COMPOSITION COSMETIQUE POUR LE SOIN DES PEAUX GRASSES, CONTENANT UN ACIDE GRAS CARBOXYLIQUE OU L'UN DE SES
DERIVES
La présente invention concerne une composition cosmétique destinée à corriger ou prévenir les désordres associés à une peau grasse, notamment par une action de diminution de la sécrétion du sébum, comportant à titre de principe actif au moins un acide gras dicarboxyjique ou un dérivé d'un tel acide gras. L'invention vise en particulier des compositions cosmétiques destinées à l'administration par voie topique.
L'invention a trait également à un procédé cosmétique pour corriger ou prévenir les désordres associés à une hyperséborrhée.
Il est habituel d'opposer les termes « peau grasse » et « peau sèche ». Cette opposition est toutefois inappropriée et entraîne une confusion. Deux paramètres sont en effet à considérer dans le classement d'une peau : (1) le degré de charge lipidique, c'est-à-dire l'aspect plus ou moins huileux de la peau, et (2) le degré d'hydratation. C'est autour de ces deux axes que l'on peut concevoir la classification la plus simple des types de peaux. Suivant le degré d'hydratation de la couche cornée et sa production de sébum, on peut donc distinguer trois types principaux de peau :
- les peaux sèches ;
- les peaux grasses ;
- les peaux mixtes. Une peau grasse est donc hyperséborrhéique et caractérisée par une sécrétion et une excrétion exagérées de sébum. Classiquement, un taux de sébum supérieur à 200 μg/cm2 au niveau du front est considéré comme caractéristique d'une peau grasse. Une peau grasse est une peau d'aspect luisant, épaisse, et dont les orifices folliculaires sont dilatés ou
comblés de minuscules spicuies cornés, voire par des comédons (ceci résulte cependant davantage d'un phénomène de rétention que d'une augmentation de l'excrétion). La peau grasse est souvent associée à un défaut de desquamation, et à un grain de peau épais. Un autre inconvénient des peaux grasses est la très mauvaise tenue du maquillage sur ce type de peau, ce qui implique de traiter la peau avant d'appliquer le maquillage, pour limiter le flux de sébum.
En plus de ces désordres esthétiques, l'excès de sébum peut servir de support au développement anarchique de la flore bactérienne saprophyte (en particulier Propionibacterium acnés et Pityrosporum ovale), et causer des comédons et/ou des lésions acnéiques.
Toutefois, l'acné et la peau grasse ne vont pas systématiquement de paire. En effet, si l'acné présente une occurrence importante dans les cas d'hyperséborrhée androgénique (typiquement dans le cas des acnés juvéniles), elle peut se développer chez des individus dont la production de sébum n'est pas particulièrement élevée. Inversement, des individus à la peau grasse ne développent par systématiquement de lésion acnéique.
Le sébum est le produit naturel de la glande sébacée, qui constitue une annexe de l'unité pilosébacée. Il s'agit essentiellement d'un mélange plus ou moins complexe de lipides. Classiquement, la glande sébacée produit du squalène, des triglycérides, des cires aliphatiques, des cires de cholestérol et, éventuellement du cholestérol libre (Stewart 1992). L'action des lipases bactériennes convertit une part variable des triglycérides formés en acides gras libres.
Le sébocyte constitue la cellule compétente de la glande sébacée. La production de sébum est associée à un programme de différenciation terminale de cette cellule. Durant cette différenciation, l'activité métabolique du sébocyte est essentiellement axée sur la biosynthèse des lipides (la lipogenèse), et plus précisément sur la néosynthèse d'acides gras.
Il existe donc un besoin pour une composition cosmétique permettant d'éviter les troubles esthétiques et le développement de lésions acnéiques associés à la surproduction de sébum. Plusieurs compositions cosmétiques susceptibles d'offrir une solution à ces problèmes ont été proposées dans l'art antérieur. Ces compositions comprennent notamment, à titre de principe actif :
- des poudres qui permettent d'absorber le sébum et donc de matifier la peau par un effet mécanique ;
- des alpha- ou béta-hydroxyacides qui, de par leur effet kératolytique, favorisent l'expulsion des bouchons cornés ;
- des actifs astringents permettant de lutter contre la dilatation des follicules sébacés ;
- des actifs exfoliants permettant de diminuer l'épaisseur de la peau, et - des actifs qui agissent sur les mécanismes biochimiques, notamment les enzymes, impliqués dans la production de sébum. Toutefois, l'efficacité de ces compositions est relative, car la plupart ne limitent pas la production sébacée mais ne font qu'absorber le sébum.
