DISPOSITIF DE RENFORCEMENT DE FLUORESCENCE LARGE BANDE
A FAIBLES PERTES ET CAPTEUR OPTIQUE BIOLOGIQUE OU
CHIMIQUE L'UTILISANT
DESCRIPTION
DOMAINE TECHNIQUE
L'invention concerne un dispositif de renforcement de fluorescence large bande à faibles pertes. Elle concerne aussi un capteur optique biologique ou chimique utilisant un tel dispositif de renforcement de fluorescence.
ETAT DE LA TECHNIQUE ANTERIEURE
La détection de réactions chimiques ou biologiques sur un support solide par marquage fluorescent est rendue difficile par les faibles niveaux de signal émis par les fluorophores .
Il existe deux méthodes permettant de renforcer le signal émis par les fluorophores . Elles sont basées sur 1 ' exacerbation du champ excitateur par des ondes évanescentes . Ces méthodes impliquent l'utilisation de scanners dédiés. Du fait de leurs principes de fonctionnement avec des modes guidés, ces méthodes ne sont pas large-bande. L'excitation doit s'effectuer avec une condition de résonance bien déterminée .
Le document "Sensivity enhancement of optical immunosensors by the use of a surface plasmon résonance fluoroimmunoassay" de F. . ATTRIDGE et al., Biosensors & Bioelectronics, vol. 6, 1991, page 201 à
214, divulgue une méthode de renforcement de fluorescence basée sur les plasmons de surface. Cette méthode consiste à déposer sur le biocapteur, entre le substrat et la couche contenant les éléments chimiques ou biologiques, une couche mince métallique (d'argent par exemple) recouverte par une couche de silice. Le biocapteur est placé sur une lentille hémi-sphérique (ou un prisme). Le faisceau d'excitation traverse ce composant et arrive sur la couche d'argent de telle manière que des plasmons de surface soient générés. Ce phénomène crée un champ excitateur intense qui permet d'exacerber l'émission en fluorescence. Malheureusement, l'emploi d'une couche mince métallique implique l'existence de pertes non radiatives préjudiciables au renforcement de fluorescence.
Le document "Slab aveguides in Chemistry "de L. KANG et al., Critical Reviews in Analytical Chemistry, vol. 21, N° 6, 1990, pages 377 à 388, divulgue une méthode de renforcement de fluorescence basée sur l'optique guidée. Cette méthode consiste à déposer sur le biocapteur, entre le substrat et la couche contenant les éléments chimiques ou biologiques, une structure guidante. Par un dispositif de couplage approprié (prisme, réseau) la lumière est injectée dans le guide. La réflexion de la lumière guidée à 1 ' interface guide/milieu contenant les fluorophores crée une onde évanescente dans le milieu contenant les fluorophores . Cette onde évanescente crée une surintensité qui permet d'exciter le fluorophore de telle manière qu'il émet une quantité importante de lumière .
Ces deux méthodes permettent donc d'augmenter le signal de fluorescence. Cependant, comme il a été dit plus haut, ces méthodes impliquent l'utilisation de scanners. Ces méthodes ne sont pas large-bande.
EXPOSÉ DE L'INVENTION
L'objectif de l'invention est de renforcer la fluorescence par des ondes classiques (propagatives) , ce qui permet une lecture du signal de fluorescence par des instruments commerciaux. Il s'agit de plus d'élargir les possibilités de renforcement de fluorescence en utilisant un composant fonctionnant sur une bande spectrale large. Il s'agit enfin de limiter les pertes non radiatives dues aux imperfections des matériaux employés .
