Procédé de préparation de jus concentrés de fruits de l'espèce citrus La présente invention se rapporte à un procédé perfectionné de préparation de jus de fruits, de l'espèce citrus, par concentration des jus de fruits naturels ; le produit obtenu peut être conservé sans réfrigération.
L'état actuel de la technique en matière de jus concentrés d'oranges, de citrons et autres fruits de l'espèce citrus exige une réfrigération pour leur conservation. La réfrigération n'est pas seulement coûteuse, mais encore il est difficile de la maintenir constante depuis le moment de la préparation des jus concentrés jusqu'à celui de leur consommation pendant tous les stades du transport et de la distribution. En outre, l'espace disponible pour conserver les jus concentrés dans les magasins sous réfri gération est généralement très limité, car dans les conditions modernes de vente en masse, on ne peut réserver pour le stockage de produits concentrés frigorifiés qu'une partie limitée des locaux de vente.
Tous les fruits de l'espèce citrus possèdent une écorce continue de cellules épidermiques avec une couche sous-jacente de pelure jaune (flavedo). Une couche spongieuse connue sous le nom de pelure blanche (albedo) pénètre plus avant dans l'écorce et enveloppe l'endocarpe ou partie comestible qui comprend des vési cules multicellulaires contenant le jus et les pépins. L'enveloppe extérieure ou écorce est desti née par sa nature à empêcher la contamination du jus dans le fruit.
Elle renferme une huile qui est relativement amère et contient notam ment des terpènes, des sesquiterpènes, de l'huile de citron et des pentènes. L'écorce exerce, par conséquent, une action répulsive sur les insectes et les bactéries. Le flavedo coloré en jaune forme une enveloppe protec trice pour le fruit.
Toutefois, malgré tous les efforts de lavage, des corps étrangers adhèrent généralement à la surface extérieure de l'écorce, et cela notam ment avec les procédés de lavage requis par la production en masse. Les bactéries se ras semblent à la surface extérieure de la couche de flavedo .
La membrane d' albedo est un corps cellulosique relativement épais qui contient di verses substances antibiotiques ainsi que du sucre, de l'acide citrique, des protéines, des pentosanes, des pectines, des glucosides, de l'eau et des solvants volatils. Si l'on incorpore cette matière complexe au jus en évitant la contamination par le flavedo , elle agit comme un moyen de préservation et comme un agent antibactérien.
Dans l'état actuel de la technique, le trai tement des fruits de l'espèce citrus pour en extraire le jus consiste tout d'abord à. couper les fruits en deux au moyen de couteaux ou d'autres moyens. Ces couteaux sont contaminés par les bactéries et les impuretés qui adhèrent à la surface extérieure du flavedo malgré le lavage habituel auquel est soumis le fruit brut. Au cours de la coupe, les couteaux se recouvrent également d'une pellicule d'huile d'écorce. Le jus est ensuite extrait du fruit par pression en laissant l'écorce intacte. En premier lieu, cette écorce est imprégnée d'un milieu fortement bactérien qui contamine le jus extrait.
Malgré toutes les précautions prises dans les anciens procédés pour laver et gratter l'écorce, on a constaté qu'il était impossible d'éliminer cette contamination bactérienne.
Une seconde cause de contamination du jus extrait selon l'ancien procédé par pressage du fruit coupé en deux avec son écorce provient du fait que l'huile d'écorce est également pres sée et passe dans le jus dont elle abîme le goût, à moins qu'on ne l'élimine ultérieurement. Pour remédier à cet inconvénient, l'ancien procédé prévoyait d'éliminer l'huile d'écorce du jus lors de sa concentration par l'applica tion de chaleur et d'un vide très poussé. Mais ceci constituait un double inconvénient en ce sens qu'il fallait utilisér la chaleur pour extraire l'huile d'écorce du jus par distillation. En outre, lorsqu'on emploie la chaleur pour la déshydra tation, on élimine des produits aromatiques volatils qui confèrent au jus son arôme carac téristique.
La chaleur a, d'autre part, pour effet de favoriser la prolifération des bactéries qui peuvent avoir été ëntrainées de l'écorce dans le jus. Etant donné, d'autre part, que le jus est composé en bonne partie par du sucre qui en forme les éléments solides principaux, avec l'ancien procédé qui utilise la chaleur et/ou le vide pour déshydrater le jus, la nature du milieu favorise la prolifération de bactéries et de spores nuisibles provoquant une rapide détérioration du jus, à moins que l'on ne prenne le plus grand soin à réfrigérer le produit lors qu'il est prêt pour la vente.
