Dispositif de fabrication de poudre par pyrolyse d'aérosol
Domaine technique de l'invention
L'invention concerne un dispositif de fabrication de poudre par pyrolyse d'aérosol comportant des moyens de production d'un aérosol, à partir d'une solution liquide comportant des précurseurs de la poudre à élaborer, et une enceinte comportant des moyens de séchage et de traitement thermique de l'aérosol.
État de la technique
Les matériaux en poudre sont fabriqués par de nombreuses techniques suivant la nature du matériau à produire, la taille de grain souhaitée, l'état cristallin recherché, etc.. Ils peuvent, notamment, être fabriqués par pyrolyse d'aérosol. Le principal avantage de ce procédé de fabrication est de produire des poudres dont la taille de grain est très peu dispersée autour de la valeur centrale. On peut ainsi produire des poudres dont le diamètre moyen est, par exemple, de 1μm avec moins de 2% des particules de diamètre inférieur à 0.7 μm et moins de 2% des particules avec un diamètre supérieur à 2 μm.
Le procédé de pyrolyse d'aérosol, schématiquement représenté à la figure 1 , consiste à générer un brouillard ou aérosol 1 à partir d'une solution liquide 2 dans laquelle un précurseur du produit à élaborer est dissous dans un solvant, par exemple dans l'eau, dans un alcool ou dans un mélange eau-alcool. L'aérosol 1 est constitué de gouttelettes dont le diamètre est peu dispersé autour de la valeur moyenne. L'aérosol 1 est introduit dans un four 3, dans
lequel il est séché et soumis à un traitement à haute température (typiquement 400°C à 1500°C). On obtient ainsi une poudre 4 dont les grains ont un diamètre moyen qui est fonction de la taille des gouttelettes de l'aérosol 1 et de la concentration du précurseur dans la solution 2.
Le procédé de pyrolyse d'aérosol comporte donc les étapes suivantes :
- génération d'un aérosol 1 à partir d'une solution liquide 2, dans laquelle est dissous un précurseur du produit à élaborer,
- transport de l'aérosol dans un four 3 par un gaz vecteur 5, de préférence de l'air ou de l'azote, ,
- séchage des gouttelettes constituant l'aérosol 1 , c'est-à-dire évaporation du solvant, ce qui produit des particules sèches du précurseur, ces particules ayant des dimensions peu dispersées autour de la valeur moyenne,
- décomposition du précurseur en oxyde, par pyrolyse, au cours d'un traitement thermique à une température typiquement entre 400°C et 1500°C, plus particulièrement entre 400°C et 600°C, cette décomposition menant généralement à un composé amorphe,
- cristallisation du composé amorphe, sous forme de particules,
- filtration du mélange gaz vecteur-particules, soit par un filtre électrostatique, soit par un filtre classique,
- récupération, à l'extérieur du four 3, de la poudre 4.
Ce procédé permet de produire des poudres dont la taille de grain moyenne varie entre 0,1 μm et quelques micromètres, avec une faible dispersion sur le diamètre. Cette uniformité dans la taille des grains dépend fortement de l'uniformité sur la taille des gouttelettes. Le diamètre des gouttelettes constituant l'aérosol doit donc être aussi uniforme que possible. De plus, pour permettre une exploitation industrielle, la quantité de gouttelettes dans l'aérosol doit être aussi élevée que possible.
Le document WO-A-9837165, décrit un procédé de fabrication de poudres par pyrolyse d'aérosol, dans lequel l'aérosol est formé par ultrasons. Un transducteur ultrasonore crée un mouvement de la surface de la solution liquide 2 qui génère un geyser. Des gouttelettes sont émises au-dessus de la surface par le geyser et sont emportées par le gaz vecteur. Il est ainsi possible de former des gouttelettes de taille très uniforme (diamètre moyen compris entre 0,5 μm et 20 μm), qui dépend essentiellement de la viscosité de la solution et de la fréquence des ultrasons (entre 1 et 5 MHz).
La production de l'aérosol par l'intermédiaire d'un transducteur ultrasonore, utilisée en laboratoire, est cependant une contrainte pour une utilisation industrielle de la pyrolyse d'aérosol. En effet, la capacité de production d'un procédé de fabrication de poudre par pyrolyse d'aérosol dépend presque exclusivement de la quantité d'aérosol que l'on peut introduire dans le four par unité de temps. Il faut donc pouvoir produire un aérosol avec une très grande densité, c'est-à-dire un grand nombre de gouttelettes par unité de volume.
