PROCEDE POUR DIMINEUR LA VARIABILITE DE LA BIODISPONIBILITE D ' UN MEDICAMENT A ADMINISTRATION ORALE
La présente invention concerne un nouveau procédé permettant 5 de diminuer la variabilité de la biodisponibilité d'un médicament à administration orale ainsi que de nouvelles compositions pharmaceutiques à administration orale.
La très grande majorité des médicaments sont distribués dans l'organisme par le biais de la circulation générale. Dans le cas d'une
10 administration intraveineuse, le médicament est apporté directement dans la circulation. En revanche, dans le cas d'une administration orale, seule une fraction de la dose absorbée passe dans la circulation. Cette fraction de molécule retrouvée dans la circulation par rapport à la dose administrée s'appelle la biodisponibilité. Elle est mesurée par l'évaluation
15 du taux plasmatique du médicament (et/ou de ses métabolites actifs) comparé au taux plasmatique obtenu par administration intraveineuse de la même dose de médicament.
Plusieurs phénomènes contribuent à la diminution et à la variabilité de la biodisponibilité d'un médicament. Ils sont d'ordre physico-
20 chimique (solubilité, cinétique de dissolution, dégradation chimique) ou biologique (dégradation biochimique, métabolisme, mécanismes de passage trans-membranaire, capture par les protéines plasmatiques, dégradation dans le foie). Si les mécanismes physico-chimiques dépendent peu de l'individu ou du moment de l'administration, tous les mécanismes
25 biologiques par contre peuvent connaître une forte variabilité, soit en fonction du sujet, soit, pour un sujet donné, en fonction des circonstances de l'administration du médicament (à jeun ou alimenté, en fonction des rythmes circadiens, etc.). Une étude générale des mécanismes biologiques à l'origine des problèmes de variabilité d'absorption est donnée dans US
30 6,028,054 de The Régents of the University of California, qui inclut une bibliographie fournie. Les mécanismes les plus importants sont le métabolisme intestinal ou hépatique par les enzymes du cytochrome P450 et les phénomènes d'efflux (flux d'expulsion de la molécule vers la lumière intestinale) liés aux transporteurs de type protéine P-gp. De plus,
35 certaines associations de médicaments vont modifier par exemple la perméabilité de la membrane et entraîner une variation de biodisponibilité.
Ces variations de biodisponibilité sont un frein considérable au développement de certains médicaments et font courir des risques aux patients. En effet, pour chaque médicament, il existe une fenêtre thérapeutique, définie comme la zone de dosage comprise entre la limite inférieure où la molécule commence à être active et la limite supérieure où la toxicité de la molécule (ou ses effets secondaires) devient dangereuse. Si pour certaines molécules cette fenêtre d'efficacité est assez large, pour d'autres, elle est très étroite et les signes de toxicité apparaissent pour des doses à peine supérieures aux doses efficaces. Dans ce cas, on comprend qu'une variation de la biodisponibilité peut avoir des conséquences graves, certains patients peu réceptifs à la molécule pouvant recevoir, pour une même quantité administrée, une dose non efficace, alors que d'autres au contraire subiront des effets secondaires gênants, voire dangereux. Cette limitation empêche parfois la mise sur le marché de nouvelles molécules qui présentent une variabilité trop grande par rapport à leur fenêtre thérapeutique ou oblige à un suivi très strict du patient pour prévenir tout risque de surdosage ou de sous-dosage.
Cette notion se trouve dans de nombreuses classes thérapeutiques, et dépend du mode d'action de la molécule, des mécanismes de son passage à travers la paroi intestinale et de son métabolisme. Certaines molécules vont présenter une variabilité peu élevée, mais un index thérapeutique très étroit, qui nécessitera d'encore réduire la variabilité de la biodisponibilité, alors que d'autres vont présenter une forte variabilité. Dans ce cas quel que soit leur index thérapeutique, il est important de réduire la variabilité.
L'itraconazole par exemple est un antifongique de la famille des triazoles dont la biodisponibilité varie fortement d'un patient à l'autre, et selon que la prise est faite à jeun ou après un repas.
Cette notion est par exemple importante pour les médicaments anticancéreux, qui par leur nature même sont toxiques (leur mode d'action consiste à détruire les cellules cancéreuses, mais la sélectivité entre cellules cancéreuses et cellules saines est en général faible). Aujourd'hui la plupart des traitements anticancéreux sont administrés par voie intraveineuse, en milieu hospitalier. Le schéma de traitement consiste généralement en des administrations périodiques (par exemple mensuelles) de fortes doses du médicament par voie intraveineuse. Ce
type de traitement nécessite généralement l'hospitalisation du malade et entraîne des effets secondaires notables. Compte tenu de ces effets secondaires, il est nécessaire d'espacer les traitements, ce qui laisse souvent la possibilité de rechutes qui peu à peu deviennent hors de contrôle. Il existe une demande forte, de la part des patients mais aussi du corps médical, pour une administration de ces traitements par voie orale. Ceci permettrait en effet, au moins après une première cure d'attaque en milieu hospitalier, de prescrire au malade un traitement d'entretien à faible dose sur le long terme, à domicile, donc moins contraignant et mieux accepté que le traitement périodique à forte dose. Un tel mode d'administration permettrait de mieux contrôler les rechutes, en évitant les périodes longues d'attentes entre deux traitements.
Malheureusement la forte variabilité de biodisponibilité souvent observée pour ces médicaments et leur fenêtre thérapeutique étroite ont jusqu'à présent limité le développement des traitements anticancéreux par voie orale.
Les articles "Pharmacocinétique de πrinotécan" de Chabot et al. dans Bulletin du Cancer 1998, p 11-20 et "Phamacokinetics of orally administered camptothecins" de Gupta E. et al. dans Annals of New-York Academy of Sciences, 2000, vol 922 p. 195-204, décrivent la variabilité de la biodisponibilité pour l'Irinotécan (médicament anticancéreux, dérivé de la camptothécine, encore nommé CPT11), et donnent des tentatives d'explication de ce phénomène.