Le but de la présente invention est justement de fournir des moyens pour traiter le problème des peaux grasses à la base, en contrôlant la lipogénèse, plutôt qu'en traitant a posteriori les conséquences d'une lipogénèse excessive. Au cours de leur recherche de composés susceptibles d'avoir des propriétés sébo-régulatrices, les inventeurs on mis en évidence qu'un acide aliphatique dicarboxylique en C9, l'acide azélaïque, peut inhiber de façon significative la lipogénèse.
Ce composé est déjà utilisé dans une préparation pharmaceutique destinée au traitement de l'acné, le SKINOREN®
(laboratoires SHERING).
L'acné est une pathologie de l'unité pilosébacée, caractérisé essentiellement par une inflammation. Elle affecte en particulier les zones faciale et dorsale supérieure et apparaît le plus communément au cours de l'adolescence (Shalita 1998). L'acné met en jeu en général (1) une production accrue de sébum (par rapport à l'état basai) ; (2) une hyperkératinisation de l'infra-infundibulum (le comédon) ; (3) une hyperprolifération de la flore commensale et (4) une inflammation.
De très nombreuses méthodes ont été proposées pour traiter ce désordre, allant de variation du régime alimentaire à l'utilisation de médicaments à action sur les voies endocriniennes (progestérone et œstrogène en particulier).
Il a notamment été proposé d'utiliser des composés à action antibactérienne en application topique. Dans cette optique, Bladon et al ont comparé l'efficacité de deux composés à action antibactérienne, la tétracycline et l'acide azélaïque, au cours d'une étude pour le traitement de l'acné vulgaire, réalisée en double aveugle sur 45 sujets masculins ayant une acné clinique. Ils ont notamment montré que l'application topique d'un gel à 20% d'acide azélaïque permettait d'obtenir une réduction du nombre de micrococcaceae et de Propionibacterium sp cutanés d'un facteur 224 et 30, respectivement (Bladon, 1986). Dans cette même étude, les auteurs ont mesuré l'effet de l'acide azélaïque sur le taux d'excrétion du sébum, sur un groupe séparé de 11 individus avec une acné physiologique, et ont montré que l'application topique d'un gel à 20% d'acide azélaïque n'entraînait pas une modification significative de l'excrétion de sébum. Dans une étude ultérieure Mayer-da-Silva et al. ont montré qu'aux doses où il est utilisé pour le traitement de l'acné, notamment dans le SKINOREN®, l'acide azélaïque ne modifie pas la quantité ni la composition du sébum excrété, ni chez les sujets acnéiques, ni chez les sujets à peau séborrhéique ne souffrant pas d'acné, ni chez les sujets normoséborrhéiques (Mayer-da-Silva, Gollnick et al. 1989).
La demande de brevet EP 0 705 602 décrit quant à elle l'utilisation d'acides alcanedioïques-α,ω comme agents actifs contre des surinfections cutanées. L'acide azélaïque est notamment cité comme agent utilisable dans ce cadre. Dans la demande de brevet WO 98/20834, Tamarkin note l'incapacité de l'acide azélaïque à réduire la production de sébum, et décrit un effet kératolytique de ce même acide, qui réduit la prolifération des kératinocytes humains lorsqu'il est utilisé à des concentrations de l'ordre de 1 mM. De façon plus générale, il est particulièrement intéressant de noter que si certains des traitements antibactériens mentionnés ci-dessus se sont révélés efficaces pour la réduction du nombre et de l'intensité des lésions acnéiques, très peu ont permis d'observer une diminution de l'hypersécrétion de sébum associée à l'acné (Thiboutot 2000). De ce fait, il ne peut être considéré comme trivial d'imaginer pour une molécule active, utilisée efficacement dans le traitement de l'acné, une application pour le traitement de la peau grasse hyperséborrhéique non- acnéique ou préacnéique.
