PROCEDE ET INSTALLATION D'EPURATION D'EAUX RESIDUAIRES PAR UN TRAITEMENT BIOLOGIQUE.
L'invention est relative à un procédé d'épuration d'eaux résiduaires par un traitement biologique mettant en œuvre un ensemble de micro-organismes pour l'élimination du carbone et de l'azote, voire du phosphore, une partie des microorganismes étant fixée sur des supports solides mobiles et constituant une biomasse fixée fluidisée.
Le traitement biologique des eaux vise l'élimination du carbone, de l'azote, voire du phosphore, grâce à l'activité métabolique d'un ensemble de bactéries ayant des spectres métaboliques différents. Ces caractéristiques imposent des conditions de fonctionnement et en particulier des temps de séjours hydrauliques et biologiques spécifiques nécessitant la multiplication du nombre des ouvrages. Ceci engendre, comme inconvénients, des coûts de construction élevés et une emprise au sol importante.
Le développement de procédés biologiques permettant une croissance bactérienne sous forme de biofilm fixé sur des supports solides mobiles, en particulier comme montré par EP 0 575 314, a permis d'envisager des conditions de faible charge massique avec des ouvrages de traitement de taille plus réduite. La charge éliminée est ainsi exprimée en kgDCO/m3 de matériaux/J. La fourniture en oxygène est par ailleurs accrue au-delà des besoins métaboliques pour permettre une bonne homogénéisation des supports dans le réacteur. Le coût élevé des supports représente une part très importante du coût total de construction de l'installation et constitue bien souvent une limite à la diffusion du procédé. Les conditions d'élimination de l'azote impose de plus l'ajout de carbone externe (de type méthanol) pour satisfaire les rendements de dénitrification, ce qui pénalise le coût d'exploitation.
Différentes alternatives pour pallier les inconvénients évoqués précédemment sont envisagées au procédé à boues activées classique : par exemple l'ajout de procédés membranaires dans Ie réacteur biologique ou sur Ia re-circulation des boues.
Ces procédés nécessitent des phases de lavages importantes pénalisant leur rentabilité globale.
La fraction carbonée est présente dans l'eau sous forme soluble et dissoute et estimée par la DCO (demande chimique d'oxygène). Les bactéries hétérotrophes sont capables d'assimiler ce carbone en condition aérobie ou en présence de nitrates permettant ainsi la dénitrification du milieu aquatique. Selon le ratio DCO/biomasse présent dans le réacteur, leur besoin en oxygène est plus ou moins important : lorsque ce ratio est faible (faible charge massique) le besoin en oxygène pour dégrader une même quantité de DCO est près de 40% supérieur à celui nécessaire en cas de ratio élevé (forte charge massique). Ainsi l'assimilation du carbone est plus économique en condition de forte charge massique. A noter que dans ces conditions, le rendement d'élimination du carbone est de l'ordre de 75 à 85%.
Le traitement de l'azote nécessite une première étape appelée nitrification qui consiste à oxyder biologiquement l'ammonium sous forme de nitrites et/ou de nitrates. Les bactéries réalisant cette étape ont un taux de croissance faible, nécessitant leur maintien dans le système pendant une longue période et occasionnant, par là même, des conditions de faible charge massique. La seconde étape appelée dénitrification nécessite du carbone disponible pour réaliser la réduction des nitrites et/ou nitrates en azote gazeux. Les cinétiques de dénitrification sont du même ordre de grandeur que celle de la nitrification.
Un traitement poussé du carbone en condition de faible charge massique n'est pas toujours compatible avec une dénitrification et occasionne l'ajout de carbone externe sous forme de méthanol par exemple, ce qui représente, outre un surcoût d'exploitation, des contraintes importantes en terme de sécurité aux abords de la station.
L'invention a pour but, surtout, d'optimiser les volumes des réacteurs et la fourniture d'oxygène.
Cette optimisation est obtenue en couplant des conditions de forte charge massique en culture libre et un traitement de l'azote en condition de faible charge massique par la biomasse fixée fluidisée. La culture libre est re-circulée à partir d'un système de flottation des boues, réalisé dans un ouvrage avec une vitesse supérieure à 10m/H. La re-circulation est contrôlée de manière à ce que la concentration soit compatible avec le système de flottation retenu.
Selon l'invention, le procédé d'épuration d'eaux résiduaires par un traitement biologique mettant en œuvre un ensemble de micro-organismes ayant des spectres métaboliques différents, pour l'élimination du carbone et de l'azote,
voire du phosphore, une partie des micro-organismes étant fixée sur des supports solides mobiles et constituant une biomasse fixée fluidisée, est caractérisé en ce que :
- une autre partie des micro-organismes est libre pour un traitement de type boue activée,
- on prévoit une première zone non aérée de traitement suivie d'une deuxième zone aérée de traitement ,
- on soumet l'effluent traité à une séparation solide/liquide par flottation à une vitesse supérieure à 10m/H, et
- on re-circule une partie de la boue récupérée par flottation vers le traitement par boue activée, cette re-circulation étant contrôlée pour que la concentration en MES (matières en suspension) de l'effluent soumis à la séparation liquide/solide reste compatible avec la flottation retenue.