D'une manière plus générale, les considérations de confort du patient, d'adhésion du patient au traitement et de coûts de santé public, orientent fortement vers le développement de la voie orale, par rapport aux voies invasives. Ce développement se heurte à deux limitations, parfois mais pas toujours liées, d'une part la faible biodisponibilité de certaines molécules, et d'autre part la variabilité de la biodisponibilité inter et intra-individuelle de nombreux médicaments.
D'autre part la notion de sécurité des traitements est devenue aujourd'hui primordiale. Il est donc important de s'assurer que la dose de médicament administrée va produire l'effet thérapeutique, sans faire courir de risque au patient. Des traitements aujourd'hui sur le marché peuvent ainsi bénéficier de nouvelles formulations leur permettant de réduire leur
variabilité de biodisponibilité d'un patient à l'autre ou d'une prise à l'autre, et d'assurer ainsi une meilleure sécurité d'emploi.
Il y a donc un besoin certain de mettre au point des formulations permettant de réduire cette variabilité, même si elles ne permettent pas d'améliorer sensiblement la biodisponibilité globale.
Indépendamment de leur classe thérapeutique de nombreuses molécules peuvent bénéficier d'une diminution de la variabilité de leur biodisponibilité.
De nombreuses tentatives ont été faites pour diminuer cette variabilité de la biodisponibilité des médicaments pris par voie orale.
Souvent, la diminution de la variabilité est obtenue en augmentant globalement la biodisponibilité.
On peut classer les méthodes utilisées en trois grandes familles, en fonction de l'action qu'elles ont pour essayer de diminuer la variabilité. Les méthodes peuvent agir sur la solubilité de la molécule, sur sa dégradation ou son métabolisme, et sur son transport au travers de la membrane intestinale, vers la circulation.
- Le brevet US 5,576,021 de Eisai est un exemple de méthode agissant sur la solubilité. Ce document décrit un comprimé multigranulaire (formé de nombreux granulés, eux-mêmes enrobés) permettant une solubilisation progressive du principe actif dans le tractus digestif. De ce fait, on évite une dissolution trop rapide, qui aurait amené une concentration locale supérieure à la capacité d'absorption de la membrane intestinale, et donc une saturation. La vitesse de dissolution est adaptée à la cinétique d'absorption, ce qui a un effet de lissage sur la cinétique globale. Les variations d'absorption sont donc diminuées. Toutefois, un tel procédé n'a pas d'influence sur les paramètres biochimiques de la biodisponibilité.
Une autre approche a été utilisée dans WO 00/48571 (Novartis) pour résoudre un problème de variabilité de la biodisponibilité lié à une mauvaise solubilité du principe actif. Dans ce cas, c'est l'utilisation d'une émulsion ou d'une solution micellaire du principe actif et de tensioactifs qui permet une bonne solubilisation et donc une meilleure biodisponibilité du principe actif. L'amélioration de la variabilité est décrite comme une conséquence de l'amélioration globale de la biodisponibilité.
- Plusieurs brevets décrivent des méthodes permettant de modifier le transport transmembranaire de la molécule active.
En effet plusieurs stratégies peuvent être utilisées, en fonction du mécanisme à l'origine de la variabilité de ce transport. Pour la plupart, ils utilisent une stratégie visant à modifier le métabolisme (inhibition des enzymes du cytochrome P450) ou à inhiber les molécules responsables de l'efflux (protéine P-gp). Ceci est principalement obtenu en couplant des molécules inhibitrices de ces mécanismes biologiques. Le brevet US 6,028,054 utilise une telle stratégie, et donne une liste de telles molécules inhibitrices. Les effets régulateurs de la biodisponibilité sont simplement obtenus en faisant prendre simultanément au patient la molécule active (en l'occurrence de la Cyclosporine) avec l'inhibiteur (du Ketoconazole).
D'autres approches, décrites dans le brevet US 6,024,978 (Novartis) et dans le brevet EP 0,589,843 (Sandoz) font appel à des tensioactifs non ioniques pour inhiber les mécanismes biologiques cités précédemment (en particulier efflux par la P-gp) et diminuer la variabilité interindividuelle de l'absorption d'un médicament (la Cyclosporine dans ces deux documents). Dans ces documents, le tensioactif et le principe actif sont mélangés au sein d'une émulsion, ou d'un concentré auto- émulsifiable. On peut donc s'attendre dans ce cas à une rapide dispersion dans le milieu gastro-intestinal de la formulation, et à un effet final limité, le principe actif et l'inhibiteur n'arrivant pas forcément en même temps au site d'absorption. - Enfin la troisième approche consiste à éviter la dégradation biochimique du principe actif, dont la cinétique dépend de l'individu. Cette approche est décrite dans le brevet US 5,674,874 (Bionumerik Pharmaceuticals) qui enseigne l'utilisation d'une solution acidifiée de la molécule dans un solvant organique, permettant en gardant le pH bas de limiter la dégradation de la molécule sous sa forme carboxylate moins active. Dans ce document, le médicament est simplement administré par le biais de capsules molles remplies de la solution acidifiée de la molécule. On peut donc penser que lors de l'ouverture de la capsule molle dans l'intestin, l'effet de protection par le pH bas risque d'être de courte durée et une hydrolyse significative risque d'avoir le temps d'avoir le temps de se produire avant l'absorption.
Il n'a donc été décrit, dans l'art antérieur, aucun moyen de favoriser simultanément les trois modes d'action envisagés pour diminuer la variabilité de la biodisponibilité, à savoir une action simultanée sur la solubilité de la molécule active, sur son métabolisme et sur son transport à travers la membrane intestinale vers le site d'absorption.
La demande internationale WO 01/49264 de Capsulis décrit l'utilisation de vésicules multilamellaires à base d'amphiphiles permettant d'administrer des médicaments par voie orale, mais n'enseigne pas l'utilisation de ces vésicules pour diminuer la variabilité de la biodisponibilité.
