Procédé pour la fabrication d'une bande en acier multiphase laminée à chaud.
Domaine technique
La présente invention concerne un procédé pour la fabrication d'une bande en acier multiphase laminée à chaud, présentant des propriétés mécaniques améliorées, en particulier une haute résistance et une bonne ductilité Actuellement, de telles bandes présentent une épaisseur comprise entre 0,7 mm et 10 mm, et le plus souvent entre 2 mm et 6 mm
Etat de la technique
Les aciers à haute résistance sont connus depuis longtemps dans la technique et leurs utilisations sont extrêmement diversifiées Dans de nombreux cas, les propriétés mécaniques de ces aciers sont le résultat d'un traitement thermique approprié, qui permet souvent d'éviter le recours à des éléments d'alliage généralement coûteux
Certaines applications exigent cependant des bandes d'acier laminées à chaud, qui présentent à la fois une résistance élevée et de bonnes propriétés de mise en forme A l'heure actuelle, une telle combinaison de propriétés est extrêmement difficile à réaliser, elle n'est d'ailleurs généra- lement obtenue que par le biais d'aciers multiphases tels que des aciers à microstructure de ferπte/bainite ou de ferπte/martensite ou encore des aciers comportant trois phases Dans ces aciers, la ferrite constitue l'élément ductile et déformable, tandis que la seconde phase, bainite ou martensite, permet de renforcer l'acier Les propriétés mécaniques finales de l'acier sont influencées directement par les proportions respectives de ces phases, ainsi que par les températures auxquelles celles-ci se forment
Suivant la pratique conventionnelle, les aciers à microstructure de ferπte/bainite ou de ferπte/martensite sont obtenus au départ d'une composition chimique spécifique et au prix d'un sévère contrôle des conditions de refroidissement lors du laminage a chaud La microstructure et les propriétés de ces aciers sont influencées par la température de bobinage, ainsi que par les vitesses de refroidissement auxquelles les aciers sont soumis
Sur une table de refroidissement laminaire classique, il n'est pas possible de contrôler la vitesse de refroidissement de la bande laminée a chaud, car les débits spécifiques du liquide de refroidissement sont fixés Cette vitesse de refroidissement dépendra alors largement de la vitesse et de l'épaisseur de la bande, ainsi que de paramètres extérieurs tels que la température du liquide de refroidissement En particulier, elle varie sur la longueur de la bande a cause de l'augmentation de vitesse de celle-ci, consécutive à l'accélération du train de laminage entre le début et la fin d'une bande De façon connue, cette accélération est imposée par la nécessité de
conserver une température de fin de laminage constante pour toute la bande II en resuite une incertitude sur la vitesse de refroidissement de l'acier, qui se repercute sur la microstructure et donc sur les propriétés de la bande, et qui peut finalement se traduire par de coûteux chutages et déclassements de bandes
En outre, la composition chimique de l'acier doit être adaptée en fonction des microstructures a réaliser et également en fonction du refroidissement qui pourra être appliqué Dans ces conditions, il n'est pratiquement pas possible de faire varier la composition de l'acier de façon spécifique pour améliorer certaines propriétés mécaniques comme la résistance à la fatigue ou au vieillissement, l'aptitude à l'expansion de trou, ou encore la soudabilite ou l'état de surface
On sait par ailleurs qu'il est possible de produire des aciers multiphases par un traitement de refroidissement dit a cycle casse D'une manière générale un tel traitement comprend un premier maintien de la bande a haute température pour assurer une transformation partielle de l'austenite en ferπte suivi d'un refroidissement brusque destine a figer la microstructure partiellement transformée et enfin d'un second maintien a une température plus basse pour transformer le reste de l'austenite en bainite ou en martensite Dans les trains a bande conventionnels, les tables de refroidissement ne disposent cependant pas de sections de refroidissement suffisamment puissantes pour assurer un tel refroidissement brusque
A cet égard, on connaît certes un procède de refroidissement ultra-rapide dit UFC ou Ultra Fast Cooling applique a une bande laminée a chaud immédiatement après sa sortie du train finisseur Ce refroidissement ultra-rapide est suivi par un refroidissement lent, dit refroidissement laminaire sur le refroidisseur usuel qui conduit aux bobineuses Ce procède permet assurément d'obtenir des aciers a haute limite d'élasticité par exemple des aciers a dispersoides De tels aciers présentent cependant une ductilité plus faible que celle développée par les structures multiphases de sorte qu'ils ne sont pas utilisables pour des applications nécessitant une ou plusieurs opérations de mise en forme
Présentation de l'invention
La présente invention a pour objet de proposer un procède pour la fabrication d une bande en acier multiphase laminée a chaud qui présente des propriétés mécaniques et en particulier une résistance et une ductilité améliorées par rapport a l'état de la technique précité
Conformément a la présente invention un procède pour la fabrication d'une bande en acier multiphase laminée a chaud qui comprend une opération de refroidissement ultra-rapide est caractérise en ce que I on effectue ladite opération de refroidissement ultra-rapide après un refroidissement laminaire lent de la bande sur la table de refroidissement et avant le bobinage final de la bande
