ELEMENT COMBUSTIBLE ET REACTEUR NUCLEAIRE A REFRIGERANT GAZEUX UTILISANT DES ELEMENTS COMBUSTIBLES DE CE TYPE
DESCRIPTION
Domaine technique
L'invention concerne principalement un élément combustible destiné à être utilisé dans le cœur d'un réacteur nucléaire refroidi par un réfrigérant gazeux. L'invention concerne également un réacteur nucléaire à réfrigérant gazeux dont le cœur est constitué de tels éléments combustibles.
Un réacteur nucléaire conforme à l'invention peut notamment être utilisé pour consommer de l'uranium appauvri .
Etat de la technique
Les réacteurs nucléaires en fonctionnement utilisent pour la plupart du combustible nucléaire conditionné sous forme de pastilles empilées dans des gaines métalliques étanches . Les gaines contenant les pastilles de combustible nucléaire forment des aiguilles de combustible. Celles-ci sont regroupées en faisceau par une ossature rigide, pour former des assemblages combustibles. Un agencement comparable est généralement envisagé dans les réacteurs nucléaires en projet .
Ce conditionnement classique du combustible nucléaire a pour inconvénient de limiter la quantité de ' chaleur qui peut être évacuée par unité de volume du cœur du réacteur lorsqu'on utilise un réfrigérant
gazeux. En effet, la chaleur dégagée par les pastilles de combustible nucléaire est transmise au fluide réfrigérant circulant entre les aiguilles par le gaz contenu dans l'espace séparant la pastille de la gaine, puis par la gaine elle-même. De plus, la surface de contact ou d'échange thermique entre les aiguilles de combustible classiques et le fluide réfrigérant est relativement faible.
Par ailleurs, dans chaque aiguille de combustible classique, une partie de la longueur de l'aiguille est réservée pour des dispositifs de blocage des pastilles et pour l'expansion des gaz provoqués par les fissions nucléaires. Par conséquent, chacune des aiguilles de combustible ne génère de la chaleur que sur une partie de sa longueur. Cela conduit à ne prendre en compte la surface d'échange thermique entre les aiguilles et le fluide réfrigérant que pour le volume utile du cœur, c'est-à-dire pour le volume du cœur dans lequel de la chaleur est effectivement générée par du combustible nucléaire. On définit ainsi la surface d'échange thermique par mètre cube utile de cœur .
Si l'on prend pour exemple le cas d'un cœur de réacteur nucléaire formé d'assemblages combustibles classiques constitués d'aiguilles de 8 mm de diamètre disposées selon un réseau triangulaire et dont les axes sont distants de 12 mm, il existe moins de 202 mètres carrés de surface d'échanges thermiques par mètre cube utile de cœur. Cette limitation de la surface d'échange thermique par unité de volume du cœur s'ajoute à la
limitation de la température que peut atteindre le matériau combustible pour entraîner une limitation de la densité volumique de puissance, c'est-à-dire de la puissance délivrée par unité de volume du cœur. Cette limitation est particulièrement pénalisante pour les réacteurs nucléaires refroidis par un réfrigérant gazeux. En effet, ces réacteurs nécessitent une grande surface d'échanges thermiques pour évacuer la puissance du cœur en fonctionnement normal ou pour évacuer la puissance résiduelle après un arrêt d'urgence.
Cette situation conduit à la nécessité de limiter la densité volumique de puissance à des valeurs relativement faibles. Cela pénalise les capacités neutroniques du cœur du réacteur, notamment dans le cas d'un réacteur à neutrons rapides. Cette situation est également pénalisante pour les coûts de revient de ce type de réacteurs puisque la limitation de la densité de puissance implique des dimensions de cuve et de bâtiment réacteur très importantes si l'on désire réaliser un réacteur présentant une puissance totale intéressante d'un point de vue économique.
Parallèlement à ces assemblages de combustible nucléaire classiques, des études et des expériences sont menées, depuis quelques années, sur des éléments combustibles formés de particules fissiles enrobées, agglomérées par une matrice carbonée. Ces éléments combustibles sont essentiellement destinés à être utilisés dans des réacteurs nucléaires à haute température, refroidis par un gaz caloporteur tel que 1 'hélium.
