SOURCE MONOCHROMATIOUE DE RAYONS X ET MICROSCOPE A RAYONS X METTANT EN ŒUVRE UNE TELLE SOURCE
DOMAINE DE L'INVENTION La présente invention concerne les sources de rayons X dits « mous », en particulier les sources mises en oeuvre pour former des images par microscopie X. La microscopie par rayons X est notamment utilisée pour l'imagerie dans les domaines de l'analyse ou de la recherche biologique, car elle permet de former des images présentant de meilleures résolutions spatiales que les images formées en lumière visible ou ultraviolette, du fait de la longueur d'onde de rayonnement inférieure.
ETAT ANTÉRIEUR DE LA TECHNIQUE
II est connu d'employer des sources de rayons X « mous » ou de grande longueur d'onde, c'est-à-dire d'énergie comprise sensiblement entre 300 et 2.000 eV. Ainsi, le document WO-01/46962 décrit un dispositif, dans lequel un jet d'eau est soumis à un bombardement d'électrons de façon à ce que les électrons de la couche K de l'oxygène contenu dans l'eau émettent des photons X « mous » lors de leur désexcitation.
Cette technique permet en particulier d'émettre des rayons X « mous » dans la « fenêtre de l'eau », c'est-à-dire des rayons X dont l'énergie est comprise entre le seuil
K du carbone à 284 eV et le seuil K de l'oxygène à 543 eV, ce qui correspond à des longueurs d'onde comprises entre 4,4 nm et 2,3 nm. Or, cette gamme d'énergie constitue un domaine préférentiel pour l'analyse biologique, car les matériaux organiques, dont le carbone est l'élément prépondérant, sont dix à vingt fois plus absorbants que l'eau qui constitue souvent la majeure partie des échantillons étudiés.
On peut donc ainsi observer des images de matériaux organiques bien contrastées.
Cependant, une telle source de rayons X à jet d'eau, du fait de la nature liquide de la cible, est évidemment difficile à mettre en œuvre et peut manquer de stabilité, donc de reproductibilité. En outre et surtout, son application est limitée par le fait que la température d'ébullition du jet d'eau sous très basse pression limite la puissance du faisceau d'électrons à un niveau trop faible pour obtenir la brillance nécessaire à une haute résolution de l'image. Ainsi, avec une telle source adjointe d'un faisceau électronique dont la puissance est limitée à 0,6 W, on ne peut atteindre qu'une brillance d'environ 5.108 photons/s.μm2.sr en émettant dans une raie de 3,8 eV de largeur spectrale.
Or, la brillance nécessaire à une haute résolution d'image serait plutôt de l'ordre de 5.1010 photons/s.μm2.sr dans une bande spectrale relativement étroite, c'est-à-dire possédant un rapport de la longueur d'onde centrale sur la largeur d'onde ^L de l'ordre de 300 à 500 (soit une largeur spectrale de 1 à 1,8 eV). Par conséquent, la brillance spectrale nécessaire est de l'ordre de :
2.1010 photons/s.μm2.sr.0,l%BW (« Band Width »).
En effet, pour obtenir une image présentant une résolution et un contraste suffisants, le capteur, constitué par exemple de 1 million de pixels, devrait recevoir environ 1.000 photons/pixel ; il faut donc 1 milliard de photons détectés par image. Or, si l'on considère que :
- le rendement de l'objectif est de 10%, la transmission de rayons X à travers l'objet est de 10%, - le rendement quantique du détecteur (conversion des photons en charges électriques) est de 70%,
- le rendement du condenseur est de 10%, le nombre de photons nécessaires devient alors de :
109 / (70% x 10% x 10% x 10%) = 1,4.1012
Or, si l'exposition dure environ 10 secondes et si l'objet est observé sous un angle ssoolliiddee ddee 77,,88..1100""33 ssrr ((oouuvveerrttuurree ddee ff//1100 ssuur un objet de 20 μm de diamètre par exemple), la brillance nécessaire est alors de :
l,4.1012 / (10 x 202 x 7,8.10"3) = 5.1010 photons/s.μm2.sr.
De même, l'utilisation de plasmas de décharge électrique pour émettre des rayons X ne permet pas d'atteindre une brillance suffisante, car la source possède de trop grandes dimensions.
