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Procédé pour la fabrication de superphosphates sans émission d'odeurs piquantes ou organiques.
Le domaine de l'invention est celui des installations de production de superphosphates. Le problème qui se pose est celui de l'émission de gaz malodorants en cours de fabrication, émissions qui se poursuivent à partir du superphosphate fabriqué.
La présente invention s'adresse à des installations de fabrication de superphosphates dont l'organe principal est le réacteur où se produit l'attaque sulfurique du superphosphate, dénommé tube cave. Il émet de l'acide
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fluosilicique H2SiF6, un produit gazeux très polluant, qui est obligatoirement éliminé par un procédé d'abattage/ lavage, en série sur le trajet de sortie des gaz issus du réacteur d'attaque. Il produit aussi du S02 (les odeurs acides) et selon l'acide sulfurique utilisé, plus ou moins de dérivés soufrés malodorants (les odeurs organiques), largement émis dans les gaz, mais aussi diffus dans le superphosphate produit.
L'émission d'odeurs organiques est, comme on peut s'y attendre, fortement amplifiée lorsqu'on utilise certaines qualités d'acide sulfurique d'attaque chargées en matières organiques, notamment les acides sulfuriques résiduaires (ci-après ASR) de la fabrication des lactames, acides dont l'utilisation pour la production des superphosphates est dictée par, au moins pour une raison économique d'importance, leur bas prix.
Il est illusoire de vouloir épurer des ASR en vue d'en éliminer les composés générateurs d'odeurs organiques, sauf à recourir à la combustion totale de l'acide sulfurique telle que pratiquée dans le procédé dit RAS (Régénération d'Acide Sulfurique), et dans ce dernier cas il n'est même pas certain que l'utilisation d'un acide"propre"aurait pour conséquence l'absence d'émission de toute odeur organique.
Les odeurs générées par la fabrication de superphosphates causent une gêne considérable dans les ateliers et surtout pour les riverains des usines. Un faux remède consisterait à injecter dans les cheminées de l'usine des masques d'odeurs ; faux remède parce que substitution à une pollution olfactive d'une autre pollution olfactive, sans doute moins désagréable, mais au moins surprenante pour le voisinage, et
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de toute façon ne supprimant pas les émissions inorganiques comme le SO2.
Bien des industries autres que celles des engrais génèrent des gaz malodorants, et des solutions ont évidemment été proposées pour y remédier. Ainsi, dans FR 2.251. 352 (Elektrokemiska Akt. ) préconise-t-on le lavage des gaz avec de l'eau oxygénée à 1-10 %, à des températures comprises entre 0 et 100 C, le pH étant indifférent. On oxyde ainsi des mercaptans, NH3, des amines. Le procédé génère cependant un effluent et ne résout aucun problème relatif aux odeurs du produit principal. Il en est de même du procédé décrit dans EP 57 624 (Charbonnages de France), qui est un procédé de désodorisation par l'eau oxygénée et l'ozone pour économiser l'eau oxygénée non consommée.
On retrouve des caractéristiques analogues dans le procédé décrit dans FR 2.503. 130 (Interox) qui fait état d'un traitement par l'eau oxygénée et le fer, traitement auquel les dialkylsulfures sont rebelles, et contre lesquels il faut passer au système eau oxygénée/cuivre. Enfin, il faut noter que l'oxydation de S02 par H202 en S04H2 est une réaction connue, base d'un système auto-régulé proposé par Degussa (Notice Degussa : Environment and Degussa), qui s'adresse à des gaz essentiellement chargés en S02, épurés par transformation en S04H2 récupéré, mais qui n'évoque nullement de moyen de désodorisation des produits fabriqués ou des rejets.
La demande internationale WO 94 11091 (ICI) décrit un procédé de désodorisation de gaz par passage dans un scrubber dont le remplissage est imprégné d'une solution oxydante, essentiellement une solution hypochlorite/nickel ou cuivre. Le procédé comporte un recyclage partiel de la solution oxydante, la partie recyclée étant régénérée par destruction de l'oxydant usé sur un lit de catalyseur à base d'oxydes métalliques et rechargement en oxydant neuf, l'effluent de sortie étant débarrassé de son oxydant usé par la même voie. Il semble que le procédé résout à peu près correctement le problème du gaz, mais laisse sans solution celui du solide et donc de l'atmosphère des magasins où il est stocké.
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WO 94 11091 ne se rapporte toutefois pas spécialement à la fabrication du superphosphate. La transposition de son enseignement à l'injection du réactif au niveau du tube cave n'est pas évidente, ne serait-ce que puisqu'on est en présence de S04H2 vésiculaire, on peut s'attendre à ce que l'hypochlorite génère du chlore qui passerait dangereusement à la cheminée. Mais aussi, les superphosphates sont des roduits à faible valeur ajoutée, et un tel traitement grèverait l'économie du procédé.