Les particules fissiles enrobées comprennent un noyau fissile, de forme sphérique, revêtu de plusieurs couches successives comprenant notamment une couche poreuse interne apte à loger les gaz de fission et à supporter le gonflement du noyau, et une couche de carbure de silicium Sic formant une barrière étanche pour les produits de fission. Ces particules sont dites de type "TRISO" . Selon le procédé de fabrication utilisé, leur diamètre varie entre environ quelques centaines de microns et quelques -millimètres .
Il existe actuellement deux types d'éléments combustibles dans lesquels les particules enrobées sont agglomérées sous une forme différente par une matrice carbonée . Dans un premier type d'éléments combustibles, développé aux Etats-Unis d'Amérique et en France, les particules enrobées sont agglomérées sous la forme de bâtonnets cylindriques, qui sont ensuite insérés dans des canaux tubulaires verticaux prévus à cet effet dans des blocs de graphite, de section hexagonale, formant le cœur d'un réacteur à haute température, refroidi au gaz . Les bâtonnets cylindriques sont obtenus en agglomérant les particules enrobées et une matrice à base de poudre de graphite. Dans un deuxième type d'éléments combustibles, développé en Allemagne, les particules enrobées sont agglomérées sous la forme de boulets, qui sont entassés en vrac avec des boulets de graphite de même dimension, pour constituer le cœur d'un réacteur à haute température, refroidi au gaz. Les boulets sont obtenus en agglomérant les particules enrobées et une matrice
carbonée pour former la partie centrale du boulet, et en revêtant cette partie centrale d'une couche périphérique dépourvue de particules enrobées.
Les éléments combustibles formés de particules enrobées , agglomérées sous la forme de bâtonnets ou de boulets, ont pour avantage notable d'être plus simples
'et moins coûteux que les assemblages de combustible nucléaire classiques à faisceaux de crayons.
Cependant, ils présentent également des inconvénients sérieux.
Ainsi, ces éléments combustibles ne peuvent être utilisés que dans des réacteurs nucléaires à spectre thermique puisque les particules fissiles enrobées sont reliées entre elles par du graphite, c ' est-à-dire par un milieu modérateur ou ralentisseur de neutrons .
Ce type d'élément combustible a aussi pour inconvénient d'être peu adapté à une mise en œuvre industrielle, notamment du fait que la manutention individuelle des éléments imposée par la nécessité de renouveler périodiquement une certaine fraction du cœur du réacteur est très délicate. Enfin, il n'est pas possible de maîtriser de manière indépendante la capacité d'échange thermique et les pertes de charge, ni la géométrie du combustible dans la cuve, notamment aux valeurs élevées de la vitesse du réfrigérant gazeux.
Exposé de l'invention L'invention a principalement pour objet un élément combustible dont la conception originale lui
permet d'être utilisé dans un réacteur nucléaire refroidi par un réfrigérant gazeux, en procurant une surface d'échanges thermiques et une densité volumique de puissance sensiblement plus élevés que les assemblages combustibles classiques.
Conformément à l'invention, ce résultat est obtenu au moyen d'un élément combustible pour cœur de réacteur nucléaire à réfrigérant gazeux, ledit élément combustible étant caractérisé en ce qu'il comprend un ensemble de tôles combustibles juxtaposées comportant des particules fissiles élémentaires noyées dans une matrice métallique, les tôles combustibles adjacentes présentant des formes telles qu'elles définissent entre elles une pluralité de canaux d'écoulement du réfrigérant gazeux.
Dans un tel élément combustible, les tôles combustibles sont assemblées par des moyens quelconques de façon à définir entre elles des canaux dans lesquels s'écoule le réfrigérant gazeux. On réalise ainsi un agencement comparable à celui d'un echangeur thermique classique. A cet effet, toutes les technologies utilisées habituellement dans de tels échangeurs peuvent être reprises. Ainsi, les éléments combustibles peuvent être constituées de tôles sensiblement parallèles entre elles, entre lesquelles sont interposées des tôles ondulées. En variante, toutes les tôles combustibles d'un même élément peuvent notamment être ondulées. La géométrie de l'élément combustible peut être plane, circulaire, spiralée, etc..
Dans un mode de réalisation préféré de l'invention, les canaux d'écoulement du réfrigérant gazeux sont sensiblement parallèles entre eux.
Par ailleurs, les tôles combustibles s ' étendent de préférence sur toute la hauteur du cœur du réacteur et les canaux sont orientés sensiblement verticalement .
Selon un premier agencement possible, les canaux présentent une section sensiblement uniforme sur toute leur longueur.
