PROCEDE DE REALISATION D ' UN DI SPOSITIF COMPRENANT UN EMPILEMENT DE PLANS DE BOITES QUANTIQUES
La présente invention concerne d'une manière générale un procédé pour réaliser sur un substrat de silicium ou germanium monocristallin d'un empilement de plans de boîtes quantiques en silicium et/ou germanium ainsi qu'un dispositif comprenant un substrat de silicium ou germanium monocristallin et un empilement de plans de boîtes quantiques dont la taille est variable dans chaque plan mais orientée.
L'obtention de boîtes quantiques en silicium fait l'objet actuellement de nombreuses études. Ces boîtes quantiques sont composées généralement d'un matériau monocristallin de taille typiquement inférieure à 100 nm.
Classiquement, les boîtes quantiques réalisées ont une forme de gouttes semi-hémisphériques de longueur d'environ 20 nm à la base et d'une hauteur de 2 à 3 nm et sont constituées de composés LTI-V qui ont pour avantage de présenter des bandes interdites d'énergie directes (donc présentant de bons rendements en luminescence par exemple) mais qui sont difficiles à traiter et intégrer.
En revanche, le silicium est un matériau bien maîtrisé tant du point de vue de son traitement que de son intégration. Néanmoins, sa bande d'énergie interdite indirecte est un handicap important pour des applications nécessitant de bons rendements de luminescence, ce qui explique le faible intérêt qu'a connu ce matériau dans les applications du type boîtes quantiques.
La possibilité de coupler le silicium (Si) avec du germanium
(Ge) ou des alliages de silicium et germanium (SiGe) a soulevé un regain d'intérêt pour l'obtention de boîtes quantiques en matériau IV-IV, c'est-à-
dire principalement des gouttes de Si ou de Ge.
Pour réaliser ces gouttes, on utilise des procédés de dépôts chimiques en phase vapeur (CVD). Ainsi, en choisissant judicieusement les paramètres de dépôt comme la température et la pression et les flux de gaz précurseurs (typiquement SiH4 et GeH4 avec H2 comme gaz vecteur), on peut déposer, par exemple, des gouttes de Ge sur une surface d'une couche de silicium ou des gouttes de Si sur une surface d'une couche de
Si02 ayant des tailles de boîtes quantiques. Pour accroître le rendement de luminescence par exemple, on encapsule le plan de boîtes quantiques ainsi réalisé, puis on redépose sur la surface de la couche d'encapsulation un plan de boîtes quantiques, et ainsi de suite sur plusieurs épaisseurs.
La réalisation de telles boîtes quantiques sous forme de gouttes de germanium est décrite entre autres dans les articles "Déposition of three-dimensional Ge islands on Si (001) by chemical vapor déposition at atmospheric and reduced pressures" (dépôt d'îlots tridimensionnels de Ge sur Si (001) par dépôt chimique en phase vapeur à pression atmosphérique et sous pression réduite) T.I. Kamins, E.C. Carr, R.S. Williams, et S.J.
Rosner, J. Appl. Phys. Si (1) 1er janvier 1997, et "Germanium quantum dots" embedded in silicon : Quantitative study of self-alignment and coarsening (gouttes quantiques de germanium noyées dans du silicium : étude quantitative d'auto-alignement et grossissement) O. Kienzle, F.
Ernst, M. Ruhle, O.G. Schmidt et K. Eberl, Appl. Phys. Lett. Vol. 74, N°2,
11 janvier 1999.
Les boîtes quantiques semi-hémisphériques présentent plusieurs inconvénients.
Les boîtes quantiques obtenues sont monocristallines mais ne présentent pas toutes la même orientation cristalline et peuvent même présenter des micro-macles.
La répartition en taille des boîtes n'est pas bien centrée et l'intervalle entre les boîtes n'est pas totalement régulier (dépendant des conditions de nucléation du dépôt chimique en phase vapeur).
Lors de l'encapsulation d'un plan de boîtes quantiques, il peut y avoir interdiffusion d'espèces du matériau d'encapsulation dans le matériau de la boîte quantique. Par exemple, le silicium déposé par CVD à une température
typiquement supérieure à 550°C pour encapsuler les boîtes quantiques en Ge d'un plan, aura tendance à diffuser dans le germanium des boîtes.