De préférence, on couple des conditions de forte charge massique en culture libre et un traitement de l'azote en condition de faible charge massique par la biomasse fixée fluidisée. La forte charge massique correspond, de préférence, à une charge supérieure à 0,4 kgDB05.kg"1MV.j"1.
Avantageusement, la re-circulation de boue récupérée par flottation vers le traitement par boue activée est contrôlée pour que la concentration en MES de l'effluent soumis à la flottation reste comprise entre 0.3 g/L et 1.5 g /L.
On peut prévoir que la première zone non aérée de traitement est une zone de traitement anoxie à forte charge, pour une élimination de la majeure partie du carbone et d'une partie de l'azote principalement par action de bactéries hétérotrophes, suivie de la deuxième zone aérée de traitement pour élimination de l'azote.
Les deux zones de traitement peuvent être séparées physiquement.
Une fraction des nitrates produits dans la deuxième zone aérée de traitement peut être re-circulée vers la première zone de traitement anoxie.
Avantageusement, on mesure la concentration en MES dans la première zone de traitement anoxie à forte charge, et on commande le taux de recirculation de la boue récupérée par flottation de manière à maintenir la concentration en MES dans la plage souhaitée.
L'invention est également relative à une installation pour l'épuration d'eaux résiduaires comportant un réacteur biologique contenant un ensemble de micro-organismes ayant des spectres métaboliques différents, pour l'élimination du
carbone et de l'azote, voire du phosphore, une partie des micro-organismes étant fixée sur des supports solides mobiles et constituant une biomasse fixée fluidisée, caractérisée en ce que :
- une autre partie des micro-organismes est libre pour un traitement de type boue activée,
- le réacteur biologique comprend une première zone non aérée de traitement suivie d'une deuxième zone aérée de traitement.,
- l'installation comporte, en aval du réacteur biologique, un flottateur à vitesse de séparation supérieure à 10 m/H qui reçoit l'effluent sortant du réacteur biologique,
- un circuit est prévu pour re-circuler une partie de la boue récupérée du flottateur vers le réacteur biologique,
-et des moyens sont prévus pour maintenir la concentration en MES de l'effluent dans une plage compatible avec la flottation.
De préférence, la concentration en MES de l'effluent soumis à la flottation est maintenue entre 0.3 g/L et 1.5 g /L.
Les moyens pour maintenir dans une plage déterminée la concentration en MES de l'effluent soumis à la flottation peuvent comprendre :
- un moyen de mesure de la concentration en MES dans le réacteur biologique,
- un contrôleur auquel est envoyé le résultat de la mesure,
- et une pompe, commandée par le contrôleur, pour le débit de recirculation.
Avantageusement, la première zone non aérée de traitement est une zone anoxie à forte charge, pour une élimination de la majeure partie du carbone et d'une partie de l'azote, principalement par action de bactéries hétérotrophes, suivie d'une deuxième zone aérée de traitement pour élimination de l'azote.
Les deux zones de traitement peuvent être séparées physiquement. Une fraction des nitrates produits dans la deuxième zone aérée de traitement peut être re-circulée vers la première zone de traitement anoxie.
Ce système présente d'une part l'avantage de produire de manière naturelle peu de boues en excès, ces boues étant d'autre part fortement fermentescibles et donc source potentielle de carbone utilisable pour la dénitrification après traitement spécifique.
L'invention propose une solution nouvelle alliant les avantages de la culture fixée pour le traitement de l'azote (nitrification et dénitrification) et ceux d'une boue activée forte charge en tête, pour améliorer le traitement global. Cette association autorise une réduction significative de la taille des ouvrages et des besoins en oxygène et permet, de plus, l'utilisation d'un système de séparation de la biomasse à grande vitesse par flottation des boues, compatible avec l'objectif de réduction de la taille des ouvrages de traitement et de qualité des rejets sur la concentration en phosphore.
Les supports de la biomasse fixée sont retenus dans le réacteur tandis que l'eau traitée et la biomasse libre sont orientées sur le flottateur de séparation à haute vitesse, selon les exigences de la qualité d'eau traitée.
Le flottateur présente un volume significativement plus faible qu'un clarificateur classique et l'ajout possible de réactif assure une qualité optimale de traitement et offre la possibilité d'éliminer par précipitation l'excès de phosphore.