Selon un autre agencement possible, les canaux présentent une section évolutive, de telle sorte que chacun d'entre eux comprend successivement une partie d'entrée convergente et une partie de sortie divergente, dans le sens de l'écoulement du réfrigérant gazeux. Cet agencement permet de détendre le réfrigérant gazeux dans la partie d'entrée convergente des canaux et, par conséquent, d'assurer un refroidissement plus efficace du cœur du fait que la température du réfrigérant gazeux est plus faible que dans le cas où la section des canaux est uniforme. Cet agencement permet aussi de comprimer le réfrigérant gazeux dans le diffuseur de sortie en régime subsonique . Dans le mode de réalisation préféré de l'invention, les particules fissiles élémentaires sont des corps fissiles et fertiles noyés directement dans la matrice métallique. Chacune des tôles peut alors être obtenue directement par laminage, ou colaminée avec des revêtements métalliques placés sur chacune de ses faces.
En variante, les particules fissiles élémentaires sont des corps fissiles et fertiles enrobés, noyés dans la matrice métallique. Dans ce cas, les tôles combustibles sont obtenues directement par laminage .
Les éléments formant les particules fissiles élémentaires sont de l'uranium et/ou du plutonium et/ou du thorium. Il est à noter que l'élément combustible selon l'invention permet de consommer de l'uranium appauvri, constitué principalement d'uranium 238.
L'invention a également pour objet un réacteur nucléaire refroidi par un réfrigérant gazeux et dont le cœur est formé d'éléments combustibles du type défini ci-dessus. Un tel réacteur se caractérise notamment par le fait que le flux de neutrons dans le cœur est essentiellement un flux de neutrons rapides.
Le réfrigérant gazeux est avantageusement du gaz carbonique C02, de l'hélium, de l'air ou de 1 ' argon . Le pilotage et le contrôle d'un tel réacteur peuvent être assurés au moyen d'organes de contrôle en carbure de bore B4C agencés de façon à pouvoir être introduits entre les éléments combustibles .
Brève description des dessins
On décrira à présent, à titre d'exemple non limitatif, un mode de réalisation préféré de l'invention en se référant aux dessins annexés, dans lesquels :
- la figure 1 est une vue en perspective qui représente un élément combustible selon un premier mode de réalisation de 1 ' invention ;
- la figure 2 est une vue en coupe à plus grande échelle, dans un plan horizontal, de l'élément combustible de la figure 1 ;
- la figure 3 est une vue en coupe comparable à la figure 2 illustrant une variante de réalisation ;
- la figure 4 est une vue en perspective comparable à la figure 1, illustrant un autre mode de réalisation d'un élément combustible selon 1 ' invention ; et
- la figure 5 représente le spectre neutronique obtenu par le calcul, en milieu infini, dans l'hypothèse où des éléments combustibles conformes à l'invention forment le cœur d'un réacteur nucléaire refroidi par du gaz carbonique C02.
Description détaillée de modes de réalisation préférés de l' invention
Dans les différents modes de réalisation décrits, les éléments remplissant des fonctions comparables sont désignés par les mêmes références numériques . Sur la figure 1, on a représenté schématiquement en perspective un élément combustible 10 conforme à un premier mode de réalisation de 1 ' invention.
Selon une caractéristique essentielle de l'invention, l'élément combustible 10 est constitué par l'assemblage d'un certain nombre de tôles combustibles
juxtaposées. Dans le mode de réalisation illustré sur les figures 1 et 2, les éléments combustibles juxtaposées comprennent des tôles planes 12a parallèles entre elles et des tôles ondulées 12b. Ces tôles planes 12a et ondulées 12b sont disposées de façon alternée, c'est-à-dire que chacune des tôles ondulées 12b est placée entre deux tôles planes 12a. On observera cependant que cet agencement n'est donné qu'à titre d'exemple nullement limitatif de l'invention, les différentes tôles combustibles- constituant l'élément combustible 10 pouvant prendre de nombreuses autres formes sans sortir du cadre de l'invention, comme on le précisera par la suite.
L'expression "tôles combustibles" signifie que chacune des tôles telles que 12a et 12b de l'élément combustible 10 est massive et constitue en elle même le combustible nucléaire, c'est-à-dire le milieu fissile.
Les tôles combustibles telles que 12a et 12b sont des tôles minces, c'est-à-dire des tôles présentant quelques millimètres d'épaisseur. A titre d'exemple non limitatif, l'épaisseur des tôles 12a et 12b peut être de 2 mm environ.