Les inventeurs de la présente invention ont maintenant découvert que ces vésicules à structure particulière permettaient, vraisemblablement du fait de leur aptitude à protéger la molécule active et à l'amener intacte jusqu'à son site d'absorption, ainsi que du fait de la nature de leurs constituants, en particulier du fait des propriétés de certains tensioactifs d'inhiber les protéines responsables de l'efflux et d'améliorer la solubilisation des principes actifs, de fournir un remarquable moyen de diminuer la variabilité de la biodisponibilité de ces molécules actives. On voit ainsi le remarquable avantage de ces vésicules multilamellaires qui est de réunir au sein d'un même système les différents mécanismes capables de diminuer la variabilité de la biodisponibilité d'un médicament.
Ainsi donc, l'invention concerne l'utilisation de vésicules multilamellaires à structure en oignon présentant une structure interne cristal-liquide, comme agent destiné à diminuer la variabilité de la biodisponibilité d'un médicament à administration orale.
Elle concerne également un procédé pour fabriquer des compositions pharmaceutiques destinées à une administration par voie orale selon lequel, dans le but de diminuer la variabilité de la biodisponibilité de cette composition, on incorpore le principe actif dans de telles vésicules multilamellaires.
Selon un autre aspect, l'invention concerne des nouvelles compositions permettant d'administrer par voie orale avec une faible variabilité inter- ou intraindividuelle de sa biodisponibilité, un médicament qui présenterait une forte variabilité de sa biodisponibilité ou un index thérapeutique trop étroit par rapport à la variabilité de sa biodisponibilité.
Elle concerne en particulier, selon cet autre aspect, des nouvelles compositions destinées à l'administration par voie orale d'un médicament anticancéreux, et tout particulièrement le CPT 11, avec une diminution de la variabilité de la biodisponibilité de ce médicament par rapport aux compositions en développement connues à ce jour.
Elle concerne également, selon ce dernier aspect, des compositions contenant des molécules antifongiques de la famille des triazoles et tout particulièrement de Pitraconazole.
Avant d'aborder la description détaillée de la présente invention, il nous semble important de donner un certain nombre de définitions, définitions en particulier destinées à bien distinguer les compositions contenant des vésicules à base d'agents amphiphiles utilisées selon la présente invention des compositions déjà utilisées selon l'art antérieur avec le même but. Dans le domaine des particules fluides, il existe deux grandes catégories d'objets selon que l'on a affaire à des gouttelettes d'un fluide dispersées dans un autre fluide ou bien à des gouttelettes enfermant un fluide similaire au milieu de suspension.
Dans le premier cas, on parle d'émulsions ou de micro- emulsions alors que dans le second cas, on parle de vésicules. La principale distinction vient du fait que dans le cas de l'émulsion, l'interface entre milieu extérieur et milieu intérieur, est formée par une monocouche d'amphiphiles, de façon à séparer les deux milieux de polarités différentes alors que dans les vésicules lamellaires, c'est une bicouche qui fait l'interface, afin que la polarité soit la même des deux côtés de la membrane.
Les vésicules lamellaires comprennent des membranes formées de bicouches. Parmi ces vésicules, on trouve en particulier des liposomes classiques comprenant les liposomes unilamellaires, pauci- et multilamellaires.
Les vésicules multilamellaires à structure interne cristal-liquide constituent une sous-famille particulière de ces vésicules multilamellaires.
Les micelles constituent un assemblage spontané de molécules amphiphiles qui, par exemple, si elles sont dispersées dans l'eau vont rassembler leurs queues lipophiles vers le centre, de manière à ne présenter que les têtes polaires à l'interface avec l'eau (la structure
inverse existe évidemment). Certains auteurs utilisent micelles gonflées pour désigner une gouttelette d'huile entourée d'amphiphiles, dès lors que la dimension de la gouttelette n'est pas grande devant la taille moléculaire des amphiphiles. On remarquera donc qu'il y a un continuum entre micelles et gouttelettes d'une émulsion.
Pour revenir au document cité précédemment en ce qui concerne l'art antérieur, le brevet US 6,024,978 définit très clairement aux colonnes 5 et 6 son champ d'application dans le domaine des micro- emulsions.
La demande internationale WO 00 48571 décrit, de façon moins explicite, également des micro-émulsions.
En effet, la composition des formulations décrites dans ce document comprenant un composé lipophile, un alcool « court » et un agent tensioactif est exactement celle d'une micro-émulsion et non pas de vésicules.
Selon un premier aspect, l'invention concerne l'utilisation, comme agents destinés à diminuer la variabilité de la biodisponibilité d'un médicament administré par voie orale ou d'un de ses métabolites, de vésicules multilamellaires présentant une structure interne cristal-liquide lamellaire, lesdites vésicules étant formées, de leur centre jusqu'à leur périphérie, d'un empilement de bicouches concentriques à base d'agents amphiphiles, alternant avec des couches d'eau, de solution aqueuse ou de solution d'un liquide polaire et incorporant en leur sein au moins un principe actif dont on cherche à diminuer la variabilité de la biodisponibilité.
Comme exposé précédemment, on entend par « variabilité de la biodisponibilité » la variabilité aussi bien inter- qu'intraindividuelle du taux plasmatique d'un médicament ou de ses métabolites après leur absorption.
Les vésicules utilisées selon l'invention sont des systèmes permettant d'apporter sous forme vésiculaire le principe actif jusqu'à son site d'absorption en favorisant à la fois sa protection, sa solubilité et son transport. Les vésicules utilisées selon l'invention sont des vésicules multilamellaires présentant une structure interne cristal-liquide, formées
de leur centre jusqu'à leur périphérie d'un empilement de bicouches concentriques à base d'agents amphiphiles, alternant avec des couches d'eau, de solution aqueuse ou de solution d'un liquide polaire, lesdites vésicules incorporant en leur sein, au moins un principe actif dont on cherche à diminuer la variabilité de la biodisponibilité.
