COMPOSITIONS PHARMACEUTIQUES CONTENANT DES DERIVES DE β- CARBOLINE, ET LEUR UTILISATION POUR LE TRAITEMENT DES CANCERS
La présente invention concerne en particulier des compositions pharmaceutiques contenant des dérivés de la β-carboline, un alcaloïde, correspondant notamment à ceux extraits de Peganum harmala, tels que l'harmine, l'harmane et l'harmalacidine, et leur utilisation dans le cadre du traitement des cancers.
Structure de la β-carboline Peganum harmala, herbe d'Afrique du Nord et d'Asie, est utilisée en médecine traditionnelle dans de nombreuses affections. Les alcaloïdes de Peganum sont connus pour leurs propriétés antibactériennes, antifongiques, antivirales, hypothermiques et surtout leurs effets hallucinogènes. (Boukef, « Les plantes dans la médecine traditionnelle tunisienne », Agence de Coopération Culturelle et Technique, Paris 1986) Une étude précédente a démontré une activité anti tumorale d'extraits des graines de P. harmala sur les tumeurs du rat et de la souris. Ainsi, l'administration d'un extrait brut alcaloïdique de graines de P. harmala, à la dose de 50 mg/kg/jours, par voie orale, a fait disparaître des tumeurs de souris greffées (sous cutané) chez 80 % des souris traitées (Lamchouri ét al. (1999) Thérapie 54 : 753-758). Par ailleurs, certains alcaloïdes purifiés et isolés de P. harmala ont montré une cytotoxicité modérée vis-à-vis de cellules tumorales murines, avec la concentration inhibant à 50 % la croissance cellulaire (IC50) de 19,2 à 60 μg/ml pour la vasicinone, 2,4 à 18,4 μg/ml pour l'harmine, inactif pour la péganine et 8,0 à 28,9 μg/ml pour l'harmalacidine (Lamchouri, thèse « Propriétés cytotoxiques et antitumorales de Peganum harmala sur des modèles expérimentaux de cancers in vitro et in vivo » (2000) Faculté des Sciences Dhar Mahraz, Fès, Maroc). Enfin, une autre étude a également démontré une action cytotoxique modérée de certains dérivés de la β-carboline, tels l'harmine (IC50 de 1,6 à 18,5 μg/ml) et l'harmane (IC50
de 8 à 20 μg/ml) sur certaines lignées cellulaires tumorales humaines (Ishida et al. (1999) Bioorg. Med. Chem. Lett. 9 : 3319-3324). On considère en général que pour un composé donné, une IC50 inférieure à 0,01 μg/ml sur des cellules humaines est nécessaire pour pouvoir envisager un passage à des tests in vivo chez la souris. Par ailleurs, il n'est fait aucune mention dans l'art antérieur d'un quelconque effet anti-tumoral in vivo de dérivés de /3-carboline, correspondant notamment à ceux extraits de P. harmala. De plus, il convient de noter que la démonstration d'une activité cytotoxique d'un composé donné vis-à-vis de lignées cellulaires tumorales, même humaines, n'implique en rien un effet anti-tumoral in vivo. En effet, ce composé peut par exemple s'avérer inactif in vivo ou bien présenter une cytotoxicité telle qu'elle est incompatible avec son administration à un être vivant. De même, des composés actifs sur des tumeurs murines ne sont pas nécessairement actifs sur des cancers humains. La présente invention a donc pour objet de fournir des compositions pharmaceutiques comprenant des composés dérivés de la /3-carboline pour la préparation de médicaments destinés au traitement des cancers. La présente invention a également pour objet de fournir un autre composé susceptible d'entrer en synergie avec des composés dérivés de la /3-carboline pour la préparation de médicaments destinés au traitement des cancers. Ainsi, la présente invention concerne l'utilisation d'au moins un composé de formule générale (1)
dans laquelle : - Ri représente H, OH, ou un groupement alkoxyle de 1 à 12 atomes de carbone, - R2 représente H, un groupement alkoxycarbonyle de 1 à 12 atomes de carbone, notamment le groupement tert-butoxycarbonyle, ou un groupement alkyle de 1 à 12 atomes de carbone,
- R3 représente O ou CH , sous réserve que, lorsque R3 représente O, alors a représente une double liaison, b et c représentent une simple liaison et R.t représente H, et que lorsque R3 représente CH3 alors a représente une simple liaison, b et c représentent une double liaison et P ne représente aucun groupement ; ou de ses sels pharmaceutiquement acceptables, pour la préparation d'un médicament destiné au traitement des cancers, tels que les cancers du colon, les leucémies, les myélomes, les cancers du sein, les neuroblastomes, les hépatocarcinomes, les cancers du poumon, les cancers de la prostate, les cancers de l'ovaire, les cancers du testicule, les cancers gastriques, les cancers pancréatiques, ou les rétinoblastomes. Selon un mode de réalisation particulier de l'invention, au moins un composé de formule générale (1) est associé avec au moins un composé inhibant la