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"Utilisation de tryptophane et composition nutritionnelle comprenant du tryptophane".
La présente invention a pour objet l'utilisation d'une substance qui, absorbée avant et/ou pendant un sevrage tabagique, ou alcoolique est de nature à assurer non seulement le succès dudit sevrage mais également le maintien de celui-ci.
On sait que la consommation tabagique est une des causes évitables de pathologies graves telles que des cancers, accidents cardio-vasculaires.
On sait aussi que, malgré les efforts de prévention importants, notamment au niveau de campagnes d'informations, la consommation du tabac ne régresse pas. Cette consommation aurait même tendance à augmenter dans certaines populations spécifiques, notamment les femmes, les adolescents et même les enfants.
Différentes études ont portés sur la détermination des causes du tabagisme. Si les premières études insistaient surtout sur les facteurs sociaux et/ou démographiques, des études récentes ont mis plus particulièrement en évidence des facteurs psychologiques. De ces dernières études, il résulte que la proportion de fumeurs est nettement plus grande chez des sujets ayant présenté des symptômes dépressifs majeurs (61 %) que chez des sujets témoins (27 %). On a constaté, d'une part, que ces facteurs psychologiques étaient particulièrement marqués lors des tentatives de sevrage tabagique et, d'autre part, que les sujets qui ne présentent pas de symptômes dépressifs ont beaucoup plus de chances de succès dans leurs tentatives de sevrage (31 %) que les sujets dépressifs (14 %).
Bien que les mécanismes qui établissent le lien entre dépression et consommation de tabac soient encore mal connus, on a aussi constaté que les sujets ayant des antécédents dépressifs présentaient régulièrement des récidives de symptômes dépressifs majeurs au moment du sevrage tabagique, la récidive de ces symptômes menant à l'échec du sevrage. Les sujets
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qui maintiendraient l'arrêt de consommation du tabac, malgré l'apparition des symptômes susdits risquent de développer un nouvel épisode dépressif majeur.
Une autre conséquence régulièrement observée du sevrage tabagique est une augmentation du poids du sujet. C'est ainsi qu'une augmentation de l'ordre de deux kilos est normalement observée après 30 jours de sevrage. Les sujets chez qui l'augmentation de poids est la plus importante sont aussi ceux qui interrompent le plus souvent leur sevrage d'autant plus que la reprise de la consommation tabagique a pour effet de réduire relativement rapidement et de manière durable le poids. C'est pourquoi la prise de poids est souvent retenue comme une des raisons principales de l'échec des tentatives de sevrage, surtout chez les sujets de sexe féminin. Bien que plusieurs facteurs soient à l'origine de ces modifications pondérales, il semble que l'augmentation de consommation calorique soit bien le facteur prédominant.
On sait, d'une part, que la sérotonine est un neuromédiateur cérébral qui influence l'humeur et l'attirance pour les hydrates de carbone et, d'autre part, que certains antidépresseurs médicamenteux, tels que la fluoxetine, agissent par inhibition du recaptage de la sérotonine au niveau des terminaisons présynaptiques.
On sait aussi que l'augmentation de la sérotonine disponible, due à la prise desdits antidépresseurs, est généralement à l'origine de la réduction des symptômes dépressifs. Un effet secondaire de la prise de ces antidépresseurs étant la réduction de l'appétit.
Suite aux liens découverts entre, d'une part, le tabagisme et le sevrage tabagique et, d'autre part, un état dépressif et/ou une prise de poids, on a pensé que l'usage de médicaments antidépresseurs en cours de sevrage tabagique serait de nature à améliorer le bien-être des sujets sevrés et à réduire les complications et le taux d'échec du sevrage. On a aussi pensé pour réduire la prise de poids associée au sevrage tabagique, à utiliser la dexfenfluramine qui, bien que connue comme un médicament régulateur central de l'appétit inhibant particulièrement une attirance pour les glucides, a un mécanisme d'action sérotoninergique.
Ce médicament permettrait
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de contrôler la prise de poids, mais la notice qui l'accompagne renseigne qu'il est contre-indiqué en cas d'antécédents dépressifs et en cas de propension aux abus médicamenteux.
Il est évident que l'usage de médicaments en cours de sevrage tabagique peut présenter des inconvénients. En effet, il est contre-indiqué d'user de médicaments puissants et artificiels en l'absence d'une pathologie franche et grave, dans le seul but de rendre plus supportables les effets de tentatives visant à la suppression de la dépendance au tabac et ce, d'autant plus que la plupart des sujets qui envisagent un sevrage tabagique conçoivent ce sevrage dans un cadre général d'amélioration de l'hygiène de vie, cadre dans lequel la prise de médicaments non indispensables n'a certainement pas de place.
