PIECE ET COMPOSITION EN SILICATE DE CALCIUM HYDRATE,
PROCEDE DE FABRICATION DE PIECE EN SILICATE DE CALCIUM HYDRATE
La présente invention concerne une pièce en silicate de calcium hydraté, ainsi qu'une composition en silicate de calcium hydraté et un procédé de fabrication d'une pièce en silicate de calcium hydraté.
On connaît déjà des panneaux d'isolation thermique en silicate de calcium hydraté (couramment dénommé CSH pour calcium silicate hydrates en anglais). Des tels produits sont obtenus par moulage et autoclavage d'une composition à base d'eau, de chaux généralement vive (de formule CaO), de ciment Portland.
L'invention a pour objet d'élargir encore la gamme de produits en silicate de calcium hydraté, en fournissant des produits à la fois performants, faciles et/ou rapides à fabriquer, même à l'échelle industrielle, et peu onéreux. A cet effet, l'invention propose d'abord une pièce extrudée à base de fibres de verre alkali résistantes dans du silicate de calcium hydraté obtenu essentiellement par réaction de silice, de granulométrie définie par le paramètre D50 inférieur ou égal à 100 μm, et de chaux éteinte, autrement appelée hydroxyde de calcium, de formule Ca(OH)2. La pièce selon l'invention est extrudée. L'extrusion permet de fabriquer des pièces complexes, creuses ou pleines, et des pièces composites. La pièce peut être de forme allongée, former notamment un profilé, avoir une section de toute forme (carré, rectangulaire, ovale, en U, en T, avec un ou des bords arrondis etc).
Par ailleurs, on choisit de limiter fortement, et de préférence de supprimer l'usage du ciment. Ainsi, la pièce peut comprendre comme source siliceuse au moins 90 % de silice, de préférence 95 % encore plus préférentiellement 100 % de silice (unique source siliceuse), le silicate de calcium hydraté est alors obtenu uniquement par réaction de la silice et de la chaux éteinte.
L'utilisation d'une silice permet de contrôler davantage le type de silicate de calcium hydraté obtenu, notamment d'accroître les phases cristallines au détriment du gel de silicate de calcium hydraté, pour plus de durabilité. Le type de structure cristalline est lié au traitement thermique d'autoclavage.
Le dosage en silice est en outre plus facile à contrôler qu'avec une composition à base de ciment dont la formulation est souvent mal connue.
La silice est de surcroît une matière première bon marché, et facile à se procurer. En particulier, la silice peut être industrielle, par exemple du sable broyé, micronisé.
Par ailleurs, pour obtenir des propriétés mécaniques satisfaisantes, on choisit de la silice fine dont le paramètre D50 est inférieur ou égal à 100 μm plutôt que le sable standard de D50 de l'ordre du mm.
D'un point de vue esthétique, l'usage de la silice comme source siliceuse essentielle voire unique permet d'obtenir une pièce blanche, pigmentable, convenant tout particulièrement pour un usage décoratif ou ornemental. Cette pièce peut aussi avoir une ou des fonctions techniques. A l'inverse, une pièce à base de ciment ou même d'autres pouzzolanes, telles que fumée de silice, cendres volantes, est généralement grise.
La pièce selon l'invention convient en intérieur comme en extérieur car elle résiste aux agressions atmosphériques (notamment pluie, soleil, ultraviolet). La pièce conserve en outre les propriétés de résistance au feu et d'isolation attribuées au silicate de calcium hydraté.
La matrice minérale utilisée lors de la fabrication de la pièce étant très alcaline, typiquement de pH supérieur ou égal à 13, on choisit des fibres de verre alkali résistantes (dites fibres AR). Un exemple de fils de verre AR sont les fibres CemFIL® et ARcoteX® vendues par la société Saint-Gobain Vetrotex.
Le verre AR renferme généralement de l'oxyde de zirconium Zrθ2. Ces fils peuvent être choisis parmi tous les fils de verre « alcali-résistants » existants (tels que ceux décrits dans les brevets GB 1 290 528, US 4 345 037, US 4 036 654, US 4 014 705, US 3 859 106, etc..) et comprennent, de préférence, au moins 5 % en moles de Zrθ2. Selon un mode de réalisation de l'invention, le verre constitutif des fils comprend Siθ2, Zrθ2 et au moins un oxyde alcalin, de préférence Na2θ, comme principaux constituants.
