MICRO-ORGANISMES ACTIFS DANS L'ENVIRONNEMENT DIGESTIF
La présente invention concerne le développement de micro-organismes génétiquement modifiés, notamment de levures génétiquement modifiées, pouvant survivre dans un environnement digestif et y exprimer efficacement un ou plusieurs gènes d'intérêt. La forme galénique et le mode d'administration de ces micro-organismes sont également proposés. De plus, l'invention se rapporte à l'utilisation de systèmes digestifs artificiels simulant les fonctions gastro-intestinales de l'homme pour l'étude, le contrôle et la sélection des micro-organismes précités. L'invention porte également sur des applications directes de bioconversion in situ, en particulier dans la mise au point de traitements préventifs ou curatifs de pathologies, notamment de maladies liées au métabolisme des xénobiotiques.
Les êtres vivants sont continuellement en contact avec des xénobiotiques, substances dites étrangères aux voies métaboliques « normales » de la cellule (médicaments, pesticides, polluants, additifs alimentaires, molécules « naturelles » de plantes...). Ces composés, souvent trop hydrophobes pour être éliminés directement par les reins ou dégradés par la bile, s'accumulent dans les lipides de l'organisme. Les enzymes du métabolisme des xénobiotiques (ou EMX) sont chargées de faciliter leur élimination en les rendant plus hydrophiles.
Ces enzymes sont classées en trois catégories :
- les enzymes de phase I (phase de fonctionnalisation) : rendant le xénobiotique plus hydrophile par introduction de groupements polaires (le plus souvent par des réactions d'oxydation). Ce sont principalement les monooxygénases à cytochrome P450, hémoprotéines présentant un maximum d'absorption caractéristique aux environs de 450 nm, lorsqu'elles sont réduites et liées au monoxyde de carbone (Omura, 1964, 1993). Chez les mammifères, les P450 se situent majoritairement au niveau de la membrane du réticulum endoplasmique lisse, principalement dans le foie, mais également dans les poumons et l'intestin, organes jouant un rôle dans le contrôle de l'entrée de nombreux xénobiotiques dans l'organisme.
Chaque P450 fait partie d'un complexe multienzymatique où il est associé à deux systèmes de transport d'électrons à flavoprotéine, la NADPH-cytochrome P450 réductase et la NADH-cytochrome b5 réductase.
Les P450 fonctionnent selon un cycle catalytique au cours duquel le fer passe par différents degrés d'oxydation, ce qui conduit à l'incorporation d'un atome d'oxygène dans le substrat R selon la réaction suivante (Guengerich, 1993) : RH + O2 + 2e- + 2H+ => ROH + H2O
Les P450 possèdent des propriétés catalytiques originales puisque, contrairement à la majorité des enzymes, un P450 donné peut agir sur de nombreux substrats présentant des structures très différentes et, inversement, un même substrat peut être reconnu par différents P450 (Coon et al., 1992). Des facteurs endogènes (espèce, souche...), physiologiques (âge, sexe...), mais également des facteurs exogènes peuvent moduler l'activité des P450 (Guengerich, 1993), en agissant à différents niveaux : expression du gène, stabilisation de la protéine, modulation de l'activité. - les enzymes de phase II (phase de conjugaison) : rendant les métabolites issus de la phase I encore plus hydrophiles (s'ils ne sont pas excrétés directement), par conjugaison à des molécules endogènes diverses (glutathion, glucuronide...). Ces enzymes sont présentes dans presque toutes les cellules de l'organisme, les principales étant la glutathion S-transférase (GST), la N-acétyl transférase (NAT), la quinone réductase (QR), l'aldéhyde deshydrogénase (ALDH), l'uridine diphosphoglucuronosyl transférase (UGT), la sulfotransférase, l'époxide hydrolase et la O-acétylase. - les enzymes de phase III (phase d'évacuation) : chargées d'éliminer des cellules les métabolites issus des réactions de détoxication (pompes transporteurs ABC, en particulier les pompes multidrug résistant MDR).
Globalement, le métabolisme des xénobiotiques est considéré comme une voie de détoxication. Cependant les enzymes de phase I peuvent donner naissance à des métabolites plus réactifs que la molécule initiale, susceptibles de se lier aux protéines (provoquant des nécroses ou des maladies auto-immunes), aux acides nucléiques (responsables de mutagénèse ou de cancérogénèse) ou aux lipides (peroxy dation
lipidique). C'est le cas notamment lorsque les enzymes de phase II sont absentes ou d'activité trop faible.
L'activité des EMX est déterminée génétiquement et hautement variable selon les individus (polymorphisme génétique). L'analyse moléculaire des corrélations existant entre gènes majeurs impliqués dans les processus de détoxication et de biotransformation, et pathologies fait actuellement l'objet de nombreux travaux de recherche. En effet, des anomalies dans les processus de détoxication et de biotransformation des composés exogènes ont clairement été identifiées chez des patients atteints de maladies dites « multifactorielles » (maladies combinant prédisposition génétique et rôle de facteurs environnementaux), très répandues à ce jour dans le monde, telles que différents cancers, diverses pathologies digestives, endométriose, bronchite chronique... Pour exemple, le risque de cancer des poumons induit par les hydrocarbures aromatiques polycycliques est augmenté d'environ 40 fois lorsque l'individu est déficient en GSTM1 (phénotype GSTM1 0/0) et possède un P450 1 Al à forte activité enzymatique (Raunio et al., 1995). De plus, selon des études épidémiologiques, les populations qui ont le plus grand risque de développer un cancer du côlon sont celles qui possèdent le phénotype « métaboliseur rapide » pour la NAT2 et le P4501 A2 et qui sont exposées à des hauts niveaux d'aminés hétérocycliques dans leur alimentation (Lang et al., 1994). Concernant le cancer du sein, des corrélations ont pu également être établies. Les femmes possédant une forme de P450 1A1 hautement inductible voient leur risque d'avoir un cancer du sein augmenté. De même, le risque de cancer du sein est augmenté (x4) chez les femmes ménopausées, fumant modérément (présence d'aminés aromatiques) et possédant un phénotype lent pour NAT2. Le groupe à risque pour le cancer de la vessie est représenté par les individus déficients en GSTM1 et NAT2 (Brockmoller et al., 1996). Une corrélation positive a été établie entre endométriose et femmes déficientes en GSTM1, ainsi qu'avec le phénotype métaboliseur lent pour NAT2 (Baranova et al., 1999).
L'alimentation est une des principales sources de xénobiotiques impliqués dans les
maladies multifactorielles, d'où l'intérêt d'assurer la détoxication de ces xénobiotiques avant qu'ils n'exercent des effets négatifs sur les organes cibles.
Ainsi, la présente invention concerne le développement d'un « médicament vivant », micro-organismes génétiquement modifiés, et plus particulièrement les levures, exprimant dans l'environnement digestif un ou plusieurs gène(s) d'intérêt(s) permettant de corriger des dysfonctionnements du métabolisme des xénobiotiques, tels que ceux mentionnés ci-dessus. Ce ou ces gènes d'intérêt seront choisis après détermination des corrélations entre patrimoine génétique et présence de pathologie et après évaluation de la prévalence de cette pathologie.
Outre la principale application de détoxication, deux autres objectifs de la présente invention sont décrits ci-dessous, à titre d'exemples.
Le premier consiste à faire exprimer dans l'environnement digestif par lesdits micro- organismes un gène d'intérêt codant pour une enzyme permettant l'activation in situ de pré-substance en substance active. L'administration d'un tel « médicament vivant » permettant de contrôler la bioconversion de pré-substance en substance active est tout particulièrement intéressante dans le cas où la substance active possède des effets secondaires indésirables et/ou est toxique à partir d'une certaine dose. Parmi ces applications, on peut citer la transformation de provitamines en vitamines.
Le second consiste à faire produire dans l'environnement digestif par ces microorganismes un peptide ou un polypeptide actif, en particulier ayant des propriétés antigéniques. La production de tels peptides, en différents points du tractus digestif, aboutit à la mise au point de « vaccins vivants » permettant de contourner un certain nombre de difficultés rencontrées dans les méthodes classiques d'administration appartenant à l'état de la technique, telles les problèmes de dégradation.
Fahl et al (WO 99/27953) ont construit des souches cVE.coli exprimant des enzymes de mammifères (P450 1A1, NADPH-cytochrome P450 réductase et GST) dont les gènes ont été insérés dans un plasmide. Ces constructions modèles sont réalisées dans le but de développer des « souches bactériennes chimioprotectrices », en particulier des
Lactobacilles, exprimant des enzymes de mammifères impliquées dans la détoxication de procarcinogènes et administrées dans l'environnement digestif afin de supplémenter le système de détoxication des cellules gastro-intestinales.
Fahl et al. ne précisent pas la durée de survie des Lactobacilles génétiquement modifiés dans un environnement digestif et s'ils peuvent y exprimer efficacement un gène d'intérêt.
Pour répondre à ces questions, nous avons mis en place des systèmes digestifs artificiels qui permettent d'étudier, d'adapter, de contrôler et de sélectionner des micro-organimes qui survivent au moins pendant un temps minimum et qui peuvent exprimer efficacement in situ (c'est-à-dire dans l'environnement digestif) un ou plusieurs gènes hétérologues d'intérêt. Bien entendu, la durée de survie dépend des micro-organismes en question et de l'environnement digestif, mais on peut définir dans le cadre de l'invention ce paramètre comme étant supérieur à 6h dans l'estomac- intestin grêle et 48H dans le côlon, c'est à dire la durée moyenne du transit dans ces compartiments digestifs chez l'homme.
