GÈNE ISOLÉ CODANT POUR LA λ-CARRAGHÉNASE ET LA λ-CARRAGHÉNASE RECOMBINANTE OBTENUE À L'AIDE DE CE GÈNE
L'invention a pour objet un gène codant pour un polypeptide présentant une activité λ-carraghénase c'est-à-dire pour un polypeptide et plus précisément une enzyme capable d'hydrolyser spécifiquement les λ-carraghénanes.
L'enzyme λ-carraghénase est sécrétée par une bactérie dénommée P. carrageenovora et déposée sous la référence 43555 dans la collection ATCC (American Type Culture Collection).
Les λ-carraghénanes sont des D-galactanes sulfatés constituants de la matrice des parois cellulaires de certaines algues rouges. Ils sont constitués de sous-unités carrabioses comprenant deux galactoses sulfatés liés par une liaison β(l-4). Ces carrabioses sont liés entre eux par des liaisons α(l-3).
Dans le cas des algues rouges, l'infection par un agent pathogène comme la bactérie P. carrageenovora se traduit par une dégradation ou hydrolyse des λ-carraghénanes pariétaux par l'enzyme bactérienne λ-carraghénase apportée par la bactérie.
L'hydrolyse des carraghénanes pariétaux des algues rouges génère des fractions oligosaccharidiques présentant différents degrés de polymérisation dont certains interviennent comme médiateurs de signaux de transduction cellulaires lors d'une infection bactérienne.
Ces fractions oligosaccharidiques pourraient être impliquées dans l'élicitation de réactions de défense chez les plantes.
Mais leur préparation à l'échelle industrielle implique la mise en œuvre de quantités importantes de λ-carraghénase.
Toutefois, la préparation de l'enzyme par extraction à partir des cellules bactériennes, seule opérationnelle à ce jour, a un rendement faible qui exclut sa production à l'échelle industrielle.
Le recours a des techniques de génie génétique permettrait d'envisager une production à l'échelle industrielle.
Et il est du mérite de la Société Demanderesse d'avoir rendu possible le recours à ces techniques grâce aux travaux qui lui ont permis d'isoler, d'identifier et de définir le gène responsable de l'activité λ-carraghénase dans le génome de la bactérie P. carrageenovora.
Le gène isolé en question conforme à l'invention, est caractérisé par le fait qu'il est constitué par la séquence nucléotidique SEQ ID NO : 1 et par des polynucléotîdes constitués par des séquences nucléotidiques analogues.
La séquence nucléotidique SEQ ID NO : 1 est représentée à la figure 1.
On rappelle qu'une séquence nucléotidique est considérée comme analogue à une autre séquence, en l'occurrence à la séquence nucléotidique du gène SEQ ID NO : 1 dans la mesure où, bien que présentant un ou plusieurs nucléotides différents par rapport SEQ ID NO : 1, les polypeptides codés par les deux séquences nucléotidiques présentent une activité λ-carraghénase identique.
Le gène conforme à l'invention code pour l'enzyme ou polypeptide recherché qui est caractérisé par une séquence en acides aminés analogue à la séquence SEQ ID NO : 2.
Plus particulièrement, l'invention vise tout polynucléotide caractérisé par le fait qu'il code pour un polypeptide dont la séquence en acides aminés est analogue à tout ou partie de la séquence SEQ ID NO : 2 ; ce polypeptide présente une activité enzymatique de dégradation des λ-carraghénanes.
L'invention a donc pour objet un polypeptide isolé ayant une séquence en acides aminés analogue à tout ou partie de la séquence SEQ ID NO : 2.
La séquence peptidique SEQ ID NO : 2 est représentée à la figure 2.
On rappelle que deux séquences peptidiques sont analogues dans la mesure où, bien que se différenciant par un ou plusieurs acides aminés, les polypeptides présentent une activité λ-carraghénase identique.
L'invention a également pour objet le susdit gène ou polynucléotide sous une forme modifiée, notamment par mutagenèse dirigée.
On indique ci-après la définition de quelques termes et expressions utilisés dans le texte de la présente demande de brevet.
En précisant que le gène conforme à l'invention est «isolé », on indique qu'il est placé dans un environnement différent de celui dans lequel il se trouve naturellement. On rappelle que ce qualificatif d' «isolé » est également utilisé en rapport avec les polypeptides ou enzymes et les cellules hôtes.
On rappelle également que les termes « polynucléotide » et « acide nucléique » peuvent être utilisés de façon interchangeable. Ils désignent des polymères de nucléotides de toute longueur, qu'il s'agisse de ribonucléotides ou de déoxynucléotides.
Ces termes incluent mais ne sont pas limités à des ADN, ARN, ADN génomique simple brin ou double brin, ni à des hybrides ADN-ARN.
Les acides nucléiques peuvent être modifiés chimiquement ou biochimiquement, par exemple par marquage avec un isotope radioactif ou un groupement fluorescent.
Ils peuvent également être modifiés par la substitution d'un ou plusieurs nucléotides par un analogue ou par des moyens permettant de greffer un acide nucléique sur une protéine, sur des composés marqués, sur d'autres acides nucléiques ou sur un substrat solide.
Ainsi, un « polynucléotide recombinant » est une molécule d'acide nucléique, simple ou double brin qui a été modifiée par une intervention humaine de manière à contenir des segments d'acides nucléiques combinés ou juxtaposés selon un arrangement n'existant pas à l'état naturel.
Par le terme « génome » on désigne l'ensemble du matériel génétique d'une cellule.
Par l'expression « banque génomique », on désigne l'ensemble des clones moléculaires comprenant des fragments d'ADN génomiques ou inserts.
Par le terme « clones », on désigne au moins deux entités (molécules, cellules, ...) ayant une information génétique identique.
Les termes « polypeptide », « enzyme » et « protéine » peuvent être utilisés de façon interchangeable et désignent des molécules caractérisées par des séquences en acides aminés de toute longueur, éventuellement modifiées par voie chimique ou biochimique.
Ces termes incluent les « protéines de fusion », expression par laquelle on désigne une protéine hybride codée par un polynucléotide comprenant les séquences nucléotidiques d'au moins deux gènes ou des fragments des deux gènes différents l'un de l'autre ; l'une des séquences peut coder pour un tag.
Par le terme « tag » on désigne toute séquence polypeptidique capable de se fixer à des matrices d'affinité et/ou d'être reconnue par des anticorps permettant de détecter et/ou de purifier le polypeptide auquel elle est fusionnée.
Pour caractériser l'activité carraghénolytique de la souche P. carrageenovora, on procède à la purification de l'enzyme native.
Dans un premier temps, l'activité carraghénolytique ayant été mise en évidence dans le milieu de culture des cellules bactériennes, on procède à l'extraction de l'enzyme native à partir du milieu de culture.
Pour ce faire, les cellules bactériennes P. carrageenovora sont mises en culture dans des conditions standard, notamment sous agitation et à une température préférentielle de 22°C.
Généralement, les cellules bactériennes sont cultivées dans un milieu Zobell comprenant 5 g/1 de bacto-peptone, 1 g/1 d'extrait de levure dans de l'eau de mer filtrée.
