Production simultanée des radio-isotopes
99-Mo et 133-Xe.
La présente invention concerne la production et l'isolement simultanés des radio-isotopes 99-molybdène et 133-xénon. Des cibles comprenant de l'aluminium et de l'uranium qui contient du 235-U sont irradiées, puis sont dissoutes dans de l'acide sulfurique en présence d'une quantité suffisante de sulfate de mercure en vue de la volatilisation du 133-Xe. Le 99-Mo est isolé de la solution.
Etat connu de la technique
Des efforts considérables ont été consacrés au cours des dernières années au développement de techniques pour la production des radio-isotopes médicaux 99molybdène et 133-xénon. Le 99-molybdène (99-Mo) est utilisé en médecine nucléaire parce qu'il produit un élément de filiation, le 99m-technétium, qu'on utilise comme traceur radioactif pour l'exploration du cerveau, du foie, des os et des reins, de même que pour l'étude de la fonction cardiaque. Le 133-xénon (133-Xe) est utilisé pour l'imagerie dans l'étude de la ventilation pulmonaire. Un procédé qui a été mis au point à l'origine pour produire le 99-Mo ou le 133-Xe a été d'irradier du 235-uranium (U-235) dans un réacteur nucléaire pour induire la fission de l'uranium, puis d'extraire par traitement chimique le 99-Mo ou le 133-Xe de l'uranium irradié.
Un procédé chimique pour extraire de l'uranium irradié des quantités de 99-Mo de l'ordre du curie a été décrit par L.G. Stang Jr.., Coordinator, "Manual of Isotope Production Processess in Use at Brookhaven National Laboratory", BNL-864 (T-347) 53, août 1964. Suivant ce procédé, la cible irradiée qui consiste en
235-U enrichi à 93%, allié à de l'aluminium (UA1), est dissoute dans de l'acide nitrique sous catalyse par le nitrate mercurique, puis la solution est passée sur une colonne d'alumine qui adsorbe sélectivement le 99-Mo qui est l'un des produits de fission. L'uranium et les produits de fission non adsorbés sont séparés de l'alumine par lavage de celle-ci avec de l'acide nitrique à 1 mole par litre, de l'eau et de l'hydroxyde d'ammonium à 0,01 mole par litre.
Le 99-Mo est ensuite séparé de l'alumine par élution au moyen d'hydroxyde d'ammonium à 1 mole par litre. Dans ce procédé, le 133Xe gazeux est dégagé de la cible irradiée pendant la dissolution de cette dernière. En raison des réactions de l'acide nitrique avec l'uranium et l'aluminium métalliques, des oxydes d'azote toxiques sont également dégagés en phase gazeuse et contaminent le 133-Xe. Jusqu'à présent, les tentatives d'épuration du 133-Xe dégagé dans ces installations de préparation du 99-Mo n'ont pas eu de succès. A cause de la difficulté d'opérer la séparation entre le 133-Xe et les oxydes d'azote, le 133-Xe à usage médical est produit couramment par dissolution des cibles dans de l'hydroxyde de sodium au cas où des cibles de UAl sont utilisées.
Du fait que la production du 99-Mo et du 133-Xe par des procédés distincts manque d'efficacité, deux techniques de production simultanées du 99-Mo et du 133-Xe à partir de la même cible ont été mises au point, à savoir par modification du procédé chimique dans un cas
(R. Hecq, J. Salacz et L. Turcato, "Procédé de fabrication de 99-Mo et 133-Xe", brevet belge 835.424,
10 novembre 1975); et par développement d'une nouvelle cible et d'un nouveau procédé chimique dans l'autre cas
(H. Arino, H.H. Kramer, J.J. McGovern et A.K. Thornton, "Primary Target for the Production of Fission Products in a Nuclear Reactor and Process for Préparation", brevet canadien n[deg.] 935.943, 23 octobre 1973, Société Union Carbide).
