METHODE D'OBTENTION DE CULASSES MOULEES COMPOSITES
L'invention concerne la réalisation de culasses moulées en alliages d'aluminium comportant au moins deux alliages différents. Les alliages liquides peuvent comporter des particules solides à la coulée de taille et de forme variées de façon à réaliser des composites à matrice métallique après solidification.
Cette technique permet d'optimiser le choix des matériaux selon les fonctions principales requises dans les différentes parties des culasses. A titre d'illustration, on peut citer la recherche, au voisinage de la chambre de combustion, d'une tolérance aux dommages à chaud maximale, notamment dans les zones intersièges des soupapes. Par contre, dans la partie froide de la culasse, notamment les piliers de fixation, la propriété critique est la résistance mécanique, afin de conférer à la culasse une rigidité maximale et la meilleure aptitude au serrage, avec un poids minimal de la pièce finie.
Or actuellement, il n'existe pas de technique de fabrication permettant de résoudre de façon satisfaisante et économiquement viable le problème énoncé ci-dessus.
En effet, il est certes possible de rechercher des matériaux présentant à la fois une forte résistance mécanique et une bonne tenue à chaud. Cependant, l'expérience montre que ce type de matériaux est coûteux. Par exemple, des composites à matrice métallique renforcés de particules de carbure de silicium de type DURALCAN coûtent, d'après les estimations des producteurs, de 2 à 3 fois plus cher que les alliages conventionnels de moulage, ce qui exclut leur utilisation pour la totalité de la culasse.
De façon générale, il est nécessaire de limiter l'emploi de matériaux à hautes caractéristiques à une application locale, dans les zones où ils sont indispensables, ceci en raison de leur coût.
Par ailleurs, il n'existe pas, à notre connaissance, de technique permettant d'insérer de tels matériaux dans une culasse. L'insertion d'alliages d'aluminium ou de composites à matrices métalliques (par
exemple les alliages AlFe AlFeCe obtenus par métallurgie des poudres, puis corroyage, les alliages à hautes caractéristiques à chaud obtenus par procédé de type OSPREY, les composites à matrice métallique résultant d'imprégnation de préformes, par exemple par forgeage liquide - Squeeze Casting -...) placés à l'état solide dans la culasse au moment de la coulée se heurte à la difficulté de réussir à lier métallurgiquement le matériau de la culasse et celui du(ou des) insert(s).
Enfin, une autre voie actuellement développée pour renforcer localement le matériau d'une culasse consiste en l'imprégnation à la coulée de préformes (notamment d'alumine ou de carbure de silicium ou de renforts constitués de fibres longues). Mais ce type de technologie présente des surcoûts de fabrication élevés par rapport aux techniques usuelles de coulée par gravité et/ou sous basse pression, notamment en raison de la nécessité d'effectuer un vide partiel, puis d'imposer des surpressions de plusieurs Pa qui obligent à recouvrir les noyaux de sable d'une couche protectrice, afin de ne pas les imprégner eux-mêmes de métal liquide.
La demanderesse a donc recherché et mis au point des techniques d'élaboration permettant de couler différents alliages dans une culasse, et notamment des alliages à haute tolérance aux dommages côté chambre de combustion et des alliages à bas prix de revient et forte résistance mécanique dans le reste de la pièce.
La pièce selon l'invention est constituée de couches successives, jointives et sensiblement horizontales.
Plus précisément, il est apparu qu'il faut que chaque couche i-1 (i l 2) vérifie les conditions suivantes au moment de la coulée de la couche ultérieure i.
* Face inférieure de la couche i—1 : 50 à 100% de fraction solide
* Face supérieure de la couche i-1 : 0 à 80% de fraction solide et de préférence : Face inférieure de la couche i-1 : 70 à 100% de fraction solide
Face supérieure de la couche i-1 : 10 à 40% de fraction solide
Ces conditions peuvent s'obtenir par ajustement du mode de refroidissement du métal coulé, visant une extraction calorifique maximale par la base de chaque couche et en attendant le temps nécessaire à l'établissement des conditions ci-dessus.
Dans la pratique, il s'agit de définir le temps d'attente, t , entre la fin de coulée de chaque couche (i-1) et le début de la couche i (i l 2), en fonction des conditions de refroidissement de la pièce moulée.
Pour des raisons évidentes de productivité, on cherche à ce que t soit aussi faible que possible dimensionnant en conséquence le système de refroidissement de la couche i-1. Le refroidissement de la pièce moulée est généralement assuré par une semelle métallique parcourue par un fluide caloporteur tel que l'eau.