Il n'existe donc pas, à l'heure actuelle de procédé permettant de régler en une fois, et la désodorisation du gaz et celle du superphosphate dans une installation à recyclage intégré.
Le procédé selon l'invention, dont l'objectif est la fabrication de superphosphates sans odeur à la cheminée, sans effluent liquide, délivrant un superphosphate lui-même sans odeur. Plus précisément, c'est un procédé qui consiste, dans une installation de production de superphosphates par attaque sulfurique de phosphates naturels et comportant un réacteur d'attaque suivi d'une ou plusieurs colonnes d'abattage/ lavage à l'eau à contre-courant pour l'élimination de l'acide fluosilicique formé, à éliminer les odeurs piquantes et organiques, à la fois à la cheminée et dans les superphosphates fabriqués, en introduisant dans une colonne ou plusieurs colonnes d'abattage/lavage une solution de lavage à base d'eau oxygénée et de solution aqueuse de sel ferreux, et en renvoyant en fin d'abattage/lavage ladite solution de lavage dans le réacteur d'attaque.
Dans le procédé selon l'invention, la solution de lavage comprend, outre l'eau industrielle qui sert normalement à abattre l'acide fluosilicique, de l'eau oxygénée et une solution aqueuse d'un sel ferreux. Comme eau oxygénée, on utilisera des solutions concentrées commerciales dont le titre est généralement compris entre 30 et 70 % en poids. Pour d'évidentes raisons de sécurité, il est vivement déconseillé d'utiliser des solutions titrant plus de 50 % d'H202. Les quantités d'eau oxygénée à utiliser sont évidemment fonction de la qualité des ASR et du niveau de
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désodorisation souhaité. Elles sont généralement comprises entre 100 et 1.000 ppm d'HO comptées en poids par rapport au superphosphate.
La solution de sel ferreux est généralement une solution concentrée préparée à partir de sulfate ferreux solide (FeS04, 7H20), dissous à raison de quelques pour cent jusqu'à saturation. Cependant pour éviter des problèmes de cristallisation par temps froid, la concentration préférée est comprise entre 10 et 30 % en poids. La quantité de fer à utiliser est telle que la concentration en cet élément dans les eaux de lavage en sortie de l'unité d'abattage/lavage, soit supérieure à 20 mg/1, soit généralement comprise entre 100 et 500 mg/l de solution de lavage.
On peut introduire ces réactifs dans la même colonne. Il faut toutefois tenir compte de la quantité d'H2SiF6 généré dont la limite de solubilité est facilement dépassée, ce qui se traduit par une précipitation de quantités importantes de solides. L'abattage ou le transfert de l'H2SiF6 vers la phase aqueuse n'est pas très rapide ; aussi, prévoit-on généralement plusieurs étages de transfert, en pratique au moins trois colonnes d'abattage/lavage en série fonctionnant à contre-courant gaz-liquide. On a pu montrer que l'injection de la solution de lavage dans la première colonne n'était pas totalement satisfaisante quant à la désodorisation du gaz et que son injection dans la colonne de sortie n'était pas une bonne solution parce qu'elle se traduisait par une augmentation sensible des rejets de brouillards sulfuriques indésirables.
C'est pourquoi, lorsqu'on choisit d'introduire les réactifs dans une même colonne, il est prévu de le faire dans la seconde colonne. Mais on obtient un meilleur résultat en procédant à l'introduction des réactifs dans des colonnes différentes, la solution ferreuse étant injectée dans une colonne d'aval (aux termes du présent document, les définitions amont/aval définissant la situation des colonnes d'abattage/lavage s'entendant d'une localisation progressive dans le sens de l'écoulement gazeux), l'eau oxygénée étant injectée dans la colonne d'amont voisine, ou étant partagée entre la colonne
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recevant la solution ferreuse et sa voisine d'amont.
Dans tous les cas de figure, il est impératif de séparer les circuits d'eau oxygénée et de solution ferreuse ; il est tout aussi impératif d'écarter les points d'introduction des réactifs dans une même colonne pour que le sel ferreux soit suffisamment dilué dans les eaux d'abattage avant sa rencontre avec l'eau oxygénée : on évite ainsi qu'un mélange brutal d'eau oxygénée et de sel ferreux ne provoque l'oxydation du sel ferreux en sel ferrique suivie d'une décomposition ultra-rapide de l'eau oxygénée et dégagement d'un important volume d'oxygène gazeux susceptible d'endommager l'installation.