L'obtention de boîtes quantiques par dépôt chimique en phase vapeur ou autre technique de dépôt comme l'épitaxie par faisceau moléculaire (MBE) est essentiellement un problème de nucléation. Or, les phénomènes de nucléation sont souvent de nature exponentielle, ce qui nécessite un contrôle de la durée. La nucléation est également très dépendante de la nature et de l'état des surfaces de réception et le temps de latence est souvent un facteur limitant pour la reproductibilité des résultats.
La présente invention a donc pour objet un procédé de réalisation d'un empilement de plans de boîtes quantiques en silicium et/ou en germanium ou alliage SiGe qui remédie aux inconvénients de l'art antérieur. En particulier, la présente invention a pour objet un procédé de fabrication d'un empilement de boîtes quantiques en silicium et/ou en germanium ou alliage SiGe permettant d'obtenir une succession de plans de boîtes quantiques avec des interfaces bien définies, des boîtes quantiques pratiquement de même taille, monocristallines et orientées. La présente invention a aussi pour objet un dispositif comprenant un empilement de plans de boîtes quantiques en silicium et/ou germanium ou alliage SiGe pratiquement de même taille, monocristallines et orientées.
Les buts ci-dessus sont atteints, selon l'invention, par un procédé de réalisation d'un dispositif comprenant sur un substrat de silicium ou de germanium monocristallin un empilement de plans de boîtes quantiques, caractérisé par le fait qu'il comprend : a) la formation sur le substrat d'un empilement de couches monocristallines successives, alternativement Si/Ge, Si/SiGe ou Si/SiGe/Ge pour un substrat en germanium et inversement pour un substrat de silicium; et b) le traitement électrochimique de l'empilement de couches monocristallines pour rendre les couches poreuses et y former des cristallites résiduelles constituant des boîtes quantiques. Dans une autre mise en oeuvre du procédé de l'invention, après
l'étape (b) de traitement électrochimique, l'empilement de couches poreuses est soumis à un traitement de passivation par oxydation électrochimique transformant les couches poreuses de Si en couches isolantes de Si02, de sorte qu'on obtient une structure dont les couches de Ge ou d'alliage SiGe forment des plans de boîtes quantiques entre des couches isolantes de Si02.
L'invention concerne également un dispositif comprenant un substrat de silicium ou germanium monocristallin et un empilement de plans de boîtes quantiques constitué par un empilement de couches monocristallines, poreuses, successives Si/Ge, Si/SiGe, ou Si/SiGe/Ge pour un substrat de germanium et l'inverse pour un substrat de silicium.
L'invention concerne encore un dispositif comprenant un substrat de silicium ou de germanium monocristallin et au moins un plan de boîtes quantiques constitué d'une couche poreuse de germanium ou d'alliage SiGe entre deux couches de Si02.
De préférence, dans la présente invention, les couches de l'empilement sont des couches de Si et Ge pour des effets chimiques, électrochimiques et optiques maximum.
Dans la présente demande, on entend par couche poreuse, une couche ayant une porosité d'au moins 35% et pouvant aller jusqu'à 85% en volume. De préférence, les couches poreuses auront une porosité de 50 à 70% en volume.
La formation de l'empilement de couches monocristallines successives de Si/Ge, Si/SiGe ou Si/SiGe/Ge est connue en soi et peut se faire par exemple par dépôt chimique en phase vapeur (CVD) ou par épitaxie par faisceau moléculaire (MBE).
Ainsi, par exemple, on peut par CVD, à partir d'un substrat massif de Si (ou de Ge), et après nettoyage classique de la surface, faire croître par hétéro-épitaxie des couches alternées de Si et de Ge (ou de Si et de SiGe ou encore de Si, SiGe et Ge), dans un même réacteur et en utilisant des gaz précurseurs appropriés comme SiH4, GeH4 et leurs mélanges, avec H2 comme gaz porteur et à des températures et pressions de travail classiques (par exemple une température de l'ordre de 650°C et une pression de 2,6 kPa (20 torr)). Dans ces conditions, la vitesse de dépôt de Si est de l'ordre de 12
nm/minute, celle de Ge de 90 nm/minute et celle d'un alliage Si0 gGeQ 2 de l'ordre de 10 nm/minute.
Ainsi, pour obtenir des couches très minces de Ge et Si, il est préférable d'utiliser une température de l'ordre de 450°C et de 520°C, respectivement.
Les couches de Si et/ou de Ge et/ou de SiGe peuvent être, comme cela est classique, dopées n ou p sans que cela nuise à l'étape ultérieure de formation des pores. Seules les valeurs des tailles de pores sont, comme on le verra ci-après, modifiées par ce dopage. Les épaisseurs des couches formées peuvent varier de 1 nm à plusieurs microns mais sont de préférence choisies pour correspondre approximativement à la taille des cristallites résiduelles après formation de la porosité, c'est-à-dire typiquement inférieure à 20 nm.