De telles vésicules ont fait l'objet d'importantes recherches et ont donné lieu à plusieurs applications. A titre d'exemples, on citera les demandes internationales WO 93/19735, WO 95/18601, WO 97/00623, WO 98/02144, WO 99/16468 et WO 01/49264. De telles vésicules désignées par vésicules multilamellaires à structure en oignon dans les documents cités ci-dessus se distinguent des liposomes par :
• leur mode de préparation qui part d'une phase lamellaire cristal-liquide, c'est à dire d'une phase à l'équilibre thermodynamique, présentant un ordre à longue distance, • leur structure interne cristal-liquide lamellaire. Cette structure est formée d'un empilement de bicouches concentriques d'amphiphiles alternant avec des couches d'eau ou de solution aqueuse ou de solution d'un liquide polaire (glycérol par exemple), du centre jusqu'à la périphérie de ces vésicules. Avant leur dispersion dans un milieu d'utilisation, ces vésicules se trouvent dans un état d'équilibre thermodynamique. La structure spécifique de ces vésicules peut être aisément mise en évidence par microscopie optique, en particulier par microscopie optique en lumière polarisée,
• la nature variée des molécules amphiphiles qui peuvent être utilisées, seules ou en mélange, pour les constituer,
• les milieux dans lesquels on peut les disperser, qui peuvent être aussi bien hydrophiles que lipophiles, en fonction de la formulation.
Ces vésicules multilamellaires présentent l'avantage de pouvoir être préparées à partir de constituants biocompatibles connus pour leur innocuité.
Par ailleurs, le procédé de préparation de ces vésicules est de mise en œuvre simple et ne fait appel qu'à des appareils courants de la chimie.
Par ailleurs, le fait que le procédé fasse appel à une phase lamellaire initiale à l'équilibre thermodynamique permet une excellente reproductibilité ainsi qu'une grande stabilité des vésicules obtenues.
Ces vésicules multilamellaires ont généralement des diamètres compris entre 0,1 et 25 μm, de préférence entre 0,2 et 15 μm.
Ces vésicules sont constituées de plusieurs couches d'agents amphiphiles alternant avec des couches de phase aqueuse ou polaire. L'épaisseur de chacune de ces couches est une épaisseur moléculaire, typiquement de l'ordre de 5 à 10 nanomètres. Pour un empilement d'une dizaine à quelques centaines de couches, on obtient donc un diamètre compris entre 0,1 μm et quelques dizaines de micromètres. C'est ce qui est observé expérimentalement, les vésicules étant observables en microscopie optique (en lumière polarisée afin d'avoir un meilleur contraste lié à leur biréfringence), soit comme des points non résolus pour les plus petites d'entre elles, soit comme des sphères biréfringentes pour les plus grosses. Le profil de tailles peut être étudié à l'aide d'un granulomètre laser (utilisant la diffusion statique d'un faisceau laser, analysée sous plusieurs angles). On obtient en général un profil gaussien centré sur une valeur variant entre 0,1 et 25 μm montrant une faible hétérogénéité de la taille pour une formulation donnée, dans des conditions opératoires de préparation données.
Ces vésicules peuvent être obtenues par un procédé comprenant la préparation d'une phase lamellaire cristal-liquide et sa transformation par application d'un cisaillement. Un tel procédé est en particulier décrit dans le brevet WO 93/19735 issu du brevet français FR 2 689 418 ou WO 95/18601 introduits ici par référence.
Selon le brevet français FR-2 689 418, cette transformation est faite lors d'une étape de cisaillement homogène de la phase cristal-liquide, ce qui conduit à des vésicules de taille contrôlée. Toutefois, en jouant sur la formulation de la phase lamellaire cristal-liquide, en particulier sur la nature des tensioactifs entrant dans sa composition, la transformation de cette phase cristal-liquide en vésicules peut être obtenue par simple sollicitation mécanique, en particulier lors du mélange des constituants.
De telles vésicules présentent, entre autres, l'avantage de pouvoir être préparées par un procédé de préparation particulièrement simple permettant d'utiliser une grande variété de tensioactifs.
Un autre avantage, lié lui aussi essentiellement au procédé utilisé pour préparer ces vésicules préférées selon l'invention, réside dans le fait que l'on incorpore les actifs et les additifs préalablement à la
formation des vésicules, ce qui permet un excellent rendement d'encapsulation, d'où une meilleure efficacité et une économie très importante pour des molécules coûteuses.
De telles structures sont avantageusement obtenues par incorporation d'au moins un agent actif dans une phase lamellaire cristal- liquide comprenant au moins un agent tensioactif puis transformation de cette phase cristal-liquide lamellaire en une phase dense de vésicules multilamellaires de petite taille.
Il est important de remarquer que cette transformation ne modifie pas la symétrie cristal-liquide de la phase initiale, et qui caractérise les vésicules multilamellaires. Cette symétrie cristal-liquide se traduit par des observations macroscopiques, telles que la biréfringence en microscopie optique, ou la présence de pic de diffraction en analyse par les rayons X. Il faut toutefois noter que de telles observations peuvent être rendues difficiles soit par le faible contraste lié à la très faible taille des vésicules, en microscopie optique, soit par la dilution et donc la faiblesse du signal en diffraction des rayons X.