Chacune des tôles telles que 12a et 12b est obtenue par laminage ou par colaminage d'un cermet constitué par des particules fissiles élémentaires noyées dans une matrice métallique. Dans le cas des tôles non planes telles que les tôles ondulées 12b, la plaque obtenue est ensuite mise en forme, par exemple dans une presse. Les particules fissiles élémentaires sont des particules sensiblement spheriques dont le diamètre est
de 1 ' ordre de quelques centaines de microns . Chacune d'entre elles contient un élément fissile constitué par du plutonium et/ou de l'uranium.
La matrice métallique est réalisée en un métal tel que le molybdène, l'acier, le tungstène, le zirconium ou le Zircaloy (marque déposée) .
Etant donné que l'élément combustible 10 est prévu pour être utilisé dans un réacteur nucléaire refroidi par un réfrigérant gazeux, les corps fissiles contenus dans les particules fissiles élémentaires sont avantageusement non revêtus, c'est-à-dire que ces corps fissiles sont noyés directement dans la matrice métallique, sans être protégés par un ou plusieurs revêtements . Le confinement des gaz de fission libérés par ces particules est alors assuré directement par la matrice métallique. Ce résultat peut notamment être obtenu en laminant un lingot présentant une concentration en particules fissiles plus forte en son centre qu'à proximité de ses faces. Si la technique de fabrication des tôles 12a et 12b ne permet pas de garantir la présence de métal entre toutes les particules fissiles élémentaires et les deux faces des tôles, nécessaire au confinement des gaz de fission, un revêtement métallique peut être prévu sur chacune desdites faces. Les tôles combustibles telles que 12a et 12b sont alors réalisées par colaminage avec les revêtements précités . Dans ce cas, le métal des revêtements est choisi dans le même groupe de matériaux que le métal de la matrice. En variante, il est également possible d'utiliser des particules fissiles élémentaires
constituées par des corps fissiles enrobés, c'est-à-dire revêtus de plusieurs couches de protection intégrant notamment une couche de carbure de silicium Sic. La présence d'un revêtement métallique sur chacune des faces de la plaque combustible n'est alors pas nécessaire et celle-ci est fabriquée directement par laminage et éventuellement formage.
Selon une caractéristique essentielle de l'invention, les différentes tôles combustibles telles que 12a et 12b entrant dans la composition de l'élément combustible 10 sont assemblées de façon telle que les tôles combustibles adjacentes définissent entre elles une pluralité de canaux 14 d'écoulement du réfrigérant gazeux. Les canaux 14 sont de préférence, sensiblement parallèles les uns aux autres .
Dans le mode de réalisation illustré à titre d'exemple sur les figures 1 et 2 , c'est-à-dire lorsque l'élément combustible 10 est constitué par l'assemblage de tôles planes 12a et de tôles ondulées 12b, les canaux 14 ont tous en section sensiblement la forme d'un triangle isocèle aplati.
Cet agencement, comparable à celui qui est utilisé dans un echangeur thermique à plaque, procure une surface d'échanges thermiques relativement importante entre le matériau combustible et le réfrigérant gazeux. A titre d'illustration, dans le cas de tôles 12a et 12b de 2 mm d'épaisseur, le pas des ondulations des tôles 12b étant de 20 mm et 1 ' écartement entre les plans médians de deux tôles planes 12a consécutives étant de 10 mm, on obtient pour chaque canal 14 un périmètre chauffant de 43 , 8 mm et
pour l'ensemble du cœur, une densité volumique de surface d'échange de 436/m.
De plus, le caractère monobloc des tôles telles que 12a et 12b permet d'assurer un transfert thermique efficace entre le matériau combustible qu'elles contiennent et le réfrigérant gazeux. Les objectifs recherchés sont ainsi atteints.
De façon plus générale, les formes des différentes tôles telles que 12a et 12b entrant dans la composition de l'élément combustible 10 conforme à l'invention sont choisies de manière à offrir la plus grande surface d'échanges thermiques possible entre les parois de ces tôles et le réfrigérant gazeux, tout en gardant une valeur raisonnable de résistance à l'écoulement. On obtient ainsi des valeurs importantes de surfaces d'échanges thermiques entre le matériau combustible et le réfrigérant gazeux par unité de volume du cœur.
