Procédé d'isomérisation de mononitriles insaturés ramifiés en mononitriles insaturés linéaires.
L'invention concerne un procédé d'isomérisation de mononitriles comprenant une liaison éthylénique et ramifiés en mononitriles linéaires.
Elle concerne plus particulièrement la réalisation de cette réaction d'isomérisation en phase gaz et en présence d'un catalyseur hétérogène.
L'hydrocyanation du butadiene en pentènenitrile est une réaction importante et mise en œuvre industriellement depuis de nombreuses années, notamment dans le procédé de fabrication de l'adiponitrile, un grand intermédiaire chimique permettant notamment d'accéder aux monomères de nombreux polymères dont les polyamides. Cette réaction est par exemple décrite dans le brevet US 3,766,237. Dans cette réaction, plusieurs composés nitriles sont formés. Les plus importants sont, par exemple, le 3-pentènenitrile ; 4-pentènenitrile, et 2-méthyl 3-butènitrile. Seuls les pentènes nitriles linéaires sont susceptibles de donner de l'adiponitrile dans une seconde étape d'hydrocyanation. Le 2-méthyl-3-butènitrile qui représente le composé ramifié le plus important conduira dans une seconde étape d'hydrocyanation au 2-méthyl glutaronitrile qui est un sous-produit difficilement valorisable. Pour limiter la quantité de mononitriles ramifiés, il a été proposé une étape d'isomérisation de ces mononitriles ramifiés en nitriles linéaires, par exemple en 3-pentènenitrile ou 4-pentènenitrile. La mise en œuvre de cette étape en phase liquide et en présence de catalyseur métallique plus particulièrement de catalyseur à base de nickel à l'état d'oxydation zéro, a été décrite dans de nombreux documents. II a été proposé dans le brevet US 5,440,067 et la demande de brevet
W097/36856 de réaliser cette isomérisation en phase gazeuse à une température comprise entre 135°C et 170°C en présence soit d'un catalyseur à base de nickel à l'état d'oxydation zéro dispersé sur un support tel que silice, alumine ou carbone, soit d'utiliser un catalyseur supporté dont la phase dispersée est une composition comprenant du nickel à l'état d'oxydation zéro et un ligand phosphite multidentate.
Toutefois, ce système catalytique présente certains inconvénients liés à la stabilité du ligand dans le domaine de températures de mise en œuvre de la réaction d'isomérisation en phase gaz.
Un des buts de la présente invention est de proposer un nouveau système catalytique pour la mise en œuvre de la réaction d'isomérisation de mononitriles ramifiés comprenant une insaturation éthylénique non conjuguée avec la fonction nitrile en mononitriles linéaires, en phase gaz.
A cet effet, l'invention propose l'isomérisation de mononitriles ramifiés aliphatiques et acyciiques comprenant une insaturation éthylénique non conjuguée avec la fonction nitrile en mononitriles linéaires par chauffage à une température inférieure à 170°C et supérieure à la température de vaporisation des mononitriles en présence d'un catalyseur comprenant un métal de transition à l'état d'oxydation 0 ou 1 et un ligand caractérisé en ce que le ligand est une phosphine multidentate répondant à la formule générale I
Dans laquelle :
X représente :
- un radical hydrocarboné divalent comprenant de 1 à 8 atomes de carbone et pouvant comprendre des hétéroatomes,
- un radical de formule -SiR2- dans laquelle R identique ou différent représente l'hydrogène, un radical hydrocarboné aliphatique ramifié ou non de 1 à 8 atomes de carbone, un radical phényl substitué ou non, ou
- un radical -NR- dans laquelle R a une signification identique à celle définie pour le radical -SiR2-
T-i, T2 identiques ou différents sont des radicaux monovalents représentant un radical aromatique substitué ou non, le radical T1 pouvant représenter un radical de formule II:
Z est un radical hydrocarboné linéaire ou non, aliphatique, cycloaliphatique, aromatique, arylaliphatique, alkylaromatique pouvant comprendre des hétéroatomes, comprenant de 1 à 20 atomes de carbone.
Z-\ représente un radical divalent de définition identique à celle du radical Z mais pouvant être identique ou différent. n est un nombre entier compris entre 2 et 6 (bornes incluses)
Selon une autre caractéristique de l'invention le radical Z est de préférence, un radical cyclique aromatique ou aliphatique comprenant de 3 à 8 chaînons, pouvant comprendre des hétéroatomes et pouvant être substitué ou associé à d'autres cycles sous forme condensée.