Dans le premier cas, des cibles de UAl, qui contiennent de l'uranium enrichi à plus de 90% en 235U, sont dissoutes dans de l'hydroxyde de sodium pour la collecte du 133-Xe, puis la solution caustique est :
(i) filtrée pour la séparation de l'uranium et des
produits de fission non dissous;
(ii) acidifiée au moyen d'acide nitrique concentré et ensuite
(iii) passée sur une colonne d'alumine pour la collecte du 99-Mo.
Ce mode opératoire est compliqué et des volumes relativement grands de déchets radioactifs liquides sont produits et doivent être évacués.
Dans le second cas, des cibles produites par dépôt d'oxyde d'uranium ou d'uranium métallique (contenant à nouveau de l'uranium enrichi à plus de 90% en
235-U) sur la face intérieure d'un tube en acier inoxydable sont irradiées dans un réacteur nucléaire, après quoi les cibles sont traitées en vue de l'isolement du 133-Xe et du 99-Mo de la façon suivante :
(i) les cibles sont ventilées pour la collecte du
133-Xe, puis
(ii) l'oxyde d'uranium ou le métal est dissous dans
des mélanges d'acide sulfurique et d'acide nitrique ou d'acide sulfurique et de peroxyde d'hydrogène, après quoi
(iii) la solution est passée sur une colonne de
charbon enrobé d'argent pour la collecte du 99Mo.
Ce procédé est relativement simple et conduit à des volumes relativement faibles de déchets radioactifs liquides, mais les limitations dues au dépôt de l'uranium sur les surfaces sont telles qu'il est probable que ces cibles et ce procédé ne sont applicables que si de l'uranium enrichi à plus d'environ 90% en 235-U est utilisé pour la fabrication des cibles. De l'uranium tellement enrichi en 235-U peut devenir indisponible dans le futur si les tentatives de mise au point de combustibles contenant de l'uranium enrichi à moins de
20% en 235-U pour les réacteurs de recherche sont couronnées de succès. Une baisse de l'enrichissement en
235-U depuis plus de 90% jusqu'au-dessous de 20% pour de tels combustibles a été envisagée comme affaiblissant les risques de détournement du combustible à des fins non pacifiques.
Pour surmonter les inconvénients décrits cidessus, il serait souhaitable de mettre au point un procédé qui
(i) permette de produire simultanément du 133-Xe et
du 99-Mo;
(ii) puisse être appliqué pour des cibles en alliage
uranium-aluminium contenant de l'uranium d'un enrichissement très variable en 235-U;
(iii) consomme moins d'acide et en concentration
beaucoup plus faible que les autres procédés, de manière à être relativement simple, sûr et peu onéreux, et
(iv) produise des volumes relativement faibles de
déchets radioactifs liquides.
Aperçu de l'invention
Le procédé de l'invention comprend la dissolution de cibles qui sont faites, par exemple, d'alliages d'aluminium et d'uranium ou bien de U02 et de poudres d'alliages combustibles, comme U3Si, US3i2 ou U3SiAl (ou de mélanges de ceux-ci) en dispersion dans une matrice d'aluminium, dans de l'acide sulfurique sous catalyse par le sulfate de mercure. Au cours de ce premier stade, l'aluminium se dissout et le 133-Xe se dégage. Le 133-Xe, qui est sensiblement exempt d'impuretés toxiques quelconques, est recueilli suivant des techniques classiques, qui peuvent comprendre une adsorption sur charbon activé refroidi. Du fait que la vitesse de dissolution de l'uranium (en particulier de U3Si, U3Si2 ou U3SiAl) dans l'acide sulfurique est faible, la solution peut contenir de l'uranium et des produits de fission non dissous.
La solution peut être filtrée pour la collecte de l'uranium et des produits de fission non dissous ou bien les solides non dissous peuvent être. mis en solution par apport d'agents oxydants dans le récipient de dissolution pendant (par exemple lors de l'utilisation du peroxyde d'hydrogène) ou après (par exemple lors de l'utilisation de l'acide nitrique) la dissolution de l'aluminium en vue de la collecte du 133-Xe. Le 99-Mo peut être extrait de la solution finale suivant des technique classiques qui pourraient comprendre une sorption sur alumine ou une sorption sur charbon enrobé d'argent. Aucune dilution ni aucun ajustement du pH de la solution ne sont nécessaires avant l'isolement du 99-Mo.
