de manière autonome par photosynthèse.
Les microalgues se développent aussi bien dans les milieux aquatiques marins, qu'en eaux douces ou saumâtres, ainsi que dans divers habitats terrestres.
La plupart des espèces microalgues rencontrées dans l'eau douce ou les océans sont strictement autotrophes, c'est-à-dire qu'elles ne peuvent croître que par photosynthèse.
Cependant, un certain nombre d'espèces de microalgues, de familles et d'origines très diverses, s'avèrent ne pas être strictement autotrophes. C'est ainsi que certaines d'entre elles, dites hétérotrophes, sont capables de se développer en l'absence totale de lumière, par fermentation, c'est-à-dire en exploitant la matière organique.
D'autres espèces de microalgues, pour lesquelles la photosynthèse reste indispensable à leur développement, sont capables à la fois de tirer parti de la photosynthèse et de la matière organique présente dans leur milieu. Ces espèces intermédiaires, dites mixotrophes, peuvent être cultivées à la fois en présence de lumière et de matière organique.
Cette particularité des microalgues dites « mixotrophes » semble être liée à leur métabolisme, qui leur permet d'opérer simultanément photosynthèse et fermentation. Les deux types de métabolisme co-existent avec un effet global positif sur la croissance desdites microalgues [Yang C. et al. (2000) Biochemical Engineering Journal 6 :87-102].
A l'heure actuelle, la classification des microalgues se fonde encore largement sur des critères morphologiques et sur la nature des pigments photosynthétiques que contiennent leurs cellules. De ce fait, elle est peu indicative du caractère autotrophe, hétérotrophe ou mixotrophe des différentes espèces d'algues, alors que celles-ci recouvrent une très grande diversité d'espèces et de formes [Dubinsky et al. 2010, Hydrobiologia, 639:153-171].
Les microalgues font l'objet actuellement de nombreux projets industriels car certaines espèces sont capables d'accumuler ou de sécréter des quantités importantes de lipides, notamment d'acides gras polyinsaturés.
Parmi ces acides gras polyinsaturés, certains hautement insaturés de la série des omégas 3 (AGHI ou PUFA-u)3), en particulier l'acide éicosapentaénoïque (EPA, C20:5 ω3) et l'acide docosahexaénoïque (DHA, C22:6 ω3) ont une importance nutritionnelle reconnue et présentent de fortes potentialités en terme d'applications thérapeutiques [Horrocks L.A. et al. (2000) Health Benefits of DHA. Pharmacol. Res. 40: 211-225].
Les huiles de poissons, issues de l'industrie de la pêche, sont actuellement la principale source commerciale de ce type d'acides gras. Toutefois, alors que ces huiles trouvent de nouvelles applications (complément alimentaire en aquaculture, intégration dans les margarines), les ressources halieutiques marines se raréfient du fait d'une activité de pêche intensive.
De nouvelles sources d'EPA et de DHA doivent donc être recherchées afin de répondre, dans le futur, à la demande croissante du marché pour ce type d'acides gras polyinsaturés.
Outre leur capacité à synthétiser les acides gras de novo, les microalgues offrent plusieurs avantages par rapport aux huiles de poisson. En particulier, elles sont cultivables in vitro dans des conditions contrôlées, ce qui permet la production d'une biomasse de composition biochimique relativement constante. D'autre part, contrairement aux huiles de poissons, les lipides provenant des microalgues ne présentent pas d'odeur désagréable et contiennent peu ou pas de cholestérol. Enfin, les lipides produits par les microalgues ont un profil d'acides gras généralement plus simple que celui des huiles de poissons, ce qui limite les étapes de séparation des acides gras d'intérêt.
Les principales microalgues productrices d'EPA et de DHA sont des espèces marines appartenant à différents phylums. Cependant, parmi les centaines de milliers d'espèces que recouvrent ces phylums, seul un petit nombre d'espèces éloignées les unes des autres sur le plan taxonomique, présente une teneur élevée en EPA et DHA. Les espèces capables de produire des quantités significatives d'EPA et/ou de DHA les plus souvent mentionnées sont celles appartenant aux genres Schizotrium sp., Crypthecodinium sp. (Dinophyceae), Phaeodactylum sp. (Bacillariophyceae, Naviculales) et Odontella sp. (Bacillariophyceae, Coscinodiscophyceae).