Avantageusement, il est possible d'incuber les cellules bactériennes P. carrageenovora dans un milieu modifié comprenant 25 g/1 de NaCl, 5 g/1 de MgSO4, 7H2O, 0.1 g/1 de CaC12, 2H2O, 1 g/1 de KCl, 2 g/1 de NaNO3, 2,5 g/1 d'acide de caséine, 1 g/1 d'extrait de levure, supplémenté par 6 % v/v de 0.2 M de Na2HPO4 pH 7,2 et 0.033 % v/v de FeSo4, 7H2O à 10 % w/v.
En outre, il a été montré que la présence de λ-carraghénanes dans les milieux de culture induit l'activité λ-carraghénase de la souche P. carrageenovora.
Ceci étant, la purification de l'enzyme native est un processus qui comprend plusieurs étapes, à savoir l'extraction initiale, la précipitation, les dialyses et les chromatographies. Ces diverses techniques permettent de fractionner les protéines et de séparer l'enzyme recherchée de toutes les autres présentes. Pour réaliser ce fractionnement des protéines, on procède de la façon exposée ci-après.
Après 2 jours de culture de la souche P. Carrageenovora dans un milieu modifié et supplémenté par 1. g/1 de λ-carraghénanes, on procède à une centrifugation. Le surnageant ainsi obtenu est concentré par ultracentrifugation tangentielle sur des membranes de 30 kDa.
Le rétentat issu de cette ultrafiltration est ensuite soumis à une précipitation différentielle au sulfate d'ammonium pour le débarrasser de la plus grande partie des protéines non désirées. La fraction protéique correspondante aux protéines qui précipitent en présence de concentrations de saturation du sulfate d'ammonium comprises entre 30 et 70 % est conservée dans un tampon PBS 25 mM pH 7,2 contenant 2 M de NaCl.
On soumet ensuite cette fraction protéique à une succession de fractionnements en utilisant différentes méthodes chromatographiques.
Avantageusement, le mélange protéique obtenu après l'opération de précipitation est chargé sur une colonne Sephacryl S-200 (Pharmacia) dont le domaine de fractionnement s'échelonne entre 5 et 250 kDa. Cette technique de chromatographie par filtration sur gel dextrane joue le rôle de tamis moléculaire et permet de séparer les protéines les unes des autres en fonction de leur poids moléculaire.
L'éluat de la colonne est recueilli en petites fractions. Les fractions éluées qui sont capables d'hydrolyser les λ-carraghénanes sont rassemblées en une fraction unique.
Cette fraction protéique unique est ensuite chargée sur une colonne phényl-sépharose de chromatographie d'interaction hydrophobe. Les fractions qui présentent une activité carraghénolytique sont retenues par la matrice phényl-sépharose et éluées lors de l'étape de lavage de celle-ci. Ces fractions sont rassemblées en une fraction unique.
Pour augmenter la pureté de la fraction protéique unique renfermant l'enzyme λ-carraghénase native, il est possible de la soumettre à une étape additionnelle de chromatographie par filtration sur gel.
Les fractions éluées et présentant une activité de dégradation de λ-carraghénanes sont rassemblées et conservées dans le tampon PBS à 4°C.
Il est possible de conserver les fractions renfermant l'enzyme native en les maintenant en présence de λ-carraghénanes. En effet, il a été montré que la conservation de l'enzyme en présence de son substrat spécifique permettait de stabiliser l'enzyme et de la conserver dans sa conformation active.
Souvent, entre ces étapes de fractionnement, il faut éliminer les sels ou produits utilisés dans les chromatographies. On utilise alors une dialyse et/ou une ultrafiltration.
Chaque étape de fractionnement doit être suivie de près pour vérifier que les fractions protéiques conservées pour être utilisées dans l'étape suivante présentent une activité de dégradation des λ-carraghénanes.
L'activité λ-carraghénolytique pour chaque fraction protéique est donc vérifiée au moyen d'un test mettant en évidence, par électrophorèse sur gel de polyacrylamide- carbohydrate (C-PAGE), la libération d'oligosaccharides anioniques résultant de la dégradation des λ-carraghénanes.
Avantageusement, la méthode utilisée est celle développée par Zablackis E. et Perez J. [A partially pyruvated carrageenan from Hawaiian Grateloupia filicina (Cryptonemiales, Rhodophyta) 1990 Bot. Mar. 33, 273-276].
Le procédé conforme à l'invention grâce auquel il a été possible d'isoler, d'identifier et de définir le gène conforme à l'invention, est caractérisé par le fait que successivement
-on prépare, par des techniques classiques de biologie moléculaire, une sonde permettant de cribler une banque génomique,
- on construit, par des techniques classiques de clonage, une banque génomique à partir du génome de la bactérie P. carrageenovora,
- on crible la banque génomique par hybridation de la sonde en vue d'isoler le gène recherché, - on séquence le gène ainsi isolé par les techniques classiques de séquençage, et
- on met en évidence l'activité λ-carraghénase de l'enzyme codée par ledit gène.
On prépare d'abord la sonde.
On rappelle qu'une « sonde» correspond à un fragment d'acide nucléique simple brin marqué par l'incorporation d'atomes radioactifs ou de groupements fluorescents et dont la séquence est sensiblement complémentaire à la séquence d'un gène recherché ; ce dernier sera décelé par hybridation avec la sonde, cette hybridation se produisant lorsque les deux séquences complémentaires s'apparient.
Par « séquence complémentaire », on désigne une séquence nucléotidique simple brin constituée d'une succession de bases complémentaires à celles d'une autre séquence simple brin avec laquelle elle est capable de s'hybrider.
Selon un mode de réalisation préféré de l'invention, la séquence nucléotidique de la sonde préparée pour le criblage de la banque génomique P. carrageenovora est complémentaire d'un segment de la séquence nucléotidique SEQ ID NO : 1.
Cette sonde est préparée en procédant de la façon indiquée ci-après.
L'enzyme native est soumise à un traitement avec des agents chimiques ou des enzymes capables de couper sa chaîne polypeptidique à des sites précis, notamment la trypsine qui coupe après une lysine ou une arginine. Ainsi, l'enzyme est fragmentée en fragments peptidiques qui pourront être séquences séparément après séparation chromatographique.
Avantageusement, ces fragments peptidiques sont séquences selon la méthode d'Edman qui permet d'enlever et d'identifier un à un les acides aminés en commençant par l'extrémité N-terminale.
La connaissance de ces séquences peptidiques partielles de la λ-carraghénase permet, par le jeu du code génétique, de déduire les séquences nucléotidiques correspondantes.
Le code génétique équivaut à la correspondance entre les séquences nucléotidiques et les séquences peptidiques. Ainsi, chaque triplet de nucléotides de la séquence nucléotidique ou codon correspond à un acide aminé unique.
On parle de dégénérescence du code génétique dans la mesure où plusieurs codons synonymes peuvent spécifier un même acide aminé. En conséquence, par le jeu du code génétique, plusieurs séquences nucléotidiques peuvent être déduites pour une séquence peptidique unique.
