Arrière-plan de l'invention L'invention concerne un procédé permettant de vérifier et le cas échéant quantifier l'adhérence d'une couche de barrière thermique en céramique formée sur un substrat. Un domaine particulier d'application de l'invention est celui de tests d'adhérence pour des revêtements tels que ceux utilisés pour des pièces chaudes de turbines à gaz telles que des aubes de distributeur ou de roue mobile de turbine haute pression. L'utilisation d'alliages métalliques réfractaires tels que des superalliages monocristallins ne suffit plus aujourd'hui à faire face aux besoins d'augmentation de la température des gaz de combustion d'une turbine à gaz pour améliorer le rendement et réduire les émissions polluantes, notamment pour des moteurs aéronautiques. Il est donc bien connu de munir des pièces en alliage métallique monocristallin d'une barrière thermique sous forme d'une couche de céramique. Une céramique couramment utilisée à cet effet est la zircone ZrO2 éventuellement stabilisée à l'yttrium. Une telle barrière thermique est formée typiquement par dépôt physique en phase vapeur ou PVD (pour "Physical Vapor Deposition), en particulier par PVD assisté par faisceau d'électrons ou EBPVD (pour " Electron Beam PVD"), donnant à la barrière thermique une structure colonnaire. Une sous-couche de liaison est interposée entre le substrat en alliage métallique monocristallin et la barrière thermique qui a une fonction de résistance à l'oxydation et qui favorise l'adhérence de la barrière thermique afin de lui permettre de présenter une bonne résistance à l'écaillage. Une sous-couche de liaison connue est composée d'un aluminiure de nickel et/ou de cobalt modifié par un métal de type platine, et pouvant comporter en outre, au voisinage de l'interface avec la barrière thermique, un métal promoteur de la formation d'un film d'alumine Al203 sur lequel la barrière thermique est ancrée. On pourra se référer notamment au document US 5 843 585.
Pour des pièces en alliage métallique monocristallin munies d'une barrière thermique formée par une couche d'oxyde céramique et, de façon plus générale, pour des substrats revêtus d'une couche de céramique, il est souhaitable de disposer d'un test permettant, de façon reproductible, de vérifier et/ou d'évaluer l'adhérence de la couche d'oxyde sur le substrat afin, notamment, de valider le processus utilisé pour la formation de la couche céramique ainsi que le processus utilisé pour la formation d'une sous-couche de liaison entre le substrat et la couche de céramique et la nature de la sous-couche de liaison.
Objet et résumé de l'invention L'invention vise à satisfaire un tel besoin et propose à cet effet un procédé de détermination de l'adhérence d'une couche de revêtement en céramique formée sur un substrat, comprenant les étapes qui consistent à : - appliquer une impulsion laser sur le substrat revêtu de la couche de céramique, - rechercher une image représentative d'une zone de décollement éventuel entre la couche de céramique et le substrat, et - analyser l'image éventuellement détectée. Selon un mode de mise en oeuvre du procédé, l'image est visualisée optiquement sous forme d'une tache visible à la surface de la couche de céramique. Une simple inspection visuelle peut ainsi permettre de détecter un décollement, la zone de décollement se traduisant par une tache plus claire visible à la surface du revêtement. Selon un autre mode de mise en oeuvre du procédé, dans le cas où la couche de céramique adhère au substrat par l'intermédiaire d'une couche d'interface en un oxyde, l'image est visualisée sous forme d'une représentation, par piézospectroscopie, du niveau de contraintes dans la couche d'interface. Avantageusement, on évalue un seuil de décollement de la couche de barrière thermique en fonction de la taille de l'image du décollement et de l'énergie appliquée par impulsion laser. L'évaluation du seuil de décollement peut être effectuée sur un échantillon préparé séparément ou prélevé sur une pièce. Cela permet de déterminer, pour un seuil souhaité, une valeur d'énergie d'impulsion laser pour laquelle on doit se situer en dessous du seuil de décollement et donc envisager la réalisation de tests non destructifs sur des pièces. De préférence, l'énergie effective appliquée par impulsion laser est mesurée.