Par ailleurs, une telle brillance est disponible dans les centres de rayonnements dits « synchrotrons ». Cependant, ces centres sont dédiés à la recherche et ils ne permettent pas d'effectuer rapidement et fréquemment des analyses d'échantillons biologiques en micro scopie X. En outre, de tels équipements sont extrêmement coûteux et encombrants notamment du fait des protections considérables qu'ils imposent. Par conséquent, ils sont inadaptés aux analyses en laboratoire.
Les accélérateurs linéaires sont inexploitables pour des raisons semblables (encombrement, coût, dangerosité), bien qu'ils permettent également d'obtenir la brillance et la finesse spectrale nécessaires au moyen d'une émission par effet Cerenkov issue du bombardement d'une mince feuille métallique (en titane ou en vanadium) par un faisceau d'électrons de très forte énergie (environ 10 MeV).
Une autre solution pour atteindre une telle brillance réside dans l'utilisation de plasmas générés par une très brève impulsion d'un faisceau LASER focalisé sur une cible contenant de l'azote ou du carbone. Les atomes ainsi bombardés sont ionisés et les transitions de couches par leurs électrons entraînent l'émission de photons X dans la « fenêtre de l'eau ». En adoptant les paramètres de fonctionnement adéquats (LASER de 100 Hz à 1 kHz de fréquence et de 100 mJ d'énergie), on peut obtenir une émission apportant la brillance requise avec des raies de grande finesse spectrale =$-L 300 à 1.000). Cependant, d'autres raies sont émises simultanément, nécessitant dès lors un filtrage sélectif. De plus, la cible peut se désagréger, ce qui impose de protéger les optiques de traitement des rayons X contre ces débris et de remplacer fréquemment la protection des optiques. Ce procédé d'émission s'avère donc très coûteux et peu pratique.
La présente invention a donc pour objet une source à rayons X présentant de très bonnes performances en termes de puissance, de brillance, de finesse spectrale, à coût faible, facile à mettre en œuvre et ne produisant pas de débris.
EXPOSE DE L'INVENTION
L'invention a donc pour objet une source monochromatique de rayons X, comprenant une cible composée notamment d'un matériau intégrant des atomes émetteurs constitués d'un type d'élément (appartenant au Tableau Périodique des Eléments), lesdits atomes étant excités par bombardement électronique, essentiellement des électrons situés sur la couche K desdits éléments.
Selon l'invention, ce matériau se trouve globalement à l'état solide et sa cohésion est assurée au moyen d'atomes structurants liés aux atomes émetteurs. De plus, selon l'invention, lesdits atomes structurants possèdent un coefficient d'absorption de l'énergie des photons inférieur ou égal à un seuil déterminé.
Ce seuil est défini de telle sorte que l'on observe sensiblement une transmission de 10 % au moins du rayonnement sortant émis par les atomes émetteurs les plus profonds (situés à environ 1 μm de la surface de la cible) atteints par le faisceau d'électrons.
Ainsi, l'invention réside dans une source de rayons X, dont la cible comprend un matériau à l'état solide composé d'atomes d'au moins deux éléments, les atomes émetteurs et les atomes structurants, les atomes structurants n'étant pas de nature à filtrer trop fortement les rayons X émis par les atomes émetteurs.
De manière avantageuse, le seuil de capacité d'absorption défini précédemment est au plus de 10%. Ainsi, au moins 10 % des rayons X émis sortent de la cible et peuvent être exploités. Compte tenu des lois de la physique mises en œuvre, et notamment la Loi dite de Lambert-Beer, cela revient à mettre en œuvre des atomes structurants dont le coefficient d'absorption est inférieur ou égal à 2,3 μm"1. En effet, la transmission selon cette loi répond à l'expression :
T = e"μ l
dans laquelle μ désigne le coefficient d'absorption et 1 la profondeur dans la cible.
D'où la valeur de μ < 2,3 μm"1 obtenue pour une transmission supérieure ou égale à 10
% avec 1 ≈ 1 μm.
Selon un mode de réalisation particulièrement avantageux, les numéros atomiques des atomes structurants sont inférieurs au numéro atomique des atomes émetteurs. De cette manière, les atomes structurants filtrent peu les rayons X émis par les atomes émetteurs.
Avantageusement, notamment pour l'analyse biologique, les atomes émetteurs sont des atomes d'oxygène, donc le matériau se présente en tout ou en partie sous une forme oxydée.
En pratique, les atomes structurants sont des atomes de béryllium, sous forme oxydée, et tout particulièrement le monoxyde de béryllium (BeO). Dans ce cas, la proportion de rayons X absorbés par les atomes structurants de béryllium est basse.
