PROCEDE DE PRODUCTION D'UN PRODUIT INTERMEDIAIRE
DESTINE A LA PRODUCTION D1ETHANOL,
ET PRODUIT INTERMEDIAIRE OBTENU
La présente invention concerne un procédé de production d'un produit intermédiaire destiné à la production d'éthanol, à partir d'une matière première lignocellulosique.
L' invention couvre aussi le produit intermédiaire obtenu par ce procédé, et son utilisation pour produire de l'éthanol.
Depuis plusieurs années de nombreuses études ont été menées pour remplacer les sources d'énergie fossiles par des énergies renouvelables. En particulier la recherche s'est orientée vers la création de nouveaux carburants : les agrocarburants ou écocarburants. Un écocarburant est un carburant produit à partir de matériaux organiques renouvelables et non fossiles.
Il existe diverses techniques de production d'écocarburants notamment la production d'huile, d'alcool ou de carburants gazeux à partir de biomasse végétale ou animale, ou de déchets industriels ou de collectivités. Actuellement de nombreux agrocarburants sont développés sous forme d'éthanol à partir de fermentations des sucres issus de céréales, blé ou maïs, ou de betteraves.
Or, le développement de ces agrocarburants posent des problèmes importants, en particulier du fait qu'ils entrent en compétition directe avec les cultures alimentaires et que la capacité de production des matières premières est limitée
comparée aux quantités consommées très importantes de carburants. On estime que les besoins ne pourraient être satisfaits par cette filière qu'à 10% environ. Par contre, la quantité de composés lignocellulosiques disponible est très importante et représente un potentiel de 40% de la demande en carburants. Ces composés lignocellulosiques comprennent notamment le bois, les pailles, les végétaux issus de cultures dédiées ayant un fort taux de matière sèche, les coproduits de l'agriculture, les déchets végétaux collectés et les déchets industriels ou de collectivités. La biomasse lignocellulosique est composée essentiellement de polysaccharides de cellulose et d'hémicelluloses, fortement liés à un réseau de lignine par liaison covalente et liaison hydrogène.
La production d'éthanol à partir de composés lignocellulosiques s'effectue par hydrolyse de la cellulose en molécules de glucose, sucres simples qui sont ensuite fermentes en éthanol par voie de glycolyse. Elle nécessite un prétraitement pour rendre accessible la cellulose afin de faciliter son hydrolyse enzymatique.
Dans les procédés connus, la biomasse lignocellulosique est prétraitée chimiquement pour hydrolyser les hémicelluloses et rendre accessible la cellulose.
Généralement il s'agit d'un prétraitement par hydrolyse en milieu basique à chaud de la biomasse pour solubiliser les hémicelluloses et une partie de lignine, ou en milieu acide faible, chaud pour hydrolyser les hémicelluloses. Toutefois ces méthodes de prétraitement connus ne sont pas satisfaisantes en terme de rendement et nécessitent l'utilisation de produits concentrés. C'est pourquoi la présente invention se propose de pallier aux inconvénients de l'art antérieur en proposant un procédé efficace et économique de prétraitement d'une biomasse lignocellulosique en vue de sa transformation en éthanol.
A cet effet l'invention α pour objet un procédé de production d'un produit intermédiaire à partir d'une matière première lignocellulosique, destiné à la production d'éthanol, caractérisé en ce qu'il consiste à défibrer ladite matière première dans une extrudeuse à une température comprise entre 600C et 1800C et en présence d'une quantité d'eau représentant entre 200% et 450% de la masse de ladite matière première.
Préférentiellement le procédé selon l'invention consiste à défibrer la matière première lignocellulosique dans une extrudeuse à une température comprise entre 600C et 1800C, en présence d'une quantité d'eau représentant entre 200% et 450% de la masse de ladite matière première et en présence d'un acide fort ou d'une base forte faiblement concentrée par rapport à la quantité d'eau, à savoir à une concentration comprise entre 0,5% et 4% par rapport au volume d'eau. L'invention a également pour objet le produit intermédiaire obtenu par la mise en œuvr 'e de ce procédé.