Parmi les micro-organismes préférés de l'invention, on peut citer les levures. En effet, au même titre que les bactéries visées par la demande de brevet précédemment citée, les levures sont des organismes présents dans l'alimentation animale et/ou humaine et des hôtes bien connus de l'environnement digestif. Certaines d'entre elles sont des orgamsmes GRAS ou « generally recognized as safe » et sont utilisées depuis quelques années comme probiotiques.
Leur facilité de production explique leur utilisation à grande échelle dans l'industrie alimentaire, par exemple dans les processus de fabrication de la bière et du pain ou comme additif dans l'alimentation animale et humaine. S cerevisiae est la plus connue et la plus exploitée commercialement. Aujourd'hui, S cerevisiae et S boulardii sont également utilisées dans l'industrie pharmaceutique comme médicaments (carbolevure® et ultralevure® respectivement), principalement destinés au traitement des troubles secondaires à l'antibiothérapie tels que diarrhées, colites ou candidoses (Ligny G, 1975). De très nombreuses études réalisées chez l'animal et chez l'homme soulignent à la fois l'innocuité et l'impact positif de ces levures sur l'environnement digestif (antagonisme vis à vis des Candidas par exemple).
Comparativement aux bactéries, l'utilisation de levures à des fins de médicaments vivants présente des avantages considérables :
- Contrairement aux bactéries, les levures sont des organismes eucaryotes. L'intégration génomique de fragments hétérologues est facilement réalisable
(recombinaison homologue hautement efficace) et aboutit à une construction plus stable que celle obtenue par insertion plasmidique, ce qui notamment limite les transferts potentiels du gêne d'intérêt à la flore endogène humaine. De plus, les levures présentent une organisation subcellulaire très voisine de celle des eucaryotes supérieurs et disposent de mécanismes de transport intracellulaire et de processing post-traductionnel indispensables à l'expression fonctionnelle et compartimentée de beaucoup de gènes hétérologues. Pour exemple, il a été montré qu'elles possèdent les critères nécessaires à la synthèse de P450 humains fonctionnels puisqu'un système d'adressage des protéines ("Signal Récognition Particule" ou SRP) permet la translocation du P450 synthétisé vers le réticulum endoplasmique, ce qui aboutit à une localisation intracellulaire et un repliement du P450 corrects (Urban et al., 1994a ; Pompon et al., 1997). Les levures possèdent également un environnement membranaire lipidique permettant la stabilité du P450 et des protéines de transfert d'électrons (NADPH- cytochrome P450 réductase et cytochrome b5) dans la membrane du réticulum endoplasmique, nécessaires à l'activité enzymatique du P450.
- Les levures, bien caractérisées au niveau moléculaire (notamment S cerevisiae, entièrement séquencée depuis 1996-Goffeau et al.-), constituent un outil de base pour l'ingénierie génétique et les bioconversions in vitro dans des conditions de fermentation non seulement de laboratoire mais surtout à grande échelle (production industrielle).
- Certaines levures telles que S cerevisiae possèdent la capacité de vivre en aérobie et en anaérobie, ce qui permet d'envisager l'utilisation de telles levures à tout niveau du tractus digestif.
- D'autres avantages concernant la construction des levures recombinées sont également à souligner. En effet, les levures sont sélectionnées par auxotrophie et non sur la base d'une résistance à un antibiotique, ce qui évite d'être confronté aux
problèmes liés à l'administration à l'homme d'organismes génétiquement modifiés possédant un gène de résistance à un antibiotique. De plus, l'insertion génomique du gène d'intérêt est facilitée par la propriété de recombinaison qu'ont certaines levures, dont S cerevisiae (Bellamine, 1996).
Des souches de S cerevisiae ont été développées permettant l'expression de trois grands types de gènes intervenant dans les différentes phases du métabolisme des xénobiotiques : des gènes de cytochromes P450 humains (phase I), des gènes d'enzymes "d'environnement de phase I" (NADPH-cytochrome P450 réductase et cytochrome b5 par exemple) et des gènes de phase II. De telles souches ont été décrites par Pompon et al. (US 5,635,369 et EP 595 948).
Dans le cadre de la présente invention, des souches de S. cerevisiae ont été utilisées comme modèles d'étude. Elles expriment d'une part le P450 1A1 humain et la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure ou d'homme (respectivement souches W(R)pHlAl et W(hR)pHlAl ), d'autre part le P450 73A1 de plante et la NADPH- cytochrome P450 réductase de levure (souche W(R)pP73Al).
Le P450 1A1 existe dans la majorité des espèces animales, y compris chez l'homme. La forme humaine a été isolée par Jaiswal et al. (1985). Il intervient dans le métabolisme des hydrocarbures aromatiques polycycliques, en particulier dans celui du benzo(a)pyrène, composé présent notamment dans la fumée de cigarettes et les produits de barbecue (Sims et al., 1974 ; Gautier et al., 1996a). Il est difficilement décelable dans le foie sans l'action d'un inducteur mais existe dans de nombreux tissus extra-hépatiques à l'état constitutif. Il est fortement inductible par des composés aromatiques polycycliques tels que le 3-méthylcholanthrène (3-MC), par des composés aromatiques halogènes tels que la 2,3,7,8-tétrachlorodibenzo-j?-dioxine (TCDD) ou par des flavonoïdes comme la β-naphtoflavone.
Le P450 73A1 (activité cinnamate 4-hydroxylase ou CA4H) catalyse la première étape de la voie des phénylpropanoïdes chez les plantes supérieures en transformant l'acide trans-cinnamique en acide p-coumarique. Cette voie constitue le début de la synthèse
des flavonoïdes (anti-oxydants).
La survie des levures « modèles », le maintien de leur activité après passage dans des systèmes digestifs artificiels et leur activité in situ ont été démontrés dans le cadre de la présente invention. De telles capacités de survie et d'activité enzymatique se révèlent être très importantes si l'on veut utiliser des micro-organismes vivants comme médicament.
A ce titre, la méthode d'évaluation du devenir des micro-organismes médicaments dans l'environnement digestif humain est également un objet de la présente invention. Comme évoqué précédemment, l'un des principaux problèmes rencontrés dans la mise au point d'un médicament « vivant » réside dans sa sélection, dans l'évaluation de sa survie, de son activité et de son contrôle, au sein d'un environnement digestif. Pour contourner ces difficultés, la présente invention propose l'utilisation de systèmes digestifs artificiels reproduisant de la manière la plus fiable et la plus dynamique possible l'environnement digestif humain. Avantageux sur le plan technique, ces systèmes permettent le contrôle des principaux paramètres de la digestion et assurent la reproductibilité des conditions expérimentales, facteurs que l'on ne peut pas ou très difficilement maîtriser chez des animaux de laboratoire. De plus, ces systèmes permettent de réaliser des prélèvements à tout niveau du tractus digestif et de s'affranchir de toutes les contraintes d'éthique liées aux expérimentations animales ou humaines (molécules potentiellement toxiques). De tels systèmes donnent également la possibilité d'évaluer l'impact des micro-organismes génétiquement modifiés sur la flore endogène humaine (implantée dans le système digestif artificiel). Ainsi, les systèmes digestifs artificiels permettent de réaliser une sélection de microorganismes génétiquement modifiés, notamment de levures génétiquement modifiées, qui se sont non seulement adaptés à l'environnement digestif mais qui conservent une bonne capacité à exprimer un gène hétérologue d'intérêt.
Tout système digestif artificiel reprenant les caractéristiques essentielles du système digestif humain peut être utilisé dans le cadre de l'invention. Divers systèmes in vitro
très simples (compartiments digestifs individualisés) ont été décrits. Leur utilisation est cependant limitée par la fragmentation des compartiments digestifs et l'absence de dynamisme. Il est donc avantageux d'utiliser le système digestif artificiel complet décrit dans WO 94/09895.
Un autre avantage de la présente invention provient de la formulation spécifique du médicament vivant de sorte à protéger les micro-organismes et à cibler spécifiquement une action dans telle ou telle partie du système digestif. Les micro-organismes, et plus particulièrement les levures, devant être actifs au niveau du tractus gastro-intestinal, la voie d'administration est la voie orale ou rectale. Les micro-organismes recombinés doivent être administrés sous une forme galénique permettant à la fois de les véhiculer jusqu'à leur lieu d'action, de les maintenir dans un état actif et de les protéger de l'environnement extérieur. Les artifices ou procédés galéniques utilisés pour atteindre ces objectifs sont différents selon la sensibilité des micro-organismes à l'environnement digestif et selon les lieux où ils auront à réaliser leur activité (niveau du tractus gastro-intestinal). Parmi les procédés galéniques utilisés, on peut citer : la lyophilisation des micro-organismes et de leur milieu nutritif, l'encapsulation des micro-organismes ou l'enrobage du système galénique les renfermant à l'aide de polymères sensibles au pH ou possédant des propriétés muco- adhésives, le mélange avec des polymères présentant des propriétés muco-adhésives, la compression des micro-organismes en présence d'excipients possédant des propriétés muco-adhésives, leur incorporation dans des gels hydrophiles ou lipophiles. Les systèmes galéniques qui en résultent sont des formes monolithiques de type comprimés monocouche ou multicouches, de type capsule de gélatine (dure ou molle) ou des formes multiparticulaires de type microgranules ou microcapsules. Ces formes permettent une libération normale ou différée des micro-organismes au sein du tractus digestif.