Alternativement, les atomes émetteurs sont des atomes d'azote, donc le matériau constitutif de la cible se présente en tout ou en partie sous une forme nitrurée.
En pratique, les atomes structurants sont des atomes de bore, formant une cible sous forme nitrurée définie par le nitrure de bore (BN).
Parallèlement, il peut exister des éléments plus lourds que les éléments émetteurs, dont les électrons de la couche L ont une énergie légèrement supérieure à l'énergie des rayons X émis par lesdits éléments émetteurs. De ce fait, ces éléments présentent une absorption des rayons X émis par les éléments émetteurs suffisamment faible pour que ces éléments puissent convenir comme éléments structurants.
En pratique, les atomes émetteurs sont des atomes d'oxygène et les atomes structurants sont des atomes de magnésium et des atomes d'aluminium, formant une cible sous forme oxydée définie par l'aluminate de magnésium (MgAl2O4), ou encore sont des atomes de chrome ou de manganèse.
Selon une forme de réalisation avantageuse de l'invention, la cible est recouverte totalement ou partiellement d'un matériau à fort coefficient de rayonnement, de manière à permettre l'évacuation par rayonnement de la chaleur produite lors dudit bombardement électronique de la cible.
De manière préférentielle, le coefficient de rayonnement du matériau à fort coefficient de rayonnement est supérieur ou égal à 0,7 pour l'émission de rayonnements de longueurs d'ondes comprises entre 1 et 10 μm.
De façon pratique pour la mise en œuvre de cette forme de réalisation de l'invention, le matériau à fort coefficient de rayonnement employé est du noir de nickel.
Avantageusement, la cible est totalement ou partiellement située en regard de conducteurs thermiques, lesquels sont recouverts en tout ou partie de matériau à fort coefficient de rayonnement, de manière à capter le rayonnement issu de la cible. En outre, un fluide circule à l'intérieur desdits conducteurs de manière à les refroidir par convection.
Selon une autre forme de réalisation pratique de l'invention, le faisceau de bombardement électronique est focalisé et incliné par rapport à la normale au point d'impact du faisceau sur la cible.
De manière préférée pour cette forme de réalisation pratique de l'invention, l'angle d'inclinaison du faisceau de bombardement électronique par rapport à la normale à son point d'impact sur la cible est compris entre 40° et 70°.
Avantageusement, la partie de la cible susceptible d'être exposée au faisceau est recouverte d'une couche superficielle en un matériau réfractaire, conducteur de l'électricité et présentant une faible absorption de l'énergie des rayons X émis ou des électrons de bombardement.
Préférentiellement, le matériau réfractaire présente un coefficient d'absorption de l'énergie des rayons X émis inférieur ou égal à 2,3 μm"1.
En pratique, ce matériau réfractaire est choisi dans le groupe comprenant le chrome, le nickel, le cobalt ou l'un de leurs oxydes, notamment l'oxyde de chrome (III) de formule Cr2O3.
Avantageusement, la source comporte en outre une réserve de ce matériau réfractaire située à proximité de la cible, la réserve étant susceptible d'être exposée au faisceau incident de manière à provoquer la sublimation d'une partie du matériau réfractaire qui constitue la cible, de façon à en reconstituer la couche superficielle.
Selon une autre forme de réalisation avantageuse de l'invention, la cible présente une symétrie de révolution et elle est mue en rotation par rapport à son axe de révolution et par rapport au faisceau de bombardement.
Selon un aspect pratique de cette forme de réalisation, l'épaisseur de la cible varie de façon globalement décroissante avec l'augmentation de la distance à l'axe de révolution de la cible.
En pratique, la cible est assemblée par brasage sur un matériau à coefficient de dilatation et à coefficient de Poisson proches de ceux du matériau composant la cible.
L'invention concerne également un microscope équipé d'au moins une source de rayons X telle que définie précédemment.
BREVE DESCRIPTION DES FIGURES
L'invention apparaîtra plus clairement à la lumière de la description des modes de réalisation particuliers suivants, qui font référence aux figures. L'objet de l'invention ne se limite cependant pas à ces modes de réalisation particuliers et d'autres modes de réalisation de l'invention sont possibles.
La figure 1 est une représentation schématique de l'anode d'une source de rayons X conforme à une première forme particulière de réalisation de l'invention. La figure 2 est une représentation schématique de l'anode d'une source de rayons X conforme à une autre forme particulière de réalisation de l'invention.