replication de l'ADN. On désigne par « composé inhibant la replication de l'ADN » tout composé susceptible d'inhiber une étape de la replication de l'ADN, que se soit en inhibant l'activité des enzymes impliquées dans la replication, telles que les ADN polymérases, les topoisomérases, les hélicases, les primases, les ligases, ou en se liant ou en modifiant l'ADN, par exemple en se liant aux deux brins d'ADN (comme les agents alkylants), ou en empêchant la synthèse de la thymidine. Avantageusement, l'association d'un composé de formule générale (1) à un composé inhibant la replication de l'ADN présente des effets synergiques dans le traitement des tumeurs. Par ailleurs, le composé de formule générale (1) est avantageusement utilisé comme adjuvant destiné à augmenter les effets de composés inhibant la replication de l'ADN dans le cadre de la préparation de médicaments anti -tumoraux. Comme on l'entend ici, le terme « association » signifie que le composé de formule générale (1) et le composé inhibant la replication de l'ADN sont tous deux présents de manière structurellement indépendante dans un médicament ou une composition pharmaceutique selon l'invention et qu'ils ne sont pas liés entre eux par des liaisons chimiques fortes de type covalentes ou de coordination. Parmi les sels pharmaceutiquement acceptables des composés de formule générale (1), les sels de chlorhydrate sont particulièrement préférés. Selon un mode de réalisation plus particulier de l'invention, le composé de formule générale (1) correspond : - aux composés de formule (2) suivante,
- ou aux composés de formule (3) suivante,
dans lesquelles Rj et R2 sont tels que définis ci-dessus. Selon un mode de réalisation encore plus particulier de l'invention, le composé de formule générale (1) correspond à : - l'harmine (4) :
- l'harmane (5)
- ou à l'harmalacidine (6)
Avantageusement, les Inventeurs ont démontré que l'harmine ainsi que l'harmalacidine avaient une action anti-tumorale in vivo, notamment sur des tumeurs humaines. Cette action est renforcée lorsque l'harmine et l'harmalacidine sont administrées en association avec un composé inhibant la replication de l'ADN.
Avantageusement, les sels pharmaceutiquement acceptables des composés de formules (4), (5) et (6) ci-dessus peuvent également être utilisés selon l'invention, et notamment le chlorhydrate d'harmine, le chlorhydrate d'harmane et le chlorhydrate d'harmalacidine. Par ailleurs, il a été montré que l'haπnane, dont la structure chimique est proche de celle de l'harmine, possède une cible cellulaire commune avec l'harmine (Sobhani et al. (2002) J. Pharm. Pharmaceut. Sci. 5 : 19-23). Il peut donc être utilisé au même titre que l'harmine dans le cadre de l'invention. Selon un autre mode de réalisation particulier de l'invention, le composé inhibant la replication de l'ADN est choisi parmi le groupe comprenant : - un agent alkylant, tel que le cyclophosphamide, la mitomycine C ou le thiotépa ; - un antimétabolite, tel que la 5-fluorouracile, l'ara C ou le méthotrexate ; - un complexe de coordination du platine, tel que le carboplatine ou le cisplatine ; - ou un agent inhibant la topoisomérase II, tel que la doxorubicine, la mitoxantrone ou l'amsacrine. Ces composés sont bien connus de l'homme de l'art. En particulier, un agent alkylant agit en empêchant la séparation des deux brins d'ADN d'un même fragment en réalisant un pontage covalent solide. Un antimétabolite empêche, soit en prenant la place des bases (5-fluorouracile ou ara- C), soit en inhibant la synthèse enzymatique de la thymidine (5-fluorouracile, méthotrexate). Les complexes de coordination du platine réalisent notamment un pontage solide entre les deux brins d'ADN d'un même fragment. La topoisomérase II a pour activité de couper et de ressouder les deux brins d'ADN d'un même fragment dans le cadre de la relaxation des ADN surenroulés. Selon un mode de réalisation préféré de l'invention, celle-ci concerne l'utilisation telle que définie ci-dessus, dans laquelle la quantité molaire de composé de formule générale (1) est supérieure à la quantité molaire du composé inhibant la replication de l'ADN qui lui est associé. En particulier, la quantité molaire de composé de formule générale (1) est moins supérieure de 20% à la quantité molaire du composé inhibant la replication de l'ADN qui lui est associé. Selon un mode de réalisation préféré de l'invention, celle-ci concerne l'utilisation telle que définie ci-dessus d'harmine ou d'harmalacidine, et de cyclophosphamide. Selon un autre mode de réalisation préféré de l'invention, celle-ci concerne l'utilisation telle que définie ci-dessus d'harmine ou d'harmalacidine, et de 5-fluorouracile.