A partir de ces informations, on conçoit et synthétise des amorces oligonucléotidiques dégénérées : elles servent d'amorces dans le cadre d'une réaction d'amplification à l'issue de laquelle on obtient une sonde ayant une grande spécificité pour le gène recherché. Ces réactions d'amplification sont réalisées à partir du génome de Ia bactérie.
Avantageusement, les amorces oligonucléotidiques de quelques dizaines de nucléotides sont produites par synthèse chimique automatisée.
Avantageusement, la sonde obtenue peut être marquée notamment avec un isotope radioactif par la technique dite d'amorçage au hasard.
Dans cette technique de marquage, les deux brins d'acide nucléique de la sonde sont préalablement séparés par chauffage suivi d'un refroidissement brutal. Puis on réalise une autre PCR en utilisant un mélange d'oligonucléotides de synthèse correspondant à
un grand nombre de combinaisons possibles de séquence. Pour une partie d'entre eux, ces oligonucléotides s'hybrident avec la sonde et constituent des amorces pour l'enzyme polymérase. Celle-ci reconstitue alors tout ou partie de la sonde en présence de désoxynucléotides triphosphate marqués radioactivement.
On construit, par ailleurs, la banque d'ADN génomique en ayant recours aux techniques classiques de clonage.
Pour ce faire, le génome de la bactérie P. carrageenovora est fragmenté d'une façon la plus aléatoire possible, par une action mécanique ou à l'aide d'une enzyme de restriction à haute fréquence de coupure.
L'hydrolyse de PADN est réalisée dans les conditions permettant de générer des fragments qui non seulement peuvent être cloner efficacement dans le vecteur de clonage choisi mais également ont une taille proche de celle du gène recherché.
Les fragments d'ADN ainsi obtenus sont purifiés par électrophorèse en gel d'agarose.
Avantageusement, ceux dont la taille est comprise entre 4 et 10 kb sont prélevés du gel d'agarose puis insérés dans le vecteur de clonage capable d'en assurer la réplication ; on obtient ainsi des vecteurs recombinants.
L'utilisation d'enzymes de restriction conduisant à des extrémités cohésives est un moyen préféré pour fragmenter l'ADN dans la mesure où elle simplifie l'étape ultérieure de clonage.
L'ensemble du génome étudié, ici celui de la bactérie P. carrageenovora, est représenté au sein de la banque génomique ainsi construite. Le nombre de clones recombinants contenus dans la banque est calculé en fonction de la taille du génome de la bactérie et la taille moyenne des inserts.
6000 clones sont suffisants pour représenter statistiquement le génome entier de P. carrageenovora.
On rappelle que le terme « vecteur » désigne une molécule d'acide nucléique extrachromosomique, notamment un plasmide, un cosmide ou un phage ayant une réplication autonome et pouvant être incorporé dans une « cellule hôte », à savoir un microorganisme, une cellule eucaryote animale ou végétale ou une cellule d'une lignée cellulaire en tant qu'entité unicellulaire qui peut être utilisée comme récipient pour un vecteur recombinant.
La cellule hôte devient recombinante lorsqu'elle contient un vecteur de clonage ou d'expression ou un acide nucléique qui lui est étranger. Dans le contexte de l'invention, un exemple de cellule hôte recombinante est une cellule qui produit un polypeptide présentant une activité λ-carraghénase à partir d'un vecteur d'expression comprenant le polynucléotide codant pour ledit polypeptide.
Typiquement un vecteur de clonage est conçu pour permettre le transport d'un fragment d'ADN clone et contient un ou plusieurs sites de reconnaissance pour des enzymes de restriction qui permettent l'insertion ou clonage d'un fragment d'acide nucléique ainsi qu'une ou des séquences nucléotidiques codantes pour des gènes permettant l'identification et la sélection de cellules hôtes transformées par ledit vecteur.
Dans le cas où les cellules hôtes sont des cellules bactériennes E. CoIi, les susdits gènes correspondent à des gènes de résistance à des antibiotiques notamment l'ampicilline et la kanamycine.
Un vecteur d'expression est conçu pour permettre l'expression d'une séquence nucléotidique codante insérée en aval d'un promoteur. La séquence insérée ou insert est alors transcrite, puis traduite en polypeptide.
Certains vecteurs d'expression ont une séquence codante pour un tag en amont ou en aval du site d'insertion ou de clonage ; la séquence insérée est alors transcrite puis traduite sous la forme d'une protéine de fusion.
Par « promoteur », on désigne une région de régulation située en amont de la région codante d'un gène, à proximité de son extrémité 5'.
Un promoteur comporte certaines séquences nucléotidiques caractéristiques permettant la fixation du complexe d'initiation de la transcription ainsi que la fixation de protéines régulatrices de la transcription.
Lorsque le promoteur est inductible, le taux de transcription augmente en réponse à un agent inducteur.
Les vecteurs recombinants sont transférés et amplifiés au moyen de cellules hôtes bactériennes, dont notamment E. CoIi.
Après un temps suffisant de culture, des clones cellulaires contenant chacun un vecteur recombinant sont séparés, étant entendu que les clones diffèrent entre eux par la nature de l' insert du vecteur.
On a ainsi obtenu la banque génomique.
On procède ensuite au criblage de la banque génomique ; un tel criblage sert à trier et à identifier les clones positifs.
Par « clones positifs », on désigne les clones qui comprennent dans leur insert une séquence nucléotidique complémentaire à celle de la sonde.
Le criblage représente l'une des parties les plus délicates des techniques de clonage et il en existe de nombreuses variantes.
Avantageusement, on procède comme suit.
On détecte la séquence nucléotidique recherchée, généralement par hybridation moléculaire.
Avantageusement, l'hybridation est effectuée in situ lorsque la banque génomique est propagée dans des cellules bactériennes.
Ainsi, les clones bactériens cultivés en boite de Pétri sont répliqués sur des disques de nitrocellulose.
Après un temps de culture suffisant, les clones bactériens des répliques sont traités par la soude qui non seulement lyse les cellules bactériennes mais également dénature l'acide nucléique en molécule simple brin.
Ainsi, dans la collection de clones, seuls ceux qui possèdent un insert dont la séquence est complémentaire à celle de la sonde sont marqués par hybridation avec celle-ci et sont sélectionnés.
Chaque clone positif sélectionné comporte un insert codant pour tout ou partie du polypeptide recherché ; la séquence nucléotidique de cet insert est déterminée par une méthode classique de séquençage.
Le criblage est alors terminé.
Les caractéristiques de l' insert de chaque clone positif, comme sa taille ou sa carte de restriction sont alors déterminées.
Une « carte de restriction » est établie en positionnant sur la séquence nucléotidique de l'insert analysé, les sites de clivage reconnus par diverses enzymes de restriction.
Ces cartes de restriction sont comparées et permettent le recouvrement des parties communes des séquences des inserts.
Par ailleurs, on réalise des expériences de « Southern Blot » selon le protocole suivant :
Après avoir digéré chaque insert par diverses enzymes de restriction, les produits de digestion de chaque insert sont séparés par électrophorèse par gel agarose, dénaturés puis transférés sur une membrane de nylon ou de cellulose.