Les microalgues du genre Odontella sont des algues unicellulaires de taille importante, dont la longueur peut attendre 35 à 50 microns. Elles possèdent un frustule en silice composé de deux valves symétriques. Il s'agit de microalgues ubiquistes et cosmopolites de la zone néritique, ne formant pas de populations planctoniques denses, et que l'on trouve souvent associées à diverses espèces de macroalgues benthiques en zones côtières. A l'état naturel, l'espèce Odontella aurita accumule entre 1.6 % à 3.4 % en poids sec total d'EPA, ce qui représente en moyenne 21 % des acides gras totaux produit par cette microalgue.
Odontella aurita est généralement cultivée en mode autotrophe dans des bassins extérieurs pour son utilisation en alimentation animale, notamment pour l'alimentation des larves de poissons et des crustacés [Pulz et Gross (2004) Valuable products from biotechnology of microalgae, Appl. Microbiol. Biotechnol. 65(6):635-648].
Néanmoins, la culture des microalgues en mode autotrophe dans des bassins ouverts n'est pas très adaptée à une exploitation industrielle de celles-ci. En effet, dans la perspective d'une exploitation intensive des microalgues, la production de biomasse doit pouvoir être réalisée en grande quantité, dans des photo-bioréacteurs fermés et de grande dimension. Cependant, il est difficile dans de telles conditions de fournir un éclairement satisfaisant à l'ensemble des cellules contenues dans le milieu de culture, en particulier lorsque la densité des microalgues devient importante.
Une alternative à la culture en autotrophie des microalgues du genre
Odontella serait de pratiquer les cultures en mode hétérotrophe, c'est-à-dire en l'absence de lumière, avec un apport d'énergie sous forme de substrats carbonés, ou bien en mode mixotrophe, c'est-à-dire, en présence d'un apport de lumière de moindre intensité, avec également un apport de substrat organique.
Toutefois, jusqu'à présent, les microalgues du genre Odontella ne se sont pas avérées cultivables dans de telles conditions.
C'est donc de manière inattendue que le demandeur est parvenu à isoler une souche de microalgue du genre Odontella, cultivable en mode hétérotrophe et mixotrophe, capable de produire du DHA et de ΙΈΡΑ en quantité satisfaisante.
Cette nouvelle souche d'Odontella a été isolée de l'environnement et mise en culture par l'inventeur, et plus particulièrement, selon un procédé mis au point par celui-ci, consistant à cultiver les microalgues en conditions de mixotrophie, en présence d'un éclairement discontinu, notamment sous forme de flashs.
L'alternance rapprochée de phases éclairées et de phases obscures, perçue généralement comme stressante pour les microalgues, a permis, de façon surprenante, d'obtenir de cette souche une production élevée d'acides gras polyinsaturés. La mise en œuvre d'une telle souche, selon l'invention, permet d'envisager une production industrielle d'acides gras polyinsaturés dans des fermenteurs bénéficiant d'un apport lumineux réduit, et donc, de réaliser des économies d'énergie et de surface par rapport aux modes de culture autotrophes existants.
La souche d'Odontella, FCC 675, qui est la première de ces souches à avoir été sélectionnée selon la présente invention, a été déposée suivant les dispositions du traité de Budapest auprès de la CCAP (Culture Collection of Algae and Protozoa, Scottish Association for Marine Science, Dunstaffnage Marine Laboratory, Oban, Argyll PA371QA, Ecosse, Royaume- Uni), le 27 mai 2011 , et s'est vue attribuer le numéro d'accession CCAP 1054/5.
Les différents aspects et avantages de l'invention sont détaillés ci- après.
Description détaillée
La présente invention a donc pour objet une microalgue isolée, du genre Odontella (Phylum: Bacillariophyta, Classe: Coscinodiscophyceae, Famille: Eupodicaceae) [ITIS, Catalogue of Life, 2010], caractérisée en ce qu'elle est cultivable en mode hétérotrophe ou mixotrophe.