DESCRIPTION
Micro organismes
Ainsi, dans un premier aspect, la présente invention se rapporte à des microorganismes comportant au moins un fragment d'ADN hétérologue comprenant un ou plusieurs gènes d'intérêt capables de s'exprimer dans l'environnement digestif. Avantageusement, lesdits micro-organismes sont également caractérisés en ce qu'ils peuvent survivre dans l'environnement digestif pendant au moins 6h, lOh ou 12h dans l'estomac et l'intestin grêle et/ou au moins 12h, 24h, 60h ou 72h dans le côlon.
En effet, dans les systèmes digestifs artificiels décrits ci-après, on obtient des microorganismes dont le taux de survie est supérieur à 25%, 50%, 75%, 80%, de préférence 90 % ou 95 % en sortie de l'iléon après 6 h de digestion et est supérieur à 2 %, 4%, de préférence 8% après 12 h de fermentation dans le côlon. Ces mesures peuvent être aisément effecmées par dénombrement à partir d'échantillons facilement prélevables dans les systèmes digestifs artificiels, à tout moment de la digestion ou de la fermentation.
De préférence, les micro-organismes mentionnés ci-dessus sont capables d'effectuer soit une réaction de bioconversion, soit la sécrétion d'un peptide d'intérêt ou d'une protéine dans tous les compartiments digestifs.
Dans le cadre de l'invention, on choisit des levures, de préférence des levures sélectionnées parmi Saccharomyces cerevisiae, S boulardii, S uvarum, Schizosaccharomyces pombe, Kluyveromyces lactis et Yarrowia lipolitica. On peut également choisir des bactéries telles que les lactobacillus décrites dans Fahl et al (WO 99/27953).
Gènes d'intérêt
On entend par gènes d'intérêt des gènes codant pour des peptides à intérêt vaccinal, des peptides à intérêt hormonal (tel l'insuline), des peptides à intérêt thérapeutique
(comme les anti-protéases, les facteurs de coagulation), des peptides à effet antibiotique, des peptides capables de piéger ou de complexer des molécules, des enzymes ou tous peptides possédant des activités de bioconversion, notamment des enzymes de détoxication ou sécrétés dans l'environnement digestif. Dans le sens de l'invention, les termes polypeptides, peptides ou protéines pourront être employés indifféremment les uns des autres et ne constituent en aucun cas une limitation à une taille donnée.
Les gènes d'intérêt seront choisis de préférence parmi les enzymes du métabolisme des xénobiotiques, à savoir des enzymes de phase I (P450 1A1, 1A2, 1B1, 2B6, 2C8, 2C9, 2C18, 2C19, 2D6, 2E1, 3A4, 3A5 et 73A1), des enzymes d'environnement de phase I (NADPH-cytochrome P450 réductase et cytochrome b5), des enzymes de phase II telles que la glutathion S-transférase (GST), la N-acétyl transférase (NAT), la quinone réductase (QR), l'aldéhyde deshydrogénase (ALDH), l'uridine diphosphoglucuronosyl transférase (UGT), la sulfotransférase, l'epoxide hydrolase et la O-acétylase et des enzymes de phase III (pompes transporteurs ABC, en particulier les pompes multidrug résistant MDR).
La glutathion S-transférase est une superfamille de gènes composée de 4 principales classes : alpha (GSTZ), mu (GSTM), pi (GSTP) et teta (GSTT). Ces enzymes jouent un rôle essentiel dans la résistance cellulaire contre la peroxidation lipidique, les dommages de l'ADN et l'alkylation des protéines causés par des espèces chimiques électrophiles. Elles catalysent la liaison de nombreux xénobiotiques électrophiles au glutathion et sont impliquées dans la détoxication des radicaux oxygénés. Les différentes classes de GST sont présentes en grandes quantités dans de nombreux tissus, avec une certaine spécificité de tissus selon la classe considérée.
Les gènes codant pour ces différentes enzymes ont été localisés sur les chromosomes humains. Différents polymorphismes ont été mis en évidence, notamment concernant le gène codant pour la GSTM1. En effet, trois allèles différents de GSTM1 ont été identifiés : les allèles GSTM1A et GSTM1B codent pour des enzymes d'activité similaire alors que l'allèle GSTMIO code pour une enzyme non fonctionnelle. Dans la plupart des populations étudiées au niveau mondial, 35% à 50% des sujets sont
homozygotes pour l'allèle GSTMIO et sont donc dépourvus de l'activité enzymatique correspondante. A cause de cette défaillance de leur système de détoxication, les individus de génotype GSTM 10/0 sont considérés comme des individus à risque lorsqu'ils sont exposés à des niveaux élevés de cancérigènes et de produits chimiques toxiques. En effet, la déficience en GSTM1 est associée avec une augmentation du risque du cancer (principalement cancers des poumons et de la vessie) et de certaines maladies chroniques (endométriose, bronchite chronique...).
Deux N-acétyltransférases (NAT1 et NAT2) ont été identifiées, catalysant des réactions de N-acétylation d'arylamines, ainsi que d'autres réactions de détoxication. Elles sont également impliquées dans le métabolisme de médicaments tels que les sulphonamides et dans les interactions médicamenteuses. Les variations existant dans l'activité des NAT correspondent à leur capacité à transférer l'acétate de l'acétyl coenzyme A au substrat. Seul le gène de NAT2 présente un polymorphisme permettant la différenciation entre acétylateur lent (SA) et acétylateur rapide (RA). Les études disponibles suggèrent que l'acétylation lente est plus un facteur de risque que l'acétylation rapide. En effet, le phénotype SA est considéré comme un facteur de risque pour le cancer de la vessie. De plus, les femmes ménopausées avec le phénotype SA ont 4 fois plus de risque de développer le cancer du sein que les femmes avec le phénotype RA.
Construction de micro-organismes recombinés : par exemple les levures
Des souches de S. cerevisiae ont été développées permettant l'expression de trois grands types de gènes intervenant dans les différentes phases du métabolisme des xénobiotiques. Dans ce cadre, une série de cassettes d'expression pour des gènes de mammifères (homme, souris, lapin) ou de plantes (topinambour par exemple) a été réalisée, cassettes portées par des vecteurs multi-copies autonomes ou intégrées dans l'ADN chromosomique des levures. Pour exemple, les P450 humains exprimés dans les levures sont les isoenzymes 1A1, 1A2, 2B6, 2C8, 2C9, 2C18, 2C19, 2D6, 2E1, 3A4, 3A5, 19A.
Parallèlement, ont été développées des coexpressions de gènes de phase I,
d'« environnement de phase I » (NADPH-cytochrome P450 réductase et cytochrome b5 par exemple) et de phase IL L'efficacité de ces constructions a été démontrée. Pour exemple, les trois étapes de biotransformation du benzo(a)pyrène impliquant le P450
I Al, la NADPH-cytochrome P450 réductase et l'époxide hydrolase ont été reproduites chez la levure S cerevisiae : l'analyse des produits d'incubation du benzo(a)pyrène avec ces levures recombinées montre la formation de l'ensemble des métabolites attendus (Gautier et al., 1996b).
De tels systèmes peuvent être utilisés comme modèle pour l'étude de certains aspects du métabolisme humain, comme aide à l'analyse de la toxicité des polluants et surtout comme outil de bioconversion.
II est possible, après conception de marqueurs de sélection et de contrôle de viabilité de types tout à fait originaux, de démontrer et contrôler la survie, et lorsque nécessaire la mort et l'élimination, de levures recombinantes fonctionnelles dans l'environnement digestif humain. II est possible d'identifier et de créer par ingémerie moléculaire des structures de contrôle des gènes hétérologues (séquences promotrices en particulier), permettant une activité adaptée et modulable dans l'environnement digestif humain. A des fins d'expression du gène d'intérêt, on peut utiliser des promoteurs constitutifs ou inductibles, des promoteurs forts, des promoteurs actifs spécifiquement dans un segment du tracms digestif en conditions d'aérobie, de semi anaérobie ou d'anaérobie, des promoteurs régulables par une molécule introduite dans le milieu intestinal. Il est possible de développer une technologie d'ingénierie génétique respectant les critères indispensables pour une utilisation in vivo chez l'homme, en particulier l'absence de vecteurs mobilisables, l'absence de marqueurs de résistance aux antibiotiques, une stabilité génétique conditionnelle des fonctions hétérologues permettant leur destruction par un facteur chimique externe si nécessaire (interruption du traitement par exemple).
Le fragment d'ADN hétérologue peut posséder en outre un marqueur génétique permettant la sélection ou la contre sélection ou un code bar génétique.
Etude et sélection de micro-organismes recombinants par utilisation de systèmes digestifs artificiels
Dans un second aspect, l'invention se rapporte à un procédé d'étude, de contrôle, d'adaptation et/ou de sélection des micro-organismes recombinés décrits ci-dessus au moyen d'un système digestif artificiel.
Par système digestif artificiel, on entend tout dispositif reprenant les caractéristiques essentielles du système digestif humain.
On peut définir le système de digestion artificiel comme un dispositif réactionnel décrit dans WO 94/09895.