L'invention a dès lors pour objet un procédé de production simultanée de 99-Mo et de 133-Xe, suivant lequel :
(a) on irradie au moyen de neutrons une cible comprenant de l'aluminium et de l'uranium qui contient du 235-U;
(b) on dissout au moins l'aluminium de la cible irradiée dans de l'acide sulfurique en présence de sulfate mercurique;
(c) on recueille le 133-Xe volatilisé pendant le stade de dissolution (b);
(d) si nécessaire, on achève la dissolution de l'uranium de la cible, et
(e) on isole le 99-Mo dissous hors de la solution.
Le stade de dissolution (d) progresse lentement, mais si nécessaire il peut être accéléré par addition d'un agent oxydant, comme le peroxyde d'hydrogène, l'acide nitrique ou l'ozone.
DESCRIPTION DETAILLEE ET EXEMPLES.-
Un intervalle approprié de concentration en acide sulfurique s'étendrait d'environ 0,5 à environ 6 moles de H2S04 par litre, mais des concentrations plus basses ou plus élevées conviendraient aussi. Aux concentrations inférieures, les vitesses de réaction sont faibles et pourraient ne pas convenir en pratique.
<EMI ID=1.1>
<EMI ID=2.1>
bilité de Al2(S04)3 s'échelonne de 300 g par litre dans l'eau froide à 1.000 g par litre dans l'eau chaude, mais lorsque la concentration en ions S04-- augmente, la solubilité diminue. De même, si des concentrations élevées en acide sulfurique étaient utilisées, les solutions devraient probablement être diluées jusqu'à environ 1 à 2 moles par litre pour l'isolement du 99-Mo et on aboutirait ainsi à devoir faire passer dans une colonne de grands volumes de solution et à devoir évacuer de plus grands volumes de déchets.
Le volume de la solution d'acide sulfurique, rapporté à la cible, est de préférence d'environ 10:1 à environ 100:1 v/v, mais n'est pas critique.
Un intervalle large pour la concentration en sulfate mercurique s'étend d'environ 0,005 mole HgS04 par litre jusqu'à la saturation. Habituellement une concentration s'élevant jusqu'à environ 0,1 mole HgS04 par litre est adéquate parce que les concentrations plus élevées n'accélèrent pas notablement la dissolution. En l'absence de sulfate mercurique, les vitesses de dissolution se sont révélées négligeables.
Des quantités appropriées d'agent oxydant, lorsque son apport est nécessaire ou souhaitable au stade (d), peuvent être, par exemple, d'environ 0,5 à 5 moles de peroxyde d'hydrogène par litre ou d'environ 1 à 10 moles de HN03 par litre, ou une quantité équivalente d'un autre agent oxydant.
La quantité de 235-U initialement en présence dans la cible peut varier beaucoup et habituellement la quantité de 235-U se situe dans l'intervalle d'environ
15 à 95% en poids de l'uranium. De préférence, l'alumi-nium est présent en quantité d'environ 30 à 90% en poids, sur base de la cible complète.
La cible peut comprendre, par exemple, un alliage uranium-aluminium ou un alliage uranium-silicium-aluminium. En variante, du dioxyde d'uranium ou un alliage combustible en poudre peut être dispersé dans une matrice d'aluminium ou d'alliage d'aluminium. Des
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U3SiAl. Les alliages U3Si et U3Si2 peuvent être dispersés dans de l'aluminium. Les alliages d'aluminium formant matrice qui contiennent environ 50 à 75% en poids de USiAl (Al pour le reste) sont d'un intérêt particulier comme combustibles "faiblement enrichis", c'est-à-dire pour du 235-U enrichi à environ 20%.