Comme illustré dans la partie expérimentale ci-dessous, la Demanderesse a, de façon surprenante et paradoxale par rapport aux résultats publiés dans l'art antérieur, montré que l'acide azélaïque peut inhiber de façon significative la lipogénèse. En effet, l'application d'acide azélaïque à 1 μM - soit 0,02 x 10"3 % environ -, sur un modèle de sébocytes humains immortalisés en culture, a entraîné une baisse de 7% de la sécrétion lipidique (exemple 1). Cette concentration, très inférieure à celles qui sont mises en œuvre dans les applications dermatologiques de ce composé (1000 fois plus basse que celle utilisée par Tamarkin dans le document WO 98/20834, pour observer un début d'effet kératolytique), permet donc d'obtenir des résultats très différents de ceux obtenus avec une concentration supérieure, selon lesquels l'application d'acide azélaïque
n'entraînait pas de modification de la quantité ni de la composition du sébum excrété.
La présente invention porte donc en premier lieu sur une composition cosmétique pour le soin des peaux grasses, contenant au moins un acide gras dicarboxylique ou l'un de ses dérivés actifs.
Dans la suite de ce texte, les concentrations en acide gras dicarboxylique sont exprimées en molarité. Afin de faciliter la conversion de ces concentrations en pourcentages, il est précisé que pour l'acide azélaïque, dans une solution standard de type aqueux, une concentration de 1 M correspond à 20% d'acide azélaïque. Bien entendu, l'homme du métier est en mesure d'ajuster cette correspondance en fonction de l'acide gras dicarboxylique utilisé et des autres éléments de la composition.
Les compositions cosmétiques de l'invention comprennent avantageusement une concentration comprise entre 1 nM et 1 mM de principe actif pour le soin des peaux grasses, de préférence inférieure à
0,5 mM, par exemple entre 1 nM et 0,1 mM, et, de manière encore préférée, entre 0,01 μM et 0,1 mM, voire entre 0,01 μM et 10 μM. L'activité de la composition cosmétique de l'invention se manifeste de préférence par une réduction du taux de sébum au niveau de la peau traitée. De façon générale dans le cadre de l'invention, on estime que les composés sont actifs sur la lipogénèse de la peau grasse, lorsque leur utilisation pour le soin de la peau grasse conduit à une diminution du taux de sébum au niveau de la peau d'au moins 10%, de préférence d'au moins 30%, le taux de sébum étant mesuré par un sébumètre de type SM810 commercialisé par la société Courage & Khazaka (Cologne, Allemagne).
Dans les compositions de l'invention, le dérivé d'acide gras dicarboxylique est de préférence choisi parmi les esters de sucre, les amides, ou les esters d'alcool gras, notamment les esters d'alcools gras non kératolytiques. En particulier, les alcools gras utilisables dans le cadre de la présente invention seront préférentiellement distincts des alcools suivants : les acides ortho-, meta-, et para-hydroxybenzoïques, les
benzoates d'ortho-, meta- et para-hydroxyalkyle, l'ortho-, le meta-, et le para-dihydroxybenzène, l'ortho-, le meta-, et le para-hydroxytoluène, ainsi que leurs dérivés. Les aminés utilisables pour cela sont de préférence l'ammoniac ou des aminés primaires ou secondaires, par exemple des acides aminés ou des aminosucres. N'importe quel type de sucre peut être utilisé dans le cadre de la présente invention. Les monosaccharides ou les disaccharides seront toutefois utilisés de préférence, ainsi que les hexoses pyranniques. A titre d'exemples non limitatifs de sucres préférentiellement utilisés dans la présente invention, on peut citer le lactose, le sorbitol, le mannitol, l'erythritol, les kétoses et les aldoses tels que l'arabinose et le glucose. De façon préférée, l'acide gras dicarboxylique ou la partie acide gras dicarboxylique du dérivé présent dans la composition cosmétique est linéaire et comporte 8, 9 ou 10 atomes de" carbone.