De préférence, les couches de Si ont une épaisseur de 2 nm à 1 μm et mieux de l'ordre de 10 nm. Les couches de Ge et d'alliages SiGe
(contenant 75% ou plus en poids de Ge) ont de préférence une épaisseur de 2 nm à 300 nm et les couches d'alliages SiGe (contenant moins de 75% en poids de Ge) ont de préférence une épaisseur de 3 nm à 50 nm.
En procédant ainsi, comme on le verra ci-après, on obtient des cristallites résiduelles de forme la plus "symétrique" possible, et la taille et la forme des boîtes quantiques est gouvernée par le couple dopage de la couche/conditions de traitement électrochimique qui agit sur la formation des pores, alors que la hauteur sera gouvernée par l'épaisseur de la couche. Les cristallites ont de préférence une hauteur de l'ordre de 10 nm. Le dépôt CVD de couches monocristallines de Si, Ge et SiGe est décrit entre autres dans le brevet français n° 97 16631.
La deuxième étape (b) du procédé de l'invention consiste en un traitement électrochimique de l'empilement de couches pour y créer une porosité. La formation de pores dans des couches de Si monocristallin est connue et est décrite entre autres dans l'article "Porous silicon : material properties, visible photo-and électroluminescence" (silicium poreux : propriétés du matériau, photo- et électroluminescence dans le visible) G. Bomchil, A. Halimaoui, I. Sagnes, P.A. Badoz, I. Berbezier, P. Perret, B. Lambert, G. Vincent, L. Garchery et J.L. Regolini, Applied Surface
Science 65/66 (1993) 394-407 North-Holland, et les brevets français n°s 87 06683 et 87 12913.
On a trouvé qu'il était possible de former des pores de manière analogue dans des couches de Ge ou SiGe, mais généralement avec des porosités plus grandes car le Ge et le SiGe s'attaquent plus vite que le silicium.
Pour les mêmes conditions de traitement, la porosité des couches de germanium est environ 1,3 fois supérieure à celle d'une couche de silicium. Brièvement, le traitement électrochimique pour la formation des couches poreuses peut s'effectuer de la manière suivante :
On introduit le substrat revêtu de l'empilement de couches dans une cellule électrochimique classique dans laquelle le substrat joue le rôle de l'anode, et la cathode est constituée typiquement d'un fil de platine. L'électrolyte est typiquement une solution aqueuse de HF. En réglant les paramètres électrochimiques tels que la concentration en HF de la solution d'électrolyte, la tension et l'intensité du courant et la durée du traitement, on règle la formation de la porosité dans les couches de l'empilement. Dans tous les cas, on obtiendra des cristallites résiduelles constituant les boîtes quantiques de taille quasi identique dans l'épaisseur des couches attaquées, car la réaction électrochimique s'arrête pour une taille déterminée des cristallites. Ce phénomène est bien connu dans le cas du silicium. On a observé un phénomène identique pour le germanium et les alliages de silicium et germanium.
Pour diminuer la taille des cristallites résiduelles, on peut utiliser le pouvoir de dissolution chimique de Si, Ge et SiGe par l'électrolyte tel qu'une solution aqueuse de HF, en prolongeant la durée du traitement. Toutefois, cette diminution de la taille des cristallites se fait au détriment d'un élargissement non isotrope des pores car la dissolution procédera plus rapidement en surface qu'au fond des pores ou sur les couches inférieures.
En modifiant les conditions du traitement électrochimique en cours de traitement, il est possible d'obtenir dans les différentes couches des porosités et des cristallites de tailles différentes.
A titre d'exemple, on a indiqué dans le tableau ci-après les porosités de couches de Si et Ge d'épaisseur 3 μm pour différentes conditions de traitement électrochimique.
Concentration HF Densité de courant Porosité (%)
(% volume) (mA/cm2) Si Ge
25 20 65 84,5
35 20 58 75,4
De même, en modifiant l'éventuel dopage des couches, on peut également obtenir des porosités différentes et des cristallites de tailles différentes dans ces couches.
L'avantage du procédé de l'invention est que dans tous les cas, on obtient des interfaces entre les plans des boîtes quantiques bien définies, et on peut obtenir des couches d'épaisseurs plus fines mieux contrôlées et surtout on obtient des plans de boîtes quantiques de deux matériaux différents.