Dans cette optique, il y a également lieu de tenir compte du fait que bon nombre de sujets présentant une dépendance au tabac ont en outre une tendance anormale à présenter d'autres dépendances, en particulier à l'alcool, aux médicaments et aux drogues.
Le sevrage alcoolique présente des similitudes avec le sevrage tabagique, bien que la dépendance physique pour l'alcool peut se manifester par un syndrôme de sevrage beaucoup plus sévère, à savoir le délirium tremens. Excepté ce cas extrême, le sevrage alcoolique conduit, comme le sevrage tabagique, à des troubles de l'humeur qui peuvent aboutir à un état dépressif. L'intérêt de l'utilisation de tryptophane résulte du fait, d'une part, qu'il a été démontré chez le rat que l'autoadministration d'alcool se traduit par une diminution du taux de sérotonine cérébrale et, d'autre part, que des études récentes semblent indiquer que des médicaments inhibiteurs de la recaptation de sérotonine réduisent, tant chez l'homme que chez le rat, la tendance à l'autoconsommation d'alcool.
Comme déjà l'usage de médicaments s'intègre très mal dans une psychothérapie de soutien mettant le sevrage tabagique ou le sevrage alcoolique dans le cadre d'un renouveau du comportement et d'une certaine hygiène de vie, il est inutile d'aggraver cette situation en faisant courir le risque, non négligeable, de substituer à la dépen- dance au tabac ou à l'alcool d'un patient une dépendance médicamen-
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teuse, d'autant plus que cette dernière pourrait être aussi dangereuse ou plus dangereuse, à court et à long terme, que la dépendance au tabac ou à l'alcool.
L'invention a pour but de remédier à ces inconvénients et de prévoir l'utilisation, lors d'un sevrage tabagique ou alcoolique, d'une substance soit que l'on trouve à l'état naturel dans des protéines, soit que l'on peut obtenir par synthèse, cette substance ne risquant pas de provoquer de dépendance ou d'effets secondaires.
A cet effet, suivant l'invention, cette substance est du tryptophane, acide aminé essentiel qui est un précurseur de la sérotonine. La mise à disposition du tryptophane au niveau cérébral est un élément régulateur déterminant des taux de sérotonine. Les taux de tryptophane et de sérotonine cérébraux sont influencés par le taux de tryptophane plasmatique, ainsi que par le rapport entre la concentration de tryptophane et la concentration d'autres acides aminés neutres plasmatiques, tels que tyrosine, phénylalanine, leucine, isoleucine et valine.
La consommation d'hydrates de carbone qui se produit en cours de sevrage tabagique stimule la sécrétion d'insuline, cette hormone augmentant le taux plasmatique de tryptophane et réduisant le taux des autres acides aminés neutres, d'où une meilleure captation cérébrale de tryptophane avec une augmentation des influences sérotoninergiques cérébrales. Ce mécanisme permet d'expliquer une certaine attirance pour les hydrates de carbone, y compris chez des sujets à tendance dépressive.
Le tryptophane est relativement peu abondant dans les aliments généralement absorbés. Dans les pays industrialisés, sa consommation quotidienne moyenne est assez. faible. C'est ainsi que l'on considère qu'un gramme de protéine d'un régime alimentaire normal fournit seulement environ 12 mg de tryptophane, le rapport entre les quantités de tryptophane fournies par la majorité des protéines alimentaires dans lesquelles il est présent et les quantités des acides aminés neutres qui entrent en compétition avec ledit tryptophane ayant en outre une valeur inférieure à celle qui est normalement mesurée dans le plasma.
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C'est ainsi que suivant l'invention, si l'on choisit l'utilisation du tryptophane naturel, on sélectionnera, pour augmenter, d'une part, le contenu en tryptophane et, d'autre part, le rapport de celui-ci avec les autres acides aminés neutres, les protéines naturelles entrant dans l'alimentation. On préférera donc, par exemple, l'alpha lactalbumine, protéine du lait, qui contient environ 65 mg de tryptophane par gramme plutôt que la caséine de lait, protéine de référence dans les études nutritionnelles, qui ne comprend que 13 mg de tryptophane par gramme.
Suivant l'invention, on peut également utiliser du tryptophane synthétique soit seul, soit comme enrichissement de tryptophane naturel, le tryptophane synthétique utilisé étant le L-tryptophane.
Le tryptophane synthétique, qui a été développé en vue du traitement de certains troubles du sommeil et comme régulateur de l'appétit, a été récemment retiré de certains marchés après l'apparition d'un syndrome grave et complexe, le syndrome éosinophilie-myalgie, qui
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1 a été apparemment trop rapidement et sans raison valable lié à son usage. En effet, dans l'état actuel des connaissances, il est apparu que le syndrôme susdit n'a pas de lien avec le tryptophane synthétique en lui-même, mais bien à la présence d'un contaminant qui apparaît lors de la mise en oeuvre de certains procédés de synthèse dudit tryptophane.