Or la production de l'aérosol 1 à l'aide d'une source ultrasonore mène toujours à des densités relativement faibles à l'entrée du four 3 car il est difficile d'extraire et d'entraîner les gouttelettes dès leur production au-dessus du geyser. D'autre part la nécessité de transporter l'aérosol 1 entre le lieu de production et l'entrée du four entraîne une coalescence des gouttelettes : deux gouttelettes ont une probabilité non négligeable de fusionner pour former une gouttelette plus grosse. L'uniformité de taille des gouttelettes, et donc des grains, est dégradée par ce processus. Il est important de remarquer que ce phénomène de coalescence est d'autant plus marqué que la densité du brouillard produit est grande. Enfin la génération à partir d'un dispositif à ultrasons ne permet d'utiliser que des solutions dont la tension de surface (ou interfaciale avec l'air) est faible
et la viscosité inférieure ou égale à celle de l'eau. C'est d'ailleurs pourquoi on ajoute souvent du méthanol à l 'eau dans les solutions afin d'en diminuer la tension de surface. En résumé, plus on veut augmenter la capacité de production, plus il faut produire un brouillard dense, plus le phénomène de coalescence est important et plus l'uniformité de la taille des grains est médiocre.
Objet de l'invention
L'invention a pour but un dispositif de fabrication de poudres par pyrolyse d'aérosol ne présentant pas ces inconvénients et permettant, plus particulièrement, de fournir une grande quantité d'aérosol à l'entrée du four.
Selon l'invention, ce but est atteint par le fait que les moyens de production de l'aérosol comportent des moyens de compression pour mettre sous pression la solution liquide et des moyens d'injection pour injecter la solution liquide sous pression dans l'enceinte, la pression de la solution liquide en amont des moyens d'injection étant très supérieure à la pression à l'intérieur de l'enceinte, immédiatement en aval du dispositif d'injection, et supérieure à 10 bars.
Selon un premier développement de l'invention, les moyens d'injection sont portés à un potentiel électrique très élevé, par exemple compris entre 10 et 100 V.
Selon un second développement de l'invention, un potentiel électrique de valeur prédéterminée est appliqué à des parois de cavités de l'enceinte.
Selon un autre développement de l'invention, le dispositif comporte des moyens de chauffage pour surchauffer la solution liquide sous pression.
Description sommaire des dessins
D'autres avantages et caractéristiques ressortiront plus clairement de la description qui va suivre de modes particuliers de réalisation de l'invention donnés à titre d'exemples non limitatifs, et représentés aux dessins annexés, dans lesquels :
La figure 1 représente un dispositif de fabrication de poudres selon l'art antérieur.
La figure 2 illustre un mode de réalisation particulier d'un dispositif selon l'invention.
La figure 3 représente la constitution d'un exemple particulier de solution liquide et sa transformation après injection.
Description de modes particuliers de réalisation.
Le dispositif selon l'invention se distingue des dispositifs connus essentiellement par la méthode de génération de l'aérosol. Celui-ci est produit par injection à haute pression à travers un orifice de petit diamètre. Dans le mode de réalisation particulier illustré à la figure 2, la solution liquide 2 est mise sous pression par une pompe 6. La solution liquide sous pression est ensuite injectée, par un dispositif d'injection 8, directement dans une enceinte 7, dans laquelle seront réalisés le séchage et le traitement thermique de l'aérosol. La détente du liquide sous pression à travers l'orifice de petit diamètre produit un
éclatement du filet de liquide en de multiples gouttelettes constituant l'aérosol 1 à l'entrée de l'enceinte 7
Le dispositif d'injection 8, dans lequel se crée la détente, peut-être réalisé sous la forme d'un orifice dont l'épaisseur est petite par rapport à son diamètre. Cependant, l'éclatement est plus efficace lorsqu'il est constitué par une buse cylindrique, dont la longueur est au moins égale au diamètre, par une buse conique, comme représenté à la figure 2, ou par une tuyère de section sensiblement parabolique.
Dans un mode de réalisation préférentiel, le dispositif d'injection 8 est constitué par une buse du même type que les buses d'injection du carburant dans les moteurs thermiques ou dans les moteurs de type Diesel à injection haute pression. Le document WO-A-9502711 et le brevet US 5945162 correspondant décrivent l'utilisation d'un injecteur de moteur d'automobile pour introduire un précurseur liquide ou une solution de précurseurs solides, dans une enceinte de dépôt chimique en phase vapeur (CVD). Les précurseurs sont maintenus sous pression dans un réservoir à une pression de l'ordre de 1 à 5 fois la pression atmosphérique. Ce dispositif permet, en calibrant le temps d'ouverture de la buse d'injection, de contrôler la quantité injectée. Cependant, il ne permet pas d'éclater le liquide en fines gouttelettes, ni d'obtenir des gouttelettes de taille uniforme, ce qui est indispensable pour la fabrication de poudres.