MODE DE RÉALISATION DE L'INVENTION
La figure 1 représente une source de rayons X, dont la cible (1) est composée notamment d'un matériau (3) à l'état solide, comprenant des atomes émetteurs liés à des atomes structurants. Dans l'exemple développé ci-après, les atomes structurants représentent un seul élément du tableau périodique et sont de numéro atomique inférieur à celui desdits atomes émetteurs. En l'occurrence, le matériau (3) de la cible (1) est une céramique réalisée en monoxyde de béryllium (BeO), dans lequel les atomes d'oxygène constituent les atomes émetteurs au sens de l'invention, tandis que les atomes de béryllium jouent le rôle des atomes structurants.
Cependant, le matériau (3) pourrait également être constitué d'une céramique composite de béryllium et d'oxyde de béryllium (Be-BeO), ou encore composé d'oxyde de bore (B2O3), où les atomes d'oxygène constituent les atomes émetteurs, tandis que les atomes de bore constituent les atomes structurants.
Parmi les autres matériaux aptes à constituer la cible (1) selon la présente invention, on peut citer les borates de lithium (LiBxOy), le nitrure de bore (BN), l'oxyde de magnésium (MgO), l'oxyde de chrome (Cr2O3), l'aluminate de magnésium (MgAl2O4), etc. On peut en outre prévoir de mettre en oeuvre ces molécules isolément ou en combinaison les unes avec les autres, sous la forme de matériaux juxtaposés.
La cible (1) constitue l'anode de la source de rayons X. Comme cela ressort de la figure 1, la cible (1) est bombardée par un faisceau d'électrons (2). L'énergie du faisceau de bombardement (2) est suffisante pour exciter les électrons situés sur les couches K des atomes émetteurs du matériau composant la cible (1). Les atomes émetteurs sont donc principalement situés au niveau de la zone atteinte par le faisceau (2).
Le courant et la tension de la cathode de la source de rayons X (non-représentée) peuvent par exemple être respectivement de 3 à 50 kV et de 10 à 50 mA.
Néanmoins, une tension d'accélération et/ou un courant cathodique différents sont envisageables, notamment dans le but d'optimiser la conversion du faisceau d'électrons de bombardement en rayons X, dont l'absorption par les matériaux de la cible (1) serait faible.
II faut noter ici que le choix du monoxyde de béryllium est judicieux, car son absorption de rayons X émis à une énergie correspondant à la raie K de l'oxygène, soit 525 eV, est relativement faible (μ = 0,7 μm 1), tandis que l'absorption de rayons X émis dans la raie K du béryllium, également susceptible d'émettre lors du bombardement de la cible (1) par le faisceau (2), se situe à un niveau assez élevé (μ=7 μm"1). A noter également qu'une tension d'accélération élevée augmente la pénétration du faisceau (2), permettant ainsi de répartir davantage dans le volume de la cible (1) la chaleur dégagée lors du bombardement.
En fait, l'expérience montre que l'absorption des rayons X émis augmente globalement avec l'augmentation du ou des numéro(s) atomique(s) des éléments choisis pour constituer les atomes structurants. Cependant, il se trouve des discontinuités importantes dans cette augmentation lorsque l'énergie de liaison d'une couche électronique d'un élément structurant dépasse la valeur de l'énergie des rayons X émis par les atomes émetteurs. C'est pourquoi, divers éléments permettent des réaliser l'invention, qui sont caractérisés en premier lieu par les niveaux d'énergie de liaison de leurs électrons.
Il a été observé que la source conforme à l'invention, dont la cible (1) est composée notamment d'une céramique en monoxyde de béryllium (3), émet des rayons X dans la raie K de l'oxygène avec une énergie de 525 eV et une largeur de 1,2 eV (soit une finesse spectrale deA 452), qui correspond à la largeur naturelle de la raie K de
l'oxygène dans un cristal de monoxyde de béryllium (BeO). Par ailleurs, la puissance de faisceau (2) admissible est de 300 W pour une source conforme à l'invention, tandis qu'elle est seulement de 0,6 W pour une source à jet d'eau ; la brillance obtenue avec le monoxyde de béryllium (3) atteint 5.1010 photons/s.μm2.sr, soit environ cent fois la brillance accessible avec une source à jet d'eau (5.108 photons/s.μm2.sr). Soit une brillance spectrale de 1010 photons/s.μm2.sr.O,l%BW.