Ainsi, les vésicules utilisées selon l'invention peuvent être obtenues selon un procédé selon lequel on prépare une phase cristal- liquide lamellaire incorporant au moins un agent actif et on provoque le réarrangement de ladite phase cristal-liquide en vésicules multilamellaires par application d'un cisaillement ou d'une sollicitation mécanique, résultant par exemple du mélange des constituants de ladite phase cristal-liquide lamellaire. Ce cisaillement pourra être un cisaillement homogène, ce qui présente l'avantage de conduire à des vésicules de taille parfaitement homogène. Toutefois, une simple agitation mécanique pourra s'avérer suffisante pour conduire à la formation des vésicules multilamellaires à structure cristal-liquide. Les molécules amphiphiles utilisées pour la préparation des vésicules utilisées selon l'invention, seront choisies, sans que cela soit une obligation, parmi les molécules faisant l'objet d'une description dans la pharmacopée, ou déjà utilisées dans des médicaments destinés à une administration par voie orale. On peut citer, sans que cela soit exhaustif, ni que les produits aient été obligatoirement utilisés précédemment en pharmacie, le groupe constitué :
* des glycérolipides, en particulier des glycérolipides phospholipidiques, hydrogénés ou non,
* des acides gras en CQ à C30, saturés ou mono- ou polyinsaturés, linéaires ou ramifiés, éthoxylés ou non, sous forme d'acide ou de sel d'un métal alcalin, alcalino-terreux ou d'une aminé,
* des esters, éthoxylés ou non, de saccharose, ou de sorbitol, ou de mannitol, ou de glycérol ou de polyglycérol contenant de 2 à 20 motifs glycérol ou de glycol des acides gras ci-dessus,
* des mono-, di- ou triglycérides ou des mélanges de glycérides des acides gras ci-dessus,
* des alcools gras en Cβ à C30, saturés ou mono- ou polyinsaturés, linéaires ou ramifiés, éthoxylés ou non,
* du cholestérol et ses dérivés, en particulier les esters de cholestérol chargés ou neutres comme le sulfate de cholestérol, * des autres dérivés à squelette stérol, en particulier ceux d'origine végétale tels que le sitostérol ou le sigmastérol,
4 des éthers, éthoxylés ou non, de saccharose, ou de sorbitol, ou de mannitol, ou de glycérol ou de polyglycérol contenant de 2 à 20 motifs glycérol ou de glycol et des alcools gras ci-dessus, des huiles végétales polyéthoxylées, hydrogénées ou non hydrogénées, des polymères séquences de polyoxyéthylène et de polyoxypropylène (poloxamères), de l'hydroxystéarate de polyethyleneglycol, des sphingolipides, et des dérivés de la sphingosine, des polyalkylglucosides, des céramides, des copolymères de polyethyleneglycol et d'alkylglycol, par exemple, les copolymères de la famille des ELFACOS de AKZO NOBEL, des copolymères di- ou tribloc d'éthers de polyethyleneglycol et de polyalkyleneglycol, par exemple les copolymères de la famille des ARLACELL de ICI.
Ces amphiphiles ou tensioactifs peuvent être utilisés seuls ou en mélange. Parmi ces amphiphiles, certains peuvent à eux seuls former une phase cristal-liquide lamellaire par mélange avec un solvant polaire.
D'autres sont utilisés uniquement en mélange, en plus faibles proportions, pour apporter des propriétés de rigidité ou d'étanchéité à la phase cristal- liquide lamellaire.
La formulation fait avantageusement intervenir un mélange de molécules tensioactives. Il est généralement utilisé au moins deux tensioactifs différents ayant des balances hydrophile-lipophile différentes, ce qui permet de régler en continu les propriétés des bicouches et ainsi de contrôler l'apparition de l'instabilité qui gouverne la formation des vésicules multilamellaires. Ainsi, on choisira avantageusement parmi les tensioactifs ci- dessus, deux tensioactifs présentant des propriétés relativement différentes, en particulier une balance hydrophile-lipophile (HLB) différente. Le premier tensioactif présentera avantageusement une balance hydrophile-lipophile comprise entre 1 et 6, de préférence entre 1 et 4, alors que le deuxième tensioactif aura une balance hydrophile- lipophile comprise entre 3 et 15, de préférence comprise entre 5 et 15.
Selon une variante avantageuse permettant de simplifier la formulation, on choisira d'utiliser des agents amphiphiles essentiellement constitués d'un mélange de glycérides polyglycosylés saturés constitués d'un mélange de monoesters, de diesters et de triesters de glycérol et de mono- et de diesters de polyethyleneglycol.
Un autre avantage des vésicules utilisées selon l'invention est que l'on peut ajouter à la formulation des polymères naturels ou artificiels tels que les polysaccharides (alginates, chitosan, etc.) afin de renforcer la solidité de la vésicule, et de lui permettre de mieux résister aux contraintes physico-chimiques du milieu d'administration (pH, effet mécanique, pression osmotique...). Ces polymères peuvent être aussi bien incorporés dans la vésicule, que déposés autour sous la forme d'un enrobage. Dans ce cas, la vésicule ou la particule formée des vésicules enrobées dans la matrice polymère a un diamètre plus gros que les vésicules seules. Ces polymères peuvent éventuellement être réticulés pour renforcer encore leur solidité.
Dans les compositions utilisées selon l'invention, les vésicules sont avantageusement dispersées au sein d'un milieu pharmaceuti- quement acceptable, généralement constitué d'eau ou d'un tampon.
Les vésicules utilisées selon l'invention peuvent aussi être dispersées dans une matrice solide, par exemple une silice hydrophobe, de manière à conduire à une poudre que l'on peut soit comprimer, soit utiliser pour remplir des gélules. On obtient ainsi une forme sèche, comprimé ou gélules destinée à une administration simple par voie orale.
Les vésicules utilisées selon l'invention peuvent aussi être dispersées dans un milieu hydrophobe, par exemple une huile, acceptable pour l'usage pharmaceutique, par exemple une huile végétale ou minérale, un ester d'acide gras synthétique, ou le squalane ou le squalène. Ceci peut avoir l'avantage d'éviter ou de limiter la présence d'eau dans le cas d'un actif qui serait par exemple hydrolysable. Cette dispersion dans l'huile peut elle-même être émulsionnée dans un milieu aqueux, afin d'obtenir une formulation plus agréable à avaler. Du fait de la présence de la phase intermédiaire huileuse, le milieu continu extérieur, par exemple aqueux, est séparé du milieu interne des vésicules, assurant ainsi une protection supplémentaire à l'actif incorporé dans les vésicules.
Comme exposé précédemment, l'invention permet d'administrer par voie orale, avec une faible variabilité inter- ou intraindividuelle de sa biodisponibilité, un médicament qui présenterait une forte variabilité de sa biodisponibilité ou un index thérapeutique étroit par rapport à la variabilité de sa biodisponibilité.
L'invention vise entre autre le cas des médicaments utilisés en chimiothérapie anticancéreuse, médicaments pour lesquels il est tout particulièrement utile de diminuer la variabilité de la biodisponibilité, comme exposé précédemment.
Elle s'applique tout particulièrement aux camptothécines et à leur dérivés.