Cette caractéristique, combinée avec la très bonne conductivité thermique des tôles combustibles en cermet, procure de nombreux avantages. Parmi ces avantages, on citera la possibilité d'obtenir des densités volumiques de puissance satisfaisantes pour la conception neutronique du cœur ainsi que pour le dimensionnement du réacteur et les investissements correspondants. De plus, l'agencement décrit permet un très bon comportement thermique en fonctionnement grâce au faible écart de température entre le matériau combustible et le gaz réfrigérant. Lors d'un arrêt pour l'évacuation de la puissance résiduelle il facilite notamment le fonctionnement en circulation naturelle en
cas de perte des moyens normaux de refroidissement tels que les soufflantes assurant la circulation du gaz réfrigérant dans le réacteur. Enfin, l'agencement précité autorise une réduction de la chaleur accumulée dans le combustible, c'est-à-dire une réduction de la température de celui-ci, qui facilite la gestion des transitoires accidentels.
L'assemblage des différentes tôles combustibles telles que 12a et 12b entrant dans la composition de l'élément combustible 10 peut être assuré par tout moyen approprié. Ainsi et comme l'illustre schématiquement 1, les tôles combustibles peuvent être maintenues en appui les unes contre les autres par une enveloppe 16 de section rectangulaire entourant l'ensemble des tôles combustibles sur les deux faces de 1 ' empilement de tôles ainsi que sur les côtés de cet empilement orientés parallèlement aux canaux 14. En variante, l'enveloppe 16 peut être remplacée par deux dispositifs de maintien, ou plus, encerclant l'empilement de tôles, par un ensemble de boulons ou d'organes de fixation équivalents traversant l'empilement de tôles, par un collage ou un soudage des tôles adjacentes, etc..
Comme l'illustre la figure 1, l'élément combustible 10 est prévu pour être placé verticalement dans le cœur d'un réacteur nucléaire à réfrigérant gazeux. Les canaux 14 d'écoulement du réfrigérant gazeux sont alors orientés sensiblement verticalement et le réfrigérant y circule de bas en haut. De plus, l'élément combustible 10 ainsi que les tôles combustibles telles que 12a et 12b qui le constituent
s ' étendent avantageusement sur toute la hauteur du cœur du réacteur.
Dans le mode de réalisation illustré à titre d'exemple sur les figures 1 et 2 , les tôles ondulées 12b sont toutes identiques et leurs ondulations sont alignées, de telle sorte que chacune des tôles planes 12a est alternativement en contact avec une ondulation d'une première plaque ondulée 12b située d'un côté de cette plaque plane 12a et avec une ondulation d'une plaque ondulée 12b située de l'autre côté de la plaque 12a.
Sur la figure 3, on a représenté une variante de ce premier mode de réalisation, dans laquelle les tôles ondulées 12b sont décalées régulièrement d'une ondulation d'une plaque ondulée 12b à l'autre. Par conséquent, les deux faces de chacune des tôles planes 12a sont simultanément en contact avec une ondulation de chacune des tôles ondulées 12b situées de part et d'autre de cette plaque plane. En d'autres termes, les tôles ondulées 12b consécutives sont agencées symétriquement par rapport au plan médian de la plaque plane 12a placée entre elles .
Comme on l'a déjà mentionné, les différentes tôles combustibles formant l'élément combustible 10 peuvent prendre de nombreuses autres formes sans sortir du cadre de l'invention. Ainsi, dans la variante de la figure 3, les tôles planes 12a peuvent être supprimées. Par ailleurs, dans les modes de réalisation des figures 1 à 3, les ondulations des tôles 12b peuvent présenter différentes hauteurs et/ou être remplacées par des formes plus complexes. En outre, dans tous les cas, au
lieu de se présenter sous la forme d'un panneau plan, l'empilement de tôles peut être enroulé sur lui-même pour présenter une section circulaire, en spirale, etc.. De façon générale, toutes les techniques habituellement utilisées dans les echangeurs thermiques constitués de tôles empilées peuvent être transposées à la réalisation des éléments combustibles 10 conformes à 1 ' invention.