Par produit intermédiaire au sens de la présente invention, on entend la biomasse obtenue après déf ibrage.
Avantageusement le procédé selon l'invention permet d'obtenir un produit intermédiaire qui permet d'augmenter d'un facteur 8 le rendement de l'hydrolyse enzymatique de la cellulose, et donc le rendement de production d'éthanol. L'invention est maintenant décrite en détail.
L'objet de l'invention est un procédé de prétraitement d'une biomasse lignocellulosique pour produire un produit intermédiaire destiné à être transformé en éthanol. Par matière première lignocellulosique ou biomasse lignocellulosique au sens de l'invention, on entend tout composé lignocellulosique, notamment :
- des fibres végétales nobles, par exemple le chanvre ou le lin,
- des cultures énergétiques, par exemple de miscanthus, panic érigé, saule, peuplier,
- des co-produits de l'agriculture, tels que des pailles de tout type (céréales, oléagineux, etc.), des sarments de vigne, des coques de graine, des capitules de tournesol, des rafles de maïs,
- des coproduits de la forêt, par exemple du bois déchiqueté,
- des produits connexes de l'industrie du bois, par exemple des sciures ou des écorces,
- des déchets industriels, par exemple du coton textile, du papier, des produits en fin de vie (palettes, traverses de voies, ferrées, etc.) ou des chutes de panneaux agglomérés.
Le procédé selon l'invention consiste à défibrer la matière première ou biomasse lignocellulosique dans une extrudeuse à une température comprise entre 600C et 1800C et en présence d'une quantité d'eau représentant entre 200% et 450% de la masse de ladite matière première.
Préférentiellement la matière première lignocellulosique est défibrée également en présence d'un acide fort ou d'une base forte à une concentration comprise entre 0,5% et 4% par rapport au volume d'eau.
Une extrudeuse est un dispositif composé principalement d'une ou plusieurs vis sans fin tournant à vitesse déterminée à l'intérieur d'un fourreau cylindrique régulé en température.
Préférentiellement, le procédé selon l'invention utilise une extrudeuse monovis ou bivis.
Une extrudeuse bivis est une extrudeuse constituée de deux vis coopérantes tournant dans le même sens et d'un fourreau enveloppant ces deux vis. Les deux vis sont identiques et sont composées de modules qui comprennent un élément de convoyage du matériau muni de fenêtres ou de fentes taillées dans les filets.
Avantageusement, l'extrudeuse permet en une seule étape de réaliser une ou plusieurs opération(s) notamment le déf ibrage de la biomasse lignocellulosique par la conjugaison des actions de compression et de cisaillement qui permet de séparer les fibres et de libérer la cellulose en la dégageant du réseau de lignine, et la solubilisation des hémicelluloses.
Selon l'invention la température de l'extrudeuse est comprise entre 600C et 1800C, préférentiellement entre 900C et 1200C, et encore plus préférentiellement entre 1000C et 1100C.
Par ailleurs la quantité d'eau utilisée dans l'extrudeuse est comprise entre 200% et 450% de la masse de ladite matière première lignocellulosique, préférentiellement entre 300% et 450%, encore plus préférentiellement entre 300% et 400% de la masse de la matière première lignocellulosique.
De même la quantité d'acide fort ou de base forte est comprise entre 0,5% et 4% par rapport au volume d'eau, préférentiellement entre 0,5 et 1,5%, encore plus préférentiellement entre 0,8% et 1,2%. Il peut s'agir par exemple de l'acide chlorhydrique, de l'acide sulfurique ou de l'hydroxyde de sodium. L'acide fort peut être minéral ou organique.
La conjugaison de ces paramètres, température, quantité d'eau et/ou quantité d'acide fort ou de base forte particulières, permet d'obtenir un produit intermédiaire lignocellulosique susceptible d'être hydrolyse asec un taux particulièrement élevé.