Une composition de verre alcali-résistante particulièrement utilisée pour réaliser les fils de verre selon l'invention est la composition décrite dans le brevet GB 1 290 528, composée principalement des composants suivants dans les proportions exprimées en pourcentages molaires : 62-75 % Siθ2 ; 7-11 % Zrθ2 ; 13-23 % R2O ; 1-10 % R'O ; 0-4 % AI2O3 ; 0-6 % B2O3 ; 0-5 % Fe2O3 ; 0-2 % CaF2 ; 0-4 % TiO2 ; R2O représentant un ou des oxyde(s) alcalin(s), de préférence
Na2θ et, éventuellement LJ2O et/ou K2O, et R'O étant un ou des composants choisis parmi les oxydes alcalino-terreux, ZnO et MnO.
Ces fibres permettent d'augmenter la résistance en flexion comme en compression. De préférence, on peut choisir des fibres dispersables pour garantir le meilleur état de surface possible.
La pièce extrudée selon l'invention est en outre plus légère qu'une pièce à base de ciment. Rapportée sur une surface (ou un support), telle qu'une surface de mur ou de façade d'un édifice, elle ne constitue pas une surcharge importante.
La pièce extrudée selon l'invention peut présenter de préférence une masse volumique inférieure à 2 g/cm3, mesurable par pesée hydrostatique. La pièce peut présenter de préférence une porosité inférieure ou égale à 60 %, préférentiellement inférieure à 50 % traduisant un nombre de défauts limités à coeur.
Dans un mode de réalisation préféré, le paramètre D50 est inférieur ou égal à 50 μm, encore plus préférentiellement entre 10 et 20 μm. Il s'agit des gammes optimales pour les propriétés mécaniques.
De préférence, pour de meilleures propriétés mécaniques, la pièce extrudée selon l'invention peut comprendre moins de 25 % de chaux carbonatée, dite calcite et de formule CaCθ3, encore plus préférentiellement moins de 15 % et/ou peut comprendre moins de 5 % de portlandite, de formule Ca(OH)2, encore plus préférentiellement moins 1 % de portlandite.
La pièce extrudée selon l'invention peut présenter un module d'Young de préférence supérieur ou égal à 4 MPa, encore plus préférentiellement supérieur ou égal à 6 MPa. L'allongement peut être de l'ordre de 0,1 %. La pièce extrudée selon l'invention est stable dimensionnellement, présente un bel aspect de surface, sans cloques, et/ou gonflements et/ou craquelures visibles à l'oeil nu. La pièce extrudée selon l'invention peut comporter au moins 1 % en poids de matières sèches des fibres de verre.
La pièce selon l'invention peut conférer un profil particulier à une surface, notamment un style architectural. Elle constitue par exemple un élément de modénature, une corniche, un encadrement (porte, fenêtre), un bandeau horizontal, une plinthe, etc.
La présente invention a également pour objet une composition de silicate de calcium hydraté facile à mettre sa mise en œuvre, rendant possible de
nouvelles applications.
L'invention propose à cet effet aussi une composition extrudable comprenant : de l'eau libre, - une silice, de granulométrie définie par le paramètre D50 inférieur ou égal à 100 μm, de la chaux éteinte, des fibres de verre alkali résistantes, un plastifiant, - un agent de cohésion, le rapport massique entre la chaux éteinte et la silice étant entre 0,7 et 1. La silice et la chaux éteinte sont susceptibles de réagir, en autoclave, pour former du silicate de calcium hydraté. La réduction du dosage en chaux permet d'obtenir de bonnes propriétés mécaniques, notamment par une diminution de chaux carbonatée.
Le rapport massique entre la chaux éteinte et la silice peut être de préférence de l'ordre de 0,8.
La chaux utilisée peut être sous forme de poudre sèche, sous forme de lait de chaux, ou encore de pâte de chaux. Le superplastifiant contribue à la fluidification du mélange et facilite l'extrusion. Il peut être de préférence de type polynaphtalène sulfonate, ou polycarboxylate. De préférence, son taux est de l'ordre de 2 % en poids.
L'agent de cohésion permet de garantir l'homogénéité de la matrice. Il peut être choisi de préférence parmi un éther de cellulose hydrosoluble et non ionique tel que le méthyl hydroxyéthyl cellulose, ou l'hydroxy propyléthyl cellulose. De préférence, son taux est inférieur à 1 % en poids.
La demanderesse a découvert que le sable de granulométrie millimétrique était certes extrudable mais conduisait après autoclavage à un produit de trop faible résistance mécanique. Aussi, on choisit une silice plus fine de paramètre D50 inférieur ou égal à 100 μm.
Dans un mode de réalisation préféré, le paramètre D50 est inférieur ou égal à 50 μm, encore plus préférentiellement entre 10 et 20 μm.
