Nouvelles structures de couche active pour électrodes de pile à combustible à électrolyte solide polymère
La présente invention concerne de nouvelles structures de couche active pour électrodes de pile à combustible à électrolyte solide polymère caractérisées en ce que la couche active est constituée par un empilement ordonné de feuillets d'épaisseur inférieure à 50 μm et d'au moins deux natures différentes, l'un deux étant toujours majoritairement composé par un conducteur ionique solide et l'autre toujours composé majoritairement par un mélange électrocatalytique, lesdits feuillets étant disposés perpendiculairement à la membrane séparant l'anode de la cathode.
Les électrodes de pile à combustible à électrolyte solide polymère sont actuellement constituées de deux couches. L'une de ces couches, dite de diffusion, a une épaisseur de l'ordre de 0,5 mm et comporte une face en contact avec le flux gazeux l'alimentant ; cette couche, à base de carbone et d'un liant tel que le PTFE, est dépourvue de catalyseur. L'autre couche, d'épaisseur plus faible (< 50 μm) , est constituée entre autre par du carbone sur lequel a été dispersé un catalyseur tel que le platine. Cette dernière couche, dite active puisque comportant le catalyseur, a une de ses faces fixée sur la couche de diffusion tandis que sur l'autre face est fixée la membrane à conduction ionique (généralement protonique) séparant l'anode de la cathode. On constate, dans le cas d'un fonctionnement avec un conducteur protonique (Nafion® par exemple), que 90 % de la polarisation affecte l'électrode où s'effectue la réduction de l'oxygène. De plus, pour cette cathode, on admet généralement que seulement 15 à 20 % du platine inclus dans la couche active participe à la réaction électrochimique. Une des hypothèses pour expliquer ce mauvais rendement du catalyseur consiste à supposer que seulement une faible partie du platine serait à la fois accessible aux
réactifs gazeux (02) et aux protons se déplaçant dans le conducteur protonique.
Après avoir effectué une étude approfondie du comportement de la cathode, la Demanderesse a pu mettre en évidence que seule une épaisseur très faible de la couche active participe efficacement à la réaction de réduction de l'oxygène. Pour les couches plus profondes, au-delà de 5 μm, les densités locales de courant sont de plus en plus faibles parce que la surtension locale est elle-même faible, cette baisse de la surtension étant due à une conduction ionique insuffisante dans les régions les plus éloignées de la membrane inter-électrodes.
A partir de cette explication, deux stratégies sont envisageables . La première consiste à réaliser des électrodes comportant une couche active de très faible épaisseur, ce qui conduit à optimiser le rendement du platine. Une deuxième voie vise à améliorer la conduction ionique dans toute l'épaisseur de la couche active, épaisseur qui pourrait atteindre 50 μm. Cette dernière voie aurait pour avantage d'augmenter la puissance surfacique des électrodes (W/cm2) et, par conséquent, de réduire l'aire des membranes interélectrodes et des collecteurs bipolaires associés aux électrodes. Dans cet esprit, on peut espérer améliorer la conduction ionique dans toute la couche active en jouant sur la répartition du conducteur ionique via son mode d'introduction dans la couche active, tout en conservant pour cette dernière la même morphologie .
Les nouvelles structures de couche active pour électrodes de pile à combustible à électrolyte solide polymère, objets de la présente invention, se caractérisent par une toute autre approche que celles précédemment décrites en ce qui concerne l'objectif d'améliorer à la fois le rendement du catalyseur (W/g) et la puissance surfacique (W/cm2). Pour
cela, la couche active a une structure radicalement différente de celle des électrodes connues à ce jour. Compte tenu de ce que, dans les électrodes de conception classique, la couche efficace est celle proche de la membrane inter- électrodes parce que la teneur en conducteur ionique y est très élevée, on a cherché à faire en sorte que la majeure partie de la couche active soit constituée par des domaines interphase de structure proche de celle des couches superficielles existantes dans les électrodes de conception classique. De plus, lorsque les électrodes sont rendues aptes, par l'amélioration de leur conduction ionique, à délivrer des densités de courant élevées, on doit alors améliorer également la cinétique de transport des espèces moléculaires afin que ces phénomènes ne soient pas limitatifs. Il s'agit donc, dans tous les cas couverts par la présente invention, de donner aux couches actives une structure feuilletée. Un tel principe est applicable aussi bien aux cathodes qu'aux anodes et, bien que toutes les piles à combustible à électrolyte solide polymère commercialisées se caractérisent par l'emploi de conducteurs protoniques, on pourrait avantageusement appliquer ce même mode de structuration à des piles à combustible à électrolyte solide polymère fonctionnant avec un conducteur anionique. Toutefois les descriptions qui suivent résultent d'études effectuées sur les cathodes à réduction de l'oxygène de pile à combustible à électrolyte solide, polymère à conduction protonique .