Le procédé de l'invention est notamment mis en œuvre pour la fabrication de mononitriles aliphatiques linéaires comprenant une double liaison ou insaturation éthylénique non conjuguée avec la fonction nitrile tels que le 3-pentènenitrile et le 4-pentènenitrile. Le catalyseur utilisé est de préférence un système catalytique solide comprenant un support inerte solide sur lequel est fixée la phase catalytique comprenant un ligand phosphine tel que décrit précédemment et un métal de transition.
Ce catalyseur solide peut être utilisé comme lit fixe ou sous forme d'un lit fluidisé.
Les supports solides inertes utilisés sont les supports poreux ou non, utilisés dans le domaine de la catalyse hétérogène supportée tels que les alumines, la silice, l'oxyde de titane, l'oxyde de zirconium, les charbons.
L'utilisation d'un système catalytique solide ou hétérogène permet de réaliser un procédé avec une vie plus longue du catalyseur et un minimum d'étapes de purification du produit final car l'élimination du catalyseur dans le produit n'est plus nécessaire. De plus, les rejets d'effluents et sous-produits dus à la présence de catalyseur dans le milieu réactionnel recueilli sont supprimés.
Selon une autre caractéristique de l'invention, les métaux de transition particulièrement convenables pour l'invention sont le nickel, le palladium, le platine, le nickel étant le métal préféré. Les systèmes catalytiques convenables pour l'invention peuvent être préparés par de nombreux procédés.
Ainsi, parmi les procédés les plus courants pour la fabrication de catalyseur à base de nickel à l'état d'oxydation zéro-[Ni(0)]-. On peut citer les compositions catalytiques obtenues à partir de complexes contenant du Ni (0) et du cyclooctadiène. Ce dernier complexe Ni(0)-bis(cyclooctadiène) est appelé couramment en abrégé Ni (cod)2.
On peut également préparer ces catalyseurs par mélange de sels de nickel à l'état d'oxydation supérieur à un avec le ligand désiré et réaliser une réduction in-situ du nickel à l'état d'oxydation zéro ou un par de l'hydrogène tel que décrit dans le brevet français 2 743 011. Le système catalytique support/métal de transition/ligand peut être obtenu par des procédés de traitement de supports classiquement décrits dans la littérature, comme dans l'article de B-C Gates, heterogeneous Catalysis Vol 2, pp 1-29, Ed. B.L. Shapino, texas A et M University Press, Collège Statom Texas, 1984. La méthode généralement
utilisée est le mélange du support avec une solution du complexe ligand/métal de transition puis un traitement du support ainsi imprégné pour éliminer le solvant.
Il est également possible d'absorber ou disperser le métal de transition sur le support puis de traiter le support comprenant le métal de transition avec une solution du ligand conforme à l'invention.
La teneur en métal de transition sur le support n'est pas critique mais est avantageusement comprise entre 0,1 % et 10 % en poids de métal par rapport au poids du support, de préférence entre 0,5 % et 5 %.
De même, la concentration en ligands est avantageusement comprise entre 0,5 mole et 20 mole par mole de métal de transition.
Selon un mode de réalisation préféré de l'invention, le système catalytique comprend un support en charbon actif ou noir de carbone d'origine organique. Eventuellement, le noir de carbone peut être traité thermiquement sous atmosphère inerte. Le nickel zéro et le ligand sont solubilisés dans un solvant organique tel que, par exemple, le dichlorométhane, le tétrachlorure de carbone, le toluène, le tétrahydrofuranne, l'acétonitrile ou l'hexane. Le support, noir de carbone par exemple, est mélangé avec cette solution pour obtenir une dispersion du catalyseur sur le support.
Le système catalytique est chargé dans un réacteur sous forme de lit fixe ou lit fluidisé. Un flux des composés à isomériser sous forme vapeur traverse le lit de catalyseur maintenu à une température inférieure à 170°C, avantageusement comprise entre 145°C et 170°C, après purge du réacteur avec un gaz inerte tel que l'argon ou l'azote.
Le domaine de températures utilisables est déterminé par une température minimale à laquelle les produits sont sous forme vapeur et une température maximale au-delà de laquelle le catalyseur peut se détériorer.
Le débit du flux de produits à isomériser est déterminé pour avoir un temps de contact suffisant avec le catalyseur.
Il peut être augmenté par un recyclage d'une partie du milieu réactionnel en sortie de réacteur.
Enfin, la pression de travail n'est pas critique et peut varier depuis la pression atmosphérique (1 atm) jusqu'à plusieurs dizaines d'atmosphère.