Le 133-Xe volatilisé qui doit être recueilli est de préférence adsorbé sur un adsorbant solide convenant à cette fin. Des adsorbants préférés sont notamment le charbon activé ou un adsorbant inorganique, comme le tamis moléculaire 5A ou la silice. Avantageusement, l'agent adsorbant est refroidi jusqu'à une température d'environ -78 à 30[deg.]C pour faciliter la condensation/adsorption. Le 133-Xe peut être désorbé suivant des techniques traditionnelles, comme la mise sous vide, le chauffage et/ou le passage d'un gaz inerte tel que l'hélium sur l'agent adsorbant.
Le 99-Mo dissous peut être adsorbé sur des adsorbants solides sélectionnés comme l'alumine, le charbon enrobé d'argent ou l'alumine enrobée d'argent. La désorption du 99-Mo et le traitement ultérieur peuvent être effectués suivant des techniques connues, comme celles décrites dans le manuel précité de L.G. Stang Jr.
La solution résiduelle du stade (e) peut être soumise à un traitement visant à isoler les autres produits de fission ou le 235-U non fissionné, si la chose est souhaitée.
Si de faibles quantités d'uranium ou d'alliage d'uranium échappent à la dissolution, elles peuvent être recueillies et recyclées au stade (b) ou (d).
Le coût de la production du 133-Xe devrait être sensiblement inférieur au coût de fabrication actuel. Le présent procédé est, à la connaissance de la Demanderesse, le seul permettant de produire simultanément le 99-Mo et le 133-Xe au départ de cibles contenant de l'uranium faiblement enrichi. Lorsque de l'uranium fortement enrichi n'est pas disponible, l'importance industrielle du procédé peut être majeure.
Les exemples suivants sont illustratifs.
(a) Au cours de huit expériences, dont les résultats sont repris au tableau I sous n[deg.] 1-8 ci-après, on dissout des échantillons de poids divers prélevés sur des cibles non irradiées contenant du siliciure en dispersion de la constitution Al-62,4% en poids USi *A1
(où USi *A1 représente U-3,2% p Si-3,0% p Al) contenant de l'uranium enrichi à 20% en poids en 235-U dans différentes quantités de H2S04, H2S04 et H202 ou H2S04 et HN03 en présence de HgS04 comme catalyseur. Comme il ressort du tableau I, les durées de dissolution s'échelonnent de 1,5 à 2,0 heures. Au cours des expériences 1-3 et 6-8, de faibles quantités de U3Si restent non dissoutes.
(b) Au cours de deux expériences (n[deg.] 9 et 10), on dissout des échantillons de Al-21% U qui contiennent de l'uranium enrichi à 93% en poids en 235-U dans du H2S04 avec du HgS04 comme catalyseur.
Les durées de dissolution sont d'environ 1,5 heure sans qu'il subsiste de précipité (voir tableau I).
En l'absence du sulfate mercurique, la dissolution n'a sensiblement pas lieu. Comme l'aluminium est entièrement dissous lors de ces expériences, le 133-Xe qui s'y trouve serait dégagé et volatilisé à l'état sensiblement exempt d'impuretés gênantes et pourrait être recueilli comme décrit ci-dessus. Lors de la mise en oeuvre d'un produit irradié, le produit de fission
99-Mo se dissouderait avec l'uranium et pourrait être isolé comme décrit ci-dessus.
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<EMI ID=5.1>
REVENDICATIONS
1.- Procédé de production simultanée de 99-Mo et 133-Xe, caractérisé en ce que :
(a) on irradie au moyen de neutrons une cible. comprenant de l'aluminium et de l'uranium qui contient du 235-U;
(b) on dissout au moins l'aluminium de la cible irradiée dans de l'acide sulfurique en présence de sulfate mercurique;
(c) on recueille le 133-Xe volatilisé pendant le stade de dissolution (b);
(d) si nécessaire, on achève la dissolution de l'uranium de la cible, et
(e) on isole le 99-Mo dissous hors de la solution.