La technique de détection proposée par l'invention est basée sur le dépôt d'un empilement de couches minces optiques réalisant une fonction miroir à faibles pertes non radiatives. Un premier objet de l'invention consiste en un dispositif de renforcement de fluorescence comprenant un support supportant des moyens de renforcement de fluorescence, les moyens de renforcement de fluorescence offrant une face de réception pour des éléments chimiques ou biologiques destinés à être lus par détection d'un signal de fluorescence émis par un fluorophore, associé aux éléments chimiques ou biologiques, sous l'effet d'un faisceau lumineux d'excitation, caractérisé en ce que les moyens de renforcement de fluorescence sont constitués par une couche mince diélectrique
transparente ou un empilement de couches minces diélectriques transparentes assurant une fonction miroir pour le signal de fluorescence et pour le faisceau lumineux d'excitation, le matériau de la couche mince ou de chaque couche mince de l'empilement étant choisi parmi les matériaux suivants : Ti02, Ta205, Hf02, Zr02, MgO, Si02, Si3N4, MgF2 et YF3.
L'épaisseur e de la couche mince ou l'épaisseur de chaque couche mince de l'empilement peut être calculée à partir de la formule suivante :
N.e = k.λ/4 où N est 1 ' indice de réfraction du matériau de couche mince pour la longueur λ du signal de lecture et k est un entier impair. Eventuellement, les moyens de renforcement de fluorescence sont des moyens déposés sur une face structurée du support .
Selon les applications, ladite face de réception peut être une face offrant des fonctions hydroxyles ou une face offrant des fonctions aldéhydes.
Un deuxième objet de l'invention consiste en un capteur optique biologique ou chimique constitué par le dispositif décrit ci-dessus, ladite face de réception supportant des éléments chimiques ou biologiques marqués par un fluorophore.
BRÈVE DESCRIPTION DES DESSINS
L'invention sera mieux comprise et d'autres avantages et particularités apparaîtront à la lecture de la description qui va suivre, donnée à titre
d'exemple non limitatif, accompagnée des dessins annexés parmi lesquels :
- la figure 1 est une vue en coupe transversale d'un capteur optique selon la présente invention,
- la figure 2 est une vue en coupe transversale d'un dispositif de renforcement de fluorescence selon la présente invention.
DESCRIPTION DETAILLEE DE MODES DE REALISATION DE L ' INVENTION
La figure 1 est une vue en coupe transversale d'un capteur optique, biologique ou chimique, selon la présente invention. Elle représente un substrat 1 supportant des moyens de renforcement de fluorescence 2 qui supportent à leur tour des substances chimiques ou biologiques marquées par un fluorophore. Ces substances sont représentées sous la forme d ' une couche 3. On a représenté sur cette figure une lentille de focalisation 4 et un faisceau de lecture 5 pour symboliser le système de lecture et d'excitation par microscopie en épifluorescence.
Les moyens de renforcement de fluorescence 2 peuvent être constitués par un empilement de couches minces diélectriques. Ces couches minces peuvent être constituées à partir des matériaux suivants : Ti02, Ta205, Hf02, Zr02, MgO, Si02, Si3N4, MgF2 et YF3. Ces matériaux peuvent être déposés par des techniques de type PVD (canon à électrons, pulvérisation.), par des techniques de type CVD ou par dépôt sol-gel.
Ces moyens de renforcement de fluorescence sous forme de couches minces peuvent être déposés sur 1 ' ensemble du substrat ou sur un substrat structuré . Dans ce dernier cas, ils peuvent être localisés par des techniques classiques de • lithographie, de "lift off" ou de masquage mécanique. Dans tous les cas, la stoechiométrie des matériaux doit être parfaitement maîtrisée. Un soin particulier est apporté à la dernière couche pour éviter la création de pertes non radiatives.
La dernière couche mince doit présenter une compatibilité biologique avec les sondes à greffer sur cette couche. La silice ou le nitrure de silicium présentent cette qualité de compatibilité biologique. Les moyens de renforcement de fluorescence assurent une fonction miroir pour la longueur d'onde d'excitation. Pour cela, il suffit que les épaisseurs optiques des différentes couches minces suivent la règle suivante : λ N.e = k. - (1)
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N étant 1 ' indice de réfraction du matériau considéré à la longueur d'onde d'excitation, k étant un nombre entier impair, λ la longueur d'onde d'excitation et e l'épaisseur optique de la couche considérée. On entend par "épaisseur optique" le produit de l'indice de réfraction avec l'épaisseur mécanique de la couche mince pour la longueur d'onde considérée.