Selon l'invention, la pression amont, c'est-à-dire avant détente dans le dispositif d'injection 8, est très supérieure à la pression aval, après détente, de manière à ce que le filet de liquide éclate complètement en fines gouttelettes de taille très uniforme. Typiquement le diamètre de l'orifice du dispositif d'injection 8 est compris entre 15 et 300 μ et la pression amont est supérieure à 10 bars, de préférence comprise entre 10 bars et 1000 bars et plus particulièrement entre
50 et 500 bars. La pression dans l'enceinte, immédiatement en aval du dispositif d'injection 8 est généralement comprise entre 0,5 et 25 bars et, de préférence, de l'ordre du bar.
Le dispositif selon l'invention permet la création d'un aérosol avec une forte densité de gouttelettes directement à l'entrée d'une zone de séchage de l'enceinte 7. En conséquence, le séchage commence dès la sortie du dispositif d'injection 8 et le solvant contenu dans les gouttelettes peut s'évaporer avant que les gouttelettes n'aient pu coalescer. Les étapes de traitement thermique, provoquant la décomposition du précurseur (en un oxyde si le gaz vecteur est de l'air) et la cristallisation sous forme de particules, sont réalisées ensuite, en continuité du séchage ou ultérieurement. Il est, de plus, possible d'utiliser des solutions 2 ayant une très large gamme de viscosité, et donc d'utiliser des solutions concentrées en précurseur.
Avec le dispositif décrit ci-dessus, une coalescence résiduelle, bien que faible, peut néanmoins subsister en raison de la très forte densité de gouttelettes créées. Cette coalescence résiduelle peut être supprimée en portant le dispositif d'injection 8 à un potentiel électrique V très élevé, de préférence compris entre 10 et 100kV. L'application d'une tension élevée au dispositif d'injection 8 charge électrostatiquement la solution liquide sous pression au cours de son transit dans le dispositif d'injection 8. Cette charge électrostatique portée par la solution entraîne un éclatement plus efficace, c'est-à-dire en gouttelettes plus uniformes, du filet de solution au sortir du dispositif d'injection 8. De plus, une tension électrostatique ainsi appliquée à la solution avant sa sortie du dispositif d'injection 8 a pour effet que chaque gouttelette porte une charge électrique identique à celle de ses voisines, et provoque ainsi une répulsion entre les gouttelettes, ce qui évite pratiquement tout risque de coalescence.
D'autre part, les parois de cavités de l'enceinte 7 dans lesquelles transitent les particules au cours du séchage, de la décomposition ou du traitement de cristallisation peuvent également être portés à un potentiel de même polarité électrique que le précédent, mais de valeur éventuellement différente, afin qu'il y ait répulsion entre les particules et les parois et qu'il n'y ait pas d'accumulation des grains sur les parois.
Dans un mode de réalisation préférentiel, le dispositif de fabrication comporte également un dispositif de chauffage 9 pour surchauffer la solution liquide sous pression. Le dispositif de chauffage 9 est, de préférence, disposé entre la pompe 6 et le dispositif d'injection 8. La température d'ébullition d'un liquide augmentant avec la pression, la solution liquide sous pression est portée à une température supérieure à sa température d'ébullition à la pression atmosphérique. La pression en aval du dispositif d'injection 8 étant généralement égale ou très proche de l'atmosphère (0,9 à 1 ,1 atmosphère), il se produit une détente dès la sortie du dispositif d'injection 8 et la solution passe alors de l'état liquide à un brouillard. Une partie du solvant (par exemple l'eau) se vaporise pendant que l'autre partie reste à l'état liquide mais est divisée sous forme de microscopiques gouttelettes de solution de solvant dans lequel est dissous le précurseur. Le diamètre des gouttelettes dépend de la fraction de liquide qui est vaporisée. Plus la solution est surchauffée, mais toujours à l'état liquide, donc à une pression suffisante, plus les gouttelettes sont petites. Le diamètre moyen peut ainsi être choisi, par exemple entre 1//m et plus de 50μm.
Les gouttelettes formées sont de taille très uniforme, avec une dispersion du diamètre de l'ordre de 30% autour du diamètre moyen Rm, c'est-à-dire que 95% des gouttelettes ont un diamètre compris entre 0,7Rm et 1 ,3Rm. Comme une partie du solvant est évaporée, les gouttelettes formées sont enrichies en
précurseur. La concentration du précurseur peut éventuellement dépasser la limite de solubilité et commencer à cristalliser dans chaque gouttelette.