Les structures de couche active pour électrodes de pile à combustible à électrolyte polymère selon l'invention se caractérisent en ce que la couche active est constituée par un empilement ordonné de feuillets d'épaisseur inférieure à 50 μm, d'au moins deux natures différentes, l'un de ces feuillets étant toujours majoritairement composé par un conducteur ionique solide et l'autre feuillet toujours composé majoritairement par un mélange électrσcatalytique,
lesdits feuillets étant disposés perpendiculairement à la membrane séparant l'anode de la cathode.
Selon une des caractéristiques de l'invention, les feuillets composés majoritairement du conducteur ionique ont une teneur en ce conducteur ionique supérieure à 60 %.
Selon une autre caractéristique de l'invention, le conducteur ionique est un polymère solide à conduction protonique, par exemple le Na ion®.
Selon une des caractéristiques de l'invention, les feuillets composés majoritairement du mélange électrocatalytique contiennent, outre le carbone sur lequel est dispersé le catalyseur, 10 à 50 % d'un liant hydrophobe et 20 à 60 % d'un conducteur ionique solide, les pourcentages étant exprimés en masse par rapport à la masse de carbone supportant le catalyseur.
Les structures de couche active selon l'invention se caractérisent par l'alternance répétée de deux sortes de feuillets de composition différente, disposés perpendiculairement à la membrane séparant l'anode de la cathode .
Selon une variante de l'invention, les feuillets composés majoritairement du conducteur ionique sont constitués d'un film de ce conducteur.
Selon une autre variante de l'invention, les feuillets composés majoritairement du conducteur ionique sont constitués d'un support poreux imprégné de conducteur ionique, la teneur en conducteur ionique étant supérieure à 60 %.
Les feuillets composés majoritairement du conducteur ionique ont une épaisseur comprise entre 5 et 50 μm, et les feuillets composés majoritairement du mélange electrocatalytique ont une épaisseur comprise entre 5 et 25 μm. Le rapport des épaisseurs entre les feuillets composés majoritairement du conducteur ionique et les feuillets composés majoritairement par le mélange electrocatalytique, doit être compris entre 0,5 et 2 et être d'autant plus élevé que l'épaisseur de la couche active est plus grande.
Selon une des caractéristiques de l'invention, la couche active comporte avantageusement des feuillets de trois natures différentes, disposés perpendiculairement à la membrane séparant l'anode de la cathode.
Selon cette caractéristique de l'invention, le troisième type de feuillet assure le déplacement rapide des espèces moléculaires. Il est situé en position médiane entre les feuillets majoritairement constitués du mélange electrocatalytique et a une épaisseur comprise entre 2 et 10 μm. Il est constitué d'un matériau poreux très hydrophobe .
Les dessins annexés illustrent, à titre non limitatif, l'invention : • la figure 1 représente en coupe un ensemble membrane- couche active-couche de diffusion d'une électrode de pile à combustible à électrolyte solide polymère selon l'invention, les feuillets de la couche active étant disposés perpendiculairement à la membrane séparant l'anode de la cathode,
• la figure 2 représente une variante de l'ensemble représenté sur la figure 1, pour lequel la couche active est composée de trois types de feuillets,
• la figure 3 représente une vue d'un bloc constitué par l'empilement des feuillets composant la couche active ; elle
correspond à un des procédés de réalisation de la couche active selon l'invention,
• la figure 4 représente une vue d'un bloc constitué d'une bande comportant les feuillets élémentaires composant la couche active selon l'invention,
• la figure 5 représente la bande de couche active précédente enroulée selon une spirale et fixée à la membrane inter-électrodes .
Les couches actives selon l'invention comportent au moins 2 sortes de feuillets. D'une part des feuillets (1) composés majoritairement de conducteur ionique, la teneur en ce conducteur étant supérieure à 60 % et, d'autre part des feuillets (2) constitués majoritairement du mélange electrocatalytique dont la composition est la suivante :
• carbone sur lequel est dispersé le catalyseur, par exemple poudre de noir de carbone Vulcan XC 72, chargé entre 20 et 40 % en platine,
• conducteur protonique imprégnant les particules de carbone, par exemple Nafion®, en teneur comprise entre 20 et
60 % de la masse de carbone platiné,
• liant hydrophobe, dispersé dans le mélange, par exemple FEP, en teneur comprise entre 10 et 50 % de la masse de carbone platiné.
Une telle composition de la masse active correspond à celle généralement adoptée pour la réalisation des couches actives d'électrodes de structure conventionnelle. L'invention ne porte donc pas sur la composition des feuillets mais sur leur disposition et leur dimensionnement .
Le mode de structuration de - la couche active est caractérisé en ce que les feuillets (1) et (2) sont disposés perpendiculairement à la membrane inter-électrodes, comme représenté sur la figure 1.