Le fait que cette microalgue soit cultivable en mode hétérotrophe s'apprécie par sa capacité à se multiplier dans l'obscurité dans un milieu de culture classique, habituellement utilisé pour la culture d'Odontella en mode autotrophe, de préférence un milieu minéral, dans lequel est ajouté un substrat carboné. Par milieu minéral, on entend un milieu de culture consistant en une solution aqueuse, souvent à base d'eau de mer, dans laquelle sont dissous des composés inorganiques, ainsi qu'éventuellement des vitamines et certains acides aminés. Un milieu
minéral approprié pour la culture d'Odontella est, par exemple, le milieu f/2 [Guillard, R.R.L. (1975) Culture of phytoplankton for feeding marine invertebrates. pp 26-60. In Smith W.L. and Chanley M. H (Eds.) Culture of Marine Invertebrate Animais. Plénum Press, New York, USA; Guillard, R.R.L. and Ryther, J.H. (1962) Studies of marine planktonic diatoms. I. Cyclotella nana Hustedt and Detonula confervacea Cleve. Can. J. Microbiol. 8: 229- 239].
Le fait que cette microalgue soit cultivable en mode mixotrophe s'apprécie par la capacité de la microalgue à se multiplier en présence d'un apport lumineux, dans un milieu de culture similaire à celui décrit ci- dessus, c'est-à-dire un milieu habituellement utilisé pour la culture d'Odontella en mode autotrophe, mais dans lequel est ajouté un substrat carboné.
En général, l'intensité de l'apport lumineux est supérieure ou égale à 5 μΕ, préférentiellement comprise entre 5 et 300 μΕ, plus préférentiellement entre 10 et 200 μΕ, et encore plus préférentiellement entre 20 et 150 μΕ.
En hétérotrophie ou en mixotrophie, un substrat carboné est apporté à la culture. Le substrat carboné comprend ou consiste en, sous forme pure ou en mélange, généralement, un ou plusieurs des composés suivants : amidon, glucose, xylose, arabinose, lactose, lactate, cellulose et ses dérivés, saccharose, acétate et/ou glycérol.
Les produits issus de la biotransformation de l'amidon, par exemple à partir de maïs, de blé ou de pomme de terre, notamment les hydrolysats de l'amidon, qui sont constitués de molécules de petite taille, peuvent former des substrats carbonés exploitables pour la culture des microalgues en mode hétérotrophe ou mixotrophe.
La culture en mode mixotrophe ou hétérotrophie de cette microalgue s'effectue préférentiellement en présence d'au moins 5 mM, de préférence au moins 10 mM, plus préférentiellement au moins 20 mM, et encore plus préférentiellement plus de 50 mM d'un substrat carboné. L'homme du métier sait déterminer les concentrations maximales du substrat carboné à utiliser. Généralement, la culture en mode mixotrophie ou hétérotrophie de
cette microalgue peut s'effectuer en présence de 10-200mM, de préférence entre 20 et 50mM de substrat carboné.
L'apport du substrat est assuré continuellement pendant la culture, afin de permettre aux cellules d'accumuler une concentration importante de lipides. Du substrat additionnel est ajouté au milieu de culture pendant le procédé de culture pour maintenir une concentration constante. L'homme du métier sait déterminer les quantités du substrat carboné à ajouter à la culture pour maintenir une concentration constante du substrat carboné dans le milieu de culture. Généralement, la culture peut s'effectuer ainsi avec des concentrations cumulatives de substrat carboné de 5 mM à 1 M, de préférence de 50 mM à 800 mM, plus préférentiellement de 70 mM à 600 mM, et encore plus préférentiellement de 100 mM à 500 mM.
Aux fins de la présente invention, l'arabinose et la xylose constituent des substrats carbonés préférés pour la culture Odontella en mode hétérotrophe selon l'invention.
L'acétate et le saccharose constituent des substrats carbonés préférés pour la culture d'Odontella en mode mixotrophe selon l'invention.
L'invention a ainsi pour objet un procédé de culture ou de sélection d'une microalgue du genre Odontella à caractère hétérotrophe ou mixotrophe selon l'invention, caractérisé en ce qu'il comprend les étapes suivantes :
- la culture d'une ou plusieurs souches du genre Odontella dans l'obscurité ou en présence d'un apport de lumière;
- le maintien de ladite culture sur plusieurs générations en présence d'un substrat carboné, tel que décrit précédemment, dans ledit milieu de culture;
- la récolte des cellules d'Odontella ainsi obtenues.