Comme il a déjà été observé par ailleurs, le bombardement par le faisceau (2) provoque réchauffement de la cible (1), en particulier dans la zone d'impact (5). Pour maintenir la cible dans un bon état de fonctionnement, il faut éviter que la cible (1) ne s'échauffe au-delà de la température de fusion des matériaux qui la composent. C'est pourquoi, la cible (1), à symétrie de révolution, est mue en rotation selon la flèche R par rapport à son axe de révolution (6), comme c'est fréquemment le cas pour les sources de rayons X, qualifiées alors de sources « à anode tournante ». Ainsi, la zone d'impact (5) est constamment renouvelée et refroidie entre deux expositions consécutives au faisceau (2), de façon à ce que la zone d'impact (5) ne puisse atteindre sa température de fusion.
La vitesse de rotation minimale est déterminée expérimentalement ou par calcul de manière à respecter la condition de température limite évoquée précédemment. Par exemple, pour un faisceau (2) de 100 W d'énergie focalisé sur une surface d'environ
20 μm x 40 μm de la cible (1) en oxyde de béryllium (3) (conductivité thermique à
1.000 K = 50 W/m.K) et en négligeant les pertes par rayonnement, la durée d'exposition au faisceau (2) doit être inférieure à 100 ns pour ne pas dépasser une température de 1.500 K environ. On en déduit la vitesse périphérique de la cible de
200 m/s, puis la vitesse de rotation en fonction du diamètre de l'anode tournante, par exemple une vitesse de rotation de 400 tours/s pour un diamètre de 150 mm.
De plus, pour éviter réchauffement de l'anode tournante, on peut prévoir d'évacuer la chaleur produite en fonctionnement. Pour cela, la cible (1) est recouverte sur une grande partie de sa surface d'une couche de matériau émissif (7a), constitué, dans l'exemple décrit, par du noir de nickel, de coefficient de rayonnement élevé, supérieur à 0,7, ici le coefficient ε vaut 0,9.
La couche de matériau émissif peut être directement en contact avec la cible (1) ou indirectement par l'intermédiaire d'une couche en un autre matériau, destinée à assurer l'accrochage du matériau émissif. Lorsque la température de la céramique (3) s'élève, la chaleur est transmise à l'ensemble de la pièce (3), car celle-ci est réalisée en un matériau bon conducteur thermique (conductivité thermique du BeO à 800 K = 70 W/m.K), puis la chaleur est transmise à la couche de matériau émissif (7a), lequel émet alors un rayonnement (essentiellement infrarouge) vers l'extérieur de la pièce (3), contribuant ainsi au refroidissement de celle-ci.
Comme représenté sur la figure 1, on peut améliorer l'évacuation de la chaleur de la pièce (3) en montant en regard et autour de celle-ci des échangeurs thermiques (8, 9) recouverts eux aussi d'une couche de matériau émissif (7b, 7c) également bons conducteurs thermiques. La géométrie et le positionnement optimaux de ces échangeurs thermiques peuvent être déterminés par l'homme du métier empiriquement ou par calcul. Un critère pour définir la géométrie et le positionnement de ces échangeurs thermiques (8, 9) consiste en ce que le rayonnement du plus grand nombre possible de points de la cible (1) est collecté par les échangeurs thermiques sous un angle solide proche de 2π sr. Cela permet d'optimiser l'échange thermique par rayonnement entre les surfaces en regard, et partant, d'évacuer une énergie thermique importante.
Enfin, on peut parfaire l'évacuation calorique en refroidissant les échangeurs thermiques (8, 9), qui demeurent de préférence statiques, au moyen de deux fluides caloporteurs (12, 13) circulant dans des canalisations (10, 11) ad hoc prévues à l'intérieur de ces échangeurs (8, 9). Les fluides caloporteurs (12, 13) refroidissent par convection les échangeurs (8, 9), et, partant, contribuent au refroidissement donc à la stabilité structurelle de la cible (1).
La figure 2 illustre une autre construction envisageable pour refroidir par convection, au moyen d'un fluide caloporteur (112) circulant dans un volume (108) prévu à cet effet, la cible cryogénique (101) tournante en oxyde de béryllium (103). Le fluide (112) employé dans cet exemple est de l'azote liquide, qui transite par gravité à travers un tube axial (109) jusque dans le volume central (108) de la cible (101). L'azote liquide (112) s'y accumule contre un cœur de cible (116) réalisé en un matériau à forte capacité calorifique, tel que l'aluminium, puis il circule le long des parois externes du tube axial (109) lors de la rotation de la cible (101). En fonctionnement, la température d'équilibre de l'ensemble constitué de la cible (101) et du tube axial (109) peut atteindre 77 K.