La zone de forte charge en tête est utile pour permettre une hydrolyse de la matière organique dissoute, voire particulaire, amenée par l'eau usée. Cette pré-hydrolyse en condition anoxie produit de la matière organique facilement assimilable nécessaire pour l'étape de dénitrification et améliore les cinétiques de nitrification par les bactéries autotrophes en zone aérée.
De plus une partie des nitrates sont dégradés dans cette zone de forte charge en tête réduisant d'autant la quantité de supports en zone anoxie.
Le traitement complet de l'azote (nitrification et dénitrification) peut être avantageusement obtenu soit par une aération séquencée soit par une configuration de type chenal permettant l'utilisation du carbone résiduel après la forte charge pour la dénitrification.
Outre le gain en terme de taille d'ouvrage et de fourniture en oxygène, l'invention permet d'écrêter, grâce à la forte charge, les variations de charge organique souvent observées et propices à des dysfonctionnements de type filamenteux sur les traitements en aération prolongée, et sur les cultures fixées de limiter le développement d'un biofilm lâche peu résistant aux forces d'abrasion mises en œuvre dans le réacteur aéré ou anoxique.
Selon les conditions d'exploitation et les normes de rejet de l'eau traitée, on peut séparer la zone de forte charge de celle à culture fixée et établir des circulations préférentielles des supports, de la phase liquide et de celle solide.
L'invention consiste, mises à part les dispositions exposées ci-dessus, en un certain nombre d'autres dispositions dont il sera plus explicitement question ci-après à propos d'exemples de réalisation décrits avec référence au dessin annexé, mais qui ne sont nullement limitatifs. Sur ce dessin :
Fig.1 est un schéma d'une installation conforme à l'invention et
Fig.2 est un schéma d'une variante de réalisation de l'installation selon l'invention.
En se reportant à Fig.1 du dessin, on peut voir une installation E pour l'épuration d'eau résiduaire qui comporte un réacteur biologique 1 contenant un ensemble de micro-organismes ayant des spectres métaboliques différents pour l'élimination du carbone et de l'azote, voire du phosphore. Une partie des microorganismes est fixée sur des supports solides mobiles 2 représentés schématiquement par des cercles sur le dessin. L'arrivée d'eau à traiter est assurée par une conduite 3. La sortie de l'effluent traité est assurée par une conduite 4. Une grille de rétention (non représentée) est prévue sur la sortie de l'effluent traité pour maintenir les supports 2 dans le réacteur 1.
Une autre partie des micro-organismes est libre dans la liqueur du réacteur 1 pour un traitement de type boue activée.
Le réacteur 1 comprend une première zone non aérée de traitement 1a située du côté de la conduite d'entrée 3. Cette zone est avantageusement prévue pour un traitement anoxie à forte charge. Cette zone anoxie ne comporte pas, dans le fond du réacteur, de moyen d'aération pour injecter de l'air.
La forte charge correspond à une charge massique supérieure à 0,4 kgDBO5.kg"1MV.j'1. La lettre j correspond à « jour », DBO correspond à la demande biochimique en oxygène, et DBO5 correspond à la quantité d'oxygène consommé après 5 jours d'incubation. MV correspond à la teneur en matières volatiles qui est une évaluation approchée de la matière organique (voir « Mémento technique de l'eau » 10ème édition DEGREMONT SUEZ, tome 1, pages 418-419, et pages 534-535).
Cette première zone de traitement anoxie à forte charge permet une élimination de la majeure partie du carbone et d'une partie de l'azote oxydé principalement par action de bactéries hétérotrophes. La première zone 1a est suivie par une deuxième zone 1b aérée de traitement pour l'oxydation de l'azote, essentiellement par des bactéries autotrophes. La deuxième zone 1b comporte,
dans le fond, des moyens d'aération 5 constitués par exemple par des rampes d'insufflation d'air dans la liqueur située au-dessus.
L'effluent traité, sortant par la conduite 4 du réacteur 1, est envoyé dans un flottateur 6 dont la vitesse de séparation solide/liquide est supérieure à 10m/H. Des flottateurs de ce type sont commercialisés par la société demanderesse, et sont décrits notamment dans l'ouvrage déjà cité « Mémento technique de l'eau » 10ème édition, tome 2, pages 876-877. Les particules solides se rassemblent sous forme d'un lit de boue 7 en partie supérieure du flottateur. Une partie des boues est re-circulée par une canalisation 8 vers la conduite 3 d'entrée du réacteur 1. L'autre partie des boues est évacuée.
La re-circulation des boues est contrôlée pour que la concentration en matière en suspension (MES) de l'effluent envoyé par la conduite 4 dans le flottateur 7 reste comprise entre 0.3 g/L et 1.5 g/L afin d'assurer un bon fonctionnement de ce flottateur 6. Pour exercer le contrôle, on prévoit au moins une sonde 9 de mesure de la concentration en MES, en particulier dans la zone de traitement anoxie 1a. Le résultat de la mesure est transmis à un contrôleur 10 ou micro-ordinateur qui, en fonction de la concentration souhaitée en MES dans le flottateur 7, commande le taux de recirculation de la boue en réglant la vitesse d'une pompe 11 installée sur la canalisation 8.