Les fractions solides sont déterminées préalablement de façon expérimentale par analyse thermique, par exemple en plaçant au moins deux thermocouples dans chaque couche (i-1), l'un dans la zone proche de l'interface avec la couche suivante, et l'autre au voisinage de la base de la couche.
Les fractions solides sont déterminées à partir de ces analyses thermiques par l'utilisation de diagrammes d'équilibre du métal coulé assimilé en général à un alliage binaire à base d'Al. Le principe du calcul est donné en Annexe.
Les systèmes d'alimentation seront adaptés de sorte que la coulée de chaque couche i ( i l 2) ne crée pas d'érosion inacceptable de la couche i-1 et que les couches soient aussi uniformes que possible. Cet ajustement est à la portée de l'homme du métier par exemple, grâce à l'optimisation de chenaux d'alimentation ou par l'utilisation de filtres métalliques ou céramiques placés dans le système d'alimentation, pour en réguler le débit. Il faut en effet obtenir une (des) interface(s) sensiblement plane(s) et régulière(s) entre les couches, contrôlable(s) par exemple par micrographie, macrographie ou microscopie à balayage sur coupe(s) transversale(s) perpendiculaire(s) à l'interface.
Les systèmes d'alimentation peuvent être dissymétriques, mais on les réalisera de préférence symétriques pour faciliter l'obtention de couches d'épaisseurs uniformes.
Enfin, il est possible d'inerter la cavité du moule par un gaz inerte (CO , Argon, Azote, etc) afin de minimiser la couche d'oxyde naturellement formée à la surface du métal liquide en cours de coulée, et donc de favoriser la liaison métallurgique entre les couches.
En remplissant le moule dans ces conditions, on obtient des culasses présentant des couches successives d'alliages différents avec une liaison métallurgique de bonne qualité sans défauts d'oxydes (voir fig. 5 et 6), conformément au cahier des charges des constructeurs automobiles.
Dans le cas de culasses bi-alliages, on forme une couche de matériau destiné à la tenue à chaud ayant typiquement une épaisseur de 15 à 25 mm côté chambre de combustion, le reste étant constitué du second alliage.
Selon l'invention, le procédé d'obtention d'une culasse bi (ou multi) métallique s'effectue donc en coulant successivement dans la cavité d'un moule soit métallique, soit en sable, soit mixte, deux (ou plusieurs) alliages d'aluminium distincts avec une (des) zone(s) d'interface(s) la(les) moins épaisse(s) possible(s) constituée(s) d'un mélange des alliages coulés et sans trace de peaux d'oxydes.
Pour ce faire, les alliages sont introduits dans la cavité du moule par des systèmes d'alimentation indépendants. Le niveau de chaque couche est obtenu en dosant sa quantité, par exemple en volume.
Afin d'éviter une zone de mélange trop importante en deux couches d'alliages différents et successifs, il convient de laisser refroidir l'alliage de la couche i-1 (i l 2) afin qu'il soit pâteux au moment de l'arrivée du métal liquide destiné à former la couche i.
La réalisation de culasse multi-alliages peut se faire par technique de coulée par gravité, sous basse pression, par forgeage liquide (squeeze casting) ou tout autre technique industrielle de fonderie adaptée à
l'obtention de culasses.
L'invention sera mieux comprise à l'aide des exemples suivants illustrés par les fig. 1 à 7. . La fig. 1 représente schématiquement une vue de la pièce moulée obtenue et le sens du gradient thermique appliqué (flèche) . La fig. 2 représente en couche transversale une vue schématique d'un moule utilisable pour la mise en oeuvre de l'invention. . La fig. 3 représente une autre version dudit moule, qui permet d'obtenir la pièce moulée représentée en perspective à la fig. 4.
. la fig. 5 représente une coupe macrographique transversale de la zone de liaison entre les deux alliages de la culasse obtenue dans les conditions rapportées à l'exemple 1 au grandissement x 25. . la fig. 6 représente une coupe macrographique transversale de la zone de liaison entre les 2 alliages de la culasse obtenue conformément aux conditions de l'exemple 2 au grandissement x 50. . la fig. 7 représente une courbe d'analyse thermique de la solidification d'un alliage eutectique Al-Si et la fig. 8 le diagramme d'équilibre de l'alliage binaire correspondant (Al-Si) .
EXEMPLE 1 - Culasse bi-alliage : AS7G - AS5U3G (fig. 2)
Le moule est composé d'une semelle métallique (1) en cuprochrome (composition approximative Cu 60%, Cr 40%) d'épaisseur 100 mm et de mottes en sable (2) . Cette semelle comporte un circuit de refroidissement (3) dans lequel circule l'eau de manière à maintenir sa température entre 80 et 100°C.