De préférence encore, le procédé est mis en oeuvre après vieillissement par exposition en milieu oxydant. Le procédé peut être avantageusement utilisé pour la détermination de l'adhérence d'une couche de barrière thermique en céramique à structure colonnaire.
Brève description des dessins D'autres particularités et avantages de l'invention ressortiront de la description faite ci-après à titre indicatif mais non limitatif, en référence aux dessins annexés sur lesquels : - la figure 1 est une vue en coupe d'un substrat revêtu d'une barrière thermique avec revêtement céramique et sur lequel le procédé selon l'invention peut être avantageusement mis en oeuvre : - la figure 2 est un schéma de principe illustrant la mise en oeuvre d'un procédé selon l'invention ; - la figure 3 est une vue schématique d'un exemple de montage pour la mise en oeuvre d'un procédé selon l'invention ; - la figure 4 est une vue d'une surface de couche de revêtement céramique montrant des images représentatives de zones de décollement produites par application d'impulsions laser d'énergies différentes ; - la figure 5 est une vue schématique illustrant un mode d'analyse quantitative d'un niveau d'adhérence avec un procédé selon l'invention ; et - la figure 6 est une vue schématique d'un montage permettant une visualisation d'images de décollement par piézospectroscopie, selon un autre mode de réalisation du procédé.
Description détaillée de modes de réalisation Un domaine particulier d'application de l'invention est celui de 35 la détermination de l'adhérence d'une barrière thermique comprenant une couche de céramique formée sur un substrat en superalliage métallique monocristallin avec interposition d'une sous-couche de liaison. La figure 1 montre, en coupe, une telle barrière thermique formée par une couche 16 de zircone stabilisée à l'yttrium. La couche 16 a ici une structure colonnaire obtenue par un processus de dépôt par EBPVD. La couche 16 est avantageusement déposée sur une sous-couche de liaison 12 essentiellement en aluminiure de nickel modifié par du platine (Ni, Pt)Al formée sur un substrat 10 en superalliage monocristallin. Une couche ou film 14 d'alumine AI2O3 est formé à l'interface entre la sous-couche de liaison 12 et la couche de zircone 16 lors de l'élaboration de cette dernière. La couche 14 est par exemple la variété allotropique a de l'alumine, sa formation étant favorisée par la présence, au moins dans la partie de la sous-couche 12 éloignée du substrat 10, d'un métal promoteur tel que le platine. Comme déjà indiqué, une telle structure est connue et décrite par exemple dans le document US 5 843 585. Le procédé selon l'invention comprend l'application, sur un substrat tel que par exemple celui de la figure 1, d'une impulsion laser. Dans le cas de la figure 2, une impulsion laser brève de forte énergie est appliquée sur la surface du substrat 10 opposée à celle munie du revêtement 16. L'énergie laser est absorbée pour générer un plasma dont l'expression crée des ordres de compression. Ces ondes de compression donnent naissance à une onde de choc qui se propage dans le substrat puis est réfléchie par la surface libre du revêtement en une onde de détente. Le croisement entre cette onde de détente et une onde correspondant à la fin de l'impulsion laser crée des contraintes de traction qui peuvent provoquer une décohésion entre le revêtement et le substrat, plus précisément, dans le cas envisagé de la figure 1, une rupture localisée de la liaison entre la couche de zircone 16 et la sous-couche 12. La figure 3 illustre schématiquement un montage pouvant être utilisé pour l'application d'impulsions laser. Un échantillon ou une pièce à tester 20 ayant deux faces opposées 20a, 20b sensiblement parallèles avec un revêtement céramique (zircone) sur l'une des faces (20b) est supporté latéralement par un bâti de maintien 22. La face 20a opposée à celle représentant le revêtement est tournée vers le haut. Une plaque 24 présentant une ou plusieurs ouvertures 26 par exemple circulaires est posée sur la face 20a. De l'eau 28 est disposée sur la face 20a dans l'espace délimité par la ou chaque ouverture 26. Un laser 30 produit un rayonnement qui est focalisé en un faisceau illuminant une zone circulaire