Dans les trains à bandes à chaud, la température de fin de laminage des bandes est égale ou supérieure à la température de transformation Ar3, cette température varie certes en fonction de la composition de l'acier, mais elle est en général comprise entre environ 800°C et 900°C
Selon l'invention, on soumet la bande d'acier laminée à chaud, à la sortie du train finisseur, à un premier refroidissement lent depuis la température de fin de laminage jusqu'à une température, dite température intermédiaire, comprise entre environ 750°C et 500°C, et de préférence entre environ 750°C et 600°C, ensuite à un refroidissement ultra-rapide depuis ladite température intermédiaire jusqu'à une température, dite température de bobinage, comprise entre environ 600°C et la température ambiante, et enfin à un second refroidissement lent a partir de ladite température de bobinage jusqu'à la température ambiante
Le premier refroidissement se déroule de préférence sur la table de refroidissement laminaire conventionnelle, c'est-à-dire à l'eau avec une faible vitesse de refroidissement, il peut cependant aussi être effectué à l'air II constitue ainsi le premier maintien de la bande a haute température, au cours duquel la ferrite peut se former dans des conditions proches de l'équilibre La durée de ce premier refroidissement dépend de la vitesse de la bande et de la vitesse de refroidissement appliquée, en fonction du degré de transformation désiré et donc de la température intermédiaire visée La vitesse de refroidissement étant de toutes manières faible, elle n'est pas influencée de façon notable par l'effet de l'accélération du train
Le refroidissement brusque est ensuite effectue de préférence par le procédé de refroidissement ultra-rapide mentionne plus haut On peut rappeler ICI que ce refroidissement ultra-rapide consiste en un arrosage de la bande par des filets d'eau sous une pression de 4 à 5 bar, ce refroidissement peut être régule en vitesse de refroidissement et en température au moyen du débit d'eau et de la longueur arrosée II permet d'atteindre des vitesses de refroidissement de 5 a 10 fois plus élevées que les tables de refroidissement laminaire conventionnelles De préférence, on effectue ledit refroidissement ultra-rapide avec une vitesse de refroidissement telle que le produit de l'épaisseur de la bande, en mm, par la vitesse de refroidissement, en °C/s, soit supérieur à 600, et de préférence encore supérieur à 800 A titre indicatif, le refroidissement UFC précité est avantageusement effectue avec une vitesse de refroidissement supérieure a 150°C/s pour une bande d'une épaisseur de 4 mm
Enfin, le second refroidissement lent est effectue immédiatement après le refroidissement brusque, c'est-a-dire essentiellement pendant le bobinage de la bande Ce refroidissement est opère depuis la température de bobinage jusqu'à une température ou il ne se produit plus de transformation de la microstructure, c'est-a-dire en pratique jusqu'à la température ambiante Au cours de ce refroidissement lent se produit généralement la transformation de l'austenite résiduelle pour former la seconde phase, bamite ou martensite, en fonction de la température de
bobinage. Il peut cependant arriver dans certains cas que cette transformation se produise avant le refroidissement lent, c'est-à-dire pendant le refroidissement brusque.
Pour la mise en œuvre pratique de l'invention, on détermine en premier lieu les proportions respectives des phases requises dans l'acier, en fonction des propriétés désirées; on en déduit la durée du premier refroidissement lent ainsi que la température intermédiaire conduisant à la fraction requise de la première phase; on en déduit également la température de bobinage conduisant à la seconde phase requise; finalement, on applique lesdites valeurs de durée et de température pour le réglage respectivement des étapes de premier refroidissement lent et de refroidissement ultra-rapide.
Exemples
A titre d'exemples, le procédé de l'invention a été appliqué à une première série de nuances d'aciers, dont les compositions chimiques sont données dans le Tableau 1.
TABLEAU 1 - Composition chimique (sans précipitation)
Dans la pratique conventionnelle, l'acier 1 peut conduire à une microstructure biphasée (ferrite- bainite mais pas ferrite-martensite). L'acier 2 n'est pas destiné à former une microstructure multiphase, à cause des teneurs élevées en niobium et en titane, qui provoquent une transformation très rapide de l'austénite en ferπte et perlite, contrariant de ce fait le formation de bainite et/ou martensite. Enfin, l'acier 3 permet en principe la formation d'une microstructure dual phase (ferrite-martensite), grâce à ses hautes teneurs en manganèse et à un cycle thermomécanique judicieusement choisi. Une telle transformation ne se déroule cependant que difficilement sur la table de refroidissement laminaire et entraîne une importante diminution de la productivité du train à chaud,
A ces trois aciers, on a appliqué un cycle de traitement conforme à l'invention, dont les différentes étapes sont indiquées aux Tableaux 2 et 3, respectivement pour des aciers à microstructure de ferrite/bain ite (Tableau 2) et ferrite/martensite ou dual phase (Tableau 3) Ces deux tableaux donnent également les propriétés et les fractions de la seconde phase des aciers considérés.