Une composition cosmétique selon l'invention peut également comporter plusieurs dérivés d'acides gras dicarboxyliques différents. Dans une telle composition, la partie acide gras dicarboxylique de chacun de ces dérivés est de préférence linéaire et comporte 8, 9 ou 10 atomes de carbone.
Une composition cosmétique particulière selon l'invention contient de l'acide azélaïque, par exemple à une concentration comprise entre 0,1 μM et 10 μM.
Dans une composition cosmétique selon l'invention, qui comporte plusieurs composés choisis parmi les acides gras dicarboxyliques et leurs dérivés, chacun de ces composants est une molécule pure, un extrait végétal, ou un extrait de microorganisme. Bien entendu, dans une telle composition, les composés peuvent, indépendemment les uns des autres, être présents sous forme pure ou sous forme d'extrait végétal ou microorganique.
Un mode de réalisation particulier de l'invention est une composition cosmétique telle que décrite ci-dessus, et qui contient un
extrait de Malassezia furfur, et/ou de Pityrosporum ovale, et/ou de Pityrosporum orbiculare.
L'extrait en question peut être obtenu par n'importe quelle méthode connue de l'homme du métier. Après culture des microorganismes, l'homme du métier peut séparer les microorganismes et le milieu de culture, par exemple par filtration, coagulation et/ou lyophilisation ou, de façon préférable, par centrifugation. Le milieu de culture et les microorganismes peuvent être autoclaves et congelés. Les microorganismes peuvent également être lyophilisés. L'extrait peut être obtenu soit à partir des microorganismes, soit à partir du milieu de culture, par toute technique connue de l'homme du métier.
Selon une variante de l'invention, un acide gras dicarboxylique constituant un principe cosmétique actif peut être associé à des principes actifs différents également sélectionnés pour leur activité bénéfique sur les peaux grasses et en particulier pour leur action sur la réduction de la lipogénèse.
Les compositions cosmétiques de l'invention sont de préférence applicables par voie topique, notamment sur la peau grasse hyperséborrhéique non acnéique ou préacnéique, ou sur le scalp gras. L'invention porte également sur une composition telle que décrite ci-dessus, caractérisée en ce qu'elle contient différents principes cosmétiquement actifs ayant une activité de réduction de la lipogénèse.
Une composition formulée pour l'administration topique selon l'invention contient un milieu cosmétiquement ou dermatologiquement acceptable, c'est-à-dire un milieu compatible avec la peau, les ongles, les muqueuses, les tissus et les cheveux. Selon un mode préféré de réalisation de l'invention, la composition a un pH de préférence proche de celui de la peau, compris entre 4 et 7. La composition comprenant un dérivé d'acide gras dicarboxylique ou l'un de ses dérivés est de préférence appliquée par
voie topique sur le visage, le cou, les cheveux, les muqueuses et les ongles ou tout autre zone cutanée du corps.
Une composition cosmétique selon l'invention peut se présenter sous toutes les formes galéniques normalement utilisées dans les domaines cosmétiques et dermatologiques. Elle peut être notamment sous forme de solutions hydroalcooliques ou huileuses, de dispersions du type lotion ou sérum, de gels anhydres ou huileux, d'émulsions de consistance liquide ou semi-liquide du type lait, obtenues par dispersion d'une phase grasse dans une phase aqueuse (H/E) ou inversement (E/H), ou d'une émulsion triple (E/H/E ou H/E/H), de suspensions ou d'émulsions de consistance molle, semi-solide ou solide du type crème, gel, de micro- émulsions, ou encore de micro-capsules, de micro-particules, ou de dispersions vésiculaires de type ionique et/ou non ionique. Ces compositions sont préparées selon les méthodes usuelles. Une forme préférée et spécialement adaptée pour les compositions selon l'invention, destinées au traitement des désordres associés à une hyperséborrhée, est une forme de type émulsion huile dans eau. De manière encore préférée, la phase grasse de cette émulsion a une composition proche de celle du sébum, c'est-à-dire que ses composants sont les principaux constituants du sébum (squalène, triglycérides, cires aliphatiques, cires de cholestérol et, éventuellement, cholestérol libre), ou des constituants de structure équivalente, présents dans des proportions similaires à celles présentes dans le sébum.