Parmi ces dérivés, on citera tout particulièrement l'irinotécan encore appelé CPT 11 ou le topotécane encore appelé hycamptamine de formule développée (S)-10-[(diméthylamino)méthyl]-4-éthyl-4,9- dihydroxy-lH-pyrano[3',4':6,7]indolizino[l,2-b]quinoline-3,14(4H,12H)- dione.
Le CPT 11 (7-éthyl-10-[4-(l pipéridino)-l-pipéridino]-carbonyl oxycampthotecine) est un dérivé de la campthotécine utilisé comme médicament anticancéreux. C'est un poison de la topoisomerase I, utilisé par voie intraveineuse dans le traitement de cancers du colon et
par voie intraveineuse dans le traitement de cancers du colon et gynécologiques. Son mécanisme d'action passe par une conversion en SN 38 (7-éthyl-l-hydroxycampthotécine), métabolite actif qui a une activité anti topoisomerase 100 fois plus importante que le précurseur CPT11. La biodisponibilité orale du CPT 11 est de l'ordre de 50%, mais présente une très forte variabilité interindividuelle à la fois pour le CPT 11 et pour le SN 38.
Plusieurs mécanismes concourent à la biodisponibilité du CPT11, parmi lesquels les différentes voies de métabolisme et les mécanismes d'efflux jouent probablement un rôle important. Du fait de la forte activité cytotoxique de cette molécule et en particulier de son métabolite actif SN 38, il est très important, si l'on veut pouvoir l'administrer par voie orale, de disposer d'une formulation présentant une faible variabilité entre individus, et pour un même individu, en fonction des paramètres de la prise.
L'invention s'applique également particulièrement bien au cas du SN 38.
D'autres médicaments anticancéreux ne sont pas ou difficilement administrables par voie orale, comme l'étoposide, qui existe sous forme orale mais montre une forte variabilité, la famille des taxanes ou la vincristine. Cette liste n'est pas exhaustive, l'administration orale de médicaments anticancéreux étant encore très peu utilisée.
D'autres médicaments, hors la classe des anticancéreux, sont déjà administrés par voie orale mais présentent une forte variabilité inter et/ou intraindividuelle de leur biodisponibilité. On peut citer, sans que cette liste soit exhaustive :
On peut ainsi citer, pour différentes classes de médicaments, un certain nombre de molécules connues pour la variabilité de leur biodisponibilité, par exemple : • dans la classe des antidépresseurs : o des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (SSRI) (fluoxetine, fluvoxamine,...) o Reboxétine o Milnacipran o Venlafaxine o Mirtazapine
o Néfazodone o Moclobémide o Tianeptine
• les anxiolytiques de type benzodiazepines (ex diazepam) • dans la classe des antirhumatismants : o Chloroquine (utilisé surtout comme antipaludéen) o Sulphasalazine o Penicillamine
• des hormones et en particulier o Les oestrogènes dérivés de l'estradiol
• Ethinyl-estradiol
• stilbestrol
• estrone
Une autre famille bien connue de principes actifs présentant une forte variabilité inter- ou intraindividuelle de leur biodisponibilité est celle des agents anti-fongiques de la famille des triazoles. Parmi ces produits, on citera tout particulièrement l'itraconazole.
Selon un autre aspect, l'invention fournit un procédé pour la fabrication d'une composition pharmaceutique destinée à une administration par voie orale caractérisé en ce que, dans le but de diminuer la variabilité de la biodisponibilité de ladite composition, on introduit dans ladite composition des produits amphiphiles sous forme de vésicules multilamellaires à structure cristal-liquide, telles que définies précédemment, ledit principe actif se trouvant au moins partiellement incorporé au sein desdites vésicules lamellaires.
Selon un autre de ces aspects, l'invention concerne également, à titre de produit nouveau, une composition pharmaceutique constituée d'une dispersion ou d'une suspension dans un véhicule pharmaceutiquement acceptable compatible avec une administration par voie orale de vésicules multilamellaires présentant une structure interne cristal-liquide lamellaire, formées de leur centre jusqu'à leur périphérie d'un empilement de bicouches concentriques à base de produits amphiphiles alternant avec des couches d'eau, de solution aqueuse ou de solution d'un liquide polaire, contenant à titre de principe actif, au moins un principe actif présentant soit un index thérapeutique très faible (dose toxique très proche de la dose minimale thérapeutique), soit une forte
variabilité inter- ou intraindividuelle peut bénéficier de l'invention, ledit principe actif étant incorporé au moins partiellement au sein desdites vésicules. ,
Comme exposé précédemment, le véhicule peut être aussi bien liquide que solide.
Selon une variante de cet aspect de l'invention, le principe actif est choisi parmi les principes actifs connus pour leur activité en chimiothérapie anticancéreuse.
Ainsi, parmi les actifs pour lesquels ce type de composition s'adapte particulièrement bien, on pourra citer les camptothécines et leurs dérivés, en particulier le CPT 11.
Les compositions de l'invention pourront également contenir, à titre de principe actif, le SN 38.
Plus généralement de nombreux principes actifs en particulier parmi les anticancéreux peuvent bénéficier de l'invention. On peut citer sans que cette liste soit exhaustive des molécules comme la vincristine, les taxanes (paclitaxel, docétaxel), les glucosides (étoposide, doxorubicine et daunorubicine), etc.
Selon une autre variante de ce même aspect, l'invention porte également sur des compositions dans lesquelles le principe actif est connu pour son activité anti-fongique et est choisi dans la famille des triazoles.
Un exemple d'un tel agent anti-fongique est l'itroconazole.
Tout ce qui a été exposé précédemment, en ce qui concerne la taille des vésicules et le choix des tensioactifs pour l'élaboration des vésicules selon l'invention, reste vrai en ce qui concerne les compositions pharmaceutiques de l'invention.