Ce système est le modèle le plus complet au niveau mondial à l'heure actuelle. En effet, il possède l'ensemble des compartiments du système digestif (estomac, duodénum, jéjunum, iléon et côlon, figures 1 et 2 ci-après) et reproduit le plus fidèlement possible l'environnement digestif de l'homme ou de l'animal monogastrique. Il prend en compte les paramètres essentiels de la digestion tels que les mouvements péristaltiques, les variations de pH au niveau gastrique et intestinal, la vidange gastrique et le temps de transit intestinal, les sécrétions gastriques, biliaires et pancréatiques, l'absorption des produits de digestion et de fermentation, l'absorption de l'eau, la microflore fécale (Minekus et al., 1995 et 1999). Un pilotage informatique du système permet un contrôle des paramètres en continu. Ce système permet de mimer différentes situations, aussi bien physiologiques que pathologiques. Il présente nombre d'avantages en terme de reproductibilité, contrôle des conditions expérimentales (difficiles à maîtriser chez les animaux de laboratoire), standardisation, fiabilité, rapidité, possibilité de collecter des échantillons à tout niveau du tractus digestif, tout en limitant grand nombre de contraintes techniques et de problèmes d'acceptabilité (impossibilité de réaliser des expériences avec des molécules potentiellement toxiques chez l'homme).
Concrètement, chaque compartiment est formé d'unités de verre contenant des parois internes flexibles. Un passage d'eau entre les parois flexibles et celles de verre permet
de maintenir une température constante de 37°C et de mimer les mouvements péristaltiques (grâce à des variations de pression de l'eau). Les différents compartiments sont reliés entre eux par des valves péristaltiques, dont l'ouverture est pilotée par ordinateur (envoi ou non d'azote). Le passage du chyme d'un compartiment à un autre est contrôlé par la quantité de nourriture présente dans chaque compartiment (présence de capteurs de niveau). Une formule exponentielle est utilisée pour modéliser la vidange gastrique et iléale (Minekus et al., 1995) : f = l-2"(t/tl/2)β ; où f représente la fraction de repas délivrée, 11/2 le demi-temps de libération du repas, t le temps de libération du repas et β un paramètre décrivant l'allure de la courbe).
Le volume du contenu digestif est enregistré continuellement par un capteur de pression et maintenu constant par absorption d'eau au travers de fibres de dialyse grâce à une pompe.
L'estomac (TIM1)
On choisit la quantité de nourriture à introduire dans l'estomac artificiel et la durée de la digestion (Minekus et al., 1995). La pepsine est délivrée en continu grâce à une pompe. Le pH est continuellement réajusté avec de l'HCl ou de l'eau, de façon à suivre une courbe prédéterminée, établie selon des données in vivo.
L'intestin grêle (TIM1
On programme l'intestin grêle artificiel pour simuler un temps de transit le plus proche possible de celui observé in vivo. Le pH est maintenu à des valeurs les plus physiologiques possibles par du NaHCO3 (6,5 au niveau du duodénum, 6,8 au niveau du jéjumum et 7,2 au niveau de l'iléon). Au niveau du duodénum, des pompes apportent les enzymes pancréatiques (mélange de pré-enzymes qui seront activées par la trypsine) et les acides biliaires. L'absorption de l'eau et des produits de digestion est réalisée grâce à un système de dialyse fonctionnant avec des unités de fibres creuses, connectées au niveau du jéjunum et de l'iléon.
Le côlon (TIM2)
Dans sa forme de base, le côlon artificiel est constitué d'une boucle où circule cycliquement une flore fécale préalablement installée. Il a été vérifié que la composition et l'activité fermentaire de cette microflore fécale, issue de selles de donneurs volontaires et implantée dans le système digestif, étaient bien représentatives de celles de la flore colique humaine et que cette flore se maintenait stable et fonctionnelle au cours du temps (Minekus et al., 1999).
Un flux d'azote permet de maintenir le système en anaérobie, condition contrôlée par un indicateur (solution de résazurine). Le milieu nutritionnel est stocké dans une unité de verre maintenue à 4°C où un influx d'azote permet son mélange permanent en anaérobie. Un ensemble de fibres de dialyse traversant tout le colon permet de mimer l'absorption de l'eau et des nutriments. Le pH est maintenu constant et ajusté à la valeur de 6,5 par une solution de NaOH (au lieu du bicarbonate in vivo). La production totale de gaz (comme le H2, le CO2 et le CH ) peut être déterminée par mesure de la quantité d'eau déplacée dans une bouteille de Mariotte. Les différents gaz, ainsi que les acides gras volatils produits (acétate, butyrate et propionate principalement), peuvent être analysés qualitativement et quantitativement par chromatographie en phase gazeuse.
Dans une forme plus élaborée, le côlon artificiel est constitué de trois sous-unités simulant les trois parties, proximale, transverse et distale où siègent des activités fermentaires différentes (associées à des pH différents).
Bien entendu, tout ou partie des systèmes digestifs artificiels précités peut être mise en œuvre dans le cadre de l'invention.
Ainsi, l'invention a trait à un procédé d'étude et de contrôle de micro-organismes comprenant les étapes consistant à : a) ajouter les micro-organismes selon l'invention dans un milieu nutritif liquide, b) introduire ledit milieu à l'entrée d'un système tel que défini ci-dessus, c) incuber et procéder à un dénombrement des micro-organismes recombinés et/ou à un test de l'activité du ou des gènes d'intérêt après passage dans les systèmes digestifs ou in situ. Par exemple, cette étape peut comprendre un test PCR. Le test
d'activité peut comprendre un test de sécrétion et ou de bioconversion.
Dans un autre mode de réalisation, le procédé peut comprendre les étapes consistant à : a) ajouter les micro-organismes selon l'invention dans un milieu nutritif liquide, b) introduire ledit milieu à l'entrée d'un système tel que défini ci-dessus, c) incuber et récupérer les micro-organismes survivants après passage dans le TIM1 et/ou TIM2 ; - répéter éventuellement les étapes a) à c) jusqu'à l'obtention d'une population homogène de micro-organismes adaptés à l'environnement digestif et capables d'exprimer efficacement le ou les gènes d'intérêt.
L'invention se rapporte également à des micro-organismes susceptibles d'être obtenus par le procédé évoqué ci-dessus. Ces micro-organismes peuvent se caractériser en ce que leur taux de survie est supérieur à 25%, 50%, 75%, 80%, de préférence 90 % ou 95 % en sortie de l'iléon après 6 h de digestion et est supérieur à 2 %, 4%, de préférence 8% après 12 h de fermentation dans le côlon. De préférence, il s'agit de levures.
La survie des micro-organismes peut être appréciée par dénombrement. La présence du ou des gènes d'intérêt peut être mise en évidence par techniques moléculaires (pour exemple Polymerase Chain Reaction). L'expression du ou des gènes d'intérêt peut être estimée par les techniques biochimiques telles que l'électrophorèse mono ou bidimentionnelle ou le Western Blot. L'activité des produits d'expression du ou des gènes d'intérêt est appréciée par des techniques spécifiques (pour exemple dosage d'activité enzymatique).
Dans un mode de réalisation particulier, l'invention porte sur des micro-organismes capables d'effectuer une réaction de bioconversion ou de sécréter un peptide ou une protéine d'intérêt dans tous les compartiments digestifs.
Méthode d'administration des micro-organismes
Des savoir-faire dans le domaine de la galénique et de la biopharmacie permettant d'optimiser l'administration des principes actifs par voie orale ont été développés. L'efficacité d'un médicament est conditionnée par sa biodisponibilité, c'est à dire la proportion de principe actif arrivant au niveau de la circulation générale, et selon quelle cinétique. L'un des buts de la formulation galénique est donc de réaliser une forme optimisée la mieux adaptée au traitement d'une maladie ou d'un syndrome déterminés, c'est à dire une forme présentant une administration aisée pour le patient et une bonne disponibilité.
Pour les principes actifs classiques (origine et nature chimique définies), la voie orale constitue une des voies d'apport privilégiée, par son administration commode et son faible coût. Les principes actifs ainsi administrés pourront être absorbés tout au long du tractus gastro-intestinal. Ils subiront éventuellement à ce niveau différentes biodégradations sous l'action des enzymes, des sucs digestifs et des variations de pH. La fraction absorbée au niveau du tractus digestif pourra atteindre le site d'action après passage par le foie et métabolisation éventuelle.
Contrairement, dans le cas des micro-organismes, ceux-ci ne seront pas absorbés par la muqueuse intestinale mais séjourneront au niveau du tractus un temps plus ou moins long afin d'exercer leur action au niveau de la cible définie. La forme galénique contenant les micro-organismes est une forme permettant de les amener intacts au niveau de la cible et de maintenir leur intégrité à ce niveau pendant un temps défini plus ou moins long. Dans ces conditions, les techniques utilisées avec les principes actifs classiques pour assurer une libération prolongée s'appliquent aux micro-organismes après adaptation de la technologie et des paramètres opératoires.
Toutes les précisions supplémentaires concernant ces formes galéniques sont disponibles dans EP 904021995 (formes galéniques améliorant la biodisponibilté), EP0542824 (formes muco-adhésives) et FR 9806958 (gel huileux et bigels).
Ces différentes techniques ou procédés, ainsi que tout autre procédé de l'état de la technique d'enrobage et d'encapsulation, peuvent être appliqués aux micro-organismes de l'invention.