La présente invention concerne également une composition pharmaceutique comprenant à titre de substance active au moins un composé de formule générale (1), ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables, en association avec au moins un composé inhibant la replication de l'ADN et un véhicule pharmaceutiquement acceptable. Selon un mode de réalisation préféré de l'invention, la composition pharmaceutique est telle que le composé de formule générale (1) correspond à : - l'harmine (4) :
- l'harmane (5)
- ou à l'harmalacidine (6)
Selon un autre mode de réalisation préféré de l'invention, la composition pharmaceutique est telle que le composé inhibant la replication de l'ADN est choisi parmi le groupe comprenant : - un agent alkylant, tel que le cyclophosphamide, la mitomycine C ou le thiotépa ; - un antimétabolite, tel que la 5-fluorouracile, l'ara C ou le méthotrexate ; - un complexe de coordination du platine, tel que le carboplatine ou le cisplatine ; - ou un agent inhibant la topoisomérase II, tel que la doxorubicine, la mitoxantrone ou l'amsacrine. Selon un autre mode de réalisation préféré, la composition pharmaceutique selon l'invention convient pour une administration par voie orale ou intraveineuse.
Selon un mode de réalisation particulièrement préféré, la composition pharmaceutique selon l'invention comprend à titre de substance active de l'harmine ou de l'harmalacidine, en association avec du cyclophosphamide et un véhicule pharmaceutiquement acceptable. Selon un mode de réalisation plus particulièrement préféré, la composition pharmaceutique susmentionnée convient pour l'administration par voie orale : d'environ 1 à environ 10 mg/kg/j d'harmine, ou d'environ 1 à environ 5 mg/kg/j d'harmalacidine, et d'environ 1 à environ 5 mg/kg/j de cyclophosphamide. Selon un autre mode de réalisation plus particulièrement préféré, la composition pharmaceutique susmentionnée convient pour l'administration par voie intraveineuse : d'environ 1 à environ 3 mg/kg/j d'harmine, ou d'environ 1 à environ 3 mg/kg/j d'harmalacidine, et d'environ 1 à environ 5 mg/kg/j de cyclophosphamide. Selon un autre mode de réalisation particulièrement préféré, la composition pharmaceutique selon l'invention comprend à titre de substance active de l'harmine ou de l'harmalacidine, en association avec de la 5-fluorouracile et un véhicule pharmaceutiquement acceptable. Selon un mode de réalisation plus particulièrement préféré, la composition pharmaceutique susmentionnée convient pour l'administration par voie orale : d'environ 1 à environ 10 mg/kg/j d'harmine, ou d'environ 1 à environ 5 mg/kg/j d'harmalacidine, et d'environ 1 à environ 10 mg kg/j de 5-fluorouracile. Selon un autre mode de réalisation plus particulièrement préféré, la composition pharmaceutique susmentionnée convient pour l'administration par voie intraveineuse : d'environ 1 à environ 3 mg/kg/j d'harmine, ou d'environ 1 à environ 3 mg/kg/j d'harmalacidine, et d'environ 1 à environ 5 mg/kg/j de 5-fluorouracile. Selon un mode de réalisation préféré, la composition pharmaceutique telle que définie ci-dessus convient pour l'administration d'une quantité molaire de composé de formule générale (1) supérieure à la quantité molaire du composé inhibant la replication de l'ADN qui lui est associé. En particulier, la composition pharmaceutique convient pour l'administration d'une quantité molaire de composé de formule générale (1) au moins supérieure de 20% à la quantité molaire du composé inhibant la replication de l'ADN qui lui est associé. La présente invention concerne également des produits contenant - au moins un composé de formule générale (1), ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables, et - au moins un composé inhibant la replication de l' ADN,
comme produits de combinaison pour une utilisation simultanée, séparée ou étalée dans le temps dans le cadre du traitement des cancers, tels que les cancers du colon, les leucémies, les myélomes, les cancers du sein, les neuroblastomes, les hépatocarcinomes, les cancers du poumon, les cancers de la prostate, les cancers de l'ovaire, les cancers du testicule, les cancers gastriques, les cancers pancréatiques, ou les rétinoblastomes. Comme on l'entend ici, le terme « combinaison » signifie que le composé de formule générale (1) et le composé inhibant la replication de l'ADN sont tous deux présents de manière structurellement indépendante dans les produits selon l'invention et qu'ils ne sont pas liés entre eux par des liaisons chimiques fortes de type covalentes ou de coordination. Selon un mode de réalisation particulier de l'invention, les produits de combinaison sont tels que le composé de formule générale (1) correspond à : - l'harmine (4) : s