Or, un tel refroidissement de la cible (101) est d'autant plus intéressant que ce dernier présente une conductivité thermique à basse température importante et bien supérieure à sa conductivité thermique à haute température. Ainsi, pour des températures comprises entre 80 K et 200 K, la conductivité thermique de l'oxyde de béryllium dépasse 800 W/m.K. Une telle construction permet donc de mieux dissiper la puissance d'échauffement consécutive au bombardement électronique de la cible (101).
Par conséquent, il est possible de limiter la vitesse de rotation de la cible (101) par rapport à une cible moins refroidie, et, ainsi, de réduire les contraintes mécaniques qui s'exercent lors de la rotation sur la céramique en oxyde de béryllium (103).
En lieu et place d'une source à cible tournante, on pourrait envisager une source conforme à l'invention et possédant une cible fixe cryogénique, refroidie à très basse température (77 K). Cependant, dissiper une puissance thermique comprise entre 100 W et 300 W pour une surface de 20 à 30 μm de diamètre nécessiterait que la cible ait une épaisseur de l'ordre de quelques micromètres, ce qui la rendrait fragile.
Par ailleurs, comme cela est connu de l'art antérieur, la cible (1 ; 101) et les pièces qui l'entourent sont placées sous vide pour permettre la propagation des électrons de bombardement (2 ; 102) et des rayons X conséquemment émis (14 ; 114).
De plus, on peut prévoir d'incliner le faisceau (2 ; 102), qui est focalisé en une tache de 10 à 30 μm de diamètre par rapport à la normale à son point d'impact (5 ; 105) sur la cible (1, 101) d'un angle α compris entre 40° et 70°. Ainsi, la contrainte thermique qui s'exerce sur la zone d'impact (5 ; 105) est davantage répartie (d'un facteur 1,5 à 3 par rapport à une incidence normale). Pour exploiter convenablement le faisceau résultant (14 ; 114), il faut alors incliner le capteur par rapport au faisceau (14, 114) de manière symétrique.
II est en outre connu qu'une source de rayons X est parcourue de courants électroniques au niveau de la zone d'impact (5 ; 105) du faisceau (2 ; 102). Il est alors nécessaire d'évacuer ces courants. C'est pourquoi, la source conforme à l'invention est recouverte au niveau de la zone d'impact (5 ; 105) d'une couche en matériau réfractaire et conducteur de façon à évacuer ces courants. Cette couche se présente donc sous la forme d'un ruban d'au moins 40 μm de large et s'étendant sur tout le tour de la cible (1, 101).
L'épaisseur et le coefficient d'absorption (qui est proportionnel au numéro atomique) de cette couche doivent être suffisamment faibles pour ne pas trop absorber les rayons X émis. Dans l'exemple des figures, la couche de chrome présente une épaisseur comprise entre 20 et 40 nm. Elle n'absorbe qu'environ 10% des rayons X émis par l'oxygène à une énergie de 525 eV, car le seuil d'énergie de la couche L du chrome est situé à 574 eV et il n'est donc pas excitable par les photons d'énergie inférieure, tels que ceux émis dans la raie K de l'oxygène par la source illustrée par les figures. D'autres matériaux conviennent pour constituer cette couche, comme le chrome, le nickel, le cobalt ou l'un de leurs oxydes, et plus particulièrement l'oxyde de chrome (III), de formule Cr2O3, connu pour sa bonne conductivité électrique.
Il convient de noter que le matériau composite (Be-BeO) étant conducteur de l'électricité, une cible réalisée en ce matériau rend inutile l'ajout de la couche de chrome. Ce composite est également bon conducteur thermique, mais sa température maximale de fonctionnement se situe aux environs de 1.200 K, contre 2.200 K pour le monoxyde de béryllium. De plus, sa teneur en atomes émetteurs (ici des atomes d'oxygène) est inférieure à celle du monoxyde de béryllium.
En outre, pour achever d'évacuer les courants électroniques, le matériau émissif (7a) recouvrant l'essentiel de la surface de la cible (1) est également conducteur et draine les charges vers la terre via l'arbre de rotation (15).