Les acides nucléiques monocaténaires sont ensuite fixés à la membrane, hybrides à la sonde marquée et lavés. Il est entendu que les conditions d'hybridation et de lavage sont d'une importance majeure. Dans la mesure où la séquence de la sonde est complètement complémentaire à celle de l'ADN analysé, l'hybridation peut être réalisée dans des conditions rigoureuses.
L'hybridation révèle la position de la séquence de la sonde sur la carte de restriction établie pour chaque insert.
On est alors en mesure de choisir le ou les clones positifs comprenant un insert dont la séquence couvre la séquence entière du gène codant pour la λ-carraghénase.
L'étape suivante comprend le séquençage du gène.
La séquence confirme la taille et la carte de restriction prédites et indique la polarité et le cadre de lecture ouvert (ORF).
Pour reconstituer la séquence nucléotidique de ce gène, les séquences nucléotidiques du ou des inserts choisis à l'issue de l'étape de caractérisation des clones sont déterminées par séquençage, puis sont ordonnées les unes par rapport aux autres au
sein d'un contig par la mise en évidence de recouvrements des extrémités chevauchantes.
Par « contig », on désigne deux ou plusieurs séquences nucléotidiques présentant des extrémités chevauchantes ordonnancées pour reconstituer le gène recherché ; le but est d'obtenir par recouvrements successifs un contig aboutissant à la séquence nucléotidique codant pour l'enzyme λ-carraghénase.
On rappelle que par « extrémités chevauchantes », on désigne des régions terminales présentant un enchaînement de nucléotides identiques.
La connaissance de la séquence nucléotidique du gène permet de le préparer par une méthode d'amplification par PCR.
A partir de la susdite séquence nucléotidique, il est possible de concevoir et de synthétiser des amorces pour obtenir et amplifier —autrement dit préparer— le gène codant pour la λ-carraghénase ou l'un de ses fragments.
Le procédé de préparation du gène codant pour la λ-carraghénase ou d'un de ses fragments comprend trois étapes, à savoir
- la sélection du gène proprement dit ou de l'un de ses fragments,
- la sélection d'une paire d'amorces oligonucléotidiques, dont chacune est complémentaire de l'une des extrémités du gène ou du fragment choisi et l'amplification du gène ou du fragment choisi, à l'aide des amorces oligonucléotidiques et d'une enzyme polymérase.
L'amplification peut être réalisée à partir d'un vecteur de clonage comprenant le gène de la λ-carraghénase, ou encore à partir du génome de la bactérie étudiée, ici notamment P. carragenovora.
Le gène isolé ou polynucléotide conforme à l'invention est également caractérisé par le fait qu'il code aussi pour un polypeptide modifié comprenant un ou plusieurs acides aminés modifiés, ledit polypeptide modifié présentant une activité enzymatique optimisée de dégradation des λ-carraghénanes.
Typiquement, pour modifier la séquence en acides aminés d'un polypeptide, on agit sur la molécule d'acide nucléique qui code pour ce polypeptide en ayant recours aux techniques connues de l'homme du métier.
II est possible pour modifier l'acide nucléique constitutif du gène ou de l'un des polynucléotides conformes à l'invention, de le soumettre à un traitement par un agent mutagène, c'est-à-dire d'un agent physique ou chimique capable de provoquer des mutations qui altèrent la signification des codons, ce qui par le jeu du code génétique modifie la séquence en acides aminés.
Avantageusement, on a recours à une technique de mutagenèse dirigée pour modifier la séquence nucléotidique du gène ainsi que celles des polynucléotides conformes à l'invention ; il s'agit alors d'introduire spécifiquement une ou plusieurs mutations dans le polynucléotide étudié, ce qui par le jeu du code génétique entraîne la substitution d'un ou plusieurs acides aminés par un ou plusieurs autres acides aminés dans le polypeptide codé par le polynucléotide muté.
Selon un autre mode de réalisation, on a recours à une technique de mutagenèse par PCR mettant en œuvre une paire d'amorces dont la séquence porte la ou les mutations désirées. Avantageusement, la séquence à muter pourra au préalable être insérée dans un vecteur entre deux séquences connues.
L'intérêt de réaliser ces mutations est non seulement de permettre une étude approfondie du mécanisme catalytique du polypeptide sur la dégradation des carraghénanes mais également d'optimiser ladite activité catalytique du polypeptide sous forme recombinante en vue de son application industrielle.
L'activité λ-carraghénase est vérifiée selon la méthode de Zablackis E. et Parez J. telle que mentionnée ci-dessus.
Une fois que conformément à l'invention le gène a été isolé et identifié, il devient possible de produire l'enzyme λ-carraghénase à l'échelle industrielle sous forme d'un polypeptide recombinant codé par le gène ou l'un des polynucléotides conformes à l'invention.
Il est également possible de produire le polypeptide recombinant sous la forme d'une protéine de fusion correspondant à l'un des polypeptides conformes à l'invention fusionné à un tag, dont notamment une séquence de résidus histidine ou la gluthation- S-transférase (GST) ; un tel tag est capable de se fixer à des matrices d'affinité et, ainsi, de faciliter la détection et la purification du polypeptide recombinant.
La protéine de fusion peut également correspondre à l'un des polypeptides conformes à l'invention fusionné à une séquence signal dont la fonction est de permettre le transfert du polypeptide auquel elle est associée d'un compartiment cellulaire à un autre voire d'être exportée à l'extérieur d'une cellule.
Pour produire à l'échelle industrielle le polypeptide recombinant, qu'il soit codé par Ie gène ou par l'un des polynucléotides conformes à l'invention, successivement
- on sélectionne une cellule hôte choisie dans le groupe comprenant les microorganismes de type bactérie et levure, des cellules eucaryotes animales ou végétales et des cellules de lignées cellulaires, - on introduit dans ladite cellule hôte, par les techniques classiques de génie génétique, le gène ou l'un des polynucléotides conformes à l'invention,
- on exprime le gène ou l'un des polynucléotides, et
- on extrait le polypeptide recombinant obtenu.
Pour introduire dans une cellule hôte un polynucléotide recombinant caractérisé par le fait qu'il comprend le gène ou l'un des polynucléotides conformes à l'invention, on
peut avoir recours aux moyens classiques de transformation, transfection ou de conjugaison.
Avantageusement, ce polynucléotide recombinant peut être introduit dans la cellule hôte au moyen d'un vecteur d'expression ; un tel vecteur est caractérisé par le fait qu'il comprend le gène ou l'un des polynucléotides conformes à l'invention codant pour la λ-carraghénase.
Toutefois, en raison du fait que la λ-carraghénase est une enzyme, la mise en œuvre de la production de sa forme recombinante peut se heurter à des difficultés majeures ; ces difficultés proviennent du système et des conditions d'expression, de la procédure de purification de l'enzyme recombinante ainsi produite et enfin de la possibilité d'une perte de l'activité pour l'enzyme recombinante par rapport à l'enzyme native.
La cellule hôte est mise en culture sous des conditions déterminées notamment de température, de pH et de composition du milieu de culture, supplémenté ou non de composés particuliers qui sont adaptées au système de surexpression choisi ; ces conditions sont optimisés de façon à produire efficacement les volumes souhaités du polypeptide recombinant sous forme soluble.