Les feuillets (1) sont constitués soit par un film de conducteur ionique réalisé à la surface des feuillets (2), soit par un support poreux imprégné de conducteur ionique et interposé entre 2 feuillets (2) .
Les feuillets (2) de matière active sont constitués par un agglomérat de carbone sur lequel est dispersé le catalyseur, un conducteur protonique et un liant hydrophobe .
Les feuillets (2) ont une épaisseur comprise entre 5 et 25 μm.
Les feuillets (1) ont une épaisseur totale comprise entre 5 et 50 μm et ils peuvent être élaborés par enduction ou pulvérisation du feuillet (2) servant de support, par une solution ou suspension contenant le conducteur ionique. Par cette méthode, on obtient, sur le feuillet (2) , un film de conducteur ionique superficiel et un domaine interphase composé de couche active riche en conducteur ionique.
On peut également, notamment en vue de l'obtention de feuillets (1) très épais (> 10 μm) , inclure entre deux feuillets (2) un feuillet support en un matériau poreux imprégné avec le conducteur ionique.
Pour le mode de structuration décrit, il conviendra de donner à l'épaisseur des feuillets (1) une valeur d'autant plus grande que la couche active sera plus épaisse et que les densités de courant seront plus élevées, le rapport épaisseur des feuillets (1) /épaisseur des feuillets (2) étant compris dans tous les cas entre 0,5 et 2.
Enfin, afin de permettre un meilleur transport des espèces moléculaires (rétrodiffusion de N2 et H20, alimentation en 02, Air ou H2) , il est avantageux, suivant la variante montrée sur la figure 2, d'inclure en position médiane dans chaque feuillet (2) un feuillet (3) de faible
épaisseur (2 à 10 μm) caractérisé en ce qu'il permet le déplacement aisé des espèces moléculaires. L'épaisseur des feuillets (2') est alors égale à la moitié de l'épaisseur des feuillets (2) .
Ce feuillet (3) peut être- constitué par un agglomérat de carbone et d'un liant hydrophobe, ou d'un matériau hydrophobe poreux.
Avant fixation de la membrane électrolyte (4) sur les feuillets constituant la couche active, il est avantageux de réaliser une couche de conducteur ionique (7) sur la face en contact avec la membrane ; cette couche interphase facilite la fixation de la couche active sur la membrane.
En ce qui concerne la réalisation de telles structures, plusieurs procédés peuvent être envisagés :
• Constitution d'un bloc feuilleté (6), comme représenté - sur la figure 3, par pulvérisation ou enduction successive des différents feuillets composant la couche active puis, après fixation de la membrane inter-électrodes (4), découpe de la couche active suivant le plan (A) et in fine assemblage sur la couche de diffusion élaborée par ailleurs, la découpe de la couche active selon le plan (A) définissant l'épaisseur (x) de celle-ci. Préalablement à l'empilement des feuillets, .il est possible de simplifier la fabrication en constituant des feuilles de grande dimension composées chacune des feuillets élémentaires.
• Réalisation d'une bande de grande longueur, comme représenté sur la figure 4, comportant les feuillets élémentaires : feuillet en conducteur ionique (1), feuillet de matière active (2) , éventuellement feuillet pour la diffusion des espèces moléculaires (3) . La bande est ensuite spiralée, comme représenté sur la figure 5, puis est découpée suivant le plan (A) afin de former une couche active d'épaisseur (x) après fixation de la membrane inter
électrodes (4) sur le plan extérieur du bloc (6). In fine fixation e l'autre face de la couche active sur la couche de diffusion (5) élaborée par ailleurs.
Dans les deux procédés décrits ci-dessus, on pourra, afin de faciliter la découpe des couches actives, fretter l'ensemble après constitution des blocs cylindriques ou parallélépipédiques afin d'augmenter leur cohésion ; pour le deuxième procédé de réalisation (figure 5) , le frettage sera assuré par une enveloppe extérieure cylindrique. • Réalisation de chaque couche active par microenduction de chaque feuillet, suivant des techniques déjà utilisées pour la fabrication des circuits en microélectronique. On peut notamment envisager une microenduction à travers un masque dont les espaces vides correspondent à un type de feuillet. Ce dernier procédé a l'avantage d'éviter les empilements, spiralages et découpes et les raccordements délicats avec la couche de diffusion. Il convient mieux pour une industrialisation du procédé.
D'autres procédés pourront être mis au point, l'invention portant essentiellement sur la définition qu'il convient de donner aux couches actives et non sur leur mode de fabrication.
EXEMPLE DE REALISATION
On réalise une électrode à oxygène comportant une couche active constituée de feuillets disposés perpendiculairement à la membrane inter-électrodes.
Dans l'exemple de réalisation décrit, les feuillets constitutifs de la couche active sont composés soit essentiellement de Nafion®, soit essentiellement de matière active, la variante décrite dans cet exemple ne comportant pas de feuillet pour la diffusion des espèces moléculaires.
La mise en œuvre d'un bloc comportant un grand nombre de feuillets, tel que représenté sur la figure 3, implique, lorsque l'on procède à la formation des feuillets un par un, un grand nombre d'opérations de pulvérisation, enduction et séchage. Dans la réalisation décrite ci-après, on a réduit ce nombre d'opérations en réalisant tout d'abord une feuille de dimensions 30 cm x 30 cm, elle-même constituée d'un feuillet en Nafion® d'épaisseur 20 μm. Ce feuillet est obtenu par pulvérisation d'une solution de Nafion® à 10 % sur un support ne permettant pas l'adhérence du Nafion®. Les séquences de pulvérisation sont interrompues par des séquences 'de séchage. On pulvérise ensuite une dernière charge de 0,4 mg/cm2 de Nafion® (charge exprimée en extrait sec) et avant son séchage, on recouvre par enduction avec une couche de matière active dont la composition est la suivante :
• carbone Vulcan XC 72 chargé à 30 % en platine
• 40 % (en masse) de Nafion® imprégnant les particules de carbone à partir d'une solution de Nafion® à 15 % • 30 % de FEP inclus à partir d'une suspension.
Ces pourcentages sont exprimés en masse à l'état sec par rapport à la masse de carbone platiné.
La masse enduite est telle que l'épaisseur du feuillet de matière active est voisine de 20 μm. Les 2 feuillets subissent un traitement thermique à 'une température de 180 °C pendant 10 heures. La feuille composée ainsi de 2 feuillets fixés l'un à l'autre est ensuite découpée en carrés de 3 cm2
(1 cm x 3 cm) , soit au total 300 carrés composites comportant chacun les 2 feuillets élémentaires.
On procède ensuite à l'empilement des carrés suivant les séquences suivantes : le feuillet de Nafion® constitue le premier feuillet de l'empilement. Le feuillet supérieur du carré composite est donc en matière active. Sur la face de ce dernier, on projette une charge de 0,4 mg/cm2 (à l'état sec)
d'une solution de Nafion® à 1 %. Cette face est ensuite pressée par un nouveau carré composite présentant une face en Nafion®. Ces séquences sont répétées 249 fois. Enfin sur la face en matière active du dernier carré composite, on pulvérise une charge de 0,6 mg/cm2 de Nafion®. Chaque séquence est suivie d'un traitement de 1 minute à 140 °C. Après quoi le bloc est soumis à un traitement thermique de 10 heures à 180 °C. La membrane inter-électrodes (Nafion® 115) est ensuite fixée après avoir réalisé une couche interphase composée de Nafion®" . On obtient ainsi un bloc feuilleté dont l'épaisseur est de 1 cm moins 20 μm. Le pressage de la membrane inter-électrodes est effectué à une température de 160 °C sous une pression de 70 kg/cm2 pendant 90 secondes. Après constitution, par cette dernière opération, d'un bloc ayant une bonne cohésion, on procède à sa découpe de telle façon que l'épaisseur de la couche active soit d'environ 40 μm, sa largeur étant de 1 cm et sa longueur de 3 cm. On dispose ensuite d'une couche de diffusion constituée par un tissu de carbone (PANEX® PW 03, fourni par Zoltech) rempli avec un mélange de Vulcan XC 72 et de PTFE
(teneurs respectives : 6 à 10 mg/cm2 de Vulcan et 4 à
7 mg/cm2 de PTFE) . Sur une des faces de cette couche de diffusion, on enduit ou l'on pulvérise une couche de matière active d'épaisseur de l'ordre de 1 μm. On presse ensuite le bloc sur la couche de diffusion sous une pression de 10 kg/cm2 et à une température de 180 °,C.
L'électrode à oxygène ainsi réalisée a donc une surface utile de 3 cm2 (1 cm x 3 cm) . Sur l'autre face de la membrane de Nafion® 115, on fixe une électrode à H2 de structure conventionnelle et de mêmes dimensions que l'électrode à oxygène. Ce cœur de pile est ensuite alimenté par 02 et H2 sous 4 bar absolu à une température de 80 °C. Après stabilisation, on constate que la densité du courant débité ' est de 1,1 A/cm2 (sous 0,7 V) alors que l'assemblage de mêmes dimensions comportant des électrodes de structure
traditionnelle donne dans les mêmes conditions 0,6 A/cm2. On constate que le gain obtenu est proche de 100 %. On peut en déduire qu'une électrode feuilletée incluant des feuillets d'épaisseurs plus faibles (par exemple 10 μm pour la matière active et 15 μm pour le Nafion®) permettrait l'obtention de gains encore plus importants.