Il a été observé que cette mince couche de matériau conducteur électrique peut être détériorée par évaporation locale sous l'effet de la chaleur produite en fonctionnement. Or, il importe que la couche de ce ruban d'évacuation demeure ininterrompue afin qu'elle assure sa fonction première. C'est pourquoi, selon une caractéristique avantageuse de l'invention, une réserve (17 ; 117) de ce matériau est rapportée sur la cible (1) près du point d'impact (5 ; 105) où le faisceau d'électrons (2 ; 102) bombarde la cible (1). Ainsi, la réserve (17, 117) peut être bombardée par le faisceau d'électrons (2 ; 102) faiblement dévié de son trajet habituel. La réserve (17 ; 117) est ainsi sublimée lorsqu'elle est exposée assez longtemps au faisceau (2 ; 102) et elle contribue à restaurer la continuité de la couche de matériau conducteur. Les paramètres du procédé de restauration ne sont pas détaillés plus avant ici, car ils relèvent des connaissances générales de l'homme du métier.
Par ailleurs, lorsque la cible (1) ou anode tournante est mue en rotation, elle est soumise à d'importantes contraintes mécaniques. Par exemple, pour un disque de 150 mm de diamètre, la vitesse de rotation à atteindre est d'environ 400 tours/s, compte tenu de la vitesse périphérique de 200 m/s indiquée ci-dessus. C'est pourquoi il est nécessaire de s'assurer que la cible (1) est apte à supporter les contraintes mécaniques afférentes à une telle vitesse de rotation et, dans la mesure du possible, de les minimiser.
Tout d'abord, ce critère guide le choix du matériau composant la cible (1). En effet, le monoxyde de béryllium, tout comme le matériau composite (Be-BeO), présente de très bonnes propriétés mécaniques, qui lui permettent de supporter les contraintes liées à la mise en rotation de la cible (1). Ainsi, la limite à la rupture du monoxyde de béryllium est de 100 MPa à une température de 500 K et la cible selon l'invention supporte alors des densités de puissance du faisceau d'électrons dépassant largement 100 kW/mm2.
Comme indiqué précédemment, d'autres matériaux peuvent convenir pour composer une cible conforme à l'invention. C'est le cas du nitrure de bore (BN), qui émet dans la raie K de l'azote avec une énergie de 392 eV, qui présente de bonnes propriétés thermiques (température limite d'utilisation à 2.500 K, conductivité de 30 W/m.K), ainsi que de bonnes propriétés mécaniques (limite à la rupture de 100 MPa à une température de 500 K).
C'est aussi le cas de l'oxyde de magnésium (MgO), émettant dans la raie K du magnésium avec une énergie de 1.254 eV. Par ailleurs, d'autres matériaux permettent encore de réaliser une source conforme à l'invention, qui présentent cependant des propriétés thermiques et/ou mécaniques moins adaptées à l'application à une anode tournante. Ainsi, l'oxyde de bore (III), de formule B2O3, l'oxyde de lithium (I), de formule Li2O, ou les borates de lithium, de formule générale LiBxOy.
Ensuite, la cible (1 ; 101) peut être usinée selon une géométrie permettant de réduire les contraintes dues à la rotation. Ainsi, pour diminuer le moment d'inertie de la cible (1 ; 101) et par conséquent diminuer ces contraintes, la cible présente une épaisseur, mesurée selon la section de la cible (1 ; 101) par un plan radial, qui varie de façon globalement décroissante avec l'augmentation de la distance à l'axe de révolution de la cible (1 ; 101).
La variation de l'épaisseur de la cible peut être linéaire, comme cela ressort de la figure 1, ou quadratique ou bien encore être définie par une autre fonction mathématique. La variation peut être continue ou discontinue, dans la mesure où elle demeure globalement décroissante avec l'augmentation de la distance à l'axe de révolution (6 ; 106) de la cible (1 ; 101), c'est-à-dire que l'épaisseur mesurée à la périphérie de la couronne ou du disque formant la cible (1 ; 101) est inférieure à l'épaisseur mesurée à proximité de son axe (6 ; 106).
Enfin, la cible (1) peut être prévue en plusieurs parties, constituées de matériaux différents, dans la mesure où ils sont aptes à supporter les contraintes mécaniques et thermiques précédemment évoquées. Il est ainsi souhaitable de prévoir l'axe et le support (16) de la céramique (3) en un matériau possédant des propriétés thermiques et mécaniques idoines. En effet, l'expérience montre que la température de la cible (1) décroît à mesure que l'on « se rapproche » de l'axe. Le matériau du support (16) doit être choisi de façon à présenter un coefficient de Poisson et un coefficient de dilatation proches de ceux de la céramique (3) pour assurer une bonne cohésion de l'assemblage, même sous contraintes mécaniques et thermiques élevées et, partant, une bonne transmission de ces contraintes. Le titane et certains de ses alliages sont aptes à constituer le support (16), car ils présentent les propriétés thermiques et mécaniques souhaitées ainsi que des coefficients de Poisson et de dilatation (v~0,32 ; k~9 μm/m.K) proches, aux températures considérées, de ceux du monoxyde de béryllium (v~0,30 ; k~8 μm/m.K).
