DISPOSITIF DE FRACTIONNEMENT DE MELANGES
La présente invention concerne un dispositif industriel de fractionnement de mélanges de composants à l'aide de solvants. Elle concerne plus précisément l'utilisation pour ce faire d'un solvant liquide, appelé diluant, et d'un solvant porté à pression supercritique, c'est-à-dire un fluide en état supercritique ou un liquide subcritique, et ce en utilisant des membranes poreuses. On sait que les corps sont généralement connus sous trois états : solide, liquide et gazeux, et que l'on passe de l'un de ces états à un autre état en faisant varier la température et/ou la pression. Or il existe un point au- delà duquel on peut passer de l'état liquide à l'état vapeur sans passer par une ébullition ou, en sens inverse, par une condensation, ce passage s 'effectuant alors de façon continue. Un tel point est appelé le point critique.
On désignera par fluide supercritique, un fluide qui se trouve dans un état caractérisé soit par une pression et une température respectivement supérieures à la pression et à la température critiques dans le cas d'un corps pur, soit par un point représentatif (sur un graphique pression/température) situé au-delà de l'enveloppe des points critiques dans le cas d'un mélange. Un tel fluide supercritique présente, pour de très nombreuses substances, un pouvoir solvant élevé, de beaucoup supérieur à celui de ce même fluide à l'état de gaz comprimé.
Il en est de même des liquides dits "subcritiques" c'est-à-dire qui se trouvent dans un état caractérisé soit par une pression supérieure à la pression critique et par
une température inférieure à la température critique, dans le cas d'un corps pur, soit par une pression supérieure aux pressions critiques des composants et une température inférieure aux températures critiques des composants dans le cas d'un mélange.
Les variations importantes et modulables du pouvoir solvant de ces fluides sont d'ailleurs utilisées dans de nombreux procédés d'extraction (solide/fluide), de fractionnement (liquide/fluide) , de chromatographie analytique ou préparâtive, de traitement des matériaux (céramiques, polymères) . Des réactions chimiques ou biochimiques sont également réalisées dans de tels solvants .
On notera que les propriétés physico-chimiques du dioxyde de carbone ainsi que sa pression critique de 7,4 MPa et sa température critique de 31°C, en font un solvant préféré dans de nombreuses applications, d'autant qu'il ne présente pas de toxicité et est disponible à très bas prix en très grande quantité. De plus, solvant non polaire, le dioxyde de carbone porté à pression supercritique est parfois additionné d'un co-solvant constitué d'un solvant organique polaire qui va modifier son pouvoir solvant de façon notable, surtout vis-à-vis de molécules présentant une certaine polarité. On utilise souvent l'éthanol à cette fin.
L'un des avantages principaux des procédés mettant en oeuvre les fluides à pression supercritique réside dans la facilité de réaliser la séparation entre le solvant (le fluide) et les extraits et solutés, ainsi qu'il a été décrit dans de nombreuses publications et, pour certains
aspects importants de mise en oeuvre, dans le brevet FR-A-2 584 618. Les propriétés intéressantes de ces fluides sont d'ailleurs utilisées depuis longtemps en extraction solide- fluide et fractionnement liquide- fluide. La présente invention a pour but de permettre, à des fins de production industrielle, la séparation d'un mélange liquide en ses différentes fractions en utilisant un système dérivé dans sa conception générale des procédés classiquement appelés "fractionnement fluide- liquide ou liquide-liquide à contre-courant" tels que ceux utilisés à grande échelle depuis plusieurs décennies.
Suivant l'invention, on combinera différents modules élémentaires de séparation, chacun étant constitué d'un récipient généralement cylindrique, contenant une membrane poreuse assurant la séparation entre deux phases fluides, entre lesquelles des solutés vont s'échanger au travers de cette membrane poreuse. Ces modules seront préférablement constitués d'un faisceau de fibres creuses et perméables qui seront disposées selon l'axe longitudinal du récipient cylindrique, afin d'assurer une grande surface de membrane par unité de volume du récipient, l'un des fluides circulant à l'intérieur des fibres et l'autre fluide circulant à l'extérieur.