Il est donc possible, suivant l'invention, d'utiliser du tryptophane pour la préparation d'une composition nutritionnelle, riche en tryptophane (de 100 à 10000 mg par jour) prévue soit pour prévenir, soit pour réduire fortement les troubles de l'humeur et la prise de poids se produisant en cours de sevrage tabagique, cette composition contribuant ainsi au succès du sevrage et évitant que l'interruption de ce dernier accroisse la dépendance au tabac.
Une telle composition est également efficace pour prévenir ou réduire fortement les troubles de l'humeur et la tendance à l'autoadministration d'alcool chez un patient entreprenant un sevrage alcoolique. L'usager de cette composition associé aux autres mesures habituelles liées audit sevrage contribuant au succès de ce dernier.
Pour la préparation de cette composition, on sélec-
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tionnera des protéines ou peptides naturels, riches en tryptophane, qui présentent, d'une part, un haut rapport en tryptophane et, de préférence, un rapport au moins deux fois supérieur à celui d'une alimentation normale, c'est-à-dire au moins 24 mg de tryptophane par gramme de protéine ou de peptide et, d'autre part un rapport tryptophane/acides aminés neutres qui est au moins égal à 0, 05.
Si la composition nutritionnelle susdite n'atteint pas, par sa teneur en protéines ou peptides naturels, le taux de tryptophane naturel souhaité, ce taux peut être atteint par addition de tryptophane synthétique, qui sera du L-tryptophane. On pourrait encore, suivant l'invention et dans le cas où il serait intéressant d'obtenir une composition nutritionnelle à partir d'éléments naturels particuliè- rement pauvres en tryptophane, prévoir un apport de tryptophane constitué essentiellement de L-tryptophane synthétique.
La composition suivant l'invention peut être préparée soit à partir d'une composition hypocalorique connue utilisée dans le cadre d'une cure de jeune ou d'un traitement de l'obésité, soit, lorsqu'une restriction calorique n'est pas particulièrement visée, à partir d'une composition comprenant un apport calorique plus élevé, par exemple par le biais d'hydrate de carbone, que celui de la composition susdite.
On veillera toutefois à ce que la composition nutritonnelle suivant l'invention comprenne de préférence un apport calorique limité à un apport calorique physiologique normal et ce, afin d'éviter une consommation calorique totale excessive.
La composition nutritionnelle suivant l'invention pourra avantageusement comprendre des éléments connus comme potentiellement utiles aux fumeurs et aux alcooliques et qui constituent notamment un apport physiologique ou supraphysiologique en vitamines A naturelles ou synthétiques et en vitamines B, C, D et E, ainsi qu'en oligoéléments, tels que le sélénium et le zinc. Les apports en vitamines seront compris, sur base d'une dose journalière, entre 0,6 et 30 mg de vitamine A, 1 et 30 mg de vitamines B, 10 et 900 mg de vitamine E et 50 et 2. 500 mg de vitamine C.
Cette composition pourra être préparée soit sous diverses présentations directement absorbables,
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telles que liquide, du type lait ou dérivé du lait, semi-liquide, du type crèmes, flans, solides, de type biscuits, biscottes, pains, soit sous forme d'additifs à intégrer dans des aliments habituels, tels que produits laitiers, soupes.
On trouvera, ci-après et à titre non limitatif, un exemple de composition nutritionnelle calculée sur base d'une dose journalière, qui comprend, suivant l'invention : - 400 mg de tryptophane-soit sous forme protéique (par exemple environ 6 gr d'alphalactalbumine pure ou associée à d'autres protéines), soit sous forme de L-tryptophane synthétique ou encore sous formes naturelle et synthétique combinées.
- 2 mg de rétinol (vitamine A) ou une dose équivalente d'un autre caroténoïde.
- 1 à 10 mg de vitamine B6 (pyridoxine) qui intervient dans la synthèse de la sérotonine à partir du tryptophane.
-. 200 mg d'acide ascorbique (vitamine C).
- 30 mg d'o < tocophérol (vitamine E), complété éventuellement de - 0, 25 à 30 gr d'acides aminés autres que le tryptophane et tels qu'aspartate, glutamate d'arginine-l'arginine étant sensée renforcer les défenses immunitaires, - glucides simples ou complexes, - acides gras saturés ou polyinsaturés, - oligoéléments (sélénium, zinc) réputés utiles au fonctionnement des défenses immunitaires, - nutriments tels que la carnitine, - arômes et additifs nécessaires aux qualités gustatives de la compo- sition nutritionnelle, à sa conservation et à sa préparation indus- trielle.
Lorsque l'exemple de composition susdit visera plus particulièrement l'accompagnement du sevrage alcoolique, on prévoira un supplément de vitamines B, notamment sous la forme de thiamine (1 à 30 mg), d'acide folique (0, 5 à 10 mg).