Un exemple de procédé particulièrement adapté selon l'invention comprend les étapes suivantes :
- mélanger la matière première lignocellulosique à une quantité d'eau représentant 200% de sa masse, préférentiellement en présence d'un acide fort
(acide sulfurique HzSO4) ou d'une base forte (hydroxyde de sodium NaOH) concentré(e) à 1% par rapport à la quantité d'eau,
- introduire ce mélange dans une extrudeuse à une température de déf ibrage comprise entre 600C et 1800C,
- ajouter une quantité d'eau représentant entre 0% et 200% de la masse de ladite matière première lignocellulosique, dans le fourreau de l'extrudeuse, durant la phase d'extrusion.
Des essais ont été effectues par mise en oeuvre de ce procédé en faisant varier les paramètres de température, de quantité d'eau et la présence ou non d'un acide fort ou d'une base forte.
Deux grammes du produit intermédiaire obtenu ont ensuite été hydrolyses dans 5OmL par 5mL de celluloses (Trichoderma longibrachiatum) à pH 5 et 500C. Les résultats obtenus sont présentés dans le tableau ci-dessous :
On constate que pour le domaine de valeurs en quantité d'eau, en température et/ou en concentration en acide fort ou base forte selon l'invention, le rendement en hydrolyse est très fortement augmenté.
Les conditions optimisées du procédé selon l'invention sont une température d'extrusion de 1050C et une quantité d'eau de 300% (200% en mélange préalable la biomasse et 100% directement dans le fourreau de l'extrudeuse).
La mise en oeuvre du procédé selon l'invention dans ces conditions peut permettre d'augmenter d'un facteur 8 le rendement de l'hydrolyse enzymatique de la biomasse traitée.
Selon l'invention, tout matériau lignocellulosique peut être utilisé. Une variante particulièrement adaptée consiste à utiliser comme matière première du coton textile recyclé, en particulier du coton textile recyclé composé d'au moins 90% de cellulose qui permet d'augmenter encore les rendements. Un coton textile recyclé composé à 92-93% de cellulose, traité par la mise en oeuvre du procédé selon l'invention à 1050C et une quantité d'eau de 300%, permet d'obtenir un gain d'hydrolyse de 23%.
Selon un autre aspect, l'invention concerne le produit intermédiaire obtenu par la mise en oeuvre du procédé selon l'invention.
Il s'agit d'une biomasse lignocellulosique traitée qui peut avantageusement être utilisée pour produire de l'éthanol par la mise en oeuvre de tout procédé adapté. Un procédé préféré, comprend les étapes suivantes :
- hydrolyse enzymatique du produit intermédiaire,
- osmose inverse, ultraf iltration, nanofiltration, décoloration et/ou f iltration stérile,
- fermentation, et - distillation/déshydratation.
Préférentiellement, il comprend les étapes suivantes :
- hydrolyse enzymatique à l'aide d'un cocktail enzymatique composé de celluloses et de β-glucosidase (entre 0,1 et 0,3g d'enzyme par gramme de cellulose) dans une cuve maintenue à une température comprise entre 45°C et 55°C, à un pH comprise entre 4 et 5,5 pendant au moins 15 heures,
- centrifugation
- ultraf iltration pour recycler les enzymes de l'hydrolyse,
- osmose inverse,
- f iltrαtion stérile,
- refroidissement,
- fermentation dans un fermenteur à environ 300C, entre 7h et 24h, à pH compris entre 3,8 et 4,3, osec des Saccharomyces cerevisiae, et - distillation/déshydratation.
Un tel procédé permet de produire des rendements importants de bioéthanol, en particulier grâce au produit intermédiaire, biomasse lignocellulosique traitée par le procédé selon l'invention.
L'éthanol obtenu peut avantageusement être utilisé comme carburant dans un véhicule à essence, seul ou association osec un ou plusieurs autres carburants.