La membrane poreuse a comme première fonction de séparer les deux phases entre lesquelles le transfert de soluté va être opéré, à savoir une phase liquide et une phase fluide à pression supercritique. Cette séparation de phase est possible du fait des forces de capillarité qui maintiennent 1 ' interface au niveau des orifices de très petit diamètre de la membrane poreuse. De telles membranes
sont couramment utilisées dans l'industrie pour séparer des fluides liquides ou un fluide liquide et un fluide gazeux. Dans le cas de la présente invention, il convient bien entendu de réaliser la membrane poreuse en un matériau qui ne soit pas altéré par les deux fluides et, particulièrement par le fluide à pression supercritique dont on sait qu'il a la propriété de modifier la morphologie des polymères organiques. On choisira donc préférentiellement des membranes minérales, telles que celles utilisées classiquement en ultrafiltration, ou des membranes organiques non affectées par les fluides à pression supercritique, telles que sous la marque POROCRIT et qui sont formées d'un faisceau de fibres creuses perméables en polypropylène . Par commodité, on appellera dans ce qui suit : -diluant : le fluide liquide,
-solvant : le fluide à pression supercritique, -solutés : les composés à fractionner. La présente invention a ainsi pour objet un dispositif de fractionnement de mélanges en leurs divers composants, du type comprenant des éléments de séparation montés en série et en boucle fermée, présentant des points d'injection et des points de soutirage alternés entre eux le long de la série des éléments de séparation, dans lequel la boucle fermée est formée de zones successives constituées chacune par au moins un élément de séparation, ce dispositif comprenant au moins un point d'injection de solvant et un point d'injection de diluant situés entre deux zones respectives, un point d'injection de mélange, au moins un point de soutirage d'extrait situé en aval du
point d'injection de mélange, dans le sens de circulation du solvant, et un point de soutirage de raffinât situé en amont du point d'injection de mélange, dans le sens de circulation du solvant, caractérisé en ce que : - le solvant est un fluide à pression supercritique,
- chacun des éléments de séparation est constitué d'un élément de séparation de phases à membrane,
- il comprend des moyens pour injecter le solvant à une pression supérieure à sa pression critique, et pour maintenir la pression dans ladite boucle à une valeur supérieure à la pression critique,
- il comprend des moyens pour injecter le diluant et pour maintenir la pression de celui-ci à une valeur voisine de celle du solvant dans chacune des zones .
Dans un mode de mise en oeuvre de 1 ' invention les éléments de séparation à membrane sont constitués d'une enveloppe cylindrique contenant un faisceau de fibres creuses et perméables disposées suivant l'axe longitudinal de l'enveloppe et des moyens d'entrée et de sortie des fluides de façon que l'un des fluides circule à l'intérieur des fibres et l'autre à l'extérieur de celles-ci. Les fibres pourront préférablement être constituées de polypropylène . Par ailleurs les pressions respectives dans chacune des zones pourront être telles que le pouvoir solvant du solvant S dans chaque zone sera maintenu constant et sera différent d'une zone à l'autre. Préférablement ce pouvoir solvant diminuera dans le sens S d'écoulement du solvant. Le dispositif suivant l'invention pourra comprendre
un système de pompage destiné à augmenter la pression du diluant entre chaque zone dans le sens de l'écoulement de celui-ci et d'un système d'équilibrage des pressions du diluant et du solvant dans chacune de ces zones. Pour ce faire on utilisera préférablement des pompes volumétriques pour faire circuler le diluant à des débits contrôlés dans chacune des zones respectives.
Le système d'équilibrage des pressions pourra être constitué de récipients d'équilibrage respectifs associés à chaque zone, qui seront connectés à chacun des courants de diluant et de solvant entrant et sortant respectivement de chaque zone aval dans le sens de circulation du solvant. L'interface entre le diluant et le solvant pourra être maintenu stable au moyen d'un système de mesure des niveaux respectifs agissant sur la régulation de débit de la pompe correspondante .
On décrira ci-après, à titre d'exemples non limitatifs, diverses formes d'exécution de la présente invention, en référence aux dessins annexés sur lesquels : La figure 1 est un schéma de principe du dispositif de fractionnement de mélanges suivant l'invention, comprenant quatre zones de fonctionnement.
La figure 2 est un schéma représentant la disposition en série de deux éléments de séparation à membrane et les trajets respectifs à travers ceux-ci du diluant et du solvant .
La figure 3 est un schéma d'une variante d'un dispositif de fractionnement suivant l'invention comprenant trois zones de fonctionnement. La figure 4 est un schéma d'une autre variante d'un
dispositif de fractionnement comprenant cinq zones de fonctionnement permettant de fractionner des mélanges en trois fractions.