La méthode de préparation consiste dans un premier temps à préparer par mélange une phase lamellaire cristal-liquide incorporant les différents constituants. Celle-ci s'obtient par simple mélange des ingrédients, dans un ordre déterminé par l'expérimentateur d'après les miscibilités de chacun des constituants. Il peut être nécessaire de chauffer certains constituants pâteux ou solides afin de faciliter leur incorporation. Dans ce cas on additionne la molécule active de préférence en fin de mélange afin de lui éviter de subir une température trop élevée, si elle est sensible à la température. On peut aussi préparer un mélange de tous les constituants sauf de la molécule active ou sa solution aqueuse sous forme
d'un mélange " stock " qu'on utilisera selon les besoins pour préparer la phase lamellaire. La solution aqueuse peut contenir différents constituants destinés à assurer sa compatibilité biologique et en particulier des mélanges tampons mais également plusieurs molécules actives synergiques. La phase lamellaire ainsi préparée est ensuite soumise à un cisaillement modéré (de 0 à 1000s"1) pendant un temps limité (de 0 à 60 minutes).
Dans la plupart des cas, ce cisaillement est obtenu directement par l'action du dispositif ayant servi au mélange. Dans une troisième étape, la phase lamellaire cisaillée est dispersée dans un milieu final, en général de l'eau ou un tampon, identique à/ou différent de celui ayant servi lors de la préparation de la phase lamellaire. Ce milieu de dispersion peut aussi être un milieu non aqueux, soit polaire (glycérol, polyéthylène glycol, alkylène glycol...), soit hydrophobe (huiles...). Cette dispersion se fait généralement à température ambiante (20-25°C) par addition lente du milieu sur la phase lamellaire sous agitation constante.
Un conservateur et éventuellement d'autres additifs destinés à compléter la formulation galénique peuvent être ajoutés au produit. Un avantage supplémentaire de l'invention est que l'on peut co- encapsuler au sein des mêmes vésicules un principe actif et des molécules adjuvantes, par exemple des inhibiteurs d'activité enzymatique ou de protéines d'efflux comme la P-gp. Une telle approche est similaire à ce qui avait été décrit dans la demande WO 99/27907 de Capsulis où une molécule était co-encapsulée avec une molécule stabilisante pour éviter sa dégradation.
Les vésicules selon l'invention sont capables d'incorporer aussi bien des molécules hydrophiles (par exemple des peptides) que des molécules lipophiles. De ce fait l'invention peut être appliquée à de nombreux médicaments.
EXEMPLES
EXEMPLE I : Administration orale de CPT11
1. Préparation des vésicules lamellaires de CPT11 Formulation en % massique
- 40% Labrafil M 2130 CS
- 10% Gelucire 44/14 - 42.5% Propylène Glycol
- 7.5% CPT11
Gelucire 44/14 et Labrafil M2130 CS (Gattefosse) sont des glycérides polyglycolysés saturés constitués d'un mélange défini de monoesters, diesters et triesters de glycérol, et de mono et diesters de polyéthylène glycol.
Mode de préparation Le CPT11 est préalablement mis en solution dans le propylène glycol. 75 mg de CPTllsont ajoutés dans 425mg de propylène glycol et l'ensemble est placé sous agitation à température ambiante jusqu'à solubilisation totale du CPT11.
Le contrôle de la solubilisation est effectué par observation microscopique en lumière polarisée. * Préparation des vésicules lamellaires lOOmg de Gelucire 44/14 et 400mg de Labrafil M 2131 CS sont introduits dans un pilulier. L'ensemble est placé entre 45°C et 50°C sous agitation jusqu'à fusion du mélange.
500mg de la solution propylène glycol/CPTll préalablement préparée sont alors incorporés au mélange de tensioactifs, puis la préparation est ramenée à température ambiante sous agitation.
La pâte est ensuite placée à 4°C pendant 8 heures avant d'être mise en oeuvre.
La taille des vésicules (mesurée par gramulométrie laser) est comprise entre 0,1 et 10 μm, de préférence entre 0,3 et 3 μm. Par taille, on entend le maximum du profil granulometrique, étant entendu que les
tailles réelles se répartissent autour de ce maximum, selon un profil en général gaussien (sur une échelle logarithmique des diamètres).
2. Dispersion pour administration orale
5 La formulation obtenue correspond à une pâte de vésicules lamellaires concentrées encapsulant le CPT11 sous forme solubilisée avec un titre de 75 mg/g. Une dispersion en milieu aqueux (eau ou milieu tampon) de cette pâte permet d'obtenir une dispersion de vésicules lamellaires suffisamment fluide pour l'administration par voie orale. 10 La dispersion pour les essais est réalisée extemporanément lors de l'administration. Cette étape est réalisée à température ambiante, en additionnant sous agitation à la quantité de pâte requise le volume de tampon phosphate (PBS IX) utile à l'administration.
153. Essais in vivo
Les variabilités de la biodisponibilité du CPT11 et de son métabolite actif SN 38 ont été étudiées sur un modèle animal, en comparant la molécule libre à la molécule incorporée dans les vésicules de l'invention. Comme c'est la variabilité qui était suivie dans cet essai, nous
20 avons suivi les taux plasmatiques des deux molécules sur 24 h pour chaque animal et comparé la variabilité des aires sous courbe (AUC) de chaque groupe.
L'étude de biodisponibilité a été réalisée sur le rat (Sprague- Dawley mâles de 220-240 g) normalement nourri. Les rats ont été répartis
25 en groupes de 10 animaux, un groupe recevant une solution aqueuse de CPT 11 (Irinotécan Campto® d'Aventis Pharma), l'autre groupe recevant la dispersion de vésicules lamellaires encapsulant le CPT 11. Chaque animal a reçu une dose unique de 75 mg de CPT 11 par gavage intra- gastrique, le volume administré étant de 3,8 mL/kg. Les prélèvements de 0 sang (500 μL) ont été effectués par la veine caudale, aux temps 15, 30, 60, 120 ,180, 300, 420, 540, 720 et 1440 minutes après le gavage. Chaque rat a subi un prélèvement une fois sur deux, cinq rats de chaque groupe subissant un prélèvement à chaque temps. Le sang prélevé a été immédiatement centrifugé sous 1000 g à 4°C pendant 10 min pour obtenir 5 le plasma qui a été conservé à -80°C en attendant l'analyse.