Le type de réacteur convenable pour la mise en œuvre du procédé de l'invention peut être très large. Aussi, le procédé peut être réalisé dans un réacteur à tubes, dans une colonne, par exemple.
Le procédé de l'invention s'applique à l'isomérisation des alkénenitriles sous forme vapeur ou à un mélange d'alkénenitriles et de solvants également sous forme vapeur. Comme solvant on peut citer, par exemple, l'acétonitrile, le tétrahydrofuranne ou le
toluène. L'alkénenitrile peut être mélangé à un gaz vecteur inerte chimiquement vis-à-vis du catalyseur et des alkénenitriles, tels que, par exemple, l'azote ou l'argon.
En sortie de réacteur, le mélange gazeux est condensé par refroidissement.
L'alkénenitrile linéaire est récupéré et peut être, par exemple, utilisé comme matière première dans une réaction d'hydrocyanation pour conduire aux dinitriles correspondants.
Les alkénenitriles qui peuvent être avantageusement isomérisés en alkénenitriles linéaires comprennent une liaison éthylénique qui n'est pas conjuguée avec la triple liaison de la fonction nitrile. Comme composés préférés, on peut citer les alkénenitriles comprenant de 5 à 20 atomes de carbone tels que le 2-méthyl 3-buténénitrile, le 2-éthyl- 3-butènenitrile et 2-propyl-3-butènenitrile.
L'invention sera décrite plus en détail au vu des exemples ci-dessous donnés uniquement à titre indicatif et illustratif.
La significaton des abréviations utilisées dans la description des exemples est données ci-dessous.
cod : 1 ,5-cyclooctadiène.
CPG : chomatographie en phase gazeuse.
(+)-CBD : [(+) 1S, 2SKrans-bis(diphénylphosphinométhyl)-1 ,2-cyclobutane. (+)-DIOP :(4,S,5S)-(+)-0-isopropylidène-2,3-di-hydroxy-1 ,4- bis(diphénylphosphino)butane.
DPEphos : Bis[(2-diphénylphosphino)phényl]éther.
DPPB : 1 ,4-Bis(diphénylphosphino)butane.
DPPF : 1 ,1 '-Bis(diphénylphosphino)ferrocène. DPPP : 1,3-Bis(diphénylphosphino)propane.
DPPX : α,α'-diphénylphosphino-o-xylène. eq : équivalent. mmol : millimole.
MGN : méthylèneglutaronitrile. 2M3BN : 2-méthyl-3-butènenitrile.
2 2BN : 2-méthyl-2-butènenitrile.
2PN : 2-pentènenitrile.
3PN : 3-pentènenitrile.
4PN : 4-pentènenitrile. 3+4PN : mélange de 3PN et 4PN.
TT (Y) : taux de transformation du composé Y exprimé par rapport à à la masse engagée de composé Y et la masse non transformée en fin de réaction.
RR (X) : rendement réel du composé X = nb de mole formé du composé X / nb de mole théorique du composé X.
RT (X) : sélectivité du composé X = RR (X) / TT (Y).
Préparation des catalyseurs supportés.
Mode opératoire
Dans un tube de Schlenk sous atmosphère d'argon sont chargés 35 mg (0,127 mmol ; M = 275,08 ; 1 eq) de Ni(cod)2 et 6 eq de ligand L. Un volume V de solvant S anhydre et dégazé est ajouté. La solution catalytique obtenue est agitée à température ambiante pendant 30 minutes.
Dans un ballon de 50 ml sous atmosphère d'argon est chargé 1 g de noir de carbone commercialisé par la société SN2A sous la dénomination commerciale Y200. Sous vive agitation, 1 ml de la solution catalytique est introduit par un goutte à goutte dans le ballon contenant le noir de carbone.
Le solvant est évaporé à température ambiante sous pression réduite. Cette étape d'imprégnation du support par la solution catalytique suivi de l'évaporation du solvant est renouvelée N fois. Le catalyseur supporté obtenu est conservé sous argon.
Les catalyseurs ainsi préparés sont listés dans le tableau I ci-dessous avec indication des ligands et solvants utilisés pour leur fabrication.
Tableau I
Isomérisation de 2 3BN en 3PN
Mode opératoire :
Le dispositif est composé d'un réacteur en phase vapeur tubulaire en verre (L = 32 cm; 0 = 2 cm) équipé d'une sonde de température, d'une arrivée d'argon et d'un septum. L'injection de la solution de 2M3BN est réalisée à travers le septum, par une aiguille reliée à une seringue. Le débit d'introduction est contrôlé. L'extrémité du réacteur est reliée à un condenseur. La partie comprise entre le condenseur et l'aiguille est placée dans un four thermorégulé.