- l'harmane (5)
ou à l'harmalacidine (6)
Selon un autre mode de réalisation particulier de l'invention, les produits de combinaison sont tels que le composé inhibant la replication de l'ADN est choisi parmi le groupe comprenant : - un agent alkylant, tel que le cyclophosphamide, la mitomycine C ou le thiotépa ; - un antimétabolite, tel que la 5-fluorouracile, l'ara C ou le méthotrexate ; - un complexe de coordination du platine, tel que le carboplatine ou le cisplatine ;
- ou un agent inhibant la topoisomérase II, tel que la doxorubicine, la mitoxantrone ou l'amsacrine. Selon un mode de réalisation préféré, l'invention concerne des produits tels que définis ci-dessus, contenant - de l'harmine ou de l'harmalacidine, et - de la 5-fluorouracile, comme produits de combinaison pour une utilisation simultanée, séparée ou étalée dans le temps dans le cadre du traitement des cancers, tels que les cancers du colon, les cancers du sein, les hépatocarcinomes, les cancers du poumon, les cancers de la prostate, les cancers de l'ovaire, les cancers gastriques, ou les cancers pancréatiques. Selon un autre mode de réalisation préféré, l'invention concerne des produits tels que définis ci-dessus, contenant : - de l'harmine ou de l'harmalacidine, et - du cyclophosphamide, comme produits de combinaison pour une utilisation simultanée, séparée ou étalée dans le temps dans le cadre du traitement des cancers, tels que les cancers du colon, les leucémies, les myélomes, les cancers du sein, les neuroblastomes, les hépatocarcinomes, les cancers du poumon, les cancers de l'ovaire, les cancers du testicule, ou les rétinoblastomes. Selon un mode de réalisation préféré, les produits tels que définis ci-dessus comprennent une quantité molaire de composé de formule générale (1) supérieure à la quantité molaire du composé inhibant la replication de l'ADN avec lequel il est en combinaison. En particulier, les produits comprennent une quantité molaire de composé de formule générale (1) au moins supérieure de 20% à la quantité molaire du composé inhibant la replication de l'ADN avec lequel il est combinaison.
DESCRIPTION DES FIGURES
Figure 1
La Figure 1 représente l'évolution de la taille de tumeurs HT29 (en cm3, axe des ordonnées) greffée sur des souris NOD-SCID non-traitées (losanges), ou traitées par de l'harmine à 100 mg/kg/jour (croix), 125 mg/kg/jour (carrés), 150 mg/kg/jour (triangles) ou 175 mg/kg/jour (cercles) en fonction du temps (en jours, axe des abscisses).
Figure 2A et Figure 2B
La Figure 2A représente l'évolution de la taille de tumeurs HT29 (en cm3, axe des ordonnées) greffée sur des souris NOD-SCID non-traitées (croix), ou traitées par du cyclophosphamide à 50 mg/kg/jour (triangles), 100 mg/kg/jour (carrés), ou par un mélange harmine 100 mg/kg/jour + cyclophosphamide 100 mg/kg/jour (cercles) ou harmine 150 mg/kg/jour + cyclophosphamide 50 mg/kg/jour (losanges) en fonction du temps (en jours, axe des abscisses).
La Figure 2B représente l'évolution de la taille de tumeurs HT29 (en cm3, axe des ordonnées) greffée sur des souris NOD-SCID non-traitées (losanges), ou traitées par de l'harmine à 150 mg/kg/jour (triangles), du cyclophosphamide à 50 mg/kg/jour (croix), ou par un mélange harmine à 150 mg/kg/jour + cyclophosphamide à 50 mg/kg/jour (cercles) en fonction du temps (en jours, axe des abscisses).
Figure 3A et Figure 3B
La Figure 3A représente l'évolution de la taille de tumeurs HT29 (en cm3, axe des ordonnées) greffée sur des souris NOD-SCID non-traitées (cercles), ou traitées par de la 5-fiuorouracile à 3 mg/kg/jour (triangles), 6 mg/kg/jour (carrés), 9 mg/kg/jour (croix), 12 mg/kg/jour (losanges) ou 24 mg/kg/jour (tirets) en fonction du temps (en jours, axe des abscisses).
La Figure 3B représente l'évolution de la taille de tumeurs HT29 (en cm3, axe des ordonnées) greffée sur des souris NOD-SCLD non-traitées (triangles), ou traitées par de l'harmine à 150 mg/kg/jour (croix), de la 5-fluorouracile à 12 mg/kg/jour (carrés), ou par un mélange harmine à 150 mg/kg/jour + 5-fluorouracile à 12 mg/kg/jour (cercles) en fonction du temps (en jours, axe des abscisses).