TABLEAU 2 Aciers Ferrite / Bainite
Ce Tableau 2 montre qu'il est possible d'obtenir des microstructures multiphases, avec des propriétés de résistance et de ductilité améliorées, à partir de chacune de ces trois nuances d'aciers Ce résultat est obtenu par un choix judicieux et un contrôle adéquat de la température intermédiaire et de la température de bobinage Le choix de la température de bobinage permet de régler la fraction de ferrite transformée et par conséquent aussi la fraction de la seconde phase, celui de la température de bobinage permet de déterminer la nature de cette seconde phase (bainite ou martensite) Si cette température de bobinage est bien étudiée, elle peut également permettre l'apparition d'une troisième phase C'est notamment le cas entre 200°C et 350°C, où une fraction de martensite peut apparaître au sein d'une microstructure ferπte/bamite
TABLEAU 3 - Aciers Dual Phase
Le Tableau 3 montre qu'un refroidissement ultra-rapide de ces mêmes aciers jusqu'à une température de bobinage égale à la température ambiante conduit à la formation de martensite et par conséquent à une résistance accrue tout en conservant une bonne ductilité La
température de bobinage de 100°C correspond à un léger réchauffage de la bande après refroidissement, qui ne nuit pas à sa résistance et améliore même légèrement sa ductilité
Dans un deuxième exemple, des aciers micro-alliés ont également été soumis à un cycle de traitement suivant l'invention Leurs compositions chimiques sont données dans le Tableau 4
TABLEAU 4 - Composition chimique (avec précipitation)
Les schémas de refroidissement sont indiques dans les Tableaux 5 et 6, respectivement pour des aciers a microstructure de ferπte/bainite (Tableau 5) et ferπte/martensite (Tableau 6) De tels schémas de refroidissement, conformes à l'invention, permettent le durcissement des aciers par précipitation d'éléments de micro-alliage (Ti) sous forme de carbures Une telle précipitation est généralement impossible dans un acier multiphase conventionnel, car elle nécessite un premier refroidissement très lent (< 20°C/s) à haute température (> 600°C) Les Tableaux 5 et 6 donnent également les propriétés de résistance et de ductilité obtenues avec ces aciers
TABLEAU 5 - Aciers Ferrite / Bainite
TABLEAU 6 - Aciers Dual Phase
Le procédé de l'invention offre plusieurs avantages importants par rapport à la technique antérieure
En premier lieu, il permet de mieux maîtriser la formation des microstructures, à savoir la fraction de ferrite d'une part et la fraction ainsi que la nature de la seconde phase d'autre part Les microstructures des deux phases sont en effet obtenues par deux opérations de refroidissement totalement indépendantes, qui permettent de gérer et de réguler séparément les températures conduisant aux microstructures désirées
La première de ces deux opérations de refroidissement est effectuée sur la table de refroidissement laminaire, a partir de la température de fin de laminage La vitesse de refroidissement étant ICI peu élevée, elle est peu critique et n'est guère influencée par l'effet de l'accélération du laminoir Cette opération permet de régler le pourcentage de ferrite formée, en faisant varier les conditions de refroidissement, en particulier le nombre de sections arrosées, c'est-a-dire en fait la durée du refroidissement, pour obtenir la température intermédiaire désirée
La seconde opération de refroidissement est un refroidissement brusque, de préférence ultrarapide, jusqu'à la température de bobinage correspondant à la microstructure désirée de la seconde phase, soit bainite ou martensite Ce refroidissement a pour effet de figer la microstructure formée au cours du premier refroidissement lent afin de permettre la reprise de la transformation a la température de bobinage
De ce fait, les microstructures étant contrôlées par le biais des températures du cycle de traitement, il est possible d'obtenir différentes propriétés mécaniques au départ d'une même nuance d'acier De même, le procède de l'invention permet de créer des microstructures multiphases et de conférer des propriétés intéressantes a des nuances d'aciers qui n'étaient pas prévues antérieurement a cette fin
De plus, le procède de l'invention n'est plus limite a un nombre restreint de compositions chimiques déterminées pour l'obtention des microstructures désirées En effet ces microstructures ne dépendent plus de la composition chimique de l'acier, mais elles sont le résultat des diverses possibilités de combinaison du refroidissement laminaire lent et du refroidissement brusque qui le suit II est des lors possible d'adapter plus aisément la composition chimique des aciers pour améliorer leurs propriétés mécaniques telles que la résistance a la fatigue ou au vieillissement l'aptitude au soudage ou a l'expansion de trou l'état de surface ou encore l'aptitude au découpage II peut également en résulter une diminution des coûts de production de l'acier lies par exemple a une baisse de productivité ou a des opérations telles que l'ecπquage ou le décapage