On va maintenant décrire la réalisation d'un dispositif de renforcement de fluorescence pour
une biopuce à ADN, ce dispositif étant optimisé pour le fluorophore CY3.
La figure 2 montre, en coupe transversale, un tel dispositif. Sur un substrat 10 en silicium, les moyens de renforcement de fluorescence 11 ont été déposés sous la forme de cinq couches référencées 12 à 16. Ce dispositif est prévu pour une longueur d'onde d'excitation du fluorophore CY3 d'environ 550 nm
Les couches 12, 14 et 16 sont en Si02, d'indice de réfraction 1,46 pour la longueur d'onde d'excitation considérée. Les couches 13 et 15 sont en
Si3N4, d'indice de réfraction 2 pour la longueur d'onde d'excitation considérée.
En appliquant la règle (1) ci-dessus, on obtient, pour k = 1, une épaisseur mécanique de 94 nm pour chaque couche de Si02 et une épaisseur mécanique de 69 nm pour chaque couche de Si3N .
Avec cet empilement de couches, la largeur de bande disponible pour l'excitation est de + ou - 100 nm autour de la longueur d'onde de centrage de
550 nm. Il est donc compatible à la fois pour le fluorophore CY3 et le fluorophore CY5.
Pour la lecture en fluorescence, on peut utiliser un microscope optimisé pour CY3. Il est doté d'un filtre optique de sélection de la lumière d'excitation à 546 nm pour une largeur spectrale de 10 nm environ.
Les couches de Si02 peuvent être déposées par un procédé de type CVD à 800°C. Les couches de Si3N4 peuvent être déposées par un procédé de type CVD à 730°C.
Les moyens de renforcement de fluorescence peuvent ne comporter qu'une seule couche, par exemple une couche de Si02 d'épaisseur mécanique 500 nm.
On va maintenant décrire quelques étapes de greffage et d'hybridation sur le dispositif de renforcement de fluorescence selon l'invention.
Un premier exemple concerne le greffage d' oligonucléotides in situ. La face libre des moyens de renforcement de fluorescence est traitée par voie chimique pour obtenir des fonctions hydroxyles en surface. Le dispositif fonctionnalisé est ensuite introduit dans un synthétiseur automatique d' oligonucléotides (Expedite 8909, PE Biosystems) qui permet de faire croître base par base un oligonucléotide de 20 mères de séquence 3' TTT TTA TCT CAC CCA AAT Ag5 ' .
Un deuxième exemple concerne le greffage d' oligonucléotides présynthétisés. La face libre des moyens de renforcement de fluorescence est traitée par voie chimique pour obtenir dans ce cas une fonction aldéhyde. Une solution d' oligonucléotides (5 μM) comportant une fonction NH2 en 5' dans un tampon phosphate est déposée sur le substrat dans des conditions permettant la formation d'une liaison covalente imine (-CH = N-) entre le dispositif et 1 'oligonucléotide. Après une nuit d'incubation à température ambiante, le dispositif est rincé dans une solution de SDS (dodécylsulfate de sodium) puis dans l'eau. La liaison imine n'étant pas très stable, il est prévu une étape de réduction de la double liaison en présence de Na2BH4 pendant 10 minutes. Le dispositif est
à nouveau rincé avec du SDS puis avec de l'eau. Il est ensuite séché sous flux d'azote.