Figure 4
La Figure 4 représente l'évolution de la taille de tumeurs HT29 (en cm3, axe des ordonnées) greffée sur des souris NOD-SCID non-traitées (carrés), ou traitées par de l'harmalacidine à 25 mg/kg/jour (triangles) ou à 50 mg/kg/jour (croix), par du cyclophosphamide à 50 mg/kg/jour (losanges), ou par un mélange harmalacidine 25 mg/kg/j + cyclophosphamide 50 mg/kg/j (tirets) ou harmalacidine 50 mg/kg/j + cyclophosphamide 50 mg/kg/jour (cercles), en fonction du temps (en jours, axe des abscisses).
EXEMPLES
EXEMPLE 1
Extractions d'alcaloïdes de Peganum harmala
De la poudre de graines de P. harmala (Zygophyllaceae) broyées (1 kg) a été extraite au méthanol. Après évaporation du solvant, le résidu a été solubilisé dans de l'acide chlorhydrique à 2 %. La solution aqueuse acide a ensuite été lavée par du dichloromethane, puis alcalinisée par du bicarbonate de sodium et extraite au dichloromethane. La phase organique laisse alors un extrait brut d'un mélange des alcaloïdes (24 g) par évaporation du solvant. L'extrait est soumis à une chromato graphie sur colonne de silice en éluant par un mélange dichlorométhane/méthanol (9/1) et séparé en 23 fractions. La cristallisation des fractions 3 à 5 dans un mélange dichlorométhane/méthanol fournit l'harmine (A) pure (3 g) (M : 212,3 ; F. 261 °C. (261°C ; Goebel, F. Justus Liebigs Ann. Chem. 1841, 38, 363 et Hochstein, A. J. Amer. Chem. Soc, 1957, 49, 5735)). La vasicine (B) est extraite des fractions 10 à 12, l'harmalacidine (C) (12,6 g, M:216, F. 197 °C (197-198 °C ; Hashimoto, Y., Kawanishi, K. Phytochemistry 1976, 15, 1559-1560 ; Siddiqui, S. Heterocycles 1988, 27, 1401)) des fractions 17 à 21 et la déméthylharmalacidine (D) des fractions 22 à 23.
A B C D
L'harmine a été précisément caractérisée :
- le spectre de masse de l'harmine montre l'ion moléculaire [M]'+ à m/z 212 Dalton, correspondant à la formule brute Cι3H]2N20 (M: 212.3). - l'analyse des spectres de RMN 1H et 13C et des spectres en 2 dimensions COSY, HSQC et HMBC confirme la structure de l'harmine ci-dessous.
Harmine (A)
- le chlorhydrate de l'harmine dihydraté a également été analysé ; F. 262°C (268-270 °C ; The Merck Index, Xth, M. Windholz, éd., Merck 1 co., Inc., Rahway, N.J. USA, 1983, p.666), M. 284,8 ;
- la toxicité a été déterminée chez la souris BALB/c ; dose létale 50 (DL50) 300 mg/kg per os. (243 mg/kg, se, souris, 38 mg/kg, iv, The Merck Index, Xth, M. Windholz, éd., Merck 1 co., Inc., Rahway, N.J. USA, 1983, p.666).
L'harmalacidine a également été caractérisée :
- le spectre de masse de l'harmalacidine montre l'ion moléculaire [M] + à m/z 216 Dalton, correspondant à la formule brute Cι H12N2O2 (M : 216,2).
- l'analyse des spectres de RMN 1H et 13C et des spectres en 2 dimensions COSY, HSQC et HMBC confirme la structure de l'harmalacidine ci-dessous (Hashimoto, Y., Kawanishi, K.
Phytochemistry 1976, 15, 1559-1560 ; Siddiqui, S. Heterocycles 1988, 27, 1401).
Harmalacidine (C) - la masse moléculaire du chlorhydrate dihydraté d'harmalacidine : M 288.
EXEMPLE 2 Effets cytotoxiques des alcaloïdes de P. harmala in vitro
Les effets cytotoxiques des différents extraits alcaloïdiques de P. harmala ont été étudiés sur plusieurs lignées cellulaires : - des lignées de cellules leucémiques humaines : K562 et Jurkat (leucémie), U937 (myelome),
- des lignées de cellules de tumeurs solides humaines : KB (epithéliome du nasopharynx) et HT29 (colon), - des lignées de cellules endothéliales immortalisées de moelle osseuse humaine: HBMEC. Les cellules sont cultivées en éruve sous atmosphère 5 % CO2 et à 37°C, en milieu RPMI1640 pour K562, Jurkat, U937 et HT29 et DMEM pour KB, supplémenté de sérum de veau foetal 10 %, de pénicilline-streptomycine 0,01 % et de L-glutamine 2 mM et en milieu EGM2 pour les cellules HBMEC. Le test de cytotoxicité est réalisé dans une microplaque de 96 puits en présence de l'extrait à tester à des concentrations variées de 40, 20, 10, 5, 1, 0,5 μg/ml et en l'absence de produit, après une incubation de 4 jours à 37°C. Au 3ème jour, on ajoute une solution de rouge neutre qui est absorbé par des cellules vivantes. La densité optique (DO) de colorant libéré par cellules lysées est mesurée à 540 nm par un lecteur de plaques Elisa. La toxicité (% inhibition de croissance) est inversement proportionnelle à la densité optique. Le pourcentage d'inhibition est défini comme étant la différence entre la DO sans produit et la DO en présence de produit rapportée à la DO sans produit La concentration inhibant à 50 % la croissance cellulaire est obtenue à partir de la courbe représentative du pourcentage d'inhibition en fonction du logarithme de la concentration. L'ensemble des résultats obtenus est rassemblé dans le Tableau 1. suivant.