Le polypeptide recombinant produit par les cellules hôtes en est extrait et purifié.
L'extraction du polypeptide recombinant à partir d'un homogénat de cellules est une procédure délicate d'une part parce que l'on est en présence de plusieurs centaines de protéines ayant des propriétés chimiques relativement proches de celles du polypeptide recombinant recherché et, d'autre part, parce qu'il faut choisir des conditions d'extraction et de purification qui ne dénaturent pas ce polypeptide recombinant.
Dans la mesure où le système d'expression du polypeptide recombinant permet sa surexpression, on peut surmonter la première difficulté.
La seconde difficulté peut être surmontée grâce aux moyens mis en œuvre dans le procédé de production du polypeptide recombinant conforme à l'invention et dont il va être question ci-après.
Après un temps de culture suffisant, les cellules sont centrifugées, puis lysées par des traitements classiques mécaniques ou chimiques.
Les principales approches de lyse des cellules sont les suivantes. Un choc osmotique suffit à briser la membrane cellulaire des cellules fragiles. Ce choc peut être assisté par un léger traitement avec un détergent dont l'avantage est de maintenir les protéines en solution.
Pour certaines cellules bactériennes, toute approche de lyse devra tenir compte de la présence d'une paroi cellulaire très résistante. Ainsi, il est préférable de traiter ces cellules bactériennes avec des enzymes qui détruiront la paroi.
Une méthode plus brutale peut aussi être utilisée. Le traitement aux ultrasons, une lyse mécanique utilisant des billes de verre ou une presse Aminco-French, sont tous des moyens envisageables.
Dans le cas où le polypeptide recombinant s'accumule dans les cellules hôtes sous forme soluble, seule la phase liquide exempte de fragments cellulaires est conservée après centrifugation des cellules lysées.
Cette phase liquide est ensuite soumise à des moyens de purification tels que la dialyse, la précipitation par les sels neutres dont notamment par le sulfate d'ammonium et les chromatographies.
Dans le cas où le polypeptide recombinant s'accumule dans les cellules hôtes en agrégats insolubles appelés corps d'inclusion, ceux-ci sont collectés par centrifugation du lysat cellulaire.
La formation de ces corps d'inclusion présente certains avantages. D'une part, le polypeptide recombinant est protégé des protéases de la cellule hôte dont la fonction
est de dégrader les protéines hétérologues. D'autre part, ces corps d'inclusion facilitent l'étape de purification du polypeptide recombinant produit par la cellule hôte.
Après centrifugation, il est préférable de solubiliser le polypeptide recombinant contenu par les corps d'inclusion. Des agents communément utilisés dans le domaine de la purification des protéines tels que la guanidine-HCl, le SDS ou l'urée 8M sont utilisés pour suspendre les agrégats; ils doivent ensuite être éliminés pour permettre la renaturation du polypeptide recombinant.
Le problème est de jongler entre des conditions assez dénaturantes pour solubiliser les corps d'inclusion, mais aussi assez douces pour ne pas dénaturer irrémédiablement le polypeptide recombinant.
L'une des stratégies permettant d'atténuer l'accumulation de l'enzyme recombinante sous forme de corps d'inclusion, consiste à induire sa sécrétion dans le périplasme ou à l'extérieur de la cellule hôte productrice. Pour ce faire, il convient de fusionner le polypeptide recombinant à une séquence spécifique servant de signal d'exportation du cytoplasme à travers la membrane plasmique voire à travers la paroi bactérienne en faisant appel à la machinerie de sécrétion de la cellule hôte.
Une autre stratégie consiste à muter par des techniques standards certains acides aminés du polypeptide recombinant suspectés d'empêcher le repliement de l'enzyme dans une conformation active de telle sorte qu'ils n'empêchent plus ce repliement.
Une autre stratégie consiste à produire le polypeptide recombinant sous une forme tronquée tout en préservant son activité de dégradation des λ-carraghénanes.
Par « polypeptide tronqué », on désigne un polypeptide plus court que le polypeptide codé par la séquence SEQ ID NO : 1. Par exemple, ce polypeptide tronqué peut être obtenu soit par délétion d'une partie de sa séquence nucléotidique soit par introduction d'une mutation conduisant à un arrêt prématuré de la traduction.
La solubilité d'un polypeptide surexprimé chez E. CoIi peut varier selon les tags qu'on y ajoute par ingénierie génétique; ainsi, il est possible qu'un même polypeptide soit insoluble avec un tag 6-histidines N-terminal et soluble avec un tag GST C-terminal.
La solubilisation de la λ-carraghénase recombinante peut également être facilitée par la présence de son substrat spécifique à savoir les λ-carraghénanes.
Une fois les corps d'inclusion solubilisés dans des conditions dénaturantes, le polypeptide recombinant est renaturé dans sa conformation active.
Avantageusement, la renaturation de l'enzyme solubilisée est initiée par le retrait du ou des agents de dénaturation par dialyse ou dilution.
L'utilisation de protéines particulières dont notamment de molécules chaperonnes, de protéines foldases ou d'anticorps monoclonaux, permettent d'augmenter le taux d'enzyme correctement repliée.
Après avoir produit le polypeptide recombinant et avant d'avoir restauré sa conformation active, il est peut être souhaitable de le purifier.
Avantageusement, les techniques de purification les plus couramment utilisées font appel à des méthodes chromatographiques mises en œuvre successivement, dont notamment la chromatographie par filtration sur gel, la chromatographie d'interaction hydrophobe, la chromatographie d'affinité ou la chromatographie échangeuse d'ions.
Souvent, entre ces étapes successives de purification, il convient d'éliminer les sels ou produits utilisés dans les chromatographies. On utilise pour ce faire une dialyse et/ou une ultrafiltration.
Chaque étape de purification doit être suivie de près pour vérifier que les fractions protéiques conservées pour être utilisées dans l'étape suivante présentent la protéine dont la taille attendue est de 100 kDa .
Suite à l'étape de renaturation de la protéine, on peut envisager une étape supplémentaire de purification visant à séparer la faction active de la fraction inactive.
En général, une simple centrifugation est suffisante. Toutefois, les techniques de chromatographie telles que celles détaillées dans la description de la demande peuvent également être utilisées.
De préférence, la λ-carraghénase recombinante est conservée dans des conditions qui la protègent de sa dégradation.
Lorsque l'enzyme est conservée à 40C dans un tampon à base de 25 mM de PBS de pH 7.2 comprenant 2 M de NaCl, elle garde une activité catalytique pendant plusieurs mois.
L'invention vise un procédé de préparation d'oligocarraghénanes de type λ, caractérisé par le fait qu'il comporte une étape d'hydrolyse mettant en œuvre l'un des polypeptides recombinants conformes à l'invention.
Typiquement, lorsque les λ-carraghénanes proviennent de l'espèce Gigartina skottsbergii, l'analyse électrophorétique des produits de digestion enzymatique révèle deux espèces majoritaires.
Ces produits sont caractéristiques de l'activité de dégradation des λ-carraghénanes par la λ-carraghénase.