Un autre inconvénient du procédé connu consistant à couper le fruit en deux et à le passer dans une presse où le flavedo avec son huile d'écorce et l' albédo sont pressés avec les pépins, la pulpe et leur contenant cellulosique pour extraire la quantité maximum de jus du fruit, provient de l'écrasement des pépins et de la libération des huiles de pépins.
Le jus ainsi produit contient de l'huile d'écorce, des quantités excessives de terpènes et de ses quiterpènes provenant de l'huile d'écorce, quantités bien supérieures aux proportions de terpènes et de sesquiterpènes existant norma lement dans le jus, et les sept huiles de pépins avec une quantité excessive de carotène et d'autres substances provenant de l'écorce fla- vedo et de 1' albédo .
Il a déjà été proposé de concentrer le jus d'orange, par exemple pour obtenir un produit final d'un degré Brix prédéterminé, par con gélation partielle du jus et séparation subsé quente de l'eau sous forme de cristaux de glace de façon à produire un jus concentré ayant un degré Brix de 20 à 50. Le jus ainsi obtenu est encore concentré ultérieurement par évaporation.
Théoriquement, la chaleur appliquée au jus pour le déshydrater n'aurait dû le porter qu'à une température d'environ 26 C, mais, en pratique, pour la concentration des jus de fruits de l'espèce citrus, la température est portée jusqu'à 740 C à 760 C en utilisant des évaporateurs à double ou triple effet. On appli quait aussi généralement un vide aussi poussé que possible pour éliminer l'eau.
Comme les jus de fruits de l'espèce citrus sont en grande partie composés de sucres et de produits aro matiques volatils, il en résulte que toute conta mination du fruit et du jus de fruit, telle qu'une contamination bactérienne, augmente le nombre des bactéries présentes de sorte que le jus se détériore rapidement à moins qu'il ne soit conservé en tout temps dans de bonnes conditions de réfrigération. D'autre part, les actions bactériennes ainsi que l'activité enzy matique dans le jus contaminé sont activées par l'augmentation de la température et le milieu de culture naturel qui provoque la pro lifération des bactéries et des spores et favorise les réactions enzymatiques.
Il s'ensuit une gé- latinisation des jus de fruits de l'espèce citrus lorsqu'ils sont mis en boîtes et ces jus n'ont pas la faveur du consommateur.
Mis à part les inconvénients cités plus haut et inhérents aux anciens procédés de déshydra tation, l'emploi de la chaleur et du vide pro voque la perte d'importants constituants vola tils du jus de fruits de l'espèce citrus qui, non seulement, confèrent au jus son arôme délec table caractéristique, mais encore, en combi naison avec d'autres constituants tels que les sucres, les terpènes, les alcools, les aldéhydes, les acides et les éthers conservent le jus et en empêchent la détérioration. A ce propos, la nature a elle-même pourvu le fruit d'une combinaison d'éléments qui agit comme un moyen de préservation du fruit.
L'application de la chaleur, et plus parti culièrement d'une chaleur allant jusqu'à 740 à 76o C donne au jus concentré à environ 500 à 550 Brix, ou plus, un goût et une odeur désagréables. On a essayé de remédier à cet inconvénient en ajoutant au jus concentré une quantité suffisante de jus brut non traité comme moyen de coupage pour réduire le de gré Brix à environ 420 à 44o et pour redonner au jus l'arôme et le goût désirés.
Malheureusement, ce traitement de coupage n'a pas eu le succès attendu du fait que les deux produits, à savoir le produit obtenu en utilisant un vide poussé et la chaleur qui pos sède son propre goût et son propre arôme très forts et le jus brut non traité qui possède un goût et un arôme de caractère opposé, forment un mélange qui en lui-même n'est fréquem ment pas goûté par bien des gens. Pour atté nuer les effets de la chaleur, on a aussi fait usage d'évaporateurs multiples travaillant sous un vide très poussé, mais cela augmente consi dérablement le prix de revient des produits obtenus par ces procédés. En outre, l'emploi de chaleur et de vide très poussé élimine non seulement l'huile d'écorce, mais encore les délicats esters volatils contenus dans le jus, ce qui modifie désavantageusement le goût du jus ainsi préparé.
Par conséquent, avec les anciens procédés de préparation du jus de fruits tels que les oranges, l'équilibre normal protecteur que la nature a créé dans le jus d'orange même se trouve détruit et le jus se transforme en un milieu favorable à la prolifération des bactéries et enzymes par lesquelles il est contaminé ; cet inconvénient s'accentue lorsque la prépa ration du jus est faite dans une installation de concentration à l'air libre ou en présence de chaleur et de sucre.