Tableau 1 : cytotoxicité in vitro des alcaloïdes de Peganum harmala
Pour résumer, l'IC5o vis-à-vis des cellules cancéreuses et endothéliales testées est la suivante :
5 à 12 μg/ml pour l'extrait brut d'alcaloïdes, 2,9 à 4,6 μg/ml (14 - 22 μM) pour l'harmine, 3 à 10 μg/ml (10,5 - 35 μM) pour le chlorhydrate d'harmine, et 10,5 à 29 μg/ml (34,4 - 134 μM) pour le chlorhydrate d'harmalacidine.
EXEMPLE 3
Acitivité antitumorale in vivo de l'harmine
Matériels et méthodes Le modèle animal choisi et celui de souris sévèrement immunodéficientes cumulées
(NOD-SCID) ayant reçu une xénogreffe de cellules tumorales humaines. Des souris NOD-SCLO, mâles et femelles, de plus de 3 mois, ont été élevées dans un environnement de stricte stérilité, en isolateur ventilé par de l'air filtré et stérilisé, à 22°C et 40 % d'humidité, sous un cycle jour- 12h/nuit-12h. Les cages, biberons et l'eau ont été stérilisés en autoclave à 120 °C pendant 30 minutes et les aliments ainsi que les litières sont traitées par irradiation γ. Toutes les manipulations ont été réalisées aseptiquement sous une hotte à flux laminaire. Les souris ont été soumises à une anesthésie générale par injection i.p. de 0,3 à 0,4 ml de hypnomidate à 2 mg/ml. lxlO7 cellules tumorales humaines coliques HT29 en suspension dans 200 μl de PBS ont ensuite été injectées en sous-cutanée, dans le dos des souris. Au lOème jour de greffe la longueur de la tumeur atteint environ 1 cm. 201 mg de chlorhydrate d'harmine ont été dissous dans 8 ml d'eau et la solution obtenue a été stérilisée par filtration sur une membrane de porosité 0,22 μm. Au dixième jour suivant la greffe, l'harmine a été administrée par voie orale (per os) à l'aide d'une sonde gastrique à raison de 0 (témoin), 100, 125, 150, 175 et 200 mg/kg/jour pendant 60 jours respectivement à 6 groupes de 5 souris. Le volume approximatif de la tumeur a été calibré et calculé régulièrement selon la formule : Volume (cm3) = longueur (cm) x largeur (cm) x hauteur (cm)x 0,5
Résultats Les résultats obtenus sont présentés dans le Tableau 2 et dans la Figure 1.
Tableau 2 : traitement par l'harmine de souris xenogreffées par des cellules tumorales humaines HT29
Groupe Dose Volume moyen des tumeurs des souris traitées par rapport au d'harmine volume moyen des tumeurs des souris non traitées (T/C) (%) (mg/kg/jour) Jour 30 Jour 40 Jour 50 Jour 60 1 0 100 100 100 100 2 100 74 77 84 105 3 125 55 58 54 67 4 150 41 46 42 51 5 175 40 10 30 40 6 200 - - - -
L'action inhibitrice de l'harmine sur la croissance des tumeurs s'est manifestée de manière dose dépendante entre 125 à 175 mg. La dose de 100 mg/kg/jour a un très faible effet. La dose de 125 mg/kg/jour commence à montrer un effet significatif : le volume de la tumeur atteint 55 à 67 % du volume de la tumeur du groupe non traité. A la dose de 150 mg/kg/jour, le volume de la tumeur représente seulement 42 % de celui du groupe témoin jusqu'au jour 50, mais atteint 51 % au 60eme jour. La dose de 175 mg/kg/jour s'est montrée efficace avec T/C = 40 %, pendant toute la durée de traitement. La dose de 200 mg/kg/jour n'a pas été tolérée, les souris sont mortes après quelques jours de traitement.