L'étape d'hybridation consiste à mettre en présence, le dispositif comportant les sondes et une solution constituée d'un tampon et de cibles de séquence complémentaire aux sondes comportant un fluorophore CY3 en position 5'. Les conditions d'hybridation permettant 1 ' appariement des sondes et des cibles sont les suivantes : - solution d'hybridation : 300 μl de cibles à 0,2 μM + 900 μl de tampon d'hybridation H-7140/Sigma,
- incubation dans une étuve à 40°C pendant 1 heure du dispositif recouvert de la solution,
- rinçage dans un bain de tampon SSC 2X (S- 6639/Sigma) pendant 1 minute,
- rinçage dans un bain de tampon SSC 0 , 2X (S-6639/Sigma) pendant 1 minute,
- séchage sous flux d'azote. L'observation faite avec un microscope en fluorescence (Olympus BX60) de différents empilements selon l'invention, conduit aux intensités de fluorescence suivantes pour des temps d'intégration de 1 seconde et un objectif 5X (les unités sont exprimées en unité arbitraire UA) : - Support en Si et monocouche de Si0 de
500 nm d'épaisseur déposé par décomposition de tétraéthoxysilane (TEOS) , synthèse in situ : 225 UA.
- Support en Si et empilement de couches de Si02 et de Si3N4, synthèse in situ : 593 UA. Pour ce type de greffage, le même rapport de renforcement de
fluorescence est obtenu avec une concentration de cibles 4 fois plus faible (0,05 μM au lieu de 0,2 μM) .
- Support en Si et monocouche de Si02 de 500 nm d'épaisseur déposé par décomposition de TEOS, oligonucléotides présynthétisés : 140 UA.
- Support en Si et empilement de couches de Si02 et de Si3N4, oligonucléotides présynthétisés : 326 UA.
Il faut noter que l'invention s'applique également à des systèmes de lecture de type scanners confocaux.
L'empilement de couches minces optiques diélectriques permet de vérifier plusieurs points.
Il est possible d'augmenter le champ d'excitation des fluorophores par rapport à une configuration sans empilement de couches minces. Ceci permet d'augmenter la quantité de lumière émise par les fluorophores. La solution la plus simple consiste à déposer un empilement de type quart d'onde. II est possible d'améliorer la directionnalité de la lumière émise par les fluorophores . Ceci permet d'améliorer la quantité de lumière collectée par le microscope ou le scanner de lecture. Ce n'est pas le cas pour les dispositifs de l'art antérieur.
L'emploi de cet empilement, que l'on peut assimiler à un "cristal photonique à une dimension", présente des propriétés de bande interdite qui lui procure un large domaine spectral d'excitation. La longueur d'onde d'excitation peut être choisie sur 1 ' ensemble de la largeur de bande du miroir
diélectrique (typiquement > 100 nm) . Ceci permet par ailleurs l'emploi simultané de plusieurs fluorophores compatibles avec cette bande spectrale. Ceci n'est pas le cas pour les dispositifs de l'art antérieur. La propriété précédente a également pour conséquence d'introduire une souplesse sur le choix de l'incidence de la lumière d'excitation. Ceci n'est pas le cas pour les dispositifs de l'art antérieur.
Il est possible d'obtenir un renforcement du signal en travaillant en incidence normale, dans l'espace libre sans faire appel à des structures guidantes. Dans ce cas, l'excitation des fluorophores du biocapteur est réalisée avec un système non dédié. L'invention est compatible avec des appareils commerciaux.
L'invention permet de bloquer la lumière d'excitation dans l'empilement et de limiter la fluorescence parasite venant du substrat .
L'invention permet aussi de ne pas employer de couches minces métalliques dans l'empilement. La présence de ces matériaux provoque l'apparition de pertes non radiatives qui limitent l'efficacité du renforcement de fluorescence.
L'invention propose des empilements de haute qualité optique en termes de pertes par absorption. En particulier, on cherche à minimiser l'influence de la dernière couche mince (celle sur laquelle sont déposés les fluorophores) . Cette couche est particulièrement optimisée. On cherche à obtenir des coefficients d'extinction les plus faibles possible (indice imaginaire) . Typiquement, des coefficients
d'extinction inférieures à 10"3 sont requis. Dans ce cas, les pertes non radiatives sont limitées.