Le dispositif selon l'invention peut, par exemple être utilisé pour fabriquer une poudre d'oxyde d'yttrium. Pour cela, on prépare une solution 2 de nitrate d'yttrium dans l'eau par dissolution de 200 grammes d'oxyde d'yttrium hexahydraté dans un litre d'eau à 80°C. A l'aide d'une pompe 6, par exemple d'une pompe à piston, on comprime alors cette solution à 200 bars et on l'envoie, par l'intermédiaire d'une canalisation 10, par exemple constituée par un tube en inox, dans une buse de détente constituant le dispositif d'injection 8. Un dispositif 9 de chauffage électrique est disposé sur la tuyauterie entre la pompe 6 et la buse 8, de manière à chauffer la solution par transfert thermique à travers le tube en inox. La température de la solution à l'entrée de la buse de détente est de 200°C. Il se produit dans l'enceinte 7, dès la sortie de la buse, un éclatement du filet liquide qui forme de nombreuses gouttelettes du solvant
(l'eau) contenant le soluté (le nitrate d'yttrium). Le volume d'entrée de l'enceinte 7, à la sortie de la buse, est balayé par un courant d'air 5 préchauffé à 120°C qui a pour effet de sécher immédiatement les gouttelettes et de former des grains microscopiques de nitrate d'yttrium hydraté. Ces particules sont alors envoyées dans un four tubulaire chauffé à 500°C pour produire la décomposition du nitrate d'yttrium en oxyde d'yttrium amorphe. Une étape ultérieure à 1200°C permet de cristalliser l'oxyde.
Dans une variante de réalisation, une dépression par rapport à la pression atmosphérique, par exemple une pression absolue de l'ordre de 500 mbars, est provoquée dans le volume de l'enceinte 7 situé immédiatement en aval du dispositif d'injection 8 et la solution est chauffée en amont de l'injecteur à une température proche de sa température d'ébullition à la pression atmosphérique.
Un mélange de solvants peut être utilisé pour préparer la solution liquide 2. En particulier, on peut utiliser un mélange d'un solvant à forte température d'ébullition (comme l'eau) et d'un solvant à faible température d'ébullition, comme du méthanol ou de l'acétone. Le solvant à faible température d'ébullition est alors vaporisé préférentiellement lors de la détente.
Il est également possible d'utiliser une émulsion, dans un solvant X, d'une solution du précurseur dans un solvant Y, les solvants X et Y n'étant pas miscibles. L'émulsion est constituée de micro-domaines 11 (figure 3) du solvant Y, dans lequel est dissous le précurseur, dans le solvant X. Les micro-domaines 11 , de Y dans X, ont une dimension typique de quelques micromètres (0,5 à 20 μm). Le solvant X est généralement choisi de manière à ce que, à la température de préchauffage de la solution, il soit liquide à la pression en amont de la buse (haute pression) et gazeux à la pression en aval de la buse (basse pression). Autrement dit, la température choisie pour la surchauffe a une valeur intermédiaire comprise entre la température d'ébullition des solvants X et Y à la pression aval. Les solvants X et Y sont donc tous deux à l'état liquide dans l'émulsion, comprimée et surchauffée, en amont du dispositif d'injection 8 (partie gauche de la figure 3). Par contre, à la sortie du dispositif d'injection 8 (partie droite de la figure 3), le solvant X est vaporisé, c'est-à-dire passe à l'état gazeux et libère les micro-domaines 11 de solvant Y (toujours à l'état liquide) contenant le précurseur. Les micro-domaines 11 , qui étaient disjoints dans l'émulsion, restent disjoints dans la phase gazeuse. On peut donc utiliser des conditions d'injection telles que l'on produit des gouttelettes de cette émulsion relativement grosses, par exemple de quelques dizaines à quelques centaines de micromètres, à l'entrée de la zone de séchage de l'enceinte 7
A titre d'exemple, on peut fabriquer une poudre d'oxyde d'yttrium à partir d'une émulsion, dans du méthyl-éthyl-cétone, d'une solution obtenue par dissolution
de 100 grammes d'oxyde d'yttrium hexahydraté dans un litre d'eau à 20°C. L'émulsion comprimée à 300 bars est chauffée à 160°C avant le dispositif d'injection 8. Dès la sortie du dispositif d'injection 8, l'émulsion éclate en formant nombreuses gouttelettes. Le traitement ultérieur est identique à celui décrit dans l'exemple précédent.
L'invention n'est pas limitée aux modes de réalisation particuliers décrits ci- dessus. En particulier, les poudres peuvent être formées à partir d'un précurseur ou d'un mélange de précurseurs. Par exemple, on peut mettre du nitrate d'yttrium dans de l'eau pour fabriquer de l'oxyde d'yttrium. Pour fabriquer un oxyde plus complexe, par exemple un oxyde d'yttrium dopé à l'europium, on partira d'un mélange de nitrate d'yttrium et de nitrate d'europium dans le rapport de concentration voulu. Le gaz vecteur est souvent de l'air mais on peut utiliser de l'azote ou tout autre gaz dont les caractéristiques chimiques présentent un intérêt.