L'assemblage de la céramique de monoxyde de béryllium (3) sur le support en titane (16) est réalisé par brasage, c'est-à-dire sans fusion des matériaux assemblés. En outre, l'arbre de rotation (15) est prévu creux de manière à augmenter sa résistance thermique, ce qui favorise l'évacuation de la chaleur par rayonnement et évite la transmission de contraintes thermiques aux pièces lui imprimant le mouvement de rotation (non-représentées). Bien évidemment, la cible (1) doit être usinée avec soin, puis équilibrée dynamiquement de façon à éviter, autant que faire se peut, les contraintes inertielles, donc les vibrations, liées aux irrégularités géométriques. Pour la même raison, l'entraînement en rotation doit être réalisé avec une grande précision.
Dans l'exemple de la figure 2, le support (116) est également réalisé en un alliage choisi pour ses propriétés thermiques et mécaniques, notamment pour ses coefficients de Poisson et de dilatation (v~0,32 ; k~9 μm/m.K) proches, aux températures considérées, de ceux du monoxyde de béryllium (v~0,30 ; k~8 μm/m.K).
En outre, on peut prévoir un joint ferro-fluide (118), connu en soi, destiné, d'une part, à assurer l'étanchéité de l'enceinte de la cible (101) de manière à y maintenir un vide adéquat, et d'autre part, à conduire les courants électroniques parasites.
Par ailleurs, les atomes structurants (ici le béryllium) sont aussi susceptibles d'émettre des rayons X dans leurs propres raies K. Mais ces rayons, moins énergétiques que ceux émis par les atomes émetteurs, peuvent être filtrés par un dispositif connu en soi installé par exemple au niveau d'un collimateur (4) situé sur le trajet des rayons X entre la cible (1) et l'objet à analyser (non-représenté). Ainsi, ces rayons « parasites » ne risquent pas de dégrader l'image de l'objet et/ou d'exposer celui-ci à une dose de rayonnement ionisant inutilement élevée.
Un autre avantage du monoxyde de béryllium pour son utilisation comme cible réside dans le fait qu'il émet peu de rayons X de freinage (également dénommés « Bremsstrahlung »), notamment du fait des faibles numéros atomiques de ses composants. En effet, la conversion de l'énergie des électrons en rayonnement de freinage possède un rendement proportionnel au numéro atomique, à la tension d'accélération et fonction de la géométrie de la cible. L'émission de rayonnement de freinage est donc d'autant plus faible que le numéro atomique des éléments bombardés est faible.
De manière connue, la désexcitation des électrons des couches K des atomes émetteurs s'accompagne de l'émission de photons X. Les rayons X ainsi émis par la cible (1) sont compris dans la « fenêtre de l'eau ». Ils possèdent une énergie comprise entre le seuil K du carbone à 284 eV et le seuil K de l'oxygène à 543 eV, soit des longueurs d'onde comprises entre 4,4 nm et 2,3 nm. Cette gamme d'énergie constitue un domaine parfaitement adapté à l'analyse biologique, car elle permet de former des images de matériaux organiques bien contrastées, en raison de la différence élevée d'absorption (facteur 10 à 20) des rayons par le carbone et par l'eau, lesquels constituent respectivement la majeure partie des matériaux organiques et des échantillons étudiés.
Par ailleurs, il convient de noter que le monoxyde de béryllium doit être manipulé selon des mesures de sécurité adaptées, car il est très toxique. Néanmoins, pour l'application envisagée ici, les risques d'exposition, donc d'intoxication, se limitent à la phase d'usinage de la cible (1). En effet, par la suite, ce matériau se présente sous la forme d'une céramique stable et isolée sous vide, ce qui réduit les risques d'intoxication.
Pour la compréhension de l'exposé, l'exemple ici développé porte sur une source de rayons X émettant à des niveaux d'énergie compris dans la fenêtre de l'eau. Cependant, l'objet de l'invention, tel qu'il ressort de la revendication 1 par exemple, porte également sur des sources de rayons X émettant à d'autres niveaux d'énergie.