Pour les substances sensibles à l'humidité atmosphérique ou celles sensibles à l'oxydation par l'oxygène de l'air ambiant, la protection est nécessaire pour la préparation des formes galéniques (gélules, comprimés) afin de garantir leur conservation et maintenir leur activité thérapeutique. L'enrobage permet par dépôt direct d'agent protecteur (résine, polymère) de protéger le principe actif. Dans le cas des micro-organismes, en particulier les levures, selon l'invention, l'enrobage a pour but de les isoler du milieu extérieur hostile afin de les protéger des agressions des enzymes, du pH et des sucs présents au niveau digestif. Le résultat de l'enrobage est l'obtention d'une « sphère » ou microsphère dont le diamètre est directement proportionnel à la quantité de produit d'enrobage utilisé et à la taille du produit à enrober à l'origine. Les paramètres opératoires, le matériel technique et les adjuvants utilisés pour réaliser cet enrobage sont des facteurs importants pour l'obtention de microsphères présentant des caractéristiques définies. L'enrobage est soit un polymère sensible au pH et se solubilisant à un pH donné du tractus gastro intestinal, soit un polymère englobant les éléments nutritifs nécessaires à la survie des micro-organismes, soit un produit mucoadhésif facilitant la mucoadhésion des micro-organismes au niveau du tractus gastro-intestinal, soit une association de ces différents composés. Le résultat obtenu est constitué de microsphères qui sont ensuite conditionnées en capsules dures ou molles.
Ainsi, un autre aspect de l'invention porte sur une composition pharmaceutique comprenant les micro-organismes définis ci-dessus se trouvant avantageusement sous une forme galénique adaptée à une administration orale ou rectale de sorte à les acheminer intacts au niveau du site cible du tractus digestif et de maintenir leur intégrité à ce niveau pendant un temps donné.
Dans cette composition pharmaceutique, les micro-organismes, en particulier les
levures, peuvent être protégés par une composition associée ou recouverte par un enrobage et/ou une membrane du type résine et/ou de type polymère formant des sphères, microsphères, granules ou microgranules.
De préférence, la composition se trouve sous la forme de gélules, de comprimés ou de dragées. La composition peut également être sous la forme d'une suspension cellulaire.
L'invention vise également un produit de combinaison comprenant les microorganismes décrits ci-dessus et une substance active ou un précurseur d'une substance active pour une utilisation simultanée, séparée ou étalée dans le temps. Ce produit se caractérise de préférence en ce que lesdit micro-organismes interagissent avec la substance active ou le précurseur. La substance active est destinée à favoriser l'action des micro-organismes recombinés (par exemple, il peut s'agir d'une substance favorisant la survie, la croissance ou l'activité des microorganismes) ou, à l'inverse, les micro-organismes agissent sur la substance active ou sur le précurseur.
Conclusion
Un autre aspect de l'invention se rapporte à l'utilisation de micro-organismes selon l'invention pour la préparation d'un médicament tel que des agents de détoxication, des agents de correction métabolique, des agents capables de modifier la flore intestinale, des agents capables d'augmenter la biodisponibilité d'une substance active ou de son précurseur et pour la préparation d'un médicament capable de fournir in situ des peptides actifs, des peptides à intérêt vaccinal, des peptides à intérêt hormonal, des peptides à intérêt thérapeutique, des peptides à effet antibiotique ou des peptides capables de piéger ou de complexer des molécules.
Légendes
Figures 1 et 2 : représentations schématiques des systèmes digestifs artificiels.
Figure 1 (estomac et intestin grêle artificiels ou TIM 1) Figure 2 (côlon artificiel ou TIM 2)
Figure 3 : constructions génomiques et plasmidiques pour l'expression du gène du P450 1A1 humain et de la NADPH-cytochrome P450 réductase humaine (A) ou de levure (B) et pour l'expression du gène du P450 73 Al de topinambour et de la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure (C). A- La souche obtenue est appelée W(hR)pHl Al . B- La souche obtenue est appelée W(R)pHlAl. C- La souche obtenue est appelée W(R)pP73Al.
URA 3 : gène sauvage de l'orotate décarboxylase ; ADE 2 : gène sauvage de l'amino- imidazole ribonucléotide carboxylase ; ura 3 : gène muté de l'orotate décarboxylase ; Y red : P450 réductase de levure ; H red : P450 réductase humaine ; PGK phosphoglycérate kinase ; Y red ORF : séquence codante de la P450 réductase de levure ; H red ORF : séquence codante de la P450 réductase humaine ; H 1A1 ORF : séquence codante du P450 1A1 humain ; P 73A1 ORF : séquence codante du P450 73 Al de topinambour ; pro : promoteur ; ter : terminateur.
Figure 4 : cinétique de libération des levures recombinantes W(hR)pHlAl et W(R)pHlAl en sortie d'iléon.
Les résultats obtenus au cours de trois digestions dans le TIM1 sont présentés digestion par digestion (A) et moyennes (B).
Les résultats sont exprimés en taux cumulés de levures survivantes retrouvées en sortie d'iléon par rapport au nombre de levures ingérées. Soit, pour chaque prélèvement (t = 120, t = 240 et t = 360 min) correspondant à un intervalle de temps de collecte des sorties iléales cumullées (0-120 min, 120-240 min et 240-360 min), le nombre total de levures est énuméré et exprimé en pourcentage du nombre total de levures ingérées. Ces pourcentages sont ensuite cumulés au cours du temps.
Le facteur de dilution dû au volume des sécrétions digestives est pris en compte dans les calculs.
Figure 5 : suivi des levures recombinantes W(hR)pHlAl et W(R)pHlAl dans le côlon artificiel.
Différents prélèvements ont été effectués afin de pouvoir réaliser un suivi des levures dans le TIM 2 :
- à t = 0, on énumère le nombre de cellules par ml de suspension de levures recombinantes, avant introduction dans le côlon,
- à t = Ofec : on énumère le nombre de cellules de levures endogènes par ml de contenu colique, avant ensemencement du côlon,
- à t = 1, t = 12, t = 24, t = 36, t = 48 et t = 60h : on énumère le nombre de cellules de levures (recombinantes et endogènes) par ml de contenu colique prélevé dans le côlon. Les résultats obtenus sont exprimés en nombre de cellules par ml (échelle logarithmique) en prenant en compte le facteur de dilution dû au volume du contenu colique.
Figure 6 : résultats des PCR réalisées sur les souches W(R)pHlAl et W(hR)pHlAl avant passage dans les systèmes digestifs (A), à la sortie de l'intestin grêle (B) et du côlon (C)
A : avant passage dans les systèmes digestifs (t =0min) B : à la sortie de l'intestin grêle (t = 120 min) C : à la sortie du côlon (t = 12h)
T = Témoin
Figure 7 : suivi des levures (R)pP73Al dans les différents compartiments du TIM 1 (7A : estomac, 7B : duodénum, 7C : jéjunum, 7D : iléon) Les levures W(R)pP73Al ont été suivies au sein de chaque compartiment digestif au cours de digestions dans le TIM1 (n=3). Pour ce faire, des prélèvements de 1 ml sont réalisés dans l'aliment avant son introduction dans l'estomac (t = 0), puis à différents niveaux du tractus digestif : dans l'estomac au bout de 15, 30, 45, 60 et 90 min de
digestion, dans le duodénum au bout de 15, 30, 45, 60, 75, 90, 120 et 150 min de digestion, dans le jéjunum au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 150, 180 et 240 min de digestion, dans l'iléon au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 150, 180 et 240 min de digestion. Le nombre de levures présentes dans chaque prélèvement est exprimé en pourcentage du nombre total de levures ingérées. Les courbes de suivi des levures recombinées dans chaque compartiment ont été comparées à celles d'un marqueur de transit non absorbable.
Figure 8 : cinétique de libération des levures recombinantes W(R)pP73Al en sortie d'iléon
Les résultats sont exprimés en taux cumulés de levures survivantes retrouvées en sortie d'iléon par rapport au nombre de levures ingérées (n=3). Soit, pour chaque prélèvement (t=30, 45, 60, 90, 120, 180 et 240 min) correspondant à un temps de collecte des sorties iléales cumulées (0-30 min, 30-45 min, 45-60 min, 60-90min, 90-120 min, 120- 180 min et 180-240 min), le nombre total de levures est énuméré et exprimé en pourcentage du nombre total de levures ingérées. Ces pourcentages sont ensuite cumulés au cours du temps. Le facteur de dilution dû au volume des sécrétions digestives est pris en compte.
Figure 9 : suivi des levures recombinantes W(R)pP73Al dans le côlon artificiel
Différents prélèvements ont été effectués dans le TIM2 afin de pouvoir réaliser un suivi des levures dans l'environnement colique :
- à t=0, on énumère le nombre de cellules par ml de suspension de levures, avant leur introduction dans le côlon, - toutes les heures jusqu'à 12h, on énumère le nombre de cellules de levures par ml de contenu colique prélevé dans le côlon. Les résultats obtenus sont exprimés en pourcentage du nombre de levures introduites dans le côlon, en prenant en compte le facteur de dilution dû au volume du contenu colique.
Figure 10 : cinétique de transformation de l'acide tfrαns^cinnamique en acide p- coumarique par les levures W(R)pP73Al, dans l'ensemble du TIM 1 (A) et dans les différents compartiments digestifs du TTM1 (B)
Afin de pouvoir suivre la réaction de conversion de l'acide trα -cinnamique en acide 7-coumarique, des prélèvements sont réalisés tout au long de long de la digestion dans les différents compartiments digestifs du TIM 1 (n=3). Des prélèvements sont ainsi effectués dans l'estomac au bout de 15, 30, 45, 60 et 90 min de digestion, dans le duodénum au bout de 15, 30, 45, 60, 75, 90, 120 et 150 min de digestion, dans le jéjunum au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 150, 180 et 240 min de digestion, dans l'iléon au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 150, 180 et 240 min de digestion et dans les sorties iléales cumulées sur 0-30 min, 30-45 min, 45-60 min, 60-90 min, 90-120 min, 120-180 min et 180-240 min à 30, 45, 60, 90, 120, 180 et 240 min.