Fig.2 montre une variante de réalisation de l'installation selon laquelle le réacteur biologique 21 comporte deux zones de traitement 21a, 21b séparées physiquement.
La zone 21a est une zone non aérée, ne comportant pas de moyen d'aération. Cette zone 21a, avantageusement zone anoxie, comporte au moins un moyen d'agitation 12, notamment du type à hélice.
Les éléments de Fig.2 identiques ou jouant un rôle analogue à des éléments déjà décrits à propos de Fig.1 sont désignés par les mêmes références numériques sans que leur description soit reprise. La zone aérée 21b, munie en partie basse de moyens d'aération 5, communique avec la zone 21a par un passage non visible sur Fig.2 muni d'une grille pour retenir les supports solides 2 dans leur partie respective 21a et 21b.
Une fraction des nitrates produits dans la deuxième zone aérée 21b de traitement est re-circulée par une conduite 13 de la zone 21b à la zone 21a.
Dans l'installation des Fig. 1 et 2 l'eau traitée est évacuée du flottateur 6 par une conduite 14.
La zone 1a ou 21a en tête de l'installation permet une hydrolyse de la matière organique dissoute, voire particulaire, amenée par l'eau résiduaire. Cette pré-hydrolyse en condition anoxie produit de la matière organique facilement assimilable nécessaire pour l'étape de dénitrification et améliore les cinétiques de nitrification par les bactéries autotrophes en zone aérée 1 b.
De plus une partie des nitrates sont dégradés dans cette zone de forte charge en tête, réduisant d'autant la quantité de supports 2 en zone anoxie.
Le traitement complet de l'azote (nitrification et dénitrification) peut être obtenu soit par une aération séquencée soit par une configuration de type chenal permettant l'utilisation du carbone résiduel après la forte charge pour la dénitrification.
Exemple
Les données présentées ci-dessous correspondent à un flux hydraulique journalier de 420 m3/H, une concentration en MES de 250 mg/L avec un taux de MV (matières volatiles) de 80%. La DCO de l'effluent est de 500 mg/L dont 40% de DBO. La concentration en azote est de 45 mg/L.
Les objectifs de traitement de l'eau sont les suivants : MES de 20 mg/L, DBO de 20 mg/L, NGL (azote global) de 14 mg/L et PT (phosphore total) de 2 mg/L.
La présence d'une biomasse de forte charge massique (et donc d'un âge de boue faible, inférieur à 3 jours) en condition d'anoxie permet une préhydrolyse de près de 22% de la DCO entrante, ce qui représente un apport en DBO facilement assimilable de l'ordre de 33mg/L. Cet apport de DBO est nécessaire pour assurer une dénitrification totale puisque l'apport en DBO facilement assimilable par l'eau à traiter (sans étape de pré-hydrolyse) est estimé à 70 mg/L alors que les besoins pour assurer une dénitrification totale sont de 98 mg/L.
Dans le cas d'une configuration classique, sans re-circulation de biomasse libre forte charge, il aurait été nécessaire d'apporter cette DBO complémentaire sous forme de méthanol par exemple.
La présence dans la zone anoxie d'une culture libre en condition de forte charge contribue également à l'élimination des nitrates : cette contribution est estimée entre 10 et 20%, ce qui représente une économie en support dans la zone anoxie.
En conclusion, dans l'exemple chiffré retenu, les avantages de la solution proposée sont présentés dans le tableau ci-dessous :
L'étape de pré-hydrolyse de la matière organique en condition anoxie va favoriser les cinétiques de dénitrification en apportant de la DBO facilement assimilable ( en abrégé : DBOfa) et les cinétiques de nitrification en limitant l'apport de carbone dans la zone aérée.
Cette action sur le traitement du carbone jouera de plus un rôle important en cas d'à-coups de charge puisque la concentration en carbone biodégradable sera moindre dans la zone aérée.
On remarque que la station de traitement de l'eau nécessite une taille globale d'ouvrage de l'ordre de 40% par rapport à une solution conventionnelle.
L'invention s'applique, en particulier, à tout traitement d'effluent présentant une concentration en carbone pouvant varier de 100mg/L à 800 mg/L et contenant une part de carbone assimilable de 20 à 100%, un ratio en masse carbone/azote supérieur à 3.5 et sans limite pour le ratio carbone/phosphore.
Selon ces caractéristiques, l'effluent traité peut être de l'eau usée d'origine résiduaire, industrielle ou agricole.
La concentration en matières en suspension de l'effluent pourra être contrôlée par l'ajout d'une étape de décantation en tête de tout traitement biologique.