Selon l'invention, on peut également mettre à profit la différence de comportement entre l'oxyde de germanium Ge02 et l'oxyde de silicium
Si02. Ainsi, on peut réaliser un empilement de couches poreuses de Ge ou GeSi et Si dans des conditions de traitement électrochimique telles qu'on obtienne des couches de silicium ayant de préférence une porosité d'environ 45% en poids. Puis, en soumettant dans la même cellule électrochimique l'empilement de couches à un traitement de passivation électrochimique, par exemple une oxydation anodique comme décrit dans l'article "Porous silicon : material properties, visible photo-and électroluminescence" cité précédemment, on transforme les couches poreuses de silicium en Si02, cependant que la fraction d'oxyde de germanium ou d'alliage SiGe qui se sera éventuellement formée dans les couches de Ge et SiGe sera dissoute par la solution aqueuse d'électrolyte conduisant en final à une structure de plans de boîtes quantiques de Ge ou SiGe entre des couches de Si02.
Les dispositifs de l'invention sont utiles pour la réalisation de détecteurs infrarouge, miroirs de Bragg et diodes électroluminescentes.
Dans tous les cas, le procédé de l'invention permet d'obtenir une répartition centrée des boîtes quantiques, ce qui n'est pas le cas des techniques de l'art antérieur et en particulier de celles faisant appel uniquement à des couches poreuses de silicium. La suite de la description se réfère aux figures annexées qui représentent, respectivement :
Figures 1A à 1C - une représentation schématique des étapes principales du procédé de l'invention; et
Figure 2 - une représentation schématique d'un empilement selon l'invention, après passivation par oxydation électrochimique.
Comme le montre la figure 1 A, le procédé de l'invention débute par le dépôt par CVD classique sur un substrat 1, par exemple de silicium monocristallin d'un empilement de couches alternées, par exemple de germanium et de silicium, dans le cas représenté un empilement de quatre couches Ge/Si/Ge/Si, 2, 3, 4 et 5, de dopage p, ayant une épaisseur respectivement de l'ordre de 10 nm.
Le dépôt CVD des couches a été effectué dans le même réacteur avec les conditions suivantes :
Couches de Si :
Gaz précurseur SiH4 : débit 400 cm3/minute
Gaz porteur H2 : débit 20 1/minute
Température : 650°C
Pression : 2,6 kPa (20 torr)
Couches de Ge :
Gaz précurseur GeH4 : débit 100 cm3/minute
Gaz porteur H2 : débit 20 1/minute
Température : 650°C Pression : 2,6 kPa (20 torr)
Le substrat 1 pourvu de l'empilement des couches 2 à 5 est alors soumis à un traitement électrochimique dans une cellule électrochimique classique à anode en platine. L'électrolyte était constitué d'une solution aqueuse de HF avec une concentration en HF de 35% en volume. La densité
de courant était de 20 mA/cm2.
Comme le montre les figures 1B et 1C, ce traitement électrochimique transforme progressivement les couches 2 à 5 de l'empilement en couches poreuses comportant des cristallites résiduelles 6 à 9 formant des plans de boîtes quantiques de nature différente et ayant des interfaces bien définies.
Etant donné que le germanium s'attaque plus vite que le silicium, on obtiendra des couches de germanium 2 et 4 ayant une porosité supérieure à celle des couches de silicium 3 et 5. Par exemple, avec les conditions ci-dessus, la porosité des couches de silicium est de 58% en volume et celle des couches de Ge de 75% en volume environ.
Les cristallites résiduelles, constituant les boîtes quantiques, sont orientées comme le substrat et possèdent une taille d'environ 10 nm avec une répartition très centrée. Sur la figure 2, on a représenté la structure obtenue selon une variante du procédé de l'invention. Dans cette variante, l'étape (b) de traitement électrochimique est modifiée pour obtenir des couches poreuses de silicium ayant une porosité de l'ordre de 45% en volume.
Dans la même cellule électrochimique, on procède alors à une étape (c) d'oxydation anodique en utilisant un electrolyte sans HF (par exemple des solutions aqueuses de HCl ou KNO3) à une densité de courant de 1 à 10 mA/cm2, de manière à transformer les couches poreuses de Si en couches non poreuses de Si02 (4,6). Les couches de germanium (3,5) restent poreuses du fait de la grande sensibilité de l'oxyde de germanium dans le milieu aqueux.
On obtient ainsi un empilement de plans de boîtes quantiques en germanium entre des couches isolantes de Si02.