Trois lots de 2M3BN ont été utilisés. Les compositions molaires et le taux d'hydratation de ces trois lots sont rassemblés dans le tableau II ci-dessous :
Tableau II
Après mise de l'installation sous atmosphère d'argon, le réacteur est chargé successivement par 7 g de quartz, un catalyseur du tableau I et à nouveau 7 g de quartz. Il est placé dans le four, équipé de la sonde de température et maintenu sous courant d'argon à un débit de 10 ml par minute. Le réacteur est porté à 150°C. Quand la température est stabilisée, le condenseur est connecté au réacteur à son extrémité et placé dans un bêcher rempli de glace pilée. Une solution dégazée de 2M3BN (lots A, B, C) diluée dans l'acétonitrile anhydre est injectée à un débit de 2 ml par heure. Le contenu du condenseur est recueilli, analysé et dosé par CPG (chromatographie en phase vapeur) toutes les 20 minutes puis toutes les heures en sortie de condenseur.
EXEMPLE 1 : Catalyseur la [ Nf/DPPP (1/6) sur noir Y200].
L'essai est effectué selon le mode opératoire ci-dessus, en injectant une solution de 2M3BN (lot C) diluée à 10% dans CH3CN. Les résultats sont rassemblés dans le tableau III ci-dessous.
Tableau III
EXEMPLE 2: Catalyseur Ib [ Nf/DPPB (1/6) sur noir Y200J.
L'essai est effectué selon le mode opératoire ci-desus, en injectant une solution de
2M3BN (lot C) diluée à 10% en poids dans CH3CN.
Les résultats sont rassemblés dans le tableau IV ci-desous :
Tableau IV
EXEMPLE 3: Catalyseur lia [ Ni°/(+)-CBD (1/6) sur noir Y200].
L'essai est effectué selon le mode opératoire ci-dessus, en injectant une solution de 2M3BN (lot C) diluée à 50% dans CH3CN. Les résultats sont rassemblés dans le tableau V ci-dessous :
Tableau V
EXEMPLE 4: Catalyseur Ilb [ Ni°/(+)-DIOP (1/6) sur noir Y200].
L'essai est effectué selon le mode opératoire ci-dessus, en injectant une solution de 2M3BN (lot C) diluée à 50% en poids dans CH3CN. Les résultats sont rassemblés dans le tableau VI ci-dessous.
Tableau VI
EXEMPLE 5: Catalyseur Ile [ Nf/DPPX (1/6) sur noir Y200].
L'essai est effectué selon le mode opératoire ci-dessus, en injectant une solution de 2M3BN (lot C) diluée à 10% en poids dans CH3CN. Les résultats sont rassemblés dans letableau VII ci-dessous.
Tableau VII
EXEMPLE 6: Catalyseur III [ Nf/DPPF (1/6) sur noir Y200J.
L'essai est effectué selon le mode opératoire ci-dessus, en injectant une solution de 2M3BN (lot A) diluée à 50% en poids dans CH3CN. Les résultats sont rassemblés dans le tableau VIII ci-dessous.
Tableau VIII
EXEMPLE 7 comparatif: Catalyseur IV ( Nf /DPEphos (1/6) sur noir Y200].
L'essai est effectué selon le mode opératoire ci-dessus, en injectant une solution de 2M3BN (lot B) diluée à 50% en poids dans CH3CN. Les résultats sont rassemblés dans le tableau IX ci-dessous :
Tableau IX
EXEMPLE COMPARATIF 8 Isomérisation de 2M3BN en 3PN selon un procédé en phase liquide, en présence du système catalytique Ni°/DPEphos (1/6).
Dans un tube de Schlenk sous atmosphère d'argon sont chargés : 20 mg (0,073 mmol ; M = 275,08 ; 1 ,0 eq) de Ni(cod)2 et 235 mg (0,436 mmol ; M = 538,56 ; 6,0 eq) de DPEphos. 806 mg (8,05 mmol ; M = 81 ,12 ; 111 eq) de 2M3BN anhydre (lot C) sont ajoutés. Le mélange est porté sous agitation en système fermé à 150°C pendant une heure puis ramené à température ambiante (20°C) et dosé par CPG. Les résultats obtenus sont rassemblés dans le tableau X ci-dessous :
Tableau X