La figure 10A présente un bilan de la réaction de bioconversion dans l'ensemble du TIM 1 (n=3). La production d'acide jp-coumarique est exprimée en % de l'acide trans- cinnamique introduit dans l'estomac.
La figure 10B représente la production d'acide /?-coumarique (exprimée en % de l'acide trαw-cinnamique introduit dans l'estomac) dans les différents compartiments du TIM1 (estomac, duodénum, jéjunum et iléon), au cours de digestions (n=3).
Figure 11 : constructions de plasmides permettant la sécrétion par des levures S. cerevisiae , soit d'un peptide "taggé"(A), soit d'une protéine "taggée"(B) A : Le plasmide obtenu est appelé ppV5H6. B : La plasmide obtenu est appelé ppGSTV5H6. PGALl : promoteur fort inductible par le galactose ; CYCl TT : terminateur du gène CYCl ; pUC ori : origine de réplication pUC permettant la maintenance et la réplication du plasmide chez les bactéries ; 2μ origin : origine de réplication 2μ permettant la maintenance et la réplication du plasmide chez la levure ; Ampicillin : gène de résistance à l'ampicilline servant de marqueur de sélection chez la bactérie; URA 3 : marqueur d'auxotrophie permettant la sélection des levures transformées ; BamHl : site de coupure de l'enzyme de restriction BamHl ; EcoRl : site de coupure
de l'enzyme de restriction EcoRl ; Pre : séquence pre, permettant l'adressage du peptide α vers le réticulum endoplasmique ; Pro : séquence pro permettant une sécrétion efficace du peptide α ; KR : site de coupure de la protéase Kex2 (acides aminés lysine-arginine) ; GST : Glutathion-S-transferase; V5 : épitope V5; H6 : chaîne polypeptidique de 6 histidines ; Stop : codon stop.
Figure 12 : détection des produits de sécrétion des souches WppVsH6 (A) et WpGSTV5H6 (B) en erlen-Meyer
Les Western-Blot obtenus avec les souches WppN5H6 et WpGSTN5H6 sont représentés en figure 12A et 12B respectivement. Des prélèvement ont été réalisés dans la culture de croissance et dans la culture d'induction, 0, 2, 4 et 6h après ajout de galactose. Les échantillons sont notés "expo" lorsque la culture d'induction a été ensemencée à faible densité cellulaire et "stat" lorsqu'elle a été ensemencée à haute densité. Les protéines du surnageant sont précipitées, séparées par électrophorèse sur gel de polyacrylamide et analysées par Western-Blot (anti-corps anti-V5). Pour chaque échantillon, on dépose les protéines du surnageant correspondant à un volume de culture contenant 5*10 levures (sauf l'échantillon B6 qui correspond à 4* 10 cellules).
Al : peptide- V5H6, témoin culture de croissance; A2 : peptide- V5H6, tO culture d'induction ; A3 : peptide-N5H6, expo t2h ; A4 : peptide-N5H6, stat t2h ; A5 : peptide- V5H6, expo t4h ; A6 : peptide- V5H6, stat t4h ; A7 : peptide-V5H6, expo t6h ; A8 : peptide- V5H6, stat t6h.
Bl : GST-N5H6, témoin culture de croissance ; B2 : GST-N5H6, tO culture d'induction ; B3 : GST-V5H6, expo t2h ; B4 : GST-V5H6, stat t2h ; B5 : GST-V5H6, expo t4h ; B6 : GST-V5H6, stat t4h (4*108 cellules) ; B7 : GSTN5H6, stat t4h (5*107 cellules) ; B8 : GST-N5H6, expo t6h ; B9 : GST-V5H6, stat t6h. a) peptide- V5H6 (PM calculé : 5.7 kDa), b) précurseur du peptide-N5H6 (PM calculé : 16 kDa), c) formes glycosylées du peptide-V5H6 ou de son précurseur, d) formes hyperglycosylées du peptide- V5H6 ou de son précurseur, e) GST-V H6 (PM calculé : 29.7 kDa), f) précurseur de la GST-V5H6 (PM calculé : 40 kDa), g) formes glycosylées ou hyperglycosylées de la GST-V5H6 ou de son précurseur.
Figure 13 : Détection, dans les différents compartiments du TIM1, du peptide "taggé" sécrété par la souche ppVsH6
La figure 13 représente les Western-Blot obtenus après analyse des échantillons prélevés dans les différents compartiments du TIM 1. Un témoin positif a également été réalisé en Erlen-Meyer (échantillons notés "témoin"). La totalité des protéines contenues dans le surnageant des échantillons a été déposée (correspondant à un volume de 4 ml dans l'estomac et le duodénum et 2 ml dans l'aliment, le jéjunum et l'iléon).
1 : Aliment ; 2 : Témoin t90 min ; 3 : Estomac t90 min ; 4 : Duo t90 min ; 5 : Jej t90 min ; 6 : Ile t90 min ; 7 : Esto tl20 min ; 8 : Vide ; 9 :Témoin tl60 min ; 10 : Duo tl60 min ; 11 : Jej tl60 min ; 12 : Ile tl60 min ; 13 : Duo t210 min ; 14 : Jej t210 min ; 15 : Ile t210 min ; 16 : Ile t270 min ; 17 : Témoin t270 min.
Figure 14 : Détection, dans les différents compartiments du TIM1, de la protéine GST "taggée" sécrétée par la souche WppGSTV5H6
La figure 14 représente les Western-Blot obtenus après analyse des échantillons prélevés dans les différents compartiments du TIM 1. Un témoin positif a également été réalisé en Erlen-Meyer (échantillons notés "témoin"). La totalité des protéines contenues dans le surnageant des échantillons a été déposée (correspondant à un volume de 4 ml dans l'estomac et le duodénum et 2 ml dans l'aliment, le jéjunum et l'iléon).
1 : Témoin t90 min ; 2 : Estomac t90 min ; 3 : Duo t90 min ; 4 : Jej t90 min ; 5 : Ile t90 min ; 6 : Vide ; 7 : Duo tl60 min ; 8 : Jej tl60 min ; 9 : Ile tl60 min ; 10 : Témoin culture de croissance ; 11 : Témoin tO min ; 12 : Aliment ; 13 : Témoin 160 min ; 14 : Duo 1210 min ; 15 : Jej t210 min ; 16 : Ile t210 min ; 17 : Ile t270 min ; 18 : Témoin t270 min.
Figure 15 : Quantification de la GST "taggée", sécrétée dans le TIM 1 par la souche WppGSTVsH6 Afin d'apprécier de façon approximative la quantité de GST sécrétée dans l'environnement digestif, nous avons comparé l'intensité des signaux de détection d'une
gamme étalon avec celle d'échantillons issus du TIM 1. 20 ng, 10 ng et 1 ng de GST pure à 85 % ont ainsi été déposés sur le même gel que les protéines d'échantillons issus de prélèvements dans le TIM 1.
1 : Témoin culture de croissance ; 2 : Aliment ; 3 : Esto 120 min ; 4 : Duo t90 min ; 5 : Jej 190 min ; 6 : Ile t90 min ; 7 : GST 20 ng ; 8 : GST 10 ng ; 9 : GST 1 ng ; 10 : GST 20 ng ; 11 : GST 10 ng ; 12 : GST 1 ng ; 13 : Jej 160 min ; 14 : Ile 160 min ; 15 : Duo tl60 min ; 16 : Duo t210 min ; 17 : Jej t210 min ; 18 : Ile 210 min.
Exemple 1 : La levure Saccharomyces cerevisiae comme système d'expression des P450 humains.
S. cerevisiae a été le premier système utilisé pour l'expression d'un P450 de rat (Oeda et al., 1985). Depuis, elle a été largement utilisée comme système d'expression hétérologue dans de nombreux laboratoires. En particulier, l'équipe du Dr Denis Pompon l'a choisie comme modèle d'étude pour l'expression de P450 humains (isoenzymes 1A1, 1A2, 2B6, 2C8, 2C9, 2C18, 2C19, 2D6, 2E1, 3A4, 3A5, 19A).
Utiliser les levures comme hôte pour l'expression hétérologue de P450 présente de nombreux avantages. En effet, les levures possèdent les critères nécessaires à la synthèse de P450 humains fonctionnels (Urban et al., 1994a ; Pompon et al., 1997). Elles présentent l'architecture intracellulaire et la majorité des modifications post- traductionnelles des cellules eucaryotes, ainsi qu'un système d'adressage des protéines ("Signal Récognition Particule" ou SRP) permettant la translocation du P450 synthétisé vers le réticulum endoplasmique, ce qui aboutit à une localisation intracellulaire et un repliement du P450 corrects. Les levures possèdent également un environnement membranaire lipidique permettant la stabilité du P450 et des protéines de transfert d'électrons (NADPH- cytochrome P450 réductase et cytochrome b5) dans la membrane du réticulum endoplasmique, nécessaires à l'activité enzymatique du P450. L'introduction dans les levures de cassettes d'expression peut être menée de deux manières : sur plasmide ou par intégration génomique.
En outre, les levures permettent de coexprimer de façon stable plusieurs ADN
complémentaire (ADNc) différents et les techniques mises en oeuvre sont de faible coût et sans risque.