Il a été constaté qu'une orange gardée avec son écorce et sa pelure blanche albédo intactes et sans aucune atteinte au fruit lui- même peut être conservée à peu près indéfini ment grâce au fait que le jus d'orange qui est renfermé à l'intérieur du fruit contient tous les éléments nécessaires à le maintenir dans des conditions d'équilibre qui empêchent son oxydation et son contenu en terpène et en sesquiterpène est juste suffisant pour agir comme moyen de préservation contre toute attaque bactériologique et enzymatique ;
en outre, le jus contient dans la pelure blanche assez de vitamine antibiotique F pour empêcher la croissance des bactéries. C'est aussi un fait prouvé que c'est précisément cet équilibre entre les terpènes, les sesquiterpènes et les autres antibiotiques qui empêche la croissance des bactéries, ainsi que l'oxydation et la détério ration du jus.
Il a déjà été proposé d'effectuer la concen tration des jus de fruits de l'espèce citrus par un procédé de déshydratation que l'on désigne par procédé de congélation étagée et dans lequel on sépare l'eau du jus par congélation dans des phases de traitement successives jus qu'à ce que le jus ait atteint une concentration d'environ 50 Brix. Ce procédé est connu dans l'industrie du traitement des fruits citriques sous le nom de procédé de congélation éta gée sous lequel il sera désigné ci-après.
Le procédé selon l'invention, qui vise à éliminer les inconvénients ci-dessus rappelés, et dans lequel on enlève l'écorce jaune, presse le fruit pour en extraire le jus et les pépins, sépare les pépins du jus et concentre ce der nier par congélation par étages, est caractérisé en ce que l'extraction du jus de fruit est effec tuée sans contamination du jus par des subs tances contenues dans l'écorce jaune et/ou dans les pépins, tandis que la concentration résulte de l'élimination exclusive d'eau sous forme de cristaux de glace.
La présente invention est avantageusement exécutée comme suit On gratte, comme on l'a déjà proposé, toute l'écorce jaune flavedo et une petite partie de la pelure blanche albedo de façon à obtenir un fruit revêtu encore d'une pellicule relativement épaisse de pelure blanche, et on presse ensuite le fruit sur une surface plane de façon à le rompre et à en extraire le jus, mais sans écraser ou abîmer les pépins, de façon à éviter de libérer les huiles de pépins. Le jus ainsi extrait est ensuite déshydraté par congélation étagée jusqu'à une concentration comprise entre environ 40 et 720 Brix, mais de préférence supérieure à 60o Brix.
La présence des huiles de pelure blanche et l'absence des huiles de pépins dans le jus pressé constituent un facteur décisif pour la conservation du jus en boîte.
Le jus ainsi obtenu a le même arôme, le même goût et la même composition que le jus d'orange naturel. Il peut être conservé dans cet état frais lorsqu'on le met en boîte immé diatement après l'avoir déshydraté à 50 jus qu'à 720 Brix, et de préférence au-dessus de 600 Brix. Après avoir été ainsi mis en boîte, il peut se conserver dans son état original avec son goût, son arôme, son,parfum originaux et en l'absence de bactéries, sans aucune réfri gération.
Il a été constaté que le jus contient au début de très petites quantités de bactéries, en fait guère plus de 5000 et que ces bactéries diminuent progressivement jusqu'à disparaître complètement vers la fin du troisième mois après la mise en boîte. Pendant de long mois, on ne constate aucune modification de goût, de couleur ou d'arôme si le produit a été rapidement mis en boîte après sa déshydrata tion et est conservé à la température habituelle des locaux de stockage, des magasins de vente et similaires, sans réfrigération.
Des essais ont prouvé que le jus d'orange à l'état original, lorsqu'il a été déshydraté comme il est expliqué plus loin, donne un produit qui est pratique- ment exempt d'oxygène, qui conserve l'équi libre des terpènes, sesquiterpènes et autres produits qui existe dans le jus de fruit naturel, et que la présence supplémentaire d'extrait de pelure blanche accroît la résistance du jus aux actions bactériologiques et enzymatiques.
On pense que l'hespéridine possède des propriétés antibactériennes vitaminiques très proches de celles de la vitamine C. Les pro priétés antibactériennes sont particulièrement actives en présence de phosphore. Ceci est probablement aussi vrai pour la naringine et l'hespéridine. Ces glucosides existent dans le jus et en particulier dans la pelure blanche où on les décèle principalement dans les téguments capillaires qui se trouvent entre la pelure blan che et les segments de l'endocarpe.