Toutefois, les profils éléctrophorétiques des produits de digestion sont différents en fonction de la source du substrat.
Par exemple, les produits générés après digestion des λ-carraghénanes provenant de l'espèce Gigartina pistillata sont plus hétérogènes que ceux obtenus après digestion du des λ-carraghénanes de l'espèce Gigartina skottsbergii.
Par ailleurs, le fait que l'enzyme soit responsable d'une diminution de la viscosité des carraghénanes de type λ suggère une attaque endolytique des polysaccharides.
Certains des oligocarraghénanes de type λ ont été reconnus comme étant des éliciteurs de réactions de défense chez les plantes supérieures.
Par conséquent, l'invention vise également l'utilisation pour un traitement des végétaux supérieurs de ces oligocarraghénanes de type λ.
L'invention porte également sur une composition phytopharmaceutique utilisée pour la protection des plantes comprenant une quantité efficace d'oligocarraghénanes de type λ, obtenues après l'hydrolyse des λ-carraghénanes par l'un des polypeptides ou enzyme conformes à l'invention.
L'invention pourra être encore mieux comprise à l'aide de l'exemple non limitatif décrit ci-après ; cet exemple est relatif à l'identification du gène codant pour la λ-carraghénase, à sa préparation, au procédé de préparation de la λ-carraghénase recombinante ainsi qu'à l'utilisation de l'enzyme λ-carraghénase pour la dégradation des polysaccharides de type carraghénane.
Exemple
Dans un premier temps, on isole et on purifie à partir de bactéries P. carrageenovora l'enzyme responsable de l'activité λ-carraghénase.
Des bactéries P. carrageenovora sont mises en culture dans 5 1 de milieu Zobell pendant 48 heures. Après centrifugation du milieu de culture à 10 000 g pendant 30 minutes, le surnageant exempt de cellules est concentré par ultrafiltration tangentielle sur une membrane en polysulfone à 30 000 Da de porosité. On obtient un volume de rétentat de 100 ml que l'on dilue dans un volume de 400 ml de tampon qui est à base de 25 mM de PBS de pH 7.2 et de 2 M de NaCl.
On procède ensuite à une précipitation différentielle au sulfate d'ammonium : la fraction entre 30 et 70 % de saturation du sulfate d'ammonium est conservée et
centrifugée à 20 00ι ~ ° minutes.
Le précipité est suspendu 10 ml de tampon A puis dessalé par dialyse pendant 12 heures dans un volume de 5 1 de tampon A. On obtient un volume de 12 ml de fraction protéique.
Pour isoler la λ-carraghénase des autres protéines de la fraction protéique, on utilise successivement 3 chromatographies différentes. On utilise le tampon A pour équilibrer les colonnes et éluer les échantillons de ces colonnes.
Dix ml de la fraction protéique sont injectés sur une colonne Sephacryl S-200 (2,5/76) puis élue à raison de 1 ml/min. A l'issue de cette chromatographie, on sélectionne des fractions sur la base de leur activité de dégradation des λ-carraghénanes. Ces fractions sont regroupées en une fraction unique qui est d'environ 30 ml.
Cette fraction unique ainsi obtenue est ensuite injectée sur une colonne de chromatographie d'interaction hydrophobe Phényl-Sepharose (6 FF colonne 2,4/14). Les fractions présentant une activité de dégradation des λ-carraghénanes sont éluées à raison de 1 ml/min pendant l'étape de lavage et regroupées en un échantillon unique représentant un volume de 44 ml.
On concentre ensuite l'échantillon de 44 ml jusqu'à 2 ml par ultracentrifugation sur une membrane à 10 000 Da de porosité.
Un volume de 200 μl de Pultrafïltrat ainsi obtenu est injecté sur une colonne de chromatographie sur gel de filtration (Superdex 200HR 1,0/30). L'élution est réalisée à raison de 0,5 ml/min.
Les fractions actives et pures ainsi éluées peuvent être conservées dans le tampon A à 4°C pendant plusieurs mois sans que l'on constate une perte de l'activité enzymatique.
Pour chaque fraction protéique récoltée à l'issue de la dernière chromatographie, on détermine la concentration de protéines selon une méthode colorimétrique standard bien connue de l'homme du métier (Bradford assay).
Le protocole de purification exposé ci-dessus permet d'obtenir une fraction pure à l'homogénéité de λ-carraghénase. Cette fraction est analysée par électrophorèse sur gel SDS-PAGE. On obtient une bande correspondant à l'enzyme λ-carraghénase dont le poids moléculaire est de 100 kDa. Cette bande est excisée du gel. L'enzyme contenue dans cette bande est ensuite soumise à une digestion par l'endoprotéase lys-C. Cette hydrolyse génère des peptides internes qui sont alors micro-séquencés selon la méthode de dégradation d'Edman. Deux microséquences internes et une microséquence N-terminale sont obtenues.
La microséquence N-terminale se lit : SQSAΠCSIETNRTITK
Les deux microséquences internes se lisent : YSYYDMWK LSAGYDNSDGIS
C'est à partir de ces microséquences que sont conçues et synthétisées les amorces de PCR permettant la synthèse de la sonde.
L'activité de dégradation des λ-carraghénanes des fractions protéiques récoltées lors des différentes étapes de purification est mise en évidence par le protocole suivant.
Les réactions d'hydrolyse sont réalisées à une température de 30°C et à un pH de 6,5. Le milieu de réaction se compose de tampon à base de 0,1 M de phosphate de sodium de pH 6,5 comprenant 0.1 M de NaCl et 0,2 % de λ-carraghénanes (w Iv).
Les λ-carraghénanes utilisés pour ces réactions enzymatiques proviennent de Gigartina acicularis, Gigartina pistillata ou de Gigartina Skottsgbergii.
Après digestion des λ-carraghénanes, les produits de digestion sont analysés par électrophorèse sur gel de polyacrylamide-carbohydrate (C-PAGE) selon le protocole de Zablackis E. et Perez J. [A partially pyruvated carrageenan from Hawaiian Grateloupia fîlicina (Cryptonemiales, Rhodophyta) 1990 Bot. Mar. 33, 273-276].
Un volume de 100 μl du susdit milieu de réaction est incubé avec 5 μl d'une des susdites fractions protéiques pendant 1 heure à température ambiante. Le résultat de l'hydrolyse enzymatique est analysé par électrophorèse sur gel de polyacrylamide (à 6 % pour le gel de concentration et 27 % pour le gel de séparation) dans un tampon de pH 8,7 comprenant 50 mM de Tris/H+ et 2 mM d'EDTA.
Après migration, les sucres chargés sont fixés et colorés dans le gel avec une solution de 0,5 % de bleu alcian (Fluka) pendant 10 minutes. Après plusieurs rinçages à l'eau distillée jusqu'à ce que le gel devienne incolore, ce dernier est soumis à une coloration au nitrate d'argent 0.4 % pendant 10 min puis rincé à l'eau distillée. La coloration est révélée par une solution de carbonate de sodium 7 % (m/v) additionnée de 0.1 % (v/v) de formaldéhyde à 37 % et stoppée avec une solution d'acide acétique à 5 % (v/v).