La levure S.cerevisiae permet la caractérisation d'activités monooxygénases humaines (Urban et al., 1994a ; Gautier, 1994), à savoir :
- l'étude de la spécificité de substrat dans un contexte exempt d'activité monooxygénase contaminante (S cerevisiae contient des P450 endogènes faiblement exprimés dont l'activité ne risque pas d'interférer avec celle du P450 humain),
- l'étude de la diversité génétique et du polymorphisme enzymatique (possibilité d'exprimer des formes de P450 peu abondantes),
- l'étude de la relation structure / fonction par mutagénèse dirigée et par fabrication de protéines de fusion (recherche des acides aminés impliqués dans un aspect particulier de la fonction du P450 humain).
Malgré les avantages précédemment énumérés, l'utilisation des levures comme système d'expression hétérologue (Urban et al., 1994a; Pompon et al., 1996) présente quelques limites :
- les fractions subcellulaires sont difficiles à préparer à cause de la paroi très résistante des levures, - le niveau de la NADPH-cytochrome P450 réductase endogène est faible, ce qui limite l'activité du P450 exprimé,
- les enzymes NADPH-cytochrome P450 réductases de levure et d'homme présentent une faible similarité de séquences (33%), ce qui diminue l'efficacité de couplage entre les P450 humains et la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure, - la production de P450 humains (entre 50 et 500 pmol de P450 par mg de protéines microsomales) est plus faible que chez la bactérie E coli (de l'ordre du nmol/mg) mais cet inconvénient est largement compensé du fait que, contrairement à la bactérie, les levures produisent des P450 fonctionnels.
Afin de pallier au mieux à certaines de ces limites (Urban et al., 1994a ; Pompon et al., 1995) différents systèmes d'expression ont été développés :
- Les systèmes de première génération : optimisation de l'expression du P450 humain.
Une cassette d'expression, insérée dans un plasmide, permet la production d'un P450 humain. Pour obtenir un niveau d'expression suffisant, les séquences 5' et 3' non codantes de l'ADNc ont été délétées avant insertion dans les levures. De plus, le promoteur fort GAL10-CYC1 (totalement réprimé par le glucose mais fortement inductible par le galactose) a été introduit dans le but de séparer la phase de croissance exponentielle, requise pour constituer la biomasse, de la phase d'expression.
- Les systèmes de deuxième génération : optimisation de l'activité spécifique du P450 humain.
Plusieurs types de modifications génomiques ont été réalisées pour augmenter l'activité spécifique du P450 de 10 à 100 fois celle obtenue avec les systèmes de première génération :
- la construction d'une protéine de fusion entre le P450 humain et la NADPH- cytochrome P450 réductase de levure,
- la surexpression de la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure, mise sous le contrôle du promoteur GAL10-CYC1,
- la coexpression du cytochrome b5 humain et du P450 humain.
La coexpression d'enzymes de phase II (comme l'époxide hydrolase) et du P450 humain a également permis de simuler des couplages métaboliques entre les enzymes de phase I et de phase II (Gautier et al, 1993).
- Les systèmes de troisième génération : "humanisation" de l'environnement redox. Au niveau du génome, la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure a été remplacée par une réductase humaine, ce qui a provoqué une forte augmentation de l'activité spécifique du P450 humain xlO à 500 par rapport aux systèmes de première génération.
Exemple 2 : Obtention des souches de levures recombinantes W(hR)pHlAl, W(R)pHlAl et W(R)pP73Al
La souche de S cerevisiae W(hR)pHlAl (figure 3A) dérive de la souche W(hR). Les
deux souches W(R)pHlAl (figure 3B) et W(R)pP73Al (figure 3C) dérivent de la souche W(R).
La construction des souches W(R) et W(hR) ont été respectivement décrites par Truan et al. (1993) et Urban et al. (1993).
Des modifications génomiques ont ainsi permis la construction des souches W(R) et
W(hR) à partir de la souche de laboratoire W3031B (signe sexuel MAT a), qui possède des mutations sur certains gènes (leu 2, his 3, trp 1, ura 3, ade 2), permettant ainsi sa sélection par auxotrophie. Souche W(R) : la phase ouverte de lecture de la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure (2072 pb) a été surexprimée par insertion du promoteur fort GAL10-CYC1
(480 pb) à la place du promoteur de la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure.
Le terminateur du gène de la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure a été conservé. Souche W(hR) : la phase ouverte de lecture de la NADPH-cytochrome P450 réductase humaine (2034 pb) a été insérée dans le génome de la levure à la place de celle de la
NADPH-cytochrome P450 réductase de levure et placée sous le contrôle du promoteur fort GAL10-CYC1. Le terminateur du gène de la NADPH-cytochrome P450 réductase de levure a été conservé.
Les deux souches W(hR)pHlAl et W(R)pHlAl résultent respectivement de la transformation de W(hR) et W(R) avec le plasmide pi Al.
Le plasmide pi Al (Voir figure 3) résulte de l'insertion dans le plasmide pV60 de la séquence codant pour le P450 1A1 humain (1539 pb), placée entre le promoteur fort GAL10-CYC1 et le terminateur du gène de la phosphoglycérate kinase (PGK). Il contient le gène codant pour la β-lactamase qui confère la résistance à l'ampicilline chez E coll.
Ce plasmide peut se maintenir dans les levures grâce aux marqueurs d'auxotrophie
URA 3 et ADΕ 2 qui complémentent les gènes correspondant déficients dans le génome des levures. L'addition du marqueur d'auxotrophie ADΕ 2 permet une meilleure stabilité du vecteur lorsque les levures transformées sont cultivées dans un
milieu de culture devenant spontanément limitant en adénine à haute densité cellulaire. Le plasmide peut se multiplier dans les bactéries grâce à une origine de réplication d'E coli et dans les levures grâce à un fragment de l'origine de réplication du plasmide 2μ.
Transformation des deux souches W(hR) et W(R) avec le plasmide plAl
Le protocole de transformation des levures, adapté de Gietz et al. (1992), nécessite dans un premier temps de rendre les levures compétentes. A cet effet, les souches W(R) et W(hR) sont mises en culture dans du milieu YPGA (glucose 20 g/1, yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1 et adénine 20 mg/1) jusqu'à atteindre une DO6oonm entre 0,5 et 2. Après centrifugation (6000 g, 3 min, 20°C), le culot cellulaire est lavé deux fois avec 25 ml d'eau distillée stérile, puis une fois avec 2 ml de tampon Tris-HCl 100 mM, ΕDTA 1 mM, acétate de lithium 0,1 M. Le culot cellulaire est repris dans 1 ml de ce même tampon. Ensuite, afin de procéder à la transformation des levures, sont mélangés l'aliquot du vecteur transformant pi Al, 50 μg d'ADN dénaturé de sperme de saumon, 100 μl des levures compétentes et 300 μl d'une solution de PEG-4000 à 40% dans le tampon Tris-HCl 100 mM, EDTA ImM, acétate de lithium 0,1 M. Le mélange est incubé 30 min à 28°C puis 15 min à 42°C. Après centrifugation (11000 g, 3 min, 20°C), le culot cellulaire est repris dans 100 μl de liquide de Ringer. Les 100 μl sont étalés sur du milieu SGI (glucose 20 g/1, yeast nitrogen base 7g/l, bactocasamino acids lg/1, tryptophane 20 mg 1 et agar 20g/l). Les boîtes sont incubées 2 à 3 jours à 30°C.
De la même façon, la souche W(R)pP73Al résulte de la transformation de la souche W(R) avec le plasmide pV60 dans lequel le gène de la cinnamate 4-hydroxylase de topinambour ou P450 73A1 (plasmide appelé p73Al - cf. Figure 3) a été inséré (Urban
Exemple 3 : Exemple de protocole de digestion dans les systèmes digestifs TIM1 et TIM2 (protocole modifié de WO 94/09895)
A Digestion dans l'estomac et l'intestin grêle artificiels ou TIM 1 (voir figure 1)
Le temps de digestion, variable, est programmé entre 240 et 360 minutes.
Solutions utilisées pendant la digestion
Différentes solutions simulant les sécrétions stomacales et intestinales sont préparées et conservées dans la glace pour celles contenant des enzymes. Toutes les solutions sont préparées avec de l'eau déminéralisée. - les solutions simulant les sécrétions de l'estomac :
* le jus gastrique : NaCI 53 mM, KC1 15 mM, CaCl2 1 mM et NaHCO3 7mM, pH 4, auxquels on rajoute de la pepsine à raison de 588 U/ml,
* la lipase : NaCI 53 mM, KC1 15 mM, CaCl2 1 mM et NaHCO3 7mM, pH 4, auxquels on rajoute de la lipase à raison de 37.5 U/ml, * de l'HCl 1M afin que le pH suive dans l'estomac une courbe prédéterminée. - les solutions simulant les sécrétions de l'intestin grêle :
* la solution de pancréatine à 7%,
* la solution de bile à 4% (pour les 30 premières minutes de la digestion) et à 2% (pour le reste de la digestion), * la solution d'électrolytes IX : NaCI 86 mM, KC1 8 mM et CaCl2 2 mM,
* du NaHCO3 1M ou de la solution d'électrolytes IX afin de maintenir le pH à 6,5 au niveau du duodénum, à 6,8 au niveau du jéjunum et à 7,2 au niveau de l'iléon.
Digestion Préalablement à l'aliment, sont introduits dans les différents compartiments du système digestif les résidus simulant ce qui reste en moyenne chez un individu à jeun : le résidu gastrique (jus gastrique ajusté à pH 2 et préincubé 15 min à 37°C), le résidu duodénal (bile 2%, pancréatine 1,75%, solution d'électrolytes 0,25X de l'intestin grêle et trypsine 7773 U/ml, préincubé 10 min à 37 °C) et les résidus jéjunal et iléal (solution d'électrolytes IX de l'intestin grêle).