De manière avantageuse, la composition extrudable selon l'invention peut comprendre essentiellement de la silice fine comme matériau siliceux pour les raisons déjà invoquées pour la pièce.
En outre, pour que la formulation ne soit pas trop ferme et ne sèche trop vite, on peut ajuster le dosage en eau et/ou en plastifiant. Par exemple, le rapport entre la quantité d'eau par rapport à la quantité de matières sèches est de préférence de l'ordre de 0,4 voire plus et/ou le taux de plastifiant est de l'ordre de
2 % en poids voire plus.
La chaux éteinte peut comprendre au moins 90 % de CaO. La chaux est d'autant plus blanche qu'elle est pure. On choisit préférentiellement de la fleur de chaux.
La présente invention a en outre pour objet un procédé de fabrication d'une pièce à base de fibre de verre alkali résistante et de silicate de calcium hydraté comportant les étapes suivantes : - extrusion de la composition définie précédemment pour former une pièce dite fraîche, pré-séchage de la pièce fraîche, autoclavage de la pièce pré-séchée à une température supérieure à 1500C, de préférence supérieure ou égale à 1800C, encore plus préférentiellement de l'ordre de 200°C.
Le pré-séchage permet d'évacuer l'eau libre servant à la mise en oeuvre n'intervenant pas dans la réaction d'hydratation et de stabiliser dimensionnellement la composition extrudée.
Un autoclavage direct est susceptible de générer des défauts d'aspects : gonflement, craquelures qui fragilisent la pièce et dégradent les résistances mécaniques.
De préférence, on réalise un pré-séchage suffisant pour évacuer le maximum de l'eau libre, de préférence pour avoir de l'ordre 15% de perte de masse, soit entre 13 et 16 %. Si la perte de masse est plus élevée, par exemple de l'ordre de 22 %, les performances mécaniques sont plus faibles car il est probable que non seulement l'eau libre est consommée mais sans doute aussi une partie de l'eau nécessaire à l'hydratation. Une perte de masse de 22 % est obtenue par exemple pour un séchage de 96 heures à température ambiante ou de 24 heures à 600C.
II existe ainsi un optimum pour la durée du pré-séchage à une température donnée. Les performances mécaniques obtenues sont plus faibles lorsque l'on raccourcit le temps de pré-séchage car on obtient une pièce présentant des défauts (un départ trop brutal de l'eau) mais inversement un temps de pré- séchage excessif conduit à une carbonatation de la chaux au détriment de la durabilité de la pièce.
Dans un mode de réalisation préféré, le pré-séchage est réalisé à température ambiante pendant une durée comprise entre 48 heures et 72 heures environ, ce qui conduit à une perte de masse de 14 %. On peut procéder à un traitement de surface de type polissage sous eau à l'aide d'un papier abrasif à base de carbure de silicium.
D'autres détails et caractéristiques avantageuses de l'invention apparaissent à la lecture des exemples 1 à 4 suivants.
Exemple 1
Dans un mélangeur, on malaxe une composition ainsi formulée :
34,3 % en poids de chaux éteinte de pureté supérieure à 90 %, telle que la chaux dénommée Boran de la société Lhoist, - 34,3 % en poids de poudre sèche de silice fine, telle que la silice C10 de la société Sifraco, dont le paramètre D50 est égal à 17 μm, 28,5 % en poids d'eau,
1 ,4 % en poids d'un plastifiant, de type polynaphtalène sulfonate, tel que le Lomar D de la société Cognis, - 0,5% en poids d'un agent de cohésion choisi parmi un éther de cellulose hydrosoluble et non ionique tel que le méthyl hydroxyéthyl cellulose, par exemple le Culminai MHEC 15000 de la société Aqualon, 0,9 % en poids des fibres de verre alkali résistantes (soit 1 ,35 % par rapport à la quantité de matières sèches), par exemple les fibres dispersables dénommées Cemfil « 70/30 » de 6, 9 ou 12 mm de longueur et vendues par la société Saint-Gobain Vetrotex, ou en variante des fibres de type Cemfil « 62/2 » vendues par la société Saint-Gobain Vetrotex.
Préférentiellement, on malaxe d'abord à sec et à petite vitesse, la chaux, la silice et les fibres, on ajoute ensuite l'eau et les adjuvants et on malaxe à plus grande vitesse.
On extrude cette composition, de préférence à vitesse plus élevée pour éviter l'apparition de défauts. Différentes formes de filières sont choisies pour réaliser des pièces de géométrie variée : plaque, profil en L, profil avec au moins un bord arrondi.