La coloration du gel révèle le profil de électrophorétique de digestion des oligocarraghénanes générés après l'hydrolyse des λ-carraghénanes par la fraction protéique comprenant le polypeptide. Les profils de électrophorétique de digestion obtenus permettent d'établir que la fraction protéique analysée présente une activité de dégradation des λ-carraghénanes.
Pour isoler et cloner le gène codant pour la protéine λ-carraghénase, on construit une banque d'ADN génomique de la souche bactérienne P. carrageenovora.
L'extraction de PADN génomique de la souche P. carrageenovora est effectuée par les méthodes classiques de biologie moléculaire. Les cellules bactériennes sont mises en culture jusqu'à saturation dans un milieu Zobell puis sont récoltées par centrifugation. Elles sont ensuite lysées chimiquement en présence de lyzozyme et de SDS. Les acides nucléiques du lysat sont alors soumis à une extraction au phénol- chloroforme, suivie d'une précipitation à l'éthanol. Les ARNs sont éliminés par traitement à la RNAse et l'ADN génomique est repurifié par précipitation à l'éthanol puis conservé dans un tampon Tris-EDTA.
L'ADN génomique est ensuite partiellement digéré par l'enzyme de restriction Sau3AI puis fractionné dans un gradient de saccharose. Les fragments d'ADN obtenus d'une
taille de 4 à 10 kb sont clones dans le site de restriction BamHI du vecteur pAT153. Les vecteurs recombinants sont introduits dans des cellules hôtes de la souche bactérienne E. CoIi DH5α. Les cellules bactériennes ainsi transformées sont mises en culture puis étalées sur des boites de Pétri comprenant un milieu de culture solide ; ceci afin d'isoler les clones bactériens. La banque génomique ainsi construite comprend approximativement 6000 clones.
Parallèlement, on construit une sonde oligonucléotidique pour permettre le criblage de la banque génomique.
La sonde est obtenue en réalisant une réaction de polymérisation en chaîne (PCR) sur l'ADN génomique extrait de la souche P. carrageenovora à l'aide de deux amorces dégénérées dont les séquences nucléotidiques se lisent comme suit :
- amorce amont complémentaire d'une séquence à l'extrémité 5' de la séquence à amplifier : AAr AGy ATh GAr ACn AA
- amorce aval complémentaire d'une séquence à l'extrémité 3' de la séquence à amplifier : TTC CAC ATr TCr TAr TA
L'ADN correspondant à la sonde ainsi amplifié est purifié par électrophorèse sur gel d'agarose puis inséré dans un vecteur de clonage (vecteur de clonage TOPO TA Cloning, hivitrogen) ; ce vecteur recombinant est lui-même amplifié et maintenu dans la souche bactérienne DH5α de E.Coli. L'insert est séquence par séquençage automatique.
L'insert qui a une longueur de 944 nucléotides, comporte la séquence nucléotidique SEQ ID NO : 3 représentée à la figure 3.
On prépare ensuite la sonde par excision de l'insert du vecteur recombinant à l'aide de l'enzyme de restriction EcoRI. Après purification sur gel d'agarose, ce fragment sert de matrice à une réaction de polymérisation permettant la synthèse d'oligonucléotides simple brin complémentaires ayant incorporé du dCTP marqué au [α32P]. Le marquage
radioactif de la sonde est réalisé à l'aide du kit Megaprime DNA labelling system (Amersham Pharmaciabiotech). La sonde est purifiée sur colonne Microspin S-200HR (Amersham Pharmaciabiotech) afin d'éliminer les dCTP marqués non incorporés.
A l'aide de cette sonde marquée, on procède au criblage de la banque génomique par hybridation in situ pour détecter les clones positifs.
Le criblage est réalisé selon la procédure développée par Sambrook et Russel [Molecular cloning : a laboratory manual, third édition, CoId Spring Harbor Laboratory Press, CoId Spring Harbor, New York, 1, 1126-1128, 1135-1142 (2001)].
Chaque colonie bactérienne issue d'un clone bactérien est transférée de la boite de Pétri sur une membrane de nitrocellulose (Hybond-N+, Amersham Pharmaciabiotech).
Ces colonies sont alors traitées selon un protocole du type désigné dans la technique par « colony blotting » ; il s'agit d'un protocole standard préconisé par le fabricant de la membrane. Il est basé sur une lyse alcaline des colonies suivie d'une neutralisation, d'un lavage et d'une fixation de l'acide nucléique sur la membrane par traitement thermique à 80°C pendant au moins 2 heures.
L'hybridation de la sonde sur les membranes suit également un protocole standard préconisé par le fabricant. La membrane est immergée à 65°C dans une solution de préhybridation comprenant SSPE 5X5 0,5 % SDS, solution DENHARDT 5X et 100 μg/ml d'ADN de sperme de saumon dénaturé. L'étape d'hybridation proprement dite se déroule à 650C dans une solution de même composition mais sans DENHARDT à laquelle on ajoute la sonde marquée. Les trois lavages successifs qui suivent se font dans des solutions comprenant 0,1 % de SDS et 2 fois concentrée de SSPE, puis 0,1 % de SDS et 1 fois concentrée de SSPE, et finalement 0,1 % de SDS et 0,1 % de SSPE. Enfin, les membranes sont séchées puis lues sur Storm system840 (Molecular Dynamics) après exposition sur écran phosphore.
Pour chaque clone bactérien positif, le vecteur recombinant est extrait et purifié par centrifugation isopycnique sur gradient de chlorure de césium.
Parmi les 6000 clones que renferme la banque, on a sélectionné 3 clones respectivement dénommés pAT1531a38, pAT1531a45 et pAT1531a53 ; ces clones ont chacun un insert capable de s'hybrider à la sonde ; leurs tailles respectives sont de 3,8 kb, 6,1 kb et 5 kb.
Afin d'établir leur carte de restriction, chacun de ces inserts a été digéré par une ou plusieurs enzymes de restriction dont notamment CIaI, EcoRI, EcoRV, HinDIII, Ndel, PstI, Pvul, Sacl, Sali et Sspl.
Chaque digestion est alors analysée par électrophorèse sur gel agarose.
L'analyse des cartes de restriction a permis de déduire que Pinsert du plasmide recombinant pAT1531a45 renferme la séquence codante entière du gène de la λ-carraghénase.
Par ailleurs, il a été établi qu'il existe un seul locus pour la λ-carraghénase au sein du génome de P. carrageenovora.
L'insert de pAT1531a45 a été séquence par séquençage automatique à l'aide d'un séquenceur 16 capillaire ABI Prism 3100 Genetic Analyser (Applied Biosystems) et selon la méthode appelée « marche sur le chromosome » permettant une progression pas à pas de la séquence par chevauchement de chaque nouvelle lecture avec la précédente. Les réactions de séquences sont obtenues via le kit BigDye Terminator
V3.0 (Abi Prism, Applied Biosystems) qui répond au principe de marquage fluorescent terminal indépendant pour les quatre bases.
L'ensemble des séquençages a été répété 5 fois de façon à lever toute ambiguïté.
