Procédé de préparation d'acides mono- et dicarboxyliques
Des procédés de production des acides carboxyliques par ozonolyse d'un acide gras non saturé suivie de décomposition par oxydation des ozonides sont connus et en particulier le brevet allemand No 565158 décrit un procédé dans lequel l'ozonolyse et l'oxydation simultanées à températures élevées d'acides gras non saturés donnent des acides monoet dicarboxyliques sans consommation excessive d'ozone. Selon ce brevet allemand, on utilise des températures allant jusqu'à 1500 C.
Le brevet britannique No 741739 décrit un procédé en deux stades, selon lequel on ozonise d'abord un nitrile non saturé, puis on décompose et on oxyde les ozonides à l'aide d'eau et d'oxygène moléculaire.
Le brevet australien No 165032 indique que la présence d'eau au cours de l'ozonolyse dans ces réactions est indésirable et qu'elle ne doit pas dépas- ser5 à 10%.
La pratique généralement établie est d'éviter la présence d'eau dans les réactions d'ozonolyse. On a avancé diverses théories à l'appui de cette pratique.
Nombre de publications allèguent que la présence d'eau au cours de l'ozonolyse cause la formation de produits finals indésirables. En voici des exemples pertinents.
1. Certains ozonides peuvent se décompenser de deux manières par suite de la présence ou de l'absence d'eau. Cf. Briner, Helv. Chim. Acta, 21, p. 748 (1938).
2. Les ozonides contenant de l'oxygène dans d'autres parties de la molécule réagissent facilement dans presque tous les cas, mme avec l'eau glacée.
Cf. Long, Chem. Rev. 27, p. 3 (1940).
3. Les ozonides de poids moléculaires relativement élevés sont connus pour se résinifier quand on les chauffe avec de l'eau. Ibid.
4. Les ozonides des cétones et des aldéhydes non saturés peuvent tre décomposés de manière continue après formation par envoi d'un courant d'air humide dans la solution ozonisée. Cf. Strauss, Ann., 393, p. 235 (1912).
5. Harries, Ar5n. 374, p. 288 (1910) a proposé un mécanisme de décomposition des ozonides commençant en présence d'eau.
D'une manière tout à fait inattendue, il a été découvert que la présence d'eau dans l'ozonolyse des acides gras non saturés, comme l'acide oléique, l'acide linoléique, l'acide érucique et leurs mélanges, ne nuisait pas au rendement en acides carboxyliques obtenus à partir de ces ozonides.
I1 a été découvert en outre, et ceci était également inattendu, que si l'ozonolyse de l'acide gras non saturé est effectuée à des températures de l'ordre de O à 490 C et de préférence de 30 à 460 C en présence d'eau sans refroidissement extérieur et si ensuite les ozonides sont oxydés à des températures supérieures, au-dessus de 1000 C, et jusqu'à 1500 C, en présence d'eau et d'ozone, on obtenait une augmentation très nette des rendements en acides de l'ordre de 15 à 20 %.
Il se dégage beaucoup de chaleur dans l'ozone lyse des composés non saturés. Il a été établi en particulier pour ce qui concerne le présent type de réaction qu'il se dégage environ 110kg/cal par molécule de non-saturation. Cf. Briner et autres,
Helv. Chim. Acta, 21, p. 357-363 (1938). Jusqu'ici, il fallait de grands efforts pour assurer le refroidissement extérieur approprié des réactions de l'ozone avec les composés non saturés. On a utilisé les dispositifs de refroidissement bien connus dans les techniques chimiques industrielles. Dans le procédé selon l'invention, le refroidissement nécessaire est interne et assuré par l'eau mélangée avec les réactifs.
La présente invention a pour objet un procédé nouveau de préparation d'acides mono- et di-carboxyliques à partir d'acides gras non saturés comme les acides oléiques, linoléiques, éruciques et leurs mélanges au sein d'un solvant.
Le procédé selon l'invention est caractérisé en ce que l'on ozonise, entre 0 et 490, les acides gras non saturés en présence d'une quantité d'eau comprise entre une et six fois le poids des acides gras non saturés et du solvant, sans refroidissement extérieur, on soumet les ozonides ainsi obtenus à une décomposition oxydante entre 100 et 1500 C en présence d'eau, puis on extrait les acides produits.
L'opération d'ozonolyse est généralement effectuée en faisant passer un mélange d'oxygène et d'ozone ou d'air et d'ozone dans l'oléfine, de préférence à basses températures, en présence d'eau.