Le procédé de culture selon l'invention a notamment pour finalité de produire des acides gras polyinsaturés, plus particulièrement de ΙΈΡΑ et du DHA, qui s'accumulent dans les microalgues ainsi sélectionnées ou produites.
Un tel procédé de culture s'avère particulièrement avantageux lorsqu'un apport lumineux variable ou discontinu est mis en œuvre,
autrement dit lorsque le flux de lumière apporté aux algues en culture est variable ou discontinu au cours du temps.
Contrairement aux idées reçues, il est apparu qu'un éclairement variable ou discontinu des cultures, en particulier dans la mise en œuvre d'une culture en mode mixotrophe, avait un impact favorable sur le développement des algues et permettait d'accroître la productivité de celles-ci, notamment en ce qui concerne leur production de lipides.
Sans être lié par la théorie, l'inventeur estime qu'un apport discontinu ou variable de lumière aux microalgues a pour effet de provoquer un « stress » favorable à la synthèse des lipides. Ce phénomène pourrait s'expliquer en partie, par le fait que, dans la nature, les microalgues ont tendance à accumuler des réserves lipidiques pour résister aux contraintes de leur environnement.
Par éclairement discontinu, il faut entendre un éclairement ponctué par des périodes d'obscurité. Les périodes d'obscurité peuvent occuper plus d'un quart du temps, de préférence la moitié du temps ou plus, durant lequel les algues sont cultivées.
Selon un aspect préféré de l'invention, l'éclairement est discontinu et plus préférentiellement sous forme de flashs, c'est-à-dire sur des périodes de courtes durées. Les phases successives d'éclairement sont alors généralement comprises entre 5 secondes et 10 minutes, de préférence entre 10 secondes et 2 minutes, plus préférentiellement entre 20 secondes et 1 minute.
Selon un autre mode de l'invention, l'éclairement peut être variable, ce qui signifie que l'éclairement n'est pas interrompu par des phases d'obscurité, et que l'intensité lumineuse varie au cours du temps. Cette variation de lumière peut être périodique, cyclique, voire aléatoire.
Selon l'invention, l'éclairement peut varier de manière continue, c'est- à-dire que l'intensité lumineuse n'est pas constante et varie en permanence au cours du temps (d mol(photons)/dt≠ 0).
Selon l'invention, on peut aussi procéder à un apport lumineux alliant des phases d'éclairement continues et discontinues.
L'invention vise, en particulier, un procédé de culture de microalgues du genre Odontella, caractérisé en ce que lesdites algues sont cultivées dans l'obscurité avec un apport de lumière discontinu ou variable au cours du temps, dont l'intensité en micromoles de photons varie d'une amplitude égale ou supérieure à 10 pmol. m"2, s"1, de préférence égale ou supérieure à 50 pmol. m"2, s"1, plus préférentiellement égale ou supérieure à 100 pmol. m "2, s"1, à raison d'une ou plusieurs fois par heure, avantageusement plus d'une fois par heure. Le point commun de ces différents modes d'éclairement, discontinu ou variable, réside dans le fait que, selon l'invention, l'intensité lumineuse apportée aux algues en culture, exprimée en micromoles de photons par seconde par mètre carré (pmol. m"2. s"1), varie au moins une fois dans une même heure. L'amplitude de cette variation d'intensité de lumière est généralement supérieure à 10 pmol. m"2, s"1, préférentiellement supérieure ou égale à 20 pmol. m"2, s"1, plus préférentiellement supérieure ou égale à 50 pmol. ni"2, s"1. Autrement dit, l'intensité lumineuse atteint, chaque heure, de préférence plusieurs fois dans l'heure, une valeur haute et basse, dont la différence est égale ou supérieure à celle indiquée ci-dessus. De préférence, ladite intensité lumineuse atteint successivement les valeurs 50 pmol. m"2, s"1 et 100 pmol. m"2, s"1 à chaque heure, plus préférentiellement les valeurs 0 et 50 pmol. m"2, s1, plus préférentiellement encore les valeurs 0 et 100 μηιοΙ. m"2, s"1.
Il est rappelé que 1 pmol. m"2, s"1 correspond à 1 μΕ m"2, s"1 (Einstein), unité souvent utilisée dans la littérature.