On réalise un pré-séchage de la pièce extrudée fraîche de 72 heures à 35°C pour éliminer au maximum l'eau libre.
La pièce séchée est ensuite autoclavée sous 15 bars à 2040C.
La pièce est dénuée de craquelures, de gonflement, est stable dimensionnellement.
On procède enfin à un traitement de surface de type polissage sous eau à l'aide d'un papier abrasif à base de carbure de silicium pour obtenir une surface lisse.
Une analyse par diffraction X de la pièce permet d'identifier les différentes phases et de les quantifier comme montré dans le tableau 1 :
Tableau 1
II ressort que la chaux et la silice réagissent pour former des silicates de calcium hydratés cristallisés (tobermorite) ou amorphe (gel de CSH). La température d'autoclavage étant supérieure à 1500C, le gel de CSH tend à cristalliser pour former des cristaux de tobermorite. La calcite, qui peut être source de faiblesse, est en quantité limitée et on ne détecte pas de portlandite.
La pièce extrudée est blanche, légère. Sa masse volumique, mesurée par pesée hydrostatique, est égale à 1 ,7 g/cm3 environ. Sa porosité selon la norme
ASTM C642-90 est en outre de l'ordre de 47 %, traduisant l'absence de défauts au sein de la matrice.
Les performances mécaniques sont évaluées par un essai de flexion 4 points sur des éprouvettes extrudées conformément à la norme EN 1170-5. Les essais sont réalisés avec une presse ZWICK1474 sur des éprouvettes de dimensions 85 mm x 350 mm et d'épaisseur 20 mm. La vitesse d'asservissement par le déplacement est de 2 mm/min, l'entraxe supérieur de 83 mm et l'entraxe inférieur de 250 mm. Le module d'Young est de l'ordre de 6,5 MPa et l'allongement de 0,08%.
Exemple 2
La formulation de l'exemple 1 est modifiée pour faciliter encore l'extrusion. Le dosage en eau est augmenté jusqu'à 29 % et le dosage en plastifiant est augmenté jusqu'à 2%.
Une analyse par diffraction X de la pièce extrudée permet d'identifier les différentes phases et de les quantifier comme montré dans le tableau 2 :
Tableau 2
La calcite est présente en plus grande proportion et la tobermorite est très minoritaire. Le module d'Young est de l'ordre de 4,3 MPa et l'allongement de 0,08 %. Les performances mécaniques obtenues sont acceptables mais cependant plus faibles que pour l'exemple 1.
La pièce extrudée reste blanche, légère, dénuée de craquelures, de gonflement, stable dimensionnellement.
La masse volumique et la porosité sont inchangées par rapport à l'exemple 1.
Exemple 3
Pour améliorer encore les performances mécaniques de la pièce présentée dans l'exemple 2, le temps de pré-séchage a été optimisé. Les meilleures performances mécaniques sont obtenues avec un pré-séchage de 48 heures à
35°C conduisant à une perte de masse de l'ordre de 14 %. Le module d'Young atteint alors 5,2 MPa et l'allongement vaut 0,06 %.
La pièce extrudée reste blanche, légère, dénuée de craquelures, de gonflement, stable dimensionnellement. Sa masse volumique et sa porosité sont inchangées.
Exemple 4
La formulation de l'exemple 1 est modifiée : le dosage en plastifiant est augmenté jusqu'à 2 % pour faciliter encore l'extrusion et le rapport massique chaux éteinte sur silice a été ajusté. Plus précisément le dosage en chaux éteinte est diminué jusqu'à obtenir un rapport de 0,8 (30,3 % de chaux éteinte sur 37,9 % de silice).
Une analyse par diffraction X de la pièce extrudée permet d'identifier les différentes phases et de les quantifier comme montré dans le tableau 3 :
Tableau 3
La diminution du dosage en chaux éteinte permet d'améliorer significativement les performances mécaniques. La proportion de la calcite, qui peut être source de faiblesse, est limitée. La plus grande partie de la chaux éteinte est ainsi combinée avec la silice pour former des silicates de calcium hydratés (sous forme de gel amorphe ou cristallisé). Le module d'Young est élevé, de l'ordre de 6,9 MPa et l'allongement de 0,1 %.
La pièce extrudée reste blanche, légère, dénuée de craquelures, de gonflement, stable dimensionnellement. Sa masse volumique et sa porosité sont inchangées. Les pièces extrudées décrites dans les exemples 1 à 4 conviennent tout particulièrement comme pièces décoratives, ornementales ou architecturales, notamment comme éléments de modénature, corniches, encadrements, ou plinthes.