L'acide gras non saturé est usuellement dissous dans un solvant inerte. L'ozonide ainsi obtenu n'est pas isolé et est utilisé directement dans l'opération de décomposition oxydante. Pour effectuer l'opération de décomposition par oxydation, on procède généralement de la manière suivante: on ajoute de l'oxygène, de l'air ou un agent chimique oxydant approprié à l'ozonide avec de l'eau additionnelle si nécessaire et à température élevée, en utilisant un catalyseur d'oxydation qui peut tre de l'eau, de l'ozone, ou les deux.
Quand l'ozonolyse est effectuée à des températures de l'ordre préféré de 30 à 460 C environ, en présence d'eau et sans refroidissement extérieur, et la décomposition oxydante de l'ozonide est effectuée à des températures plus élevées allant jusqu'à 1500 C, on obtient une augmentation inattendue de la quantité d'acides produits, comme on le verra plus compIètement dans la suite.
Les résultats expérimentaux figurant au tableau I de l'exemple montrent que le rendement en diacide n'est pas affecté de manière nuisible par la présence de l'eau dans l'opération d'ozonolyse. Quand l'eau est présente en quantité égale au produit non saturé et au solvant, on obtient une certaine augmentation de rendement. Quand le poids de l'eau est de 5 à 6 fois le poids du composé non saturé et du solvant au cours de l'ozonolyse, le rendement ne diminue que de 3 à 4 %. Ces pertes sont probablement causées par les volumes relativement grands manipulés à l'échelle du laboratoire et ne seraient probablement pas éprouvées à l'échelle industrielle.
Le tableau I montre également que l'on doit assurer un refroidissement extérieur pour maintenir la température du réacteur à 30O C quand la teneur en eau est de 20 % ou moins. Toutefois, quand la proportion d'eau atteint environ 100 à 600 %, aucun refroidissement extérieur n'est nécessaire et la température du réacteur ne dépasse pas 460 C.
Exemple:
Tableau I
Ozonisation de l'acide gras du tall oil en acide caproïque
Nombre Eau * en Température Rendement du d'essais poids O/o maximum rend. théorique
réacteur, C C en diacide
3 0 30 76,3
2 10 30 77,3
3 20 30 77,3
1 95 46 *+ 78,6
1 570 40** 73,3
* Teneur en eau rapportée à la somme composé non
saturé + solvant.
Pas de refroidissement extérieur.
Selon un mode de mise en oeuvre du procédé selon l'invention, on soumet à l'ozonisation des acides gras non saturés du tall oil comprenant des proportions sensiblement égales d'acides oléique et linoléique à des températures contrôlées de l'ordre de 15 à 300 C en présence d'eau, et cette réaction peut tre exprimée par les équations suivantes
EMI2.1
<tb> <SEP> CH5(CH2)7CH <SEP> = <SEP> CH(CH2)7COOH <SEP> + <SEP> Oo <SEP> acide <SEP> oléique
<tb> <SEP> 00
<tb> <SEP> CH3 <SEP> (CH2)7 <SEP> CH <SEP> CH(CH2)7COOH
<tb> <SEP> O
<tb> <SEP> H20
<tb> CH5(CH2)4CH <SEP> = <SEP> CHCH2CH <SEP> = <SEP> CH(CH2)7COOH <SEP> + <SEP> > <SEP> Ho <SEP> acide <SEP> linoléique
<tb> <SEP> 00 <SEP> 00
<tb> <SEP> CH3(CH2)4CH <SEP> CHCH2CH <SEP> CH(CH2)7COOH
<tb> <SEP> O <SEP> o
<tb>
Ces ozonides sont alors soumis à la décomposition oxydante en présence d'eau,
selon les équations:
EMI2.2
EMI3.1
<tb> <SEP> CH3(CH2)7COOH <SEP> + <SEP> COOH(CH2)7COOH
<tb> <SEP> acide <SEP> pargonique <SEP> acide <SEP> azélaique
<tb> <SEP> 00 <SEP> 00
<tb> <SEP> H20
<tb> CH3(CH2)4CH <SEP> CHCH-CH\ <SEP> CH(CH2)7COOH <SEP> + <SEP> 2 <SEP> l/2 <SEP> 02
<tb> <SEP> o <SEP> o
<tb> <SEP> CHs(CH2)4COOH <SEP> + <SEP> COOH(CH2)7COOH <SEP> + <SEP> C02 <SEP> + <SEP> H20
<tb> <SEP> acide <SEP> caproique <SEP> acide <SEP> azéläïque
<tb>
La quantité d'acide malonique formée est faible ou nulle, bien qu'on eût pu s'attendre à ce qu'il s'en formât, et la disposition de la liaison à trois carbones entre les deux groupes ozoniques est par conséquent inconnue.
Plus spécialement, dans le procédé décrit cidessus, on place 56 g (0,2mol, soit 0,3 équivalent de double liaison) des acides gras non saturés du tall oil en solution dans 60 g d'acide caproique dans un récipient cylindrique en verre à fond en verre fritté et relié au sommet à un condenseur, un dispositif d'absorption contenant 100ml de solution aqueuse d'iodure de potassium à 5 % et un dispositif de dosage d'humidité en série. On ajoute des quantités calculées d'eau jusqu'à 600 % en poids des réactifs et du solvant de manière que la réaction dans l'appareil en verre soit effectuée à une température réglée dans la gamme préférée, soit 30 à 460 C, sans refroidissement extérieur.
On effectue l'ozonolyse en admettant un courant d'oxygène contenant environ 1 à 6 % en poids d'ozone dans l'appareil en verre par la plaque frittée selon un débit d'environ 1,4 litre par minute pendant environ trois heures et jusqu'à ce que la solution iodée d'essai vire au brun, ce qui indique la présence d'ozone et sensiblement le terme de la réaction.
On réduit alors la concentration en ozone de /lo à 3/l0 % sans interrompre le courant d'oxygène qui peut tre réduit à 0,283 1 par minute et on poursuit l'oxydation des ozonides dans le récipient en verre pendant environ trois heures et demie. Au cours de cette oxydation, la température dans la récipient réactionnel en verre doit tre portée à environ 100-I 100 C au moyen de serpentins chauffants entourant le récipient.
L'opération d'oxydation terminée, on refroidit le mélange présent dans le récipient de verre et on le transfère dans un ballon à distiller où on le distille sous 15-20 mm de mercure. On recueille 81,5 g d'une fraction de monoacides distillant à 60-1600 C principalement formés d'acides caproique et pélargonique.
On fait alors bouillir le résidu de la distillation et on sépare la couche aqueuse ainsi obtenue de la couche huileuse. La solution aqueuse refroidie dépose de l'acide azélaique presque pur, dont l'équivalent de neutralisation est de 95-96. On extrait également de l'acide azélaique de la couche huileuse et le rendement total en acide azélaique presque pur est d'environ 70 %. On peut isoler une qualité inférieure d'acide azélaique se montant à environ 10 à 15 % des liqueurs mères. Le rendement en acide azélaique presque pur obtenu dans oe mode de mise en oeuvre de l'invention montre une amélioration d'environ 15 % par rapport aux anciens procédés connus et en particulier celui du brevet allemand.
On peut utiliser avantageusement des oxydants autres que l'air dans ce procédé comme le montre le tableau Il:
Tableau II
Oxydation des ozonides des acides du tall oil
Comparaison de divers oxydants
Oxydant Rendement 0/o ::' Moyenne
Air seul 70
68 69 Air03 74
70 72
72 2 seulement 70 ** 70 o2-o3 * * * 75
75 75
75
75
* t/so à '/nn O/o en poids : " meilleure opération
rapporté à la quantité théorique de diacide pouvant
tre obtenu.
Le tableau II montre que la présence d'ozone dans des proportions de 'Inn à S/o % en poids dans le gaz oxydant améliore le rendement en diacide.
Pour comparer le procédé selon l'invention, plus spécialement avec le procédé du brevet allemand, on applique ce dernier procédé à un mélange d'acide oléique, d'eau et d'acide acétique qu'on a ozonisé à 600 C avec un rendement de 60 % en acide azélaI- que de haute qualité. On a alors traité un mélange identique selon le procédé de l'invention et on l'a ozonisé à 250 C en présence d'eau jusqu'à addition d'une molécule d'ozone par molécule de non-saturation. On a alors élevé la température dans l'opération de décomposition oxydante et on a terminé la réaction de la manière décrite dans le brevet allemand à nouveau en présence d'eau. On a obtenu un rendement en acide azelaïque de haute qualité de 70%.
On applique le mme processus que ci-dessus en utilisant des acides gras de tall oil, de l'acide capröïque et de l'eau que l'on a ozonisés à 700 C selon le brevet allemand, ce qui donne un rendement de 63 % d'acide azélaique de haute qualité. On traite un mélange identique à 900 C selon le brevet allemand et on obtient un rendement de 34,4 % en acide azélaique de haute qualité. On traite alors un mélange identique conformément au procédé selon l'invention avec ozonisation à 200 C en présence d'eau jusqu'à addition d'une molécule d'ozone par molécule de non-saturation.
On élève ensuite la température dans la gamme indiquée par le brevet allemand au cours de l'opération de décomposition oxydante et on termine la réaction en présence d'eau; on obtient un rendement de 70,5 % en poids d'acide azélaique de haute qualité.