L'apport de lumière dans les cultures peut être obtenu par des lampes réparties autour de la paroi externe des fermenteurs. Une horloge déclenche ces lampes pour des temps d'éclairement définis. Les fermenteurs se situent préférentiellement dans une enceinte à l'abri de la lumière du jour, dont on peut contrôler la température ambiante.
Selon un mode de réalisation de l'invention, les cultures peuvent être réalisées dans un fermenteur dans lequel le milieu de culture circule de manière régulière pour atteindre une partie éclairée de ce fermenteur. Un tel fermenteur peut prendre, par exemple, la forme d'un dispositif
muni d'un tuyau circulaire dont une partie est transparente et éclairée depuis l'extérieur. Le milieu de culture et les algues en suspension, en circulant activement à travers la partie éclairée d'un tel dispositif, se trouvent ainsi périodiquement au contact de la lumière.
Une souche particulière d'Odontella FCC 675, isolée, sélectionnée et cultivée par le demandeur, a été déposée à la CCAP, le 27 mai 2011 , sous le numéro CCAP 1054/5. Selon les analyses taxonomiques en cours, celle-ci appartiendrait à l'espèce Odontella aurita. Néanmoins, compte tenu de sa filiation avec d'autres espèces d'Odontella, l'invention porte sur toute espèce de microalgue du genre Odontella ayant un caractère mixotrophe, telle que décrite dans la présente demande.
Ainsi qu'a pu le constater le déposant, le fait que les souches sélectionnées selon le procédé de l'invention présentent de bonnes aptitudes à croître en mode hétérotrophe ou mixotrophe, prédispose ces souches à une production d'acides gras polyinsaturés plus élevée, notamment d'EPA et de DHA.
Le procédé de culture selon l'invention permet donc de sélectionner des souches d'Odontella à caractère mixotrophe, similaires à celle isolée par le demandeur et déposée à la CCAP, ayant un haut rendement en acides gras polyinsaturés.
Pour réaliser le criblage des souches, différentes souches d'Odontella peuvent être cultivées, en parallèle, sur des microplaques dans une même enceinte avec un suivi précis des conditions et de l'évolution des différentes cultures. Il est ainsi aisé de connaître la réponse des différentes souches à l'éclairement discontinu et, le cas échéant, à l'adjonction d'un ou plusieurs substrats carbonés dans le milieu de culture. Les souches qui répondent favorablement à l'éclairement discontinu et aux substrats carbonés, offrent généralement un meilleur rendement pour la production de lipides sur le plan qualitatif (acides gras polyinsaturés plus abondants dans le profil lipidique) et quantitatif (les lipides contiennent une proportion plus élevée d'EPA et de DHA).
Les microalgues peuvent être sélectionnées dans un fermenteur à partir d'un pool de microalgues diversifié et dont on cherche à sélectionner les variants avantagés par le mode de sélection selon l'invention alliant lumière discontinue ou variable avec des conditions de culture mixotrophes. Dans ce cas, la culture est pratiquée en maintenant les microalgues en cultures sur de nombreuses générations, puis un isolement des composantes devenues majoritaires dans le milieu de culture est effectué au terme de la culture.
Le procédé de culture selon l'invention se caractérise plus particulièrement en ce que la culture des souches s'effectue sur plusieurs générations, de préférence en mode mixotrophe, et en ce qu'on récolte les cellules chargées en lipides.
L'invention a également pour objet un procédé d'enrichissement de microalgues du genre Odontella en acides gras polyinsaturés, caractérisé en ce qu'il comprend la sélection et la culture de microalgues du genre Odontella, en mode mixotrophe ou hétérotrophe, plus particulièrement selon les procédés de culture décrits précédemment.
L'invention a également pour finalité la production de lipides, notamment d'acides gras polyinsaturés, via la culture de microalgues du genre Odontella à caractère hétérotrophe ou mixotrophe, puis la récupération des microalgues ainsi cultivées pour en extraire le contenu lipidique, en particulier ΙΈΡΑ et/ou le DHA. Ces microalgues sont de préférence cultivées ou sélectionnées selon les procédés visés précédemment.