Dans la description qui précède, les canaux 14 d'écoulement du réfrigérant gazeux formés entre les tôles combustibles présentent toujours une section sensiblement uniforme sur toute leur longueur. Comme l'illustre schématiquement la figure 4, les canaux 14 peuvent aussi présenter une section évolutive. Ainsi, chacun des canaux 14 peut comprendre successivement une partie basse d'entrée convergente et une partie haute de sortie divergente, formant diffuseur, dans le sens de l'écoulement du réfrigérant gazeux à l'intérieur de l'élément combustible 10, c'est-à-dire de bas en haut. Cet agencement permet de détendre le réfrigérant gazeux dans la partie d'entrée convergente de chacun des canaux. On assure ainsi un refroidissement plus efficace du cœur du réacteur puisque la température du réfrigérant gazeux est plus faible que lorsque les canaux 14 présentent une section uniforme. De plus, le réfrigérant gazeux est comprimé dans la partie de sortie divergente en régime subsonique .
A titre d'illustration, l'élément combustible 10 décrit précédemment en se référant à la figure 1 se présente sous la forme d'un panneau dont les dimensions
peuvent être, par exemple, de 2 m dans le sens de la longueur ou de la hauteur, de 47 cm dans le sens de la largeur et de 7 , 2 cm dans le sens de l'épaisseur. Un tel panneau est obtenu en assemblant quinze tôles combustibles de 2 mm d'épaisseur comprenant huit tôles planes 12a et sept tôles ondulées 12b, 1 ' ecartement entre les plans médians de deux tôles planes 12a adjacentes étant de 10 mm et 1 ' ecartement entre deux ondulations consécutives des tôles ondulées 12b étant également de 10 mm.
Comme on l'a déjà indiqué, cet agencement permet d'obtenir une densité volumique de surfaces d'échanges de 436/m, un diamètre hydraulique de 5,2 mm, et un périmètre chauffant de 43,8 mm. Les éléments combustibles 10 conformes à l'invention sont prévus pour être utilisés dans le cœur d'un réacteur nucléaire refroidi par un réfrigérant gazeux. Ce réfrigérant gazeux peut notamment être du gaz carbonique C02, de l'hélium, de l'air ou de l'argon sous pression.
Des calculs simples montrent qu'un réacteur nucléaire refroidi par l'un quelconque de ces gaz et dont le cœur est formé d'éléments combustibles 10 conformes à l'invention permet d'obtenir soit une densité de puissance dans le combustible relativement modeste avec un cœur d'une très grande longévité, soit une densité de puissance plus élevée avec un cœur présentant une longévité encore satisfaisante.
Ainsi, en faisant circuler du gaz carbonique C02 dans un cœur de 9 m2 de section et de 2 m de hauteur, constitué d'éléments combustibles 10 du type
décrit en référence aux figures 1 et 2, une très grande longévité est obtenue avec une vitesse de 40 m/s à la sortie du cœur, les températures d'entrée et de sortie étant respectivement de 250°C et de 600°C. Dans ce cas, la puissance thermique échangée est de 1753 MW, ce qui donne une puissance électrique de 720 MWe avec un rendement de l'ordre de 41 %. La densité de puissance dans le combustible est limitée à 195 MW/m3, et le flux surfacique relativement faible (225 KW/m2 ) correspondant à la très grande surface d'échange assure un écart de température inférieur à 65°C entre le centre du combustible et le gaz réfrigérant. La température du combustible au point le plus chaud est alors inférieure à 700°C. Les pertes de charges de 1 ' écoulement de gaz carbonique à travers le cœur sont d ' environ 3 bars .
Une densité de puissance sensiblement plus importante est obtenue en utilisant du gaz carbonique sous une pression de 40 bars, sa vitesse d'écoulement en sortie de cœur étant de 50 m/s et la température d'entrée et de sortie du gaz carbonique étant respectivement de 250°C et de 800°C. Dans ce cas, la puissance thermique du cœur est de 2816 MW, ce qui correspond à une puissance électrique de 1240 MWe en prenant un rendement de 43 %. La densité de puissance dans le combustible est de 319,11 MW/m3, la température au cœur du combustible est légèrement inférieure à 900°C et la perte de charge estimée au passage du cœur est légèrement inférieure à 4 bars . Des caractéristiques de puissance (de l'ordre de 1200 MWe) proches de celles du second cas ci-dessus
peuvent être obtenues en utilisant de l'hélium comme réfrigérant, sous une pression de 70 bars, la vitesse en sortie de cœur étant de 65 m/s et les températures d'entrée et de sortie du cœur étant de 260°C et de 900°C. Dans ce cas, la température maximale du combustible est inférieure à 1000°C et la perte de charge dans le cœur est inférieure à 1 bar.