EXEMPLE 4
Activité antitumorale in vivo du cyclophosphamide, seul ou en association avec l'harmine
L'activité antitumorale du cyclophosphamide (M=261), seul ou en association avec l'harmine, a été mesurée selon la méthodologie de l'Exemple 3. 150 mg de cyclophosphamide (Sigma) ont été dissous dans 8 ml d'eau et la solution obtenue a été stérilisée par filtration sur une membrane de porosité 0,22 μm. Les souris ont reçu soit 50, 100, ou 150 mg/kg/jour de cyclophosphamide seul, soit un mélange harmine 150 mg/kg/jour + cyclophosphamide 50 mg/kg/jour ou harmine 100 mg/kg/jour + cyclophosphamide 100 mg/kg/jour. Les résultats obtenus sont présentés dans le Tableau 3 et dans les Figures 2A et 2B.
Tableau 3 : Traitement par le cyclophosphamide, seul ou en association avec l'harmine, de souris xenogreffées par des cellules tumorales humaines HT29
Groupe Dose Dose de Volume moyen des tumeurs des souris traitées d'harmine cyclophosphamide par rapport au volume moyen des tumeurs des (mg/kg/jour) (mg/kg/jour) souris non traitées (T/C) (%) Jour 15 Jour 30 Jour 40 Jour 50 Jour 60 1 0 0 100 100 100 100 100 2 0 50 63 42 37 36 32 3 0 100 47 25 18 14 15 4 0 150 4 5 150 50 20 10 7 8 9 6 100 10(3 36 16 11 10 9
Lorsque le cyclophosphamide est administré seul (Tableau 3, Figures 2A, 2B), la dose de 50 mg/kg/jour conduit à un rapport T/C de40 à 30 %. La dose de 100 mg/kg/jour a inhibé très fortement la croissance tumorale: T/C de 25 à 15 %. A la dose de 150 mg/kg/jour, le volume de tumeur n'a pratiquement pas augmenté, mais les souris n'ont pas supporté cette dose et sont toutes mortes aux environs du 15ème jour de traitement. Lors de l'administration simultanée de l'harmine 150 mg avec le cyclophosphamide 50 mg/kg/jour (Tableau 3, Figure 2B) (rapport molaire harmine / cyclophosphamide 3,7 / 1), le volume tumoral est demeuré stationnaire avec un rapport T/C à moins de 10 % jusqu'au 60ème jour du traitement. L'association harmine - cyclophosphamide présente donc un effet synergique sur l'inhibition de la croissance tumorale, par rapport à l'utilisation d'harmine seule et de cyclophosphamide seul aux concentrations utilisées dans le mélange. Ceci permet d'envisager l'utilisation de cette association pour le traitement des cancers. Toutefois, il convient de noter que l'association de l'harmine 150 mg/kg/jour avec 50 mg/kg/jour de cyclophosphamide a été mal toléré à partir de 30ème jour. Le symptôme d'intoxication cumulative est mis en évidence par le jaunissement du pelage ou l'apparition d'oedème par un trouble hépato-rénal qui disparaissent par arrêt du cyclophosphamide. Il a donc fallu arrêter l'administration journalière de cyclophosphamide et passer à un cycle 7 jours de repos-3 jours de traitement. L'harmine par contre a été donnée sans interruption. Les souris ayant subi ce traitement combiné et ménagé ne présentent pas de signe d'intoxication et 75 % des souris ainsi traitées ont survécu plus de 100 jours avec un volume tumoral de moins de 1 cm3.
L'association harmine 100 mg/kgjour + cyclophosphamide 100 mg/kg/jour donne une inhibition de la croissance tumorale semblable, avec un rapport T/C proche de 10 % (Tableau 3, Figure 2AY
EXEMPLE 5
Acitivité antitumorale in vivo de la 5-fluorouracile, seule ou en association avec l'harmine
L'activité antitumorale de la 5-fluorouracile (M=130), seule ou en association avec rharmine, a été mesurée selon la méthodologie de l'Exemple 3. 50 mg de 5-fluorouracile (Sigma) ont été dissous dans 8 ml d'eau et la solution obtenue a été stérilisée par filtration sur une membrane de porosité 0,22 μm. Les souris ont reçu soit 3, 6, 9, 12, ou 24 mg/kg/jour de 5-fluorouracile seule, soit un mélange harmine 150 mg/kg/jour + 5-fluorouracile 12 mg/kg/jour. Les résultats obtenus sont présentés dans le Tableau 4 et dans les Figures 3A et SB-