La culture des souches d'Odontella selon l'invention en mode mixotrophe ou hétérotrophe permet généralement d'augmenter la biomasse totale de plus de 20 %, plus souvent de plus de 30 %, et parfois même, de plus de 40 % par rapport à la culture d'une même souche d'Odontella en mode autotrophe.
Par ailleurs, le contenu des lipides totaux en EPA et DHA dans les lipides totaux extraits des souches d'Odontella ainsi cultivées, représente plus de 10 %, généralement plus de 30 %, bien souvent
plus de 40 %, voire même plus de 50 % des lipides totaux cellulaires, en poids sec.
Les méthodes d'extraction sélective de ΙΈΡΑ et du DHA sont connues de l'homme du métier et sont, par exemple, décrites par Bligh, E.G. and Dyer, W.J. [A rapid method of total lipid extraction and purification (1959) Can. J. Biochem. Physiol., 37: 91 1-917]. L'EPA et le DHA ainsi extraits peuvent être utilisés en tant qu'additifs dans des compositions nutritionnelles, telles que du lait maternisé, ou bien dans des compositions cosmétiques ou thérapeutiques.
Les microalgues, sélectionnées, cultivées ou enrichies en acides gras polyinsaturés selon le procédé de l'invention, peuvent être utilisées directement, sous forme hydratée ou déshydratée, ou après transformation, en tant qu'aliment complément alimentaire, notamment en pisciculture, ou en tant qu'ingrédient entrant dans la composition de produits cosmétiques ou thérapeutiques.
Exemple
Culture des souches ô'Odontella aurita en bioréacteur Les cultures sont réalisées dans des fermenteurs (bioréacteurs) de 2L utiles avec automates dédiés et supervision par station informatique. Le système est régulé en pH via l'ajout de base (solution d'hydroxyde de sodium à 1 N) et/ou d'acide (solution d'acide sulfurique à 1 N). La température de culture est fixée à 23°C. L'agitation est réalisée grâce à 3 mobiles d'agitation placés sur l'arbre selon la configuration de Rushton (hélices tripales à pompage descendant). La vitesse d'agitation et le débit d'aération sont régulés au mini = 100 rpm et au maxi = 250 rpm et Qmjni =0,5 vvm / Qmaxi = 2 vvm respectivement. Le bioréacteur est équipé d'un système luminaire externe entourant la cuve transparente. L'intensité ainsi que les cycles de lumière sont contrôlés par un automate dédié et supervisé par station informatique.
Les réacteurs sont inoculés avec une pré-culture réalisée sur table d'agitation (140 rpm) en enceinte thermostatée (22°C) et éclairée en continue à 100 μΕ m"2 s"1. Pré-cultures et cultures en bioréacteurs sont réalisées dans le milieu f/2. Le carbone organique utilisé pour la culture en mixotrophie en bioréacteur est l'acétate de sodium à des concentrations entre 20 mM et 50 mM. Le substrat organique carboné est rajouté dans le milieu de culture en mode « fed-batch ». Les conditions de culture en hétérotrophie sont identiques à celles de la mixotrophie en absence de lumière.
Suivi des cultures
La concentration en biomasse totale est suivie par mesure de la masse sèche (filtration sur filtre GFC, Whatman, puis séchage à l'étuve sous vide, 65°C et -0,8 bar, pendant 24h minimum avant pesée).
Concernant la quantification des lipides totaux, 107 cellules/mL ont été extraites. Les méthodes d'extraction des lipides sont connues de l'homme du métier et sont, par exemple, décrites par Bligh, E.G. et Dyer, W.J. [A rapid method of total lipid extraction and purification (1959) Can. J.Biochem. Physiol 37:911-917].
Lumière en flash
L'apport de la lumière dans les cultures en bioréacteur a été obtenu par des lampes LED réparties autour de la paroi externe des fermenteurs. Une horloge déclenche ces LED pour des temps d'éclairement ou des puises entre 10 et 100 uE. L'intensité lumineuse du système flash utilisé en mixotrophie est égale à celle utilisée en autotrophie (témoin).
Souche Odontella Hétérotrophie Mixotrophie en
flash
Biomasse (% par rapport > 150% > 200%
à l'autotrophie)
Lipides totaux > 20% >35%
(% par rapport
à l'autotrophie)
EPA et DHA (% par rapport >25% >30%
à l'autotrophie)