Comme on l'a déjà indiqué, les particules fissiles élémentaires contenues dans les tôles combustibles telles que 12a et 12b sont formées d'éléments fissiles tels que de l'uranium et/ou du plutonium et éventuellement d'éléments fertiles tels que du thorium.
Plus précisément, les particules d'uranium se présentent avantageusement sous la forme de dioxyde d'uranium U02 appauvri et de dioxyde de plutonium. L'expression "dioxyde d'uranium appauvri" désigne des particules contenant 0,25 % d'uranium 235 pour 99,75 % d'uranium 238. Les particules de plutonium se présentent généralement sous la forme de dioxyde de plutonium Pu02 obtenu à partir de plutonium issu d'un réacteur nucléaire à eau sous pression existant. A cet effet, on utilise avantageusement du plutonium dit "de qualité 2016", c'est-à-dire du plutonium dont la composition moyenne correspond à celle qui serait produite en l'an 2016 par des réacteurs à eau sous pression de 900 MW électriques, après trois cycles classiques, refroidis pendant trois ans, retraités et fabriqués dans les deux ans qui suivent.
Dans un premier exemple de composition, chacune des tôles combustibles peut comprendre 34 % de particules d'U02, 16 % de particules de Pu02 et 50 % de matrice métallique, en volume. Comme on l'a déjà indiqué, le métal de la matrice peut notamment être constitué par du molybdène, de l'acier, du tungstène, du zirconium ou du Zircaloy (Marque déposée) . Cette composition n'est évidemment donnée qu'à titre d'illustration, les teneurs en noyaux fissiles étant optimisées en fonction de la •' stratégie de gestion affectée au cœur.
Des calculs ont été effectués sur la base de cette composition, à l'aide du code de calcul APOLLO 2 du Commissariat à l'Energie Atomique. Dans ces calculs, on a pris pour hypothèse que les particules de Pu02 étaient obtenues à partir de plutonium de qualité 2016.
Sur la figure 5, on a représenté le spectre neutronique, obtenu par le calcul, d'un réacteur nucléaire dont le cœur est formé d'éléments combustibles ayant une constitution conforme à l'exemple ci-dessus. En d'autres termes, la figure 5 représente la répartition du flux des neutrons (en n.s_1.cm"2) en fonction de l'énergie (en électronvolts), en milieu infini. Ce spectre neutronique montre que le flux des neutrons dans le cœur est essentiellement un flux de neutrons rapides (vitesse de l'ordre de 40 000 km/s). En particulier, le flux peut être considéré comme nul au-dessous d'une énergie de seuil d'environ 50 électronvolts et comme presque nul dans le domaine des résonances de l'uranium 238. Cette dernière
caractéristique permet de réduire le taux de capture résonante de l'uranium 238, en réduisant la production d'uranium 239. Cette caractéristique permet également d'augmenter le taux de fission dans le domaine rapide de l'uranium 238, en améliorant sensiblement la proportion de neutrons retardés βθff.
Par ailleurs, les calculs neutroniques montrent que les éléments combustibles conformes à l'invention, conjointement avec la composition d'assemblages précitée, permettent d'obtenir des propriétés neutroniques très intéressantes. Ainsi, le coefficient Doppler est de l'ordre de -1,40 pcm/°C, ce qui permet d'envisager un comportement intrinsèquement sûr du cœur en cas d'excursion de puissance entraînant une augmentation de la température du combustible.
De façon comparable, la proportion de neutrons retardés (βθff) et de 364 pcm, ce qui autorise une bonne marge de contrôle du réacteur, en cas de retrait intempestif d'un organe de contrôle. Ce phénomène favorable est accentué par la forte résistance à la fracturation et la température de fusion relativement élevée de certains cermets .
En outre, le coefficient de réactivité est de l'ordre de 1,467 pour un cœur neuf (milieu infini). Compte tenu de la puissance volumique dégagée par le combustible (environ 88 W/g de noyaux lourds) il est possible de réaliser des cycles très longs et notamment d'obtenir un taux de combustion au déchargement qui tend vers 100 GWj/t (équivalent U02) . Dans les mêmes hypothèses, le tableau I donne la composition initiale en noyaux lourds d'un cœur de
réacteur nucléaire conforme à l'exemple considéré, ainsi que la composition finale de ce cœur pour une puissance volumique de 195 WM/m3 (ce qui correspond au premier exemple d'un réacteur au C02 défini ci-dessus) et un taux de combustion au déchargement de 125 GWj/t. Dans ce tableau, les valeurs massiques, exprimées en kg ont été calculées pour les dimensions du cœur données précédemment à titre d'exemple (18 m3).