de la face 20a du substrat à travers une ouverture 26. L'eau 28 produit un confinement permettant une meilleure détente dans le matériau du plasma engendré par l'impulsion laser. Le rayonnement laser est focalisé sur une zone circulaire ayant par exemple un à quelques millimètres de diamètre. Le laser 30 délivre des impulsions ayant par exemple une enveloppe gaussienne (schématisée sur la figure 2) et une durée de quelques ns à quelques dizaines de ns. On utilise par exemple un laser de type Nd:YAG produisant un rayonnement de longueur d'onde de 1, 064 pm. Avantageusement, un dispositif permettant de mesurer et de faire varier l'énergie laser effectivement appliquée est prévu. Un tel dispositif comprend un miroir semi-transparent 32 qui divise le faisceau émis par le laser 30 en un faisceau réfléchi dirigé vers la face 20a et un faisceau non réfléchi reçu par un dispositif 34 à photodiode permettant de mesurer la puissance réelle du faisceau émis. Un polariseur rotatif 36 et une optique 38 sont disposés en série sur le trajet du faisceau réfléchi, entre le miroir 32 et la face 20a. Une variation de l'énergie appliquée sur la face 20a du substrat peut être commandée par action sur le polariseur rotatif 36 tandis que l'optique 38 assure la focalisation désirée du faisceau. La figure 4 montre la surface de la couche céramique présente sur la face 20b, après application d'impulsions laser d'énergies différentes en différents emplacements régulièrement répartis sur la face 20a, le rayonnement laser étant focalisé sur des zones circulaires de même diamètre, les énergies différentes correspondant à différentes densités de puissance laser obtenues par commande du polariseur 36. On constate l'apparition de taches claires (blanchâtres) de diamètres différents en des emplacements sur la face 20b correspondant à certains des emplacements d'application d'impulsions laser sur la face 20a. Il a été vérifié par examen de coupes métallographiques que les taches traduisent une zone de décollement de la couche de revêtement en zircone.
En l'absence de décollement de la couche de zircone, celle-ci, qui est transparente, laisse voir la couche sous-jacente de couleur grise.
Aucune tache claire n'est alors visible comme à l'emplacement I sur la figure 4 qui correspond à un emplacement sur la face opposée 20a où l'énergie laser appliquée a été insuffisante pour provoquer le décollement local de la couche de zircone.
Lorsqu'un décollement de la couche de zircone a été produit, une couche d'air est alors présente sous la partie décollée de la couche de zircone, ce qui se traduit par une tache claire (comme à l'emplacement II de la figure 4). Le diamètre de celle-ci représente l'ampleur de la partie décollée. On notera que la structure colonnaire de la couche de zircone favorise la visualisation du décollement par conduction de la lumière. La taille de la tache claire varie en fonction de la densité de puissance laser appliquée alors que la "tache" focale du rayonnement laser appliqué reste inchangée. Plus la densité de puissance est élevée, plus le diamètre de la tache est grand. Après sa propagation, l'onde de choc produite par l'application du rayonnement laser est atténuée spatialement et la traction générée à l'interface avec la couche de zircone l'est également. La traction présente donc une amplitude maximale au centre de la tache focale et décroît continûment de part et d'autre de ce centre. Pour des densités de puissance laser élevées, la contrainte de traction peut être supérieure au seuil d'adhérence de la couche de zircone sur toute la surface correspondant à la tache focale du rayonnement laser appliqué, voire même au-delà de la surface de la tache focale, l'onde de choc se propageant aussi latéralement. Par contre, pour des densités de puissance plus faibles, la contrainte de traction peut excéder le seuil d'adhérence uniquement dans la partie centrale de la tache focale de sorte que la tache claire observée à la surface du revêtement zircone peut être plus réduite que la tache focale. La figure 5 montre la variation de la contrainte de traction à l'interface avec la couche de revêtement en fonction de la distance au centre de la tache focale, pour une énergie laser relativement élevée ("forte" densité de puissance) et une énergie laser moins élevée ("faible" densité de puissance), l'énergie étant suffisante dans les deux cas pour provoquer un décollement de la couche de revêtement zircone. Sur la figure 5, on a mis en relation le niveau maximum de contrainte de traction avec le contour (en pointillés) de la tache claire observée. La valeur de contrainte de traction pour le bord de la tache peut être considérée comme représentant le seuil d'adhérence de la couche de revêtement zircone. Ainsi, par un test destructif sur un échantillon ou une pièce, il est possible de déterminer un seuil d'adhérence d'un revêtement par mesure du diamètre d'une tache claire traduisant un décollement provoqué par impact de rayonnement laser. On peut aussi, après corrélation expérimentale entre une énergie laser appliquée et un seuil d'adhérence d'un revêtement formé par un procédé donné, effectuer des tests non destructifs par application sur des pièces d'énergie laser d'un niveau déterminé en fonction de celui correspondant au seuil d'adhérence. La corrélation expérimentale entre niveau d'énergie laser et seuil d'adhérence peut être effectuée par analyse de la taille d'une tache observée (comme décrit en référence à la figure 5) ou par balayage d'un ensemble de niveaux d'énergie différents et détermination de la limite d'apparition de tache claire, comme illustré par la figure 4. On notera qu'il est préférable de réaliser le test d'un échantillon ou d'une pièce après une phase de vieillissement par exposition à un milieu oxydant à température élevée, par exemple après plusieurs heures à une température comprise entre 1 000°C et 1 200°C sous air, afin d'avoir des résultats représentatifs du comportement du matériau dans ses conditions d'utilisation et d'être plus discriminant en comparaison avec un revêtement neuf. Dans ce qui précède, on a envisagé une détermination d'une zone de décollement d'une couche de revêtement en zircone par 25 observation d'une tache claire à la surface du revêtement. Dans les cas où, comme illustré par la figure 1, la couche de revêtement céramique adhère au substrat par l'intermédiaire d'une couche d'alumine 14, une représentation des contraintes dans la couche d'oxyde, donc une représentation de zones possibles de décollement entre la 30 couche d'oxyde et la couche de revêtement céramique, peut être obtenue par piézospectroscopie. Un tel procédé de mesure de contraintes dans une couche d'alumine telle que celle de la figure 1 est décrit dans la publication de D.M. Liptein et D.R. Clarke intitulée "Measurement of the Stress in Oxide 35 Scales Formed by Oxidation of Alumina-Forming Alloys" Oxidation of Metals, Vol. 45, Nos 3/4, 1996, p. 267-280.
Comme le montre la figure 6, un échantillon 40 ayant une structure telle que celle de la figure 1 et susceptible de présenter des décollements de la couche de revêtement zircone après avoir été soumis à des impacts de rayonnement laser est illuminé par un faisceau laser afin de générer une fluorescence par la présence de chrome dans la couche d'alumine a. Une introduction de chrome dans la couche d'alumine n'est en général pas nécessaire car il y a pratiquement toujours une très faible contamination d'ions chrome dans l'alumine. Le rayonnement laser d'excitation est produit par exemple par un laser 42 de type Argon-Ion ayant une longueur d'onde 514,5 nm. Le rayonnement est focalisé sur l'échantillon 40, du côté du revêtement céramique et la fluorescence produite est recueillie sur un spectromètre 44 à travers un objectif. L'analyse des spectres obtenus permet de différencier entre des zones de la couche d'alumine sous contrainte (pas de décollement de la couche de revêtement zircone) et des zones de la couche d'alumine non contrainte (décollement de la couche de revêtement zircone), donc d'avoir des images de zones de décollement, lesquelles images peuvent être exploitées comme décrit plus haut. Concernant ce procédé par piézospectroscopie, on pourra aussi se référer à un article de S. Margueron et F. Lepoutre intitulé "Détermination des contraintes résiduelles par piézospectroscopie dans les couches d'alumine à l'interface des barrières thermiques" paru dans Journal de Physique 2003, Vol. 106, p. 161-172.