Tableau 4 : Traitement par la 5-fluorouracile, seule ou en association avec l'harmine, de souris xenogreffées par des cellules tumorales humaines HT29 Groupe Dose Dose de 5- Volume moyen des tumeurs des souris traitées d'harmine fluorouracile par rapport au volume moyen des tumeurs des (mg/kg/jour) (mg/kg/jour) souris non traitées (T/C) (%) Jour 15 Jour 30 Jour 40 Jour 50 Jour 60 1 0 0 100 100 100 100 100 2 0 3 43 56 66 61 86 3 0 6 37 53 60 64 70 4 0 9 41 41 59 52 59 5 0 12 73 66 54 47 59 6 0 24 17 54 54 7 150 12 25 26 22 21 23 Lorsque la 5 -fluorouracile est délivrée seule per os, à des doses comprises entre 3 et
12 mg/kg/jour, pendant 60 jours (Tableau 4 et Figure 3A), les tumeurs (HT29) continuent de croître. Avec la dose de 12 mg/kg/j, la taille des tumeurs croît lentement jusqu'à J50 (T/C=52%), puis les tumeurs se remettent à croître plus rapidement, pour atteindre à J60 une taille semblable à celle observée avec la dose de 9 mg/kg/j. La dose de 24 mg/kg/j, administrée avec une alternance de 6 jours de traitement et de 6 jours de repos, est efficace
jusqu'au 20ème jour du traitement (T/C=17 %) mais, par la suite, l'efficacité décroît : au 30ème jour (T/C=54 %). Cette dose devient létale entre les 35 et le 45ème jour d'administration. L'harmine 150 mg/kg/j a été administrée simultanément en combinaison avec des doses croissantes de 5 -fluorouracile : 3, 6, 9 et 12 mg/kg/j respectivement. Seule l'association harmine 150 mg/kg/jour + 5 -fluorouracile 12 mg/kg/jour est portée dans le Tableau 4 (rapport molaire harmine / 5-fluorouracile de 7,7 / 1). Cette association, administrée en cycle de 6 jours de traitement et 6 jours de repos, possède des effets synergiques sur l'inhibition de la croissance tumorale (Tableau 4, Figure 3B et a pu maintenir le volume tumoral inférieur à 1,3 cm3 même au 60ème jour de traitement, avec 23 % de T/C.
EXEMPLE 6
Acitivité antitumorale in vivo de la vinblastine, seule ou en association avec l'harmine L'activité antitumorale de la vinblastine est dose-dépendante entre 0,125 et 0,5 mg/kg/j jusqu'au 40ème jour, par administration sous cutanée. Une dose supérieure à 1 mg/kg/j n'a pas été supportée par les souris NOD-SCID au-delà du 6eme jour. Aucun effet synergique n'a été observé pour les combinaisons harmine 150 mg/kg/j et vinblastine 0,125, 0,25 et 0,5 mg /kg/j respectivement.
EXEMPLE 7
Acitivité antitumorale in vivo de l'harmalacidine, seule ou en association avec le cyclophosphamide L'activité antitumorale de l'harmalacidine, seule ou en association avec le cyclophosphamide, a été mesurée selon la méthodologie de l'Exemple 3. 100 mg de chlorhydrate dihydraté d'harmalacidine ont été dissous dans 8 ml d'eau et la solution obtenue a été stérilisée par filtration sur une membrane de porosité 0,22 μm. Les souris ont reçu soit 25, 50, ou 100 mg/kg/jour de l'harmalacidine seule, soit un mélange harmalacidine à 25 ou 50 mg/kg/jour + cyclophosphamide 50 mg/kg/jour. Les résultats obtenus sont présentés dans le Tableau 5 et dans la Figure 4.
Tableau 5 : Traitement par l'harmalacidine, seule ou en association avec le cyclophosphamide, de souris xenogreffées par des cellules tumorales humaines HT29 Groupe . Dose Dose de Volume moyen des tumeurs des souris d'harmalacidine cyclophosphamide traitées par rapport au volume moyen des (mg/kg/jour) (mg/kg/jour) tumeurs des souris non traitées (T/C) (%) Jour 15 Jour 30 Jour 40 Jour 50 Jour 60 1 0 0 100 100 100 100 100 2 25 0 81 72 70 65 77 3 50 0 42 56 48 45 57 4 100 0 mort - - - - 5 25 50 45 29 26 23 25 6 50 50 60 32 24 20 20
Lorsque l'harmalacidine est délivrée seule per os, à des doses de 25 et 50 mg/kg/jour, pendant 60 jours (Tableau 5 et Figure 4), les tumeurs (HT29) croissent lentement jusqu'à J50 (T/C=65 et 45%), puis se remettent à croître plus rapidement, pour atteindre à J60 T/C=77 et 57 %. La dose de 100 mg/kg/j n'a pas été supportée plus de 10 jours. L'harmalacidine 25 ou 50 mg/kg/j a été administrée simultanément en combinaison avec le cyclophosphamide 50 mg/kg/j. Cette association, administrée en cycle de 5 jours de traitement et 2 jours de repos, manifeste des effets synergiques sur l'inhibition de la croissance tumorale (Tableau 5, Figure 4) et a pu maintenir le volume tumoral inférieur à 1,5 et 1,2 cm3 même au 60eme jour de traitement, avec respectivement 25 et 20 % de T/C.