TABLEAU I
Le tableau I montre qu'en fin de cycle, la teneur en plutonium fissile reste importante (environ
50 %) . Cela permet d'envisager un retraitement
supplémentaire du plutonium afin d'obtenir une charge modulée par l'utilisation d'un support de type UOX enrichi et de permettre une valorisation supplémentaire du plutonium. Par ailleurs, bien que la consommation du plutonium ne soit pas l'objectif principal de l'invention, on peut remarquer que la fraction consommée (34 %) est supérieure à celle d'un réacteur à eau sous pression à 30 % de combustibles de type MOX, celle-ci étant limitée à environ -25 %.
Il est à noter par ailleurs que la composition initiale du combustible pourrait être optimisée de façon à améliorer la consommation de plutonium. Cependant, ce type de combustible a principalement pour avantage d'être un important consommateur d'uranium 238 (diminution d'environ 30 %) . Cela représente une importante valorisation économique de ce matériau combustible, disponible en très grande quantité.
Le contrôle d'un réacteur nucléaire refroidi au gaz et dont le cœur est constitué d'éléments combustibles conformes à l'invention est assuré en insérant des tôles de carbure de bore entre les éléments combustibles. En effet, compte tenu du spectre rapide existant dans le cœur du réacteur, les absorptions des isotopes lourds sont faibles et ont individuellement un poids très limité dans le bilan neutronique. En revanche, le bore présente localement un très fort taux d'absorption et possède donc une efficacité très importante. En effet, il a des sections efficaces dans ce domaine d'énergie du même ordre de grandeur que celle des isotopes du combustible mais sa
concentration est plus de 50 fois supérieure. Par conséquent, l'insertion d'une plaque de carbure de bore par élément combustible est suffisante pour garantir au facteur de multiplication (k infini) une valeur inférieure à 0,925.
Des calculs ont également été effectués sur la base d'une composition de combustible contenant une teneur en plutonium réduite de moitié par rapport à l'exemple précédent. Cette hypothèse vise à permettre de relâcher les contraintes liées à la fabrication d'éléments combustible à teneur élevée en plutonium.
Ces calculs montrent que des longueurs de cycles intéressantes (environ trois fois 18 mois) sont obtenues. De plus, le niveau de réactivité initiale étant plus faible, ce combustible peut être contrôlé plus aisément. La moindre quantité de plutonium et la quantité supérieure d'uranium 238 conduisent à un coefficient Doppler et à un taux de neutrons retardés plus avantageux. Par ailleurs, la consommation d'uranium 238 est moindre que dans le cas précédent et la variation de plutonium 239 presque nulle.
D'autres calculs ont été effectués, dans les deux exemples de compositions du combustible énoncés ci-dessus, en prenant pour hypothèse que la puissance volumique est de 319 MW/m3 (ce qui correspond au deuxième exemple d'un réacteur refroidi au C02, donné précédemment) .
Dans les deux cas, l'augmentation de la puissance spécifique engendre une réduction de la longueur du cycle. Cependant, le cycle obtenu reste très intéressant. Ainsi, dans le cas d'un combustible
contenant 8 % en volume d'oxyde de plutonium on obtient trois cycles d'environ 30 mois et dans le cas d'un combustible à 5 % en volume d'oxyde de plutonium, on obtient trois cycles de 12 mois. Par ailleurs, l'augmentation de la puissance est pratiquement sans effet sur les pourcentages de plutonium et d'uranium consommés lorsque la teneur en plutonium est élevée. Toutefois, la production d' actinides mineurs est légèrement plus faible lorsque la puissance est augmentée.
Dans le cas d'un combustible à faible teneur en plutonium, la consommation d'uranium 238 et de plutonium 239 est beaucoup plus efficace lorsque la puissance volumique est plus élevée. Bien entendu, les éléments combustibles conformes à l'invention peuvent être utilisés aussi bien dans des cœurs de forme parallelepipédique que dans des cœurs de forme cylindrique ou autres. Comme on l'a déjà indiqué, la forme de chacun des éléments combustibles peut en effet être différente de celle qui a été décrite en se référant notamment à la figure 1.