Les différentes séquences obtenues ont été alignées et organisées au sein d'un contig. L'insert du clone pAT1531a45 couvrant 5665 nucléotides renferme le gène entier codant pour la λ-carraghénase.
Le cadre de lecture ouvert du gène a ensuite été déduit à partir de ce contig ; la séquence codante pour la λ-carraghénase couvre 2826 nucléotides.
Elle est représentée par la séquence nucléotidique SEQ ID NO : 1.
On a ensuite déterminé la séquence peptidique du gène isolé et identifié codant pour la λ-carraghénase.
Par le jeu du code génétique, une séquence peptidique a été déduite de la séquence nucléotidique du gène. Elle est représentée par la séquence SEQ ID NO : 2.
Une analyse comparative, effectuée au moyen des programmes BLASTp et PSI- BLAST (à partir du serveur du NCBI), entre la séquence peptidique SEQ ID NO : 2 et les séquences peptidiques disponibles dans la banque GENBANKnr, a révélé que près de 75 % de la séquence SEQ ID NO : 2 ne présentent aucune similitude significative avec les autres séquences peptidiques.
Toutefois, les 80 acides aminés C-terminaux de SEQ ID NO : 2 présentent 38 % d'identité avec la région C-terminale d'une cyclomaltodextrinase, une glycoside hydrolase provenant de la bactérie Thermotoga maritima.
Pour produire l'enzyme λ-carraghénase recombinante, on peut procéder comme suit.
La région codante du gène codant pour la λ-carraghénase est amplifiée par PCR à partir de l'ADN plasmidique du pAT1531a45 en utilisant la polymérase haute fidélité (Platinum Pfic DNA polymérase, Invitrogen) ainsi que des amorces comprenant une séquence complémentaire à celle du gène ou de l'un des polynucléotides recherchés.
Pour permettre le clonage du produit de PCR dans le vecteur de clonage pDONR201 (Gateway™, Invitrogen), les amorces utilisées sont flanquées d'une séquence spécifique à ce système de clonage.
La séquence nucléotidique de l'amorce amont utilisée pour amplifier la région codante
du gène codant pour la λ-carraghénase se lit :
5' GGGGACAAGTTTGTAC AAAAAA GCA GGC TTC TCT CAATCG GCT ATTAAAAGTATTGAAACAAACCGA3'
La séquence nucléotidique de l'amorce aval utilisée pour amplifier la région codante du gène codant pour la λ-carraghénase se lit :
5' GGGGAC CAC TTT GTA CAA GAA AGC TGG GTC CTA CAA TGT TGA ACTTTGCATGTTTCTAAGGTC3'
Le produit de PCR est donc clone par recombinaison homologue dans le vecteur de clonage pDONR201 (Gateway™, Invitrogen). Les vecteurs recombinants obtenus sont ensuite amplifiés et maintenus après transformation dans la souche E coli DH5α. La séquence de l'insert est vérifiée. L'insert dont la séquence correspond à celle du gène ou à celle de l'un des polynucléotides est ensuite sous-cloné en phase dans le vecteur d'expression pDEST17 (technologie Gateway™, Invitrogen). Dans ce vecteur, l'insert est sous le contrôle du promoteur de l'enzyme T7 polymérase permettant une transcription importante de cet insert dans une souche bactérienne adéquate. En amont de l'insert, on retrouve un tag de 6 histidines qui permettra une purification facilitée du polypeptide recombinant.
Des cellules de la souche bactérienne E. Coli BL21 pLysS (Novagen) sont transformées par les vecteurs recombinants pDEST17.
Les cellules bactériennes ainsi transformées sont cultivées dans un milieu M9 consistant en 6g/l de Na2HPO4, 3 g/1 K2HPO4, 0,5 g/1 NaCl, 1 g/1 NH4C1, 0,246 g/1 MgSO4 7H2O et 15 mg/1 CaC12 2H2O supplémenté avec 100 μg/ml d'ampicilline et de 35 μg/ml de chloramphenicol dans un incubateur Bioflow 3000 à 37°C sous atmosphère contrôlée. La croissance des cellules bactériennes s'effectue jusqu'à la phase de croissance exponentielle (DO de 0.8 à 600 nm). La production du polypeptide recombinant est induite par addition d'isopropyl-1-thio-β-D-galactopyranoside à une concentration de 1 mM.
Pendant l'induction, les cellules bactériennes sont incubées à une température de 200C pendant 6 heures.
L'extraction des corps d'inclusion à partir de la culture bactérienne induite se fait à l'aide du réactif à base d'un mélange de détergents non ionique commercialisé sous le nom BugBuster® Protein Extraction Reagent (Novagen). La procédure conforme à celle préconisée par le fabricant se déroule de la façon suivante.
Les cellules bactériennes sont récoltées par une centrifugation de 10 min de à 10 000 g. Le culot cellulaire est ensuite resuspendu à température ambiante dans un volume minimum de 5 ml du susdit réactif BugBuster® par gramme de culot
Avantageusement, on ajoute à cette suspension cellulaire lμl/ml d'une nucléase (commercialisée sous le nom Benzonase® Nucléase par Novagen), 1 KU/ml de Lysozyme (Novagen) et lμL/ml d'un cocktail d'inhibiteurs de diverses protéases (Sigma).
La suspension est ensuite soumise à une légère agitation pendant 10 à 20 min.
La fraction insoluble contenant les corps d'inclusion est obtenue par centrifugation à 16 000 g pendant 20 min à 4°C. Le culot obtenu est alors complètement resuspendu dans la solution précédente pour y être lavé pendant 5 min à 4°C sous légère agitation. Ce volume est alors additionné de 6 volumes d'une dilution 1Ox du réactif commercialisé sous le nom BugBuster® à 4°C puis légèrement vortexé pendant 1 min.
Les corps d'inclusion sont alors récoltés après 15 min de centrifugation à 5 000 g à 4°C. Ce culot est repris par vortexage doux dans un volume de réactif commercialisé sous le nom BugBuster® à 4°C. Cette étape de centrifugation/lavage est répétée deux fois.
Finalement, la dernière suspension est centrifugée à 16000 g pendant 15 min à 4°C : seul le culot est conservé.
Les corps d'inclusion ainsi purifiés contenant le polypeptide recombinant sont
solubilisés dans un tampon de 50 mM de Tris de pH 8 supplémenté par 8 M d'urée.
On utilise le polypeptide recombinant ainsi obtenu pour hydrolyser les λ-carraghénanes provenant de l'espèce Gigartina skottsbergii.
Le polypeptide recombinant adopte sa conformation active lorsqu'il est mis en présence de son substrat sans qu'une étape de renaturation ne soit requise.
Les conditions expérimentales sont les suivantes :
La réaction d'hydrolyse se fait par ajout de 2 % (v/v) de cette suspension d'enzyme recombinante dans le milieu de réaction précédemment décrit. La réaction est réalisée à 300C sur une durée de 48 heures.
L'analyse par C-page du profil électrophorétique des produits de digestion des λ-carraghénanes provenant de l'espèce Gigartina skottsbergii par le polypeptide recombinant est conforme à celui obtenu par l'enzyme native.
Il s'ensuit que le polypeptide recombinant a une activité λ-carraghénase.