La mesure des taux plasmatiques de CPT 11 et SN 38 a été réalisée par HPLC suivant la méthode de la littérature (Sparreboom A. et al, Clinical. Cancer Res., 4 :2747-2754, 1998). Les AUC ont été calculées individuellement à partir des taux plasmatiques en fonction du temps, par paramétrage selon un modèle à un compartiment. Les moyennes, écart- type et coefficients de variation sont donnés dans les tableaux suivants pour les deux molécules suivies, en fonction du mode d'administration du CPT 11 (libre ou dans les vésicules). Le premier tableau correspond au groupe de rats soumis à des prélèvements de 15 min à 12h (15, 60, 180, 420, et 720 min), alors que le tableau suivant correspond au groupe de rats soumis à des prélèvements entre 30 min et 24 h (30, 120, 300, 540 et 1440 min).
On observe dans les deux tableaux une diminution de la variabilité de l'AUC pour le CPT 11 et, de manière plus marquée et statistiquement significative, pour SN 38, bien que globalement les AUC de ces deux molécules soient légèrement plus faibles après administration du CPT 11 dans les vésicules que libre.
Exemple II : Administration orale d'itraconazole
L'itraconazole est un antimycosique à usage systémique, présent sur le marché sous la forme de gélules et de suspension buvable. C'est un antifongique à large spectre de la classe des triazolés.
Son absorption par voie orale présente une biodisponibilité variant de 55% (gélules) à 70% (suspension), qui dépend de la prise ou non de repas. De plus la biodisponibilité montre une forte variation interindividuelle, rendant le dosage délicat. II a été démontré un effet de premier passage hépatique, mais le métabolite principal, l'hydroxy-itraconazole, présente une activité antifongique similaire à celle de l'itraconazole.
1. Préparation des vésicules lamellaires d'itraconazole Formulation en % massique
- Sorbitan stéarate (Montane 60, Seppic) 30%
- Sorbitan trioléate (Montane 85, Seppic) 5%
- Triglycérides à chaînes moyennes (Miglyol 812, Condea) 5%
- Acide lactique à 90% dans l'eau (Purac90, Nattermann) 48% - Itraconazole (Wyckoff) 12%
Mode de préparation L'itraconazole est préalablement mis en solution dans l'acide lactique. 36g d'itraconazole sont ajoutés dans 144g d'acide lactique (à
90% dans l'eau) et l'ensemble est placé sous agitation à température ambiante jusqu'à solubilisation totale de l'itraconazole.
Le contrôle de la solubilisation est effectué par observation microscopique en lumière polarisée. Préparation des vésicules lamellaires
90g de Montane 60, 15g de Montane 85 et 15g de Miglyol 812 sont introduits dans la cuve d'un mélangeur thermostatee à 80°C par circulation d'eau dans une double enveloppe. L'ensemble est placé sous agitation jusqu'à fusion du mélange.
150g de la solution acide lactique/Itraconazole préalablement préparée sont alors incorporés au mélange fondu, puis la préparation est ramenée à température ambiante sous agitation.
2. Dispersion pour administration orale
La formulation obtenue correspond à une pâte de vésicules lamellaires concentrées encapsulant l'itraconazole sous forme solubilisée avec un titre de 120 mg/g. Une dispersion à 50% massique en milieu huileux de cette pâte permet d'obtenir une dispersion de vésicules lamellaires suffisamment fluide pour l'administration par voie orale.
Cette étape est réalisée à température ambiante, dans le réacteur, en additionnant sous agitation à 300g de pâte, 300g d'huile de paraffine fluide.
3. Essais in vivo
L'étude de biodisponibilité a été réalisée sur le chien (Beagle mâles de 12 à 15 kg) à jeun une nuit avant l'administration. Six chiens ont été répartis en groupes de 2 animaux, chaque groupe recevant successivement, en une seule fois soit l'échantillon d'itraconazole dans les vésicules selon l'invention, soit le produit témoin (Sporanox® (Janssen) gélules). Les animaux ont été alimentés normalement 3 h après l'administration. Une période de repos de 7 jours a été observée entre deux administrations.
Les échantillons sanguins ont été prélevés dans des tubes citrates à la veine jugulaire aux temps 0,5 ; 1 ; 2 ; 3 ; 4 ; 5 ; 6 ; 10 ; 24 et 36 heures après l'administration. L'état clinique, la mortalité et la morbidité ainsi que le poids corporel ont été suivis durant toute l'expérience.
Les plasmas ont été préparés dans les 60 minutes du prélèvement par centrifugation à 3000 tr/min à 4°C pendant 10 min. Après transfert dans des tubes en polypropylène, ils ont été congelés rapidement à - 20°C.
L'itraconazole a été analysé par HPLC en phase inverse, avec détection à 263 nm, en présence de Ketoconazole comme étalon interne, après extraction liquide/liquide dans du tétrabutylmethyl ether.
Les aires sous courbes (AUC) ont été calculées individuellement à partir des taux plasmatiques en fonction du temps, par la méthode des trapèzes. Les valeurs de Cmaχ, tmaχ et de l'aire sous courbe (entre 0 et 36h) sont données dans le tableau suivant pour les deux molécules suivies (itraconazole et somme itraconazole plus hydroxy-itraconazole), en fonction du mode d'administration de l'itraconazole (Sporanox® ou dans les vésicules) ainsi que les écarts-type à la moyenne (SEM). Les deux dernières lignes du tableau présentent les rapports des écarts-type entre la forme commerciale (Sporanox®)et la forme en vésicules selon l'invention.
On observe que pour les trois paramètres observés, les variations interindividuelles sont nettement diminuées par rapport à la forme commerciale de l'itraconazole. On remarque aussi que, pour les paramètres de biodisponibilité (Cmaχ et AUC), alors que les valeurs de ces paramètres ne sont pas significativement modifiées leur variabilité est très nettement diminuée comme en atteste le rapport des déviations standards. Ce phénomène est encore plus marqué sur la somme de l'itraconazole et de son métabolite. Ceci montre bien que la variabilité de la biodisponibilité est diminuée par l'invention, et non pas uniquement la variabilité de la vitesse d'absorption.