La figure 5 est une vue schématique d'un mode de mise en oeuvre de l'invention et notamment de moyens d'équilibrage des pressions dans les zones de la boucle.
Dans ce qui suit et par simplification, on se limitera au cas d'un mélange de deux composants A et B à séparer en deux coupes, ce qui donne un circuit comprenant en série un point d'injection Is de solvant et un point d'injection ID de diluant, un point de soutirage S-g d'extrait, un point d'injection IA+B du mélange à fractionner et un point de soutirage SR de raffinât, un point de soutirage ou d'appoint de diluant AD et un point de soutirage ou d'appoint de solvant As ainsi que représenté sur la figure 1.
Suivant l'invention chacun des modules de séparation pourra être constitué d'un élément de séparation 5 ou de plusieurs de ceux-ci qui seront alors disposés en série. Sur la figure 1 le dispositif de fractionnement comprend quatre modules de séparation 1, 2, 3 et 4 définissant successivement quatre zones respectives I à IV.
Chacun des éléments de séparation 5 est constitué de membranes poreuses. Ces membranes poreuses, qui doivent être stables en présence du diluant, du solvant à pression supercritique et des solutés, sont constituées de membranes minérales, telles que celles dérivées des barrières de diffusion utilisées pour la séparation isotopique ou celles utilisées en ultrafiltration, ainsi que certaines membranes construites en polymère organique. On utilisera
préférablement des membranes constituées de faisceaux de fibres poreuses creuses 6 de polypropylène qui paraissent bien adaptées à l'utilisation du solvant à pression supercritique, notamment lorsque celui-ci est constitué de dioxyde de carbone, ainsi qu'à l'utilisation de nombreux solutés dissous dans une phase aqueuse ou dans une phase organique. On citera ainsi les modules séparateurs à fibres creuses commercialisés sous la marque POROCRIT. Dans les éléments de séparation 5 le diluant D circule à l'intérieur des fibres 6 et le solvant S circule à l'extérieur de celles-ci côté récipient, ainsi que représenté schématiquement sur la figure 2.
Le solvant S utilisé est constitué d'un fluide à pression supercritique, préfèrentiellement du dioxyde de carbone. Il est introduit en Ig dans le module 1, par un compresseur ou une pompe K, dans le sens de la circulation du solvant S représenté sur la figure par la flèche S.
De façon générale le diluant D est constitué d'un liquide insoluble ou très peu soluble dans le solvant S. Dans les modes de mise en oeuvre décrits ci-après il est constitué d'une phase aqueuse et est introduit en I-Q par une pompe P qui le fait circuler en sens inverse du solvant suivant la flèche D.
Le mélange contenant les composants A et B que l'on souhaite séparer est dissous dans la phase diluant et est introduit en I^+B entre les zones II et III.
Les composants A et B sont soutirés sous forme de raffinât contenant essentiellement le composant B en SR entre la zone I et la zone II et sous forme d'extrait contenant essentiellement le composant A en Sg entre la
zone III et la zone IV, étant précisé que ce raffinât et cet extrait sont soutirés sous forme dissoute dans le courant de solvant S .
Le solvant S circulant à contre-courant du diluant D et le mélange A+B étant injecté entre la zone II et la zone III, les composants A et B vont se répartir entre le diluant et le solvant. Les composants à plus forte affinité avec le solvant seront donc plus difficilement entraînés par le diluant et suivront préférentiellement le solvant tandis que les composants à affinité plus faible avec le solvant auront tendance à être plus facilement entraînés par le diluant .
On peut donc considérer en schématisant, que de chaque zone à la suivante, le pouvoir solvant du solvant S doit diminuer, sinon rester égal, et ne peut pas augmenter sauf bien entendu lorsque l'on se place à la sortie de la zone IV (pour être recyclé en zone I) en ce qui concerne le solvant et en sortie de la zone I (pour être recyclé en zone IV) en ce qui concerne le diluant D. Suivant l'invention, afin d'obtenir une bonne séparation entre les deux phases tout en assurant le transfert des solutés entre celles-ci, on fera en sorte que les deux fluides, de part et d'autre de la membrane, soient maintenus à des pressions très voisines l'une de l'autre, de façon que les forces capillaires empêchent l'une des phases de percoler à travers la membrane pour se mélanger à l'autre phase. On fera donc en sorte que la phase liquide soit maintenue à une pression voisine de celle du fluide à pression supercritique, et ce à tout moment du procédé, y compris lors des phases transitoires de fonctionnement.