On estime, d'autre part, que ces composants du jus, et plus particulièrement du jus extrait de la pe lure blanche, empêchent la formation de moi sissures par l'action de l'eau et la prolifération des bactéries qui sont à la base de la détério ration du jus. L'hespéridine est un dérivé de la flavonone, le 5,7,3'-trioxy-4'-méthoxyflavo- none-7-rhamnoglucoside. Ce groupe comprend aussi le dérivé hydrolysé, l'hespérétine.
Associé avec ce groupe dans le jus, on trouve la citrine, un mélange de deux gluco sides, l'hespéridine et l'ériodictine. Ces gluco sides de la flavanone donnent par hydrolyse de l'hespérétine et de l'ériodictyol.
La citrine est actuellement connue sous la désignation de vitamine P. Ainsi le dérivé des glucosides que l'on rencontre plus particulière ment dans la pelure blanche joue apparemment un certain rôle dans le maintien de l'équilibre antibactérien et antienzymatique qui empêche le jus concentré des fruits citriques de se gâter.
En éliminant l'huile de l'écorce jaune et les bactéries et autres corps étrangers entraînés, et en éliminant les huiles de pépins (à base d'acides palmitique, stéarique, arachidique, li- nolénique, linoléique et oléique) libérées par l'écrasement et la rupture des pépins, on réduit les possibilités de détérioration dans les jus concentrés de fruits citriques à la température ambiante. Dans le procédé suivant la présente inven tion, on ne retire absolument rien du jus natu rel, à l'exception de l'eau.
Les terpènes, les sesquiterpènes et les autres éléments antibio tiques du jus demeurent intacts tant en ce qui concerne leur qualité que leur nature ; seule leur concentration est accrue par rapport à un même poids de jus non traité. On n'emploie ni chaleur ni vidé. Il n'y a, par conséquent, aucune perte des esters délicats et des subs tances aromatiques volatiles qui donnent au jus son goût et son arôme caractéristiques.
Les éléments dont on tolère la présence dans le jus, ainsi que l'accroissement du contenu en sucre et éventuellement l'accroissement du contenu en extrait de pelure blanche, empêchent la formation ou l'action des bactéries et des enzymes entraînées dans le jus et empêchent ainsi la détérioration du jus lorsqu'il est con centré à 50 jusqu'à 72,1 Brix, de préférence à plus de 600 Brix, et conservé à la tempéra ture ordinaire.
Il a été également constaté que lorsqu'on extrait du fruit un jus d'orange ou un jus de fruit citrique quelconque sans le déshydrater, le jus s'oxyde rapidement à moins qu'il ne soit protégé par un moyen quelconque contre l'oxy dation ; le jus se gâte donc rapidement en présence d'eau contenant de l'oxygène en traîné.
Par exemple si l'on presse un fruit citrique quelconque et on en recueille le jus dans un récipient que l'on place dans un réfrigérateur, le jus se gâte progressivement, formant des couches superposées et perdant son goût et son arôme normaux.
En revanche, si l'on réduit fortement le composant aqueux du jus en le faisant congeler seul, on empêche la détérioration du jus dés hydraté qui résulte de l'opération et si l'on met en boîte ce jus immédiatement après déshydra tation en le maintenant dans son état naturel, il se conserve indéfiniment sans réfrigération. A cet effet, il est avantageux lors de la mise en boîte du jus déshydraté obtenu par le pro cédé selon l'invention de rincer préalablement la boîte ou le récipient avec du bioxyde de carbone, ou de préférence avec de l'azote avant d'y introduire le jus concentré.
En déshydratant le jus par congélation contrôlée et en évitant de modifier autrement la composition chimique ou physique du jus de fruit citrique (comme ce serait le cas en utilisant le vide poussé et la chaleur), il a été possible d'obtenir un jus à haute teneur de sucre et titrant de 500 à 72,1 Brix sans modifier en quoi que ce soit le goût, l'arôme ou la composition du jus naturel. En outre, la pré sence d'un pourcentage élevé de sucre constitue un élément essentiel de conservation du jus concentré du fait de son action antibactérienne à cette haute concentration, et surtout en ab sence d'oxygène.
En évitant ainsi toute perte appréciable de constituants ayant une fonction préservatrice, perte inévitable lorsqu'on soumet le jus à une évaporation, même à basse tem pérature, il a été possible d'obtenir un jus concentré qui peut être mis en boîte et conservé à la température ordinaire sans recourir à une réfrigération quelconque: