COMPOSITION UTILE POUR LA PREPARATION D'UN BETON SANS AJOUT
D'EAU
La présente invention a pour objet une composition permettant la préparation d'un mortier ou d'un béton liquide sans ajout d'eau, un procédé pour la préparation de ladite composition et un kit comprenant cette composition.
Le béton est un matériau couramment utilisé pour la réalisation d'ouvrage d'art et de diverses constructions. En effet, il s'agit d'un produit qui présente deux états successifs : une phase plastique ou fluide permettant de le mettre en œuvre par moulage, puis une phase de durcissement et de montée en résistances qui lui permet d'atteindre ses performances mécaniques d'usage.
Le béton est couramment constitué d'un liant hydraulique, de granulats, d'eau et d'éventuels adjuvants. L'eau participe aux deux phases successives de la vie du béton. Elle contribue à l'obtention de la phase plastique ou fluide en constituant une pâte avec le liant hydraulique et participe par la suite aux mécanismes de prise qui conduisent aux qualités d'usage du béton.
Les mécanismes de prise d'un liant hydraulique dépendent de la nature de celui-ci. D'une manière générale, la prise procède d'une succession de réactions de solubilisation et de précipitations de nouvelles espèces chimiques. Ces nouvelles espèces chimiques, essentiellement des cristaux, croissent et coalescent de telle manière qu'elles assurent par leur enchevêtrement une continuité de la matière conduisant à sa rigidifîcation. Cet enchaînement de réactions est communément appelé hydratation.
Les bétons sont réalisés couramment en utilisant des ciments comme liants hydrauliques. La nature de ces ciments ne remet pas en cause les principes généraux décrits ci-dessus mais conditionne les règles de formulation et notamment la quantité d'eau.
La quantité d'eau rentrant dans la composition d'un béton hydraulique joue un rôle crucial dans la qualité du béton finalement préparé. En effet, les résistances mécaniques finales du béton son conditionnées par les quantités relatives de liant hydraulique et d'eau. D'une manière générale, plus le rapport eau sur liant est faible plus les résistances finales sont élevées. Ce rapport est habituellement noté E/C (rapport massique eau sur
ciment). Pour un ciment portland de type CEM I suivant la norme EN 197-1, il est usuel de l'utiliser dans des compositions cimentaires dont le rapport E/C est compris entre 0,35 et 0,65.
Les besoins stœchiométriques en eau relatifs à la prise sont inférieurs aux besoins nécessaires à l'obtention d'une consistance propre à la mise en œuvre du matériau. Ainsi, il est usuellement constaté que l'hydratation totale d'un CEM I requiert un E/C supérieur ou égal à 0,2. L'eau en excès permet d'obtenir des mortiers ou béton suffisamment plastiques voire fluides pour être mis en œuvre.
En conséquence, la quantité d'eau participant à la formulation d'une composition cimentaire de type béton, mortier ou autre joue un rôle important pour la qualité finale de ceux-ci.
Si l'eau est en excès, les caractéristiques mécaniques finales seront en retrait de ce que l'on peut attendre. En particulier, la résistance du produit finalement préparé sera plus faible, sa porosité augmentera ce qui le rendra plus sensible aux agressions chimiques extérieures, et, à l'état frais, des phénomènes de ségrégation statique et dynamique seront observés.
De plus, la qualité de l'eau utilisée peut aussi avoir un impact sur les performances du produit. Ceci est particulièrement important dans les lieux ou les ressources en eau sont limitées.
II y a donc une nécessité de mettre à disposition des utilisateurs un mortier ou un béton qui puisse être préparé facilement, sans risque qu'un excès d'eau nuisible à la qualité finale du béton ou qu'une eau de mauvaise qualité soit utilisée
Les polymères dits « superabsorbants » sont connus pour leur capacité à capter l'eau et à la retenir. La demande de brevet EP-A-0338739 décrit l'utilisation d'eau piégée dans un superabsorbant en vu d'être ajoutée à un mélange de granulat pour préparer des mortiers ou des bétons à faible ratio eau sur ciment (E/C). L'ajout d'eau piégée dans un superabsorbant est présenté comme remédiant à la difficulté de malaxage des mortiers ou bétons ainsi préparés ou comme permettant un contrôle de la température ou encore un
contrôle de la perte d'ouvrabilité des mortiers et bétons lors de la phase plastique. Ce document ne fait aucune mention de la problématique à l'origine de la présente invention.
Dans Water-entrained cement-based materials, Cernent and concrète 2001, vol.31, n°4, pp.647-654 , JENSEN Ole Mejlhede et al. rapportent l'utilisation de polymères superabsorbant est décrite comme un moyen de garder l'eau à l'intérieur d'un composition cimentaire dans le but de limiter la dessiccation.
Enfin, dans Autogenous Shrinkage of Concrète with Super-Absorbent Polymer ACI materials journal, 2009, vol.106, n°2, pp.123-127, WANG Fazhou et al. rapportent l'utilisation d'un polymère superabsorbant pour réduire le retrait des ciments. Cependant la dégradation des performances mécaniques des ciments ainsi préparés est également rapportée par les auteurs.
Or, il a maintenant été trouvé de façon toute à fait surprenant une composition permettant la préparation de béton ou de mortier sans ajout d'eau, apportant ainsi une solution satisfaisante aux problèmes techniques mentionnés ci-dessus, sans dégrader les performances des matériaux finalement obtenus. Grâce à cette composition, l'utilisateur final n'aura en effet pas à se préoccuper de la qualité et/ou de la quantité d'eau nécessaire à la préparation du mortier ou du béton.
Ainsi, la présente invention a pour objet une composition sous forme de solide divisé comprenant :
- un mélange de granulats ; - un superabsorbant ; et
- de l'eau.
La composition selon l'invention permet en effet, par l'ajout d'un mélange sous forme de poudre de ciment et d'adjuvants, et sans ajout d'eau, de préparer un mortier ou béton liquide. Il a en effet été observé de façon toute à fait surprenante que l'eau comprise dans la composition selon l'invention rentrait dans les sphères de superabsorbant et y restait de manière stable jusqu'à ce qu'elle soit libérée au contact avec le mélange de ciment et d'adjuvants, donnant ainsi sa plasticité au béton.
Dans le cadre de la présente invention on entend par « mélange de granulats » un mélange de granulats naturels ou artificiels de classe granulaire différente dont les proportions relatives permettent la réalisation de béton ou de mortier conformément aux règles de formulation connues de l'homme de l'art. Les granulats et les termes utilisés sont décrits par la norme NF EN 12620+Al :2008-06. Préférentiellement, le mélange de granulats comprend du sable, du gravillon et du gravier et peut contenir éventuellement de la fine. Les différentes classes granulaires peuvent être de type roulé, semi-concassé ou concassé de toutes natures pétrographiques. De préférence les granulats de type silico- calcaire permettent une réalisation avantageuse de l'invention.
De plus, dans le cadre de la présente invention, on entend par « superabsorbant » tout polymère réticulé capable d'absorber jusqu'à 1000 fois sa masse d'eau. Les polymères de type superabsorbant sont habituellement utilisés dans le domaine de l'hygiène corporel. Ils sont essentiellement constitués de longues chaines hydrophiles réticulées leur conférant une forte affinité pour l'eau tout en étant insolubles du fait de leur structure tridimensionnelle. Cette particularité leur permet de se gonfler d'eau tout en ne se dispersant pas dedans. A titre d'exemple de tels polymères, on peut citer les copolymères d'acide acrylique et d'acrylate de sodium réticulés, les alcools polyvinyliques, les produits greffés à base de polysaccharides naturels, naturels modifiés ou synthétiques. Préférentiellement, on peut citer les copolymères d'acide acrylique et d'acrylate de sodium réticulés qui permettent d'atteindre des taux de d'absorption d'eau très élevés.
Enfin, dans le cadre de la présente invention, les proportions exprimées en % correspondent à des pourcentages massiques par rapport au poids total de la composition considérée.
Préférentiellement, la composition selon l'invention comprend :
- de 80 à 95 % d'un mélange de granulats ; de 0,005 à 1 % de superabsorbant ; et - de 1 à 20 % d'eau.
Préférentiellement encore, la composition selon l'invention comprend : de 85 à 93 % d'un mélange de granulats ;
- de 0,01 à 0,5 % de superabsorbant ; et - de 5 à 10 % d'eau.
Préférentiellement encore, la composition selon l'invention est exempte de tout adjuvant. Dans le cadre de la présente invention, on entend par adjuvant toute substance chimique ou un mélange de substance chimique propre à modifier les performances du mortier ou du béton à l'état frais ou à l'état durci.
La présente invention a également pour objet un procédé de préparation de la composition telle que décrite précédemment, comprenant les étapes suivantes :
- malaxage à sec des granulats et des billes de superabsorbant ; - introduction de l'eau de gâchage ; et malaxage jusqu'à l'obtention d'un mélange homogène sous forme de solide divisé.
La présente invention concerne également les différents produits préparés à partir de la composition, en particulier les bétons et les mortiers. Ainsi, la présente invention a également pour objet un béton ou un mortier comprenant la composition selon l'invention.
La présente invention a également pour objet un kit utile pour la préparation d'un béton ou d'un mortier sans ajout d'eau, ledit kit comprenant :
- une composition sous forme de solide divisé selon l'invention ;
- un mélange sous forme de poudre de ciment et d'un ou plusieurs adjuvants.
Dans le cadre de la présente invention, les ciments utilisés sont de la famille des ciments Portland, des ciments d'aluminate de calcium, des ciments sulfoalumineux et les ciments prompts naturels.
Préférentiellement, les adjuvants utilisés dans le kit sont choisis parmi les substances chimiques ou un mélange de substances chimiques propres à modifier les performances du mortier ou du béton à l'état frais ou à l'état durci. Ils sont généralement constitués de molécules organiques ou inorganiques sous forme de sels ou non. Ils peuvent être des polymères hydrosolubles ou non, fonctionnalisés ou non. Préférentiellement encore, les adjuvants utilisés dans le kit sont choisis parmi produits décrits dans la norme EN 934-2 définissant les adjuvants pour mortiers et bétons. De préférence, les adjuvants utilisés seront choisis parmi les superplastifiants ou hauts réducteurs d' eau de type
polycarboxylates, polymélamines sulfonées, les lignosulfonates et les polynaphtalènesulfonates.
Les adjuvants utilisés dans le kit sont sous forme de poudre (pas en solution dans l'eau) afin de pouvoir être mélangés au ciment sans provoquer de réactions d'hydratation.
De façon préférée, le kit selon l'invention se présente sous la forme d'un sac avec deux compartiments : le premier compartiment scellé hermétiquement contenant la composition selon l'invention et est ; et le second compartiment contient un mélange sous forme de poudre de ciment et d'un ou plusieurs adjuvants.
Un tel sac peut par exemple être préparé de la manière suivante : - malaxage à sec des granulats et des billes de superabsorbant ;
- introduction de l'eau de gâchage ; malaxage jusqu'à l'obtention d'un mélange homogène ; introduction du mélange dans le premier compartiment du sac et sceller hermétiquement pour éviter toute évaporation de l'eau ; et - introduction du ciment et éventuellement des adjuvants en poudre dans le deuxième compartiment et sceller hermétiquement.
Enfin, la présente invention concerne également les différents produits préparés à partir du kit décrit précédemment, en particulier les bétons et les mortiers. Ainsi, la présente invention a également pour objet l'utilisation du kit décrit précédemment pour préparer un béton ou un mortier.
La présente invention peut être illustrée de façon non limitative par les exemples suivants.
Exemple 1
Trois bétons de classe C30/37 XFl S2 Dl 1 selon la norme EN206-1 ont été réalisés à partir de kits contenant les constituants suivants :
La composition contenu dans le compartiment A du Kit référence ne contient pas de superabsorbant. Un ajout d'eau est nécessaire à la préparation du béton à partir de ce kit. Ce kit référence permettra de mesurer l'impact du superabsorbant sur les performances à l'état frais et à l'état durci du béton finalement préparé.
Les kits 1 et 2 sont réalisés conformément à l'invention. Aucun ajout d'eau n'est nécessaire à la préparation du béton à partir de ces kits. Ils sont réalisé en deux compartiments scellés.
Les compositions introduites dans le compartiment A se présente sous la forme d'un solide divisé obtenu en mélangeant puis en malaxant le granulat (sable 0/4 et gravier 4/11), le super absorbant de type polyacrylate de sodium réticulé de dénomination commerciale NORSOCRYL D60 de la société ARKEMA et l'eau.
Dans le compartiment B on introduit un mélange de ciment (CEM II/ A LL 42,5 R VICAT MONTALIEU) et de superplastifiant en poudre de type polycarboxylate de dénomination commerciale PERAMIN LP 170 de la société PERAMIN SA.
Les compartiments sont des poches scellées et étanches en matière plastique permettant la conservation des deux mélanges : garder l'eau dans le compartiment A et maintenir le ciment au sec dans le compartiment B.
Pour chaque essai, les deux poches sont ouvertes et leur contenu mélangé.
Après quelques instants, le mélange des deux matériaux pulvérulents se transforme en un béton plastique dont les performances à l'état frais et à l'état durci ont été mesurées. Les résultats obtenus sont rassemblées dans le tableau suivant :
Les essais de mesure d'affaissement réalisés suivant la norme EN12350-2 permettent de caractériser la consistance du béton. Plus la valeur est élevée plus le béton est plastique voire fluide.
Les essais de mesure de la masse volumique suivant la norme EN12350-6 permettent de caractériser la qualité globale du m béton à l'état frai.
De même, la mesure de l'air occlus suivant la norme EN 12350-7 permet de vérifier la quantité d'air entraîné dans la formulation du béton lors du malaxage. Plus la valeur d'air occlus est élevée, plus les résistances mécaniques à terme du béton seront amoindries. Par contre, l'air occlus peut permettre de formuler des bétons résistants au gel. La résistance à la compression (Rc) et la résistance au fendage (Rf) mesurées suivant la norme EN12390-3 permettent de caractériser les performances mécaniques du béton à cours, moyen et long terme (2, 7 et 28 jours).
Le retrait, mesuré suivant la norme NFP 18427, permet de caractériser la contraction du mortier ou du béton pendant la prise et la montée en résistance.
Ainsi, on note que le superabsorbant augmente la consistance du béton (essai d'affaissement), et n'a pas d'influence significative sur les autres essais à l'état frais : la masse volumique et l'air occlus.
A l'état durci, on note une légère perte de performance en ce qui concerne les résistances à la compression sans dégradation des autres performances. Cette perte peut être compensée par un léger surdosage en ciment.
Exemple 2
Trois mortiers ont été réalisés à partir de kits contenant les constituants suivants
La composition contenu dans le compartiment A du kit de référence ne contient pas de superabsorbant. Un ajout d'eau est nécessaire à la préparation du mortier à partir de ce kit. Ce kit référence permettra de mesurer l'impact du superabsorbant sur les performances à l'état frais et à l'état durci du béton finalement préparé.
Les kits 1 et 2 ont été préparés comme les kits de l'exemple 1.
Pour chaque essai, les deux poches sont ouvertes et leur contenu mélangé.
Après quelques instants, le mélange des deux matériaux pulvérulents se transforme en un mortier plastique dont les performances à l'état frais et à l'état durci sont rassemblées dans le tableau suivant :
On note que le superabsorbant augmente la consistance du béton (essai d'affaissement), et n'a pas d'influence significative sur les autres essais à l'état frais : la masse volumique et l'air occlus.
A l'état durci, on note une légère perte de performance en ce qui concerne les résistances à la compression sans dégradation des autres performances. Cette perte peut être compensée par un léger surdosage en ciment.
Exemple 3
Quatre bétons de classe C30/37 S4 D22,4 selon la norme EN206-1 ont été réalisés à partir de kits contenant les constituants suivants : :
La composition contenu dans le compartiment A du kit de référence ne contient pas de superabsorbant. Un ajout d'eau est nécessaire à la préparation du mortier à partir de ce kit. Ce kit référence permettra de mesurer l'impact du superabsorbant sur les performances à l'état frais et à l'état durci du béton finalement préparé.
Les kits 1, 2 et 3 ont été préparés comme les kits de l'exemple 1.
Pour chaque essai, les deux poches sont ouvertes et leur contenu mélangé.
Après quelques instants, le mélange des deux matériaux pulvérulents se transforme en un mortier plastique dont les performances à l'état frais et à l'état durci sont rassemblées dans le tableau suivant :
On note que l'utilisation d'un CEMI permet de garder une consistance stable malgré la quantité de superabsorbant rentrant dans la composition et que les performances à l'état durci ne sont pas affectées.