A titre indicatif, une phase grasse mimant la composition du sébum, utilisable dans le cadre de la présente invention, se compose au moins de 12% à 18% de squalène, de 0% à 10% de trimyristine, de 0% à 10% de trimyristoléine, de 0% à 10% de tripalmitine, de 0% à 10% de tripalmitoléine, de 0% à 20% de trioléine, de 0% à 10% de tristéarine, de 0% à 60% de glycérol, de 0% à 15% de d'acide oléique, de 0% à 10% d'acide palmitique, de 0% à 15% d'acide palmitoléique, de 0% à 10% d'acide myristique, de 0% à 10% d'acide myristoléique, de 5% à 20% de
myristyl oléate, de 5% à 10% de palmityl oléate, de 0,5% à 3% de cholestéryl palmitate et de 0% à 5% de cholestérol.
D'autres phases grasses mimant la composition du sébum, utilisables dans le cadre de la présente invention, sont décrites dans les demandes de brevets FR0114033, GB 884688, WO 02/26207 et WO
02/11693, parmi lesquelles on peut citer une formulation comprenant 35 à 70% d'huile de macadamia, 18 à 30% d'huile de jojoba (cire), 5 à 15% d'huile d'avocat, 6 à 15% de produit insaponifiable d'huile d'olive, 0,5 à 3% de cholestérol libre, 0,5 à 1 ,5% d'oléate de cholestérol, 1 à 3% de phospholipides de soja, et 0,05 à 0,15% de butylhydroxytoluène.
L'intérêt d'une composition dont la phase grasse mime la composition du sébum, est de permettre une meilleure disponibilité de l'actif au niveau de l'organe cible, c'est-à-dire de la glande sébacée.
Les compositions selon l'invention peuvent être également utilisées pour les cheveux sous forme de solutions alcooliques ou hydroalcooliques, ou sous forme de crèmes, de gels, d'émulsions, de mousses. Elles peuvent être utilisées par application sur le cuir chevelu ou, le cas échéant, constituer des shampooings traitants pour cheveux gras.
Les quantités des différents constituants des compositions utilisées selon l'invention sont celles classiquement utilisées dans les domaines considérés.
Ces compositions constituent notamment des crèmes de protection, de traitement ou de soin pour le visage, pour les mains ou pour le corps, des laits corporels de protection ou de soin, des lotions, gels ou mousses pour le soin de la peau et des muqueuses ou pour le nettoyage de la peau. Elles présentent un intérêt particulier pour le traitement des zones les plus grasses du corps, notamment pour le visage, le cou, et le dos.
Les compositions peuvent également consister en des préparations solides constituant des savons ou des pains de nettoyage.
De façon connue, la composition utilisée selon l'invention peut contenir également des adjuvants habituels dans les domaines cosmétique et dermatologique, tels que les gélifiants hydrophiles ou lipophiles, les actifs hydrophiles ou lipophiles, les conservateurs, les antioxydants, les solvants, les parfums, les charges et les matières colorantes. Les quantités de ces différents adjuvants sont celles classiquement utilisées dans les domaines considérés, et par exemple de 0,01 % à 20% du poids total de la composition. Bien entendu, l'homme de l'art veillera à choisir ce ou ces éventuels additifs et/ou leurs quantités de manière telle que les propriétés avantageuses attachées intrinsèquement à la composition soient conformes à l'invention, en particulier telle que l'activité sébo-régulatrice de l'acide gras dicarboxylique ou de son dérivé ne soit pas, ou substantiellement pas, altérées par la ou lès adjonctions envisagées.
Comme huiles utilisables dans l'invention, on peut citer les huiles minérales (huile de vaseline), les huiles végétales (huile de karité, huile d'amande douce), les huiles animales, les huiles de synthèse, les huiles siliconées (cyclométh icône) et les huiles fluorées (perfluoropolyéthers). On peut aussi utiliser comme matières grasses des alcools gras, des acides gras (acide stéarique), des cires (paraffine, carnauba, cire d'abeilles). Comme émulsionnants utilisables dans l'invention, on peut citer le Polysorbate 60 et le stéarate de sorbitane vendus respectivement sous les dénominations commerciales Tween 60 et Span 60 par la Société ICI. On peut y ajouter des co-émulsionnants tels que le PPG-3 myristyl éther vendu sous la dénomination commerciale Emcol 249-3K par la société Witco.
Comme solvants utilisables dans l'invention, on peut citer les alcools inférieurs, notamment l'éthanol et l'isopropanol, le propylène glycol. Comme gélifiants hydrophiles, on peut citer les polymères carboxyvinyliques (carbomer), les copolymères acryliques tels que les copolymères d'acrylates/alkylacrylates, les polyacrylamides, les polysaccharides tels que l'hydroxypropylcellulose, les gommes naturelles
(xanthane) et les argiles, et, comme gélifiants lipophiles, on peut citer les argiles modifiées comme les bentones, les sels métalliques d'acides gras comme les stéarates d'aluminium, la silice hydrophobe, les polyéthylènes et l'éthylcellulose. Comme actifs hydrophiles, on peut utiliser les protéines ou les hydrolysats de protéines, les acides aminés, les polyols, l'urée, l'allantoïne, les sucres et les dérivés de sucre, les vitamines hydrosolubles, l'amidon, les extraits bactériens ou végétaux, notamment d'Aloe Vera.
Comme actifs lipophiles, on peut utiliser le tocophérol (vitamine E) et ses dérivés, les acides gras essentiels, les céramides, les huiles essentielles.
En vue de lutter efficacement contre le photovieillissement, il est en outre possible d'ajouter à la composition utilisée selon l'invention un ou plusieurs filtres solaires complémentaires, actifs dans l'UVA et/ou UVB, hydrophiles ou lyophiles, comportant éventuellement une fonction sulfonique.
Le filtre solaire est de préférence choisi parmi les filtres organiques et/ou les filtres minéraux.
Comme filtres organiques, on peut notamment citer les dérivés cinnamiques, les dérivés salicyliques, les dérivés du camphre, les dérivés de triazine, les dérivés de la benzophénone, les dérivés du dibenzoylméthane, les dérivés de β,β-diphénylacrylate, les dérivés de l'acide p-aminobenzoïque, les polymères filtres et silicones filtres décrits dans la demande WO-93/04665 ou encore les filtres organiques décrits dans la demande de brevet EP-A 0 487 404.
Comme filtres minéraux, on peut notamment citer des pigments ou bien encore des nanopigments (taille moyenne des particules primaires : généralement entre 5nm et 10 nm, de préférence entre 10 et 50 nm) d'oxydes métalliques enrobés ou non, comme par exemple des nanopigments d'oxyde de titane (amorphe ou cristallisé sous forme rutile et/ou anatase), de fer, de zinc, de zirconium ou de cérium qui sont tous des
agents photoprotecteurs bien connus en soi agissant par blocage physique (réflection et/ou diffusion) du rayonnement UV. Des agents d'enrobage classiques sont par ailleurs l'alumine et/ou le stéarate d'aluminium. De tels nanopigments d'oxydes métalliques, enrobés ou non enrobés, sont en particulier décrits dans les demandes de brevets EP-A-0 518 772 et
EP-A-0 518 773.
Comme exemples de filtres solaires complémentaires actifs dans l'UV-A et/ou l'UV-B, on peut citer : l'acide p-aminobenzoïque, le p-aminobenzoate oxyéthyléné (25 mol), le p-diméthylaminobenzoate de 2-éthylhexyle, le p-aminobenzoate d'éthyle N-oxypropyléné, le p-aminobenzoate de glycéroi, le salicylate d'homomenthyle, le salicylate de 2-éthylhexyle, le salicylate de triéthanolamine, le salicylate de 4-isopropylbenzyle, le 4-ter-butyl-4'-méthoxy-dibenzoylméthane (PARSOL 1789 de GIVAUDAN ROURE) le p-méthoxycinnamate de 2-éthylhexyle (PARSOL MCX de
GIVAUDAN ROURE) le 4-isopropyl-dibenzoylméthane (EUSOLEX 8020 de MERCK), l'anthranilate de menthyle, le 2-éthylhexyl-2-cyano-3,3'-diphénylacrylate, (UVINUL N539 de BASF), l'éthyl-2-cyano-3,3'-diphénylacrylate, l'acide 2-phényl benzimidazole 5-sulfonique et ses sels, le 3-(4'-triméthylammonium)-benzylidèn-bornan-2-on- méthylsulfate, le 2-hydroxy-4-méthoxybenzophénone (UVINUL MS 40 de
BASF),
le 2-hydroxy-4-méthoxybenzophénone-5-sulfonate (UVINUL MS 40 de BASF), le 2,4-dihydroxybenzophénone (UVINUL 400 de BASF), le 2,2',4,4'-tétrahydroxybenzophénone (UVINUL D 50 de BASF), le 2,2'-dihydroxy-4,4'-diméthoxybenzophénone (HELISORB II de
NORQUAY), le 2-hydroxy-4-n-octoxybenzophénone, le 2-hydroxy-4-méthoxy-4'-méthylbenzophénone, l'acide α-(2-oxobom-3-ylidène)-tolyl-4-sulfonique et ses sels, le 3-(4'-sulfo)benzylidèn-bornan-2-one et ses sels, le 3-(4'-méthylbenzylidène)-d,l-camphre, le 3-benzylidène-d,l-camphre, l'acide benzène 1 ,4-di(3-méthyiidène-ÎO-camphosulfonique) et ses sels (MEXORYL SX de CHIMEX), l'acide urocanique, le 2,4-6-tris-[p-(2'-éthylhexyl-1 '-oxycarbonyl)anilino]-1 ,3,5- triazine, le 2-[p-(tertiobutylamido)anilino]-4,6-bis [p-(2'-éthylhexyl-1'- oxycarbonyl)anilino]-1 ,3,5-triazine, le 2,4-bis { [4-2-éthyl-hexyloxyl]-2-hydroxyl-phenyl }-6-(4- méthoxy-phenyl)-1 ,3,5-triazine, le polymère de N-(2 et 4)-[2-oxoborn-3-ylidèn)méthyl)benzyl]- acrylamide, l'acide 4,4-bis-benzimidazolyl-phénylèn-3,3',5,5'-tétrasulfonique et ses sels, le 2,2'-méthylèn-bis-[6-(2H-benzotriazol-2-yl)-4-(1 ,1 ,3,3- tétraméthylbutyl) phénol], les polyorganosiloxanes à fonction malonate.
L'invention porte aussi sur un procédé de traitement cosmétique, par l'application des compositions telles que définies ci-dessus, selon la technique d'utilisation habituelle de ces compositions. Par exemple :
application de crèmes, de gels, de sérums, de pommades, de lotions, de laits sur la peau, le cuir chevelu, les ongles et/ou les muqueuses.
Un procédé cosmétique pour le traitement des peaux grasses, pour la prévention et/ou le traitement des lésions acnéiques, consistant à appliquer sur la peau, les muqueuses et/ou les fibres kératiniques, une composition contenant au moins un acide gras dicarboxylique ou l'un de ses dérivés, fait donc partie intégrante de la présente invention.
Une catégorie particulière de sujets susceptibles de bénéficier d'un traitement cosmétique selon l'invention est la catégorie des personnes ayant une peau hyperséborrhéique non acnéique. En effet, comme mentionné ci-dessus, si l'hypersécrétion de sébum n'est pas systématiquement associée à l'acné, elle n'en demeure pas moins particulièrement inesthétique, et ne bénéficie actuellement d'aucun traitement efficace. Contre toute attente, les inventeurs ont démontré, dans la partie expérimentale ci-dessous, que des concentrations d'acide gras dicarboxilyque de l'ordre de 1 μM (donc, environ 0,00002 %), soit très inférieures à celles utilisées antérieurement dans les applications anti- acnéiques, permettent d'observer une diminution significative de la production de sébum par les sébocytes.