Le dispositif suivant l'invention comprend des moyens classiques de circulation du diluant liquide et de circulation du solvant à pression supercritique tels que ceux utilisés dans les installations d' extraction- fractionnement utilisant les fluides à pression supercritique. Ainsi, la circulation du diluant est assurée par des pompes P et celle du solvant à pression supercritique peut être assurée soit par un compresseur K, soit par une pompe véhiculant le fluide à l'état liquéfié qui est ensuite réchauffé à la température requise.
Dans le cas qui vient d'être décrit, on s'est limité au cas de deux constituants A et B mais, comme on l'a souligné précédemment, ce cas peut être étendu à plus de deux constituants en augmentant le nombre des points de soutirage vers l'aval ou l'amont par rapport au point d'injection I^+B du mélange A+B.
On peut bien entendu injecter le mélange à séparer soit dans la phase liquide diluant, soit dans la phase solvant à pression supercritique et soutirer les fractions A et B soit en solution dans le diluant, soit dans le solvant .
Cependant il est simplement plus pratique d'injecter une solution liquide du mélange dans le diluant qu'une solution supercritique. Par ailleurs bien que le soutirage des fractions puisse être opéré dans la phase diluant plutôt que dans la phase solvant, il est toutefois plus commode et moins coûteux, en général, de séparer le solvant et les fractions riches en produits A et B à extraire respectivement, compte tenu des propriétés spécifiques des fluides en état
supercritique ainsi qu'il a été mentionné ci-dessous, plutôt que de séparer les fractions riches en produits A et B respectivement et le diluant D en utilisant des procédés comme la distillation et la cristallisation. Dans un mode de mise en oeuvre particulier de l'invention, la séparation sera préférentiellement mis en oeuvre de telle façon que le pouvoir solvant du solvant S soit maintenu constant dans chacune des zones, mais soit différent d'une zone à l'autre, à la différence fondamentale de ce qui est réalisé dans les procédés classiques d'extraction à contre-courant .
Une telle mise en oeuvre est rendue possible par les propriétés particulières des fluides à pression supercritique susmentionnées, à condition de concevoir un équipement adapté pour mettre en oeuvre une telle variation. Suivant l'invention on modulera le pouvoir d'élution en faisant varier la pression du solvant S, ce qui est relativement aisé dans certaines gammes de pression/température . En fait, pour des considérations technologiques, il n'est pas simple de réaliser une telle modulation du pouvoir solvant par une variation de pression à température constante (régime isotherme) . On préférera donc, sans que ceci ne constitue une limitation à la mise en oeuvre du procédé objet de la présente invention, réaliser ladite modulation par une variation de pression à enthalpie constante (régime adiabatique ou isenthalpique) . Ceci conduira à choisir les paramètres de fonctionnement de l'installation dans une zone du diagramme pression- température du fluide éluant au sein de laquelle les
variations de température resteront très faibles (quelques degrés kelvin) lors des opérations de modulation de la pression entre les zones.
On a constaté par voie expérimentale que les pouvoirs solvants du fluide S, dans chacune des quatre zones définies sur les figures 1,3 et 4 doivent être décroissants, ce qui implique que les pressions régnant dans chacune de ces zones doivent être décroissantes, sans qu'il soit exclu qu'elles puissent être égales dans deux ou trois zones successives, voire les quatre zones (régime isobare) . On notera qu'au contraire du solvant S qui circule d'amont en aval dans des zones portées à des pressions décroissantes, le diluant D circule à contre- courant dans des zones successives portées à des pressions croissantes et très voisines de celles du solvant dans chacune d'entre elles.