Le moule est muni de deux systèmes d'alimentation (4) et (5), d'évents, de noyaux des circuits de circulation d'eau et d'huile, de pipes d'admission et d'échappement, et de masselottes habituelles (non représentés) .
Le procédé de noyautage est le procédé PEPSET pour les mottes (2) , les noyaux des circuits de circulation d'huile et les pipes d'admission et d'échappement, et ASHLAND pour les noyaux des circuits de circulation d'eau.
Par l'alimentation (4), on coule le premier métal, de l'AS7G0,3 (selon la norme française NF A 57702) à la température de 710°C (température visée) sur une hauteur de 20 mm correspondant à l'épaisseur de la table de la culasse (dosage volumétrique) . Le système d'alimentation (5) est calculé de façon à ce que l'amenée d'AS7G0,3 dure environ 15 s avec une vitesse ou débit d'environ 6,5 1/mn aux attaques (6). Dès la fin de la coulée du premier alliage, on introduit par le système d'alimentation (5) le deuxième alliage, un AS5U3G (norme 57702) à la température de 720°C à la vitesse ou débit de 30 1/mn aux attaques de manière à ce que la composante horizontale de la vitesse de cet alliage soit env. 0,5 m/s afin de remplir le reste du moule sans éroder le premier métal.
Le calcul des fractions solides dans le premier alliage (AS7G03) au moment de l'arrivée du deuxième métal à l'aide de l'enregistrement de la température du premier alliage, du diagramme Al-Si et de l'application de la règle des leviers en appliquant la méthode donnée en Annexe conduit aux résultats suivants :
- partie inférieure 10 (au contact de la semelle) : 82 %. - partie supérieure 11 (dans la zone de l'interface) : 18%.
EXEMPLE 2 - Culasse bi-alliage - duralcan F3A - AS5U3G
Le Duralcan F3A, constitué de AS7G0,3 + 15% de particules de SiC, est utilisé comme premier alliage et est coulé dans les mêmes conditions que 1ΑS7G de l'exemple n° 1. Les particules de SiC ne modifiant pas l'analyse thermique de l'alliage, la méthode de calcul des fractions solidifiées pour les alliages d'aluminium normaux est applicable.
Néanmoins, la température de coulée du Duralcan est augmentée de 20°C de manière à obtenir la même fluidité que celle de l'alliage de base non chargé, et donc les mêmes vitesses de remplissage.
ANNEXE
Mode de calcul des fractions solidifiées dans le cas d'alliages de type Al-Si hypoeutectiques (cas général des alliages de fonderie pour culasses) .
A partir du diagramme d'équilibre de la figure 7, pour un alliage type AISi, de composition globale Co, on définit :
T la température de l'alliage Tl température de début de solidification T2 température de fin de solidification (ici en coïncidence avec la température de palier eutectique) Cl concentration en élément d'addition du métal solidifié en premier C2 concentration en élément d'addition du métal solidifié en dernier, avant transformation du liquide eutectique.
On assimile CM, composition moyenne, solidifiée avant la transformation eutectique à : CM = Cl + C2
C3 concentration eutectique
On applique alors la règle habituelle des leviers pour déterminer la fraction solidifiée à chaque stade de la solidification précédant la transformation isotherme (ou eutectique).
Soit fso la fraction solidifiée obtenue juste avant la solidification de 1'eutectique (T=T2) :
fso = C3 - Co C3 - CM
La fraction solidifiée, fs, entre Tl et T2 peut être calculée soit par cette même règle des leviers à chaque température, soit par la formule suivante, plus rapide, si on assimile le soliduε et le liquidus de
l'alliage à deux droites entre Tl et T2 (hypothèse tout à fait acceptable dans le cadre de l'utilisation de cette demande de brevet) :
fs = (C3-Co)(Tl-T) (T2 S T i Tl) (C3-CM)(Tl-T)+(Co-Cl)(T-T2)
La fraction solidifiée au cours d'un palier de transformation isotherme, notamment eutectique, peut être estimée à partir de l'analyse thermique grâce à un thermocouple placé dans la couche considérée, en supposant que la fraction solidifiée varie linéairement dans le temps au cours de la transformation isotherme.
Dans le cas d'une transformation de type binaire (figure n° 6), on peut donc écrire avec une très bonne approximation, que la fraction totale solidifiée Fs est égale à :
Fs = fso + (1 - fso) (t - to) (to S t S tl)
(tl - to)
puisque l'alliage est totalement solide au temps tl.