Un procédé cosmétique particulier selon l'invention, est un procédé pour le traitement des peaux grasses, pour la prévention et/ou le traitement des lésions acnéiques, consistant à appliquer sur la peau, les muqueuses et/ou les fibres kératiniques, une composition contenant un acide gras dicarboxylique (ou l'un de ses dérivés actifs) à une concentration permettant d'apporter au niveau des sébocytes une quantité d'acide dicarboxylique correspondant à la concentration d'acide azélaïque dont l'efficacité a été observée in vitro. Bien entendu, l'homme du métier saura choisir cette concentration en fonction du dérivé concerné et des excépients de la composition, qui permettent une vectorisation plus ou moins efficace du composé actif vers les sébocytes.
A titre indicatif, une composition utilisée dans un procédé cosmétique selon l'invention peut comprendre de l'acide azélaïque à une concentration comprise entre 0,1 μM et 10 μM.
De manière plus générale, notamment dans le cadre de procédés de régulation de la sécrétion du sébum chez des sujets ayant une peau hyperséborrhéique non acnéique, les compositions utilisées comprendront une concentration d'acide gras dicarboxylique (ou de l'un de ses dérivés actifs) inférieure ou égale à 500 mM, de préférence inférieure ou égale à 50 mM, de manière encore préférée, inférieure ou égale à 5 mM, voire inférieure ou égale à 0,5 mM.
L'invention porte donc également sur un procédé cosmétique de régulation de l'hyperséborrhée chez des sujets non acnéiques, consistant à appliquer sur la peau, les muqueuses et/ou les fibres kératiniques, une composition contenant au moins un acide gras dicarboxylique ou l'un de ses dérivés, présente dans ladite composition à une concentration comprise entre 1 nM et 50 mM, de préférence inférieure ou égale à 5 mM et, de manière encore préférée, inférieure ou égale à 0,5 mM.
L'invention porte en particulier sur l'utilisation de l'acide azélaïque, pour la préparation d'une composition sébo-régulatrice, pour le traitement des peaux grasses.L'invention porte notamment sur l'utilisation de l'acide azélaïque, pour la préparation d'une composition destinée à corriger les désordres associés à une hyperséborrhée.
Les caractéristiques de l'invention mentionnées ci-dessus apparaîtront plus clairement à la lumière des exemples suivants.
Exemple 1 : Réduction de la lipogénèse
Le test mis au point consiste à mesurer, après 2 jours de traitement, la quantité de lipides produite par des sébocytes de la lignée humaine immortalisée (en présence ou non d'agents actifs). La mesure d'émission de fluorescence du colorant ROUGE NILE, à deux longueurs
d'onde distinctes, permet de quantifier le contenu en lipides neutres caractéristiques du sébum.
Tableau 1
Les glucocorticoïdes sont connus pour diminuer la production de sébum chez les sujets non acnéiques (Leveque, J.L ; et al. (1991)). Le cortisol a donc été choisi comme référence, tandis que le milieu de culture seul a été choisi comme témoin (aucun excipient supplémentaire n'a été ajouté au cortisol ni à l'acide azélaïque, ces derniers étant solubilisés dans le milieu de culture dans les conditions du test). Ces expériences ont montré que l'acide azélaïque inhibe, à la concentration de 1 μM la production de sébum. Son activité est modérée par rapport à la référence pharmaceutique. Elle devrait néanmoins permettre une action cosmétique significative, dans une formulation adéquate, en effectuant si nécessaire des applications répétées.
Exemple 2 : Tolérabilité
La tolérabilité de l'acide azélaïque a été mesurée par mesure.de la cytoxicité du produit sur les sébocytes SZ 95 (Zouboulis, Seltmann et al. 1999). Les conditions du test sont les mêmes qu'à l'exemple 1. La cytotoxicité est mesurée par la production de LDH dans le milieu de culture.
Tableau 2
Comme on peut le noter dans le tableau 2 ci-dessus, l'acide azélaïque améliore la survie des sébocytes dans les conditions expérimentales. Son activité séborégulatrice ne saurait donc être attribuée à une cytotoxicyté.
BIBLIOGRAPHIE
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