Le procédé est un procédé sans effluent, qui a aussi l'avantage d'abattre la quasi-totalité du S02 généré par le procédé. Ce résultat n'était pas évident, car rien n'enseigne que H202 oxyde le 802 en présence de grandes quantités d'acide fluosilicique et qu'au surplus, on pouvait craindre que du fait de la température élevée des eaux de lavage (80- 900C), l'eau oxygénée soit décomposée thermiquement avant de réagir avec les polluants gazeux. Tous les observateurs s'accordent sur les résultats flagrants de l'invention, la suppression des odeurs piquantes et organiques dans le voisinage immédiat de l'usine, et l'absence d'odeurs organiques dans les ateliers de stockage du superphosphate.
Les tests Draeger de 802 et de mercaptan sur les gaz bruts non dilués prélevés dans la cheminée avant dilution sont également négatifs.
On notera deux particularités secondaires, mais non négligeables du procédé : le S02 abattu devient du 804H2 qui est réintégré au procédé, et le système est un moyen de valorisation des ASR pour lesquels il n'y a pas de solution économiquement acceptable.
Exemples
Les exemples qui suivent, non limitatifs de l'invention, se réfèrent à une unité de superphosphates qui est schématisée en figure 1. Elle comprend un réacteur d'attaque des phosphates [1] alimenté en phosphates [2] et en acide
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sulfurique [3]. L'effluent gazeux sortant du réacteur [1] par [4] est mis en contact avec une solution de lavage entrant par [8] et traversant trois colonnes d'abattage/lavage à contre courant [5], [6], [7]. Les gaz lavés sortent des
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colonnes d'abattage/lavage par [10] avant d'être rejetés à la cheminée en [11J.
La solution effluente des colonnes d'abattage/lavage sortant de [9] est récupérée temporairement en [12] avant d'être recyclée en totalité par [13] au réacteur d'attaque des phosphates [1]. Les superphosphates produits en [1] sont évacués par [14] puis stockés en vrac dans l'atelier avant d'être conditionnés pour la commercialisation.
Exemple 1 (comparatif)
L'installation traite 20 t/h de phosphates naturels avec 12,2 t/h d'acide sulfurique résultant d'un mélange, pour un tiers d'acide sulfurique neuf à 96 % et pour deux tiers d'ASR à 68 %. Les colonnes d'abattage/lavage sont alimentées par 2,5 m3/h d'eau industrielle, entrant par [8] dans la troisième colonne et sortant par [9], chargée en H2SiF6 à 900C environ. Les tests DRAEGER de S02 et de mercaptan, sur les gaz non dilués dans la cheminée, sont tous très positifs.
Les gaz sont piquants et présentent de fortes odeurs soufrées. Dans le voisinage de l'usine, à la retombée des gaz, on note une odeur résiduelle gênante, parfaitement identifiable. De même, les superphosphates chauds sortant du tube cave sont fortement odorants, ce qui contribue à une pollution diffuse et non canalisée au sein de l'atelier.
Exemple 2 (selon l'invention)
L'installation traite 21 t/h de phosphates naturels avec 13,5 t/h d'acide sulfurique résultant d'un mélange, pour un tiers d'acide sulfurique neuf à 96 % et pour deux tiers d'ASR à 68 %. Les colonnes d'abattage/lavage sont alimentées par 2,8 m3/h d'eau industrielle entrant par [8] dans la troisième colonne. La solution de sulfate ferreux à 30 % en poids de FeS04, 7H20 du bac [18] est introduite par [15] dans la deuxième colonne d'abattage/lavage [6] par la surverse de la colonne [7]. Le débit de solution est de 10 kg/h auquel correspond une concentration moyenne en Fe+2 de 216 mg/l dans
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les liqueurs de lavage.
L'eau oxygénée (à 35% en poids) est introduite à partir du bac [19], en deux points de l'installation d'abattage/lavage : dans la deuxième colonne
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[6] par la tuyauterie [16], on en introduit 30 kg/h, tandis qu'on en introduit 32 kg/h dans la première colonne [5] par la tuyauterie [17].
L'effluent de lavage sort de l'installation d'abattage/ lavage par [9] à 92OC, vers la cuve intermédiaire [12] avant d'être recyclé à l'attaque des phosphates par [13].
Les tests Draeger, 802 et mercaptan, sur les gaz non dilués dans la cheminée sont tous négatifs. Dans le voisinage de l'usine, à la retombée des gaz, aucune odeur gênante n'est perceptible. Les superphosphates chauds sortant du tube cave ne présentent plus d'odeur désagréable. La pollution diffuse a disparu.