Le dispositif suivant l'invention permet une mise en oeuvre intéressante économiquement sur le plan industriel. Un mode de mise en oeuvre possible est illustré sur la figure 5. Dans celui-ci l'écoulement du solvant S à pression supercritique entre son point d'entrée Is et son point de sortie Es se fait sans perte de charge notable à travers les modules de séparation à l'exception des vannes notées (V^ avec k=l, 2, 3, 4 représentant le n° de la zone concernée) situées en aval dans le sens S de circulation du solvant des zones I, II, III et IV, dans lesquelles on réalisera la perte de charge souhaitée afin de réguler parfaitement les pressions dans ces zones aux valeurs choisies par l'opérateur. L'écoulement du diluant D entre son point d'entrée I-Q
et son point de sortie E-p se fait sans perte de charge notable à travers les modules de séparation, mais requiert un système de pompage pour augmenter la pression du diluant entre chacune des zones et un système d'équilibrage des pressions du diluant D et du solvant S dans chacune de ces zones. Pour ce faire, on utilise des pompes (P^) volumétriques à piston ou à membrane pour faire circuler le diluant D à des débits bien contrôlés dans chacune des zones I à IV et on dispose un système d'équilibrage des pressions entre le diluant D et le solvant S constitué par exemple d'un récipient cylindrique (R^) connecté à chacun des courants de diluant D et de solvant S entrant et sortant respectivement de la zone aval (K) dans le sens de circulation du solvant, dans lequel l'interface (F) entre le diluant et le solvant est maintenue stable grâce à un système de mesure de niveau (N^*) agissant sur la régulation du débit de la pompe de diluant (P^) située en amont de la dite zone. Ce système simple est facilement automatisable et les pompes et vannes nécessaires sont disponibles et ont été testées à grande échelle dans les installations de mise en oeuvre des fluides supercritiques .
L'alimentation du mélange à séparer introduit au point I +B peut être effectuée soit directement sans dilution préalable, si le mélange est liquide à la température et à la pression d'alimentation, soit plus généralement et plus favorablement après dilution dudit mélange dans le diluant porté préalablement ou ultérieurement à cette dilution dans des conditions voisines de celles souhaitées par l'opérateur à l'entrée de la zone II.
Toutefois, dans une variante du procédé, on peut également introduire le mélange à séparer dissous dans le fluide solvant S. Cette opération de dilution est opérée classiquement selon les règles de l'art habituelles. Aussi à titre d'exemple, cette opération peut être favorablement réalisée par dissolution du mélange solide à fractionner au sein du solvant percolant sur un lit dudit solide, lequel solvant se trouvant alors dans des conditions où son pouvoir solvant est fixé de façon qu'il atteigne la concentration souhaitée en ledit mélange par saturation.
De même, si ledit mélange est liquide, on pourra favorablement faire percoler le solvant à l'état de bulles au sein de celui-ci, dans des conditions où il se sature en ledit mélange en atteignant la composition souhaitée. Si le mélange à fractionner est gazeux ou liquide, on pourra également favorablement réaliser la dissolution dans l'éluant liquide par un mélange en ligne, les deux flux étant soigneusement régulés. Cette alimentation du mélange à séparer est favorablement effectuée à une température et à une pression très voisines de celles fixées à l'entrée de la zone II. On minimise ainsi les perturbations du régime d'écoulement dans les modules de séparation amont et aval. De plus, dans une variante intéressante de l'invention, on peut utiliser cette alimentation comme apport d'enthalpie au système. En effet, la mise en oeuvre la plus favorable du procédé consiste, comme décrit ci-dessus, à réaliser les variations de pression isenthalpiques à travers des vannes de régulation. Dans certains cas, ladite détente peut s'accompagner d'une baisse notable de la température du fluide qu'il est possible de compenser en introduisant le
mélange à fractionner à une température supérieure à la température du fluide.
Lorsque la circulation du solvant S est assurée par un compresseur K, la compression du fluide est toujours source d ' échauffement de celui-ci et il est alors possible de contrebalancer cet échauffement en introduisant l'appoint de solvant à une température inférieure à celle du fluide issu de la dernière colonne amont. Lorsque la circulation du solvant est assurée par une pompe, la température du solvant entrant en Ig dans le module de séparations 1 de la zone I est régulée grâce à un échangeur de chaleur situé en aval de ladite pompe.
Le raffinât et l'extrait qui sont soutirés sont des solutions du mélange fractionné au sein d'une certaine quantité de diluant ou, plus favorablement, du fluide supercritique constituant le solvant. La mise en oeuvre de l'art antérieur tel que décrit par exemple dans le brevet français susmentionné FR-A-2 584 618 permet de séparer le solvant des produits obtenus, le solvant pouvant être favorablement recyclé dans le procédé via l'appoint en solvant AS .
Un des avantages importants permis par le procédé faisant l'objet de l'invention réside précisément dans la mise en oeuvre aisée de cette opération, où, à la différence des problèmes rencontrés lorsque le raffinât et l'extrait sont soutirés dans le diluant, la séparation ne nécessite pas, dans le cas présent, de dispositifs complexes, ni une grande consommation d'énergie. De plus, lorsque le solvant supercritique est par exemple du dioxyde de carbone pur, les produits fractionnés ne sont pas
pollués par quelque trace de solvant résiduel, ce qui constitue un avantage supplémentaire considérable.
On décrira ci-après un exemple d'application de la présente invention dans lequel on se propose de réaliser la séparation des arômes de boissons fermentées ou distillées. On sait que ces boissons sont essentiellement constituées d'eau et d'éthanol ainsi que de composants présents à très faible teneur, à savoir les arômes, qui donnent le goût et la couleur à ces boissons. Ainsi, le rhum concentré est constitué à environ 50% en masse par de l'eau, 50% en masse par de l'éthanol et de moins de 0,2% d'arômes dont les plus importants sont l'acétate d'éthyle et le 2-pentanol. Une séparation sélective des arômes est très délicate car il est impossible de les obtenir par distillation, l'éthanol étant également très volatil. Dans les exemples, on a modélisé la boisson distillée par une solution aqueuse d'éthanol et d'acétate d'éthyle.
Le dispositif de fractionnement utilisé est conforme à celui décrit en regard de la figure 1. L'équipement comprend 20 modules élémentaires qui sont connectés en série de façon à constituer les quatre modules de séparation 1, 2, 3 et 4 , ainsi que représenté sur la figure 1. Chaque module élémentaire est plus précisément constitué d'un faisceau de 120 fibres creuses en polypropylène de 40,3 cm de longueur, d'un diamètre extérieur de 0,6 mm et d'une épaisseur de 0,3 mm, qui est contenu dans un tube métallique 7. L'ensemble est soumis à une température soigneusement régulée à 40°C.
Le débit de fluide pouvant varier entre 0,6 kg/h et 3 kg/h. Le liquide à traiter circule à l'intérieur des fibres
creuses des modules séparateurs a un débit que l'on peut faire varier entre 0,1 kg/h et 0,5 kg/h grâce à des pompes volumétriques à piston connectées en amont de chacune des zones . EXEMPLE 1
Dans le présent exemple le module de séparation 1 comprend neuf modules élémentaires au sein desquels les pressions des deux phases sont voisines de 20 MPa, le module de séparation 2 comprend cinq modules élémentaires au sein desquels les pressions des deux phases sont voisines de 11 MPa, le module de séparation 3 comprend cinq modules élémentaires au sein desquels les pressions des deux phases sont voisines de 10 MPa, et le module de séparation 4 comprend un seul module élémentaire au sein duquel les pressions des deux phases sont voisines de 7,5 MPa. Le débit de diluant D, de l'eau dans le cas présent, introduit en I- dans la zone IV est fixé à 200 g/h, celui de solvant S, du dioxyde de carbone, introduit en Ig dans la zone I est de 3000 g/h, et celui de la charge à traiter introduit dans le diluant en I^+B entre la zone III et la zone II est fixé à 78 g/h et est constitué de 60 g/h d'eau, 13 g/h d'éthanol et 5 g/h d'acétate d'éthyle. Les débits de soutirage du fluide solvant en S^ entre la zone IV et la zone III (appelé extrait) est fixé à 500 g/h et celui de soutirage de fluide solvant en SR entre la zone II et la zone I (appelé raffinât) est fixé à 1500 g/h. Lorsque ces conditions ont été maintenues constantes pendant une heure environ, on pèse et on analyse les courants sortant du système et on en déduit les débits suivants exprimés en grammes par heure des composants dans chacune des phases
fluides sortant du dispositif, après élimination du dioxyde de carbone :
EXEMPLE 1
On constate l'excellente sélectivité du procédé, et on retrouve bien dans l'extrait et le raffinât les quantités d'éthanol et d'acétate d'éthyle injectées en
Ï-A+B-
EXEMPLE 2
Dans cet exemple, les conditions sont très voisines de celles utilisées dans l'exemple 1, sauf que les modules de séparation sont au nombre de trois et qu'ils sont cette fois-ci connectés selon le schéma de principe présenté sur la figure 3, le module de séparation 1 comprenant dix modules élémentaires au sein desquels les pressions des deux phases sont voisines de 20 MPa, le module de séparation 2 comprenant cinq modules élémentaires au sein desquels les pressions des deux phases sont voisines de 11 MPa et le module de séparation 3 comprenant cinq modules élémentaires au sein desquels les pressions des deux phases sont voisines de 10 MPa. Le débit d'eau (diluant) introduit en I-j dans la zone III est fixé à 200 g/h, celui de dioxyde de carbone (solvant) introduit en Is dans la zone I est de 3000 g/h, celui de la charge à traiter introduit dans le
diluant en I^+B' entre la zone III et la zone II est de 78g/h. Cette charge est constituée de 60 g/h d'eau, 13 g/h d'éthanol et 5 g/h d'acétate d'éthyle. Le fluide solvant est entièrement soutiré en aval de la zone III en S**-? et on obtient, après séparation du dioxyde de carbone, un mélange liquide appelé extrait. De même le débit de soutirage de fluide solvant en SR entre la zone II et la zone I (appelé raffinât) est fixé à 1500 g/h. Lorsque ces conditions ont été maintenues constantes pendant une heure environ, on pèse et on analyse les courants sortant du système. On en déduit les débits suivants exprimés en g par heure des composants dans chacune des phases fluides sortant du dispositif, après élimination du dioxyde de carbone :
EXEMPLE 2
On constate que les résultats sont très voisins de ceux obtenus à 1 ' exemple 1 bien que le procédé mis en oeuvre soit simplifié par rapport à celui utilisé dans cet exemple précédent .
EXEMPLE 3
Une autre illustration du procédé et de l'équipement objets de l'invention peut être mise en oeuvre en utilisant en tant que solvant du dioxyde de carbone additionné d'un
co-solvant constitué d'un composé chiral, c'est-à-dire d'un isomères optique pur de l'espèce considérée qui sera appelé agent de résolution.
Grâce à ce mélange qui est porté à une pression supercritique, on séparera un mélange constitué d'un racémique, c'est-à-dire d'un mélange équimolaire des deux énantiomères de l'espèce considérée qui sera appelée le soluté. En effet, on sait que les interactions entre le fluide à pression supercritique et les deux énantiomères constituant le soluté sont stéréospécifiques et permettent donc de dissoudre sélectivement dans le fluide solvant l'un ou l'autre des énantiomères du soluté selon la conformation de l'agent de résolution et la reconnaissance chirale en résultant. La sélectivité est d'autant plus forte que l'affinité des molécules devant interagir est forte. Ainsi, on sait que l'on peut utiliser une base chirale comme agent de résolution pour séparer les énantiomères d'acides organiques. Toutefois, cette séparation n'a été conduite qu'avec un seul étage de contact en mode "batch" , conduisant à une sélectivité limitée.
Selon le procédé objet de l'invention, on peut fractionner un soluté racémique dissous dans le diluant en utilisant un solvant constitué d'un mélange comprenant au moins un agent de résolution porté à une pression supercritique. L'agent de résolution sera choisi de façon à ce qu'il ne soit pas soluble dans le diluant afin qu'il ne soit pas transféré dans la phase diluant.
Dans une variante de ce procédé, on pourra réaliser la même séparation en utilisant un agent de résolution soluble dans le diluant et non soluble dans le solvant à
pression supercritique. Il est à noter que la reconnaissance chirale est fondée sur la formation d'un complexe entre l'agent de résolution et l'un des énantiomères du soluté, complexe qui doit être assez labile pour être facilement brisé après la sortie de l'équipement sous forme d'extrait ou de raffinât selon les cas, afin de permettre la récupération de cet énantiomère et le recyclage de cet agent de résolution.
Reprenant un des exemples cités, le procédé selon l'invention mis en oeuvre sur l'équipement décrit précédemment dans l'exemple 1, les vingt modules de séparation étant connectés de façon à constituer quatre zones I à IV constituées respectivement de deux, huit, huit et deux modules élémentaires, permet d'obtenir en continu une résolution du soluté racémique constitué d'ibuprofen en utilisant un solvant constitué de dioxyde de carbone additionné d'un agent de résolution constitué de R- (+) -1- phényléthylamine . On a pu ainsi obtenir deux fractions enrichies en chacun des énantiomères présentant chacune un excès enantiomerique égal à 35% avec une productivité de 2 g/h.