Les fluides de dialyse pour le jéjunum (bile 1,55%, KC1 8 mM, NaCI 86 mM) et l'iléon (électrolytes IX) sont maintenus à 37°C pendant le temps de la digestion et circulent à un débit de 10 ml/min (fibres de dialyse: COBE, HG-400, seuil = 8000 Da). La souche de levure étudiée, remise en suspension dans 300 ml de lait demi-écrémé ou de milieu de culture YPL (yeast extract 10g/l, bactopeptone 10 g/1, galactose 20g/l), est introduite dans l'estomac. Les levures sont préparées comme décrit dans les exemples
4 et 5.
Cinétique
Les solutions simulant les différentes sécrétions sont délivrées selon une cinétique préétablie en fonction des paramètres in vivo :
* au niveau de l'estomac : le jus gastrique et la lipase sont délivrés à un débit de 0,25 ml/min, 1ΗC1 est introduit à un débit de 0,25 ml/min si nécessaire.
* au niveau du duodénum : les solutions de pancréatine à 7% est délivrée à un débit de 0,25 ml/min, la solution de bile (à 4 ou à 2%) à un débit de 0,5 ml/min, le NaHCO3 1M et la solution d'électrolytes IX à un débit total de 0,25 ml/min.
* au niveau du jéjunum et de l'iléon : le NaHCO3 1M est introduit à un débit de 0,25 ml/min, si nécessaire.
Les courbes de vidange gastrique et iléale, sont modélisées par la formule f = l-2'(t/tl 2)β , où tl/2 est le temps de demi- vidange et β un paramètre définissant l'allure de la courbe.
B Fermentation dans le côlon artificiel ou TIM 2 (voir figure 2)
Après une phase de stabilisation de la flore de 2 jours, la fermentation peut être maintenue jusqu'à une semaine après ensemencement du côlon.
Ensemencement du côlon
Toutes les étapes de l'ensemencement sont réalisées sous flux d'azote.
200 g de fèces fraîches (issus de volontaires sains) sont mixés dans 200 ml de tampon phosphate 0,1 M à pH 6,5, préalablement autoclave et placé sous flux d'azote pendant au minimum 2 h. Le mélange obtenu est filtré sur gaze stérile. Le filtrat est centrifugé
(25000g, 30 min, 4°C). Le culot bactérien et le mucus sont repris dans du milieu de base (Ileum delivery médium) lui-même dilué 10 fois dans le tampon phosphate 0,1 M.
Environ 10g de rétentat de filtration sont ajoutés à cette solution bactérienne afin de l'enrichir en fibres. Le mélange est mixé à nouveau puis introduit dans le côlon à l'aide d'une seringue.
Solutions utilisées pendant la fermentation
Différentes solutions entrant dans la constitution du milieu nutritif de la flore fécale et de la solution de dialyse du côlon sont préparées, autoclavées 15 min à 120°C puis stockées à 4°C jusqu'à utilisation (sauf la solution de vitamines qui est stérilisée par filtration et stockée à -20°C). Toutes les solutions sont préparées avec de l'eau déminéralisée.
- une solution d'électrolytes 10 X : hème 0,1 g/1, sels biliaires 0,5 g/1, cystéine 4 g/1, FeSO40,05 g/1, CaCl24,5 g/1, MgSO45 g/1, NaCI 4,5 g/1 et K2HPO425 g/1,
- une solution d'hydrates de carbone 20 X : pectine 12 g/1, xylane 12 g/1, arabinogalactane 12 g/1, amylopectine 12 g/1 et amidon 100 g/1,
- une solution contenant des lipides et des protéines (TBC 40X) : tween 80 80 ml/1, bactopeptone 120 g/1 et caséine 120 g/1,
- une solution de vitamines 10 X : ménadione 10 mg/1, biotine 20 mg/1, vitamine B12 5 mg/1, pantothénate 100 mg/1, nicotinamide 50 mg/1, acide p-aminobenzoïque 50 mg/1 et thiamine 40 mg/1.
Stabilisation de la flore et fermentation
La solution de dialyse (solution d'électrolytes 1 X du côlon et solution de vitamines 0,01 X, pH 6,5) est mise à buller sous flux d'azote pendant toute une nuit. Elle est délivrée à un débit de 1 ml/min pendant toute la durée de la stabilisation et de la fermentation (fibres de dialyse : JFM M5ID X Flow).
"L'ileum delivery médium" (solutions d'électrolytes 1 X du côlon, solution d'hydrates de carbone 10 X, TBC 10 X, solution de vitamines 0,01 X et mucus 20 g/1, pH 6,5), simulant le produit de la digestion issu de l'iléon, est introduit dans le côlon à raison de 3 ml par heure. La souche de levure étudiée, remise en suspension dans de l'eau déminéralisée ou du milieu de culture YPL (yeast extract 10g/l, bactopeptone 10 g/1, galactose 20g/l), est introduite dans le côlon, après stabilisation de la flore. Les levures sont préparées comme décrit dans les exemples 4 et 5.
Exemple 4 : Suivi des levures recombinantes W(R)pHlAl et W(hR)pHlAl dans les systèmes digestifs artificiels
Préparation des levures
Les souches W(R)pHlAl et W(hR)pHlAl sont mises en culture dans du milieu minimum SGI (glucose 20 g/1, yeast nitrogen base 7g/l, bactocasamino acids lg/1 et tryptophane 20 mg/1) jusqu'à une concentration de 106- 107 cellules /ml.
La culture est ensuite centrifugée dans des tubes en plastique stériles (3000 g, 10 min, 4°C). Le surnageant est jeté et les cellules sont lavées dans 15 ml d'eau physiologique (NaCI 9 g/1).
Après centrifugation (3000 g, 10 min, 4°C), le surnageant est jeté et le culot cellulaire est remis en suspension dans l'aliment.
Les levures sont introduites dans le TIM 1 remises en suspension dans 300 ml de lait demi-écrémé ou sont introduites dans le TIM2 remises en suspension dans 5 ml d'eau déminéralisée.
Dénombrement des levures
- Prélèvement des échantillons dans TIM 1 : 1 ml de l'aliment de départ (contenant les deux souches de levure) est prélevé avant introduction dans l'estomac (t = 0), puis 1 ml est prélevé aux temps 120, 240 et 360 min dans les efïluents iléaux collectés sur les intervalles de temps 0-120 min, 120-240 min, 240-360 min, - Prélèvement des échantillons dans TIM 2 : 1 ml du contenu colique est prélevé avant ensemencement du côlon (t = Ofec) ainsi qu'l ml de la suspension de levures avant introduction dans le côlon (t = 0), puis 1 ml du contenu colique est prélevé toutes les 12 heures dans le côlon (t = 1, 12, 24, 36, 48 et 60 h),
- Culture des levures : les prélèvements sont dilués dans de l'eau physiologique et étalés sur du milieu SGI. De l'ampicilline (100 μg/ml) est rajoutée dans le milieu afin d'éliminer les contaminants provenant du système digestif et/ou de la flore fécale, ainsi que de l'éthanol (3% v/v) afin de favoriser le développement des levures.
- Dénombrement : le dénombrement des boîtes est réalisé après 2 à 3 jours d'incubation à 30°C.
Résultats : Les expériences réalisées ont permis de démontrer la viabilité dans les
systèmes digestifs artificiels des souches recombinées de S. cerevisiae W(hR)pHlAl et W(R)pHlAl, introduites simultanément dans l'estomac ou dans le côlon. 50 % + 18,9 (n=3) des levures recombinantes introduites dans l'estomac sont retrouvées en sortie d'iléon après 6 h de digestion (figure 4).
Le taux de survie des levures dans le côlon apparaît plus faible puisque que l'on ne retrouve, après 12 h de fermentation, que 4% des levures introduites (n=l) (figure 5). Les causes de cette forte diminution du taux de survie dans le côlon restent indéterminées, d'autant plus, qu'après une heure de fermentation, la totalité des levures introduites était toujours présente dans le côlon. Deux hypothèses ont été avancées mettant en cause la compétition exercée par la flore fécale et les conditions de quasi anaérobiose régnant dans le côlon artificiel.
Identification des levures par Polymerase Chain Reaction (PCR) La technique PCR a dû être optimisée pour le suivi des levures recombinantes dans l'environnement digestif.
Les PCR peuvent être réalisées à partir de colonies isolées sur boîte de Pétri ou de levures remises en culture liquide. Dans le premier cas, on prélève une tête d'épingle d'une colonie que l'on remet en suspension dans 10 μl d'eau distillée avant de la faire bouillir 10 min. Dans le deuxième cas, la culture doit être en phase exponentielle de croissance (DOeoonm comprise entre 0,5 et 2). Après centrifugation (10000g, 10 min, 4°C), le culot cellulaire est repris dans 50 μl d'eau distillée et mis à bouillir 10 min. En culture liquide, les meilleurs résultats (en terme d'intensité des amplifiats et de reproductibilité des expériences) sont obtenus lorsque les levures sont en phase exponentielle de croissance (DO6oonm de 0,5 à 2), alors que sur milieu solide le stade de croissance des levures ne semble pas influencer les résultats.
Les amorces utilisées sont soit internes aux gènes (P450 1A1 et NADPH-cytochrome P450 réductases humaine ou de levure), soit situées à la fois sur le gène et son promoteur GAL10-CYC1 afin de vérifier la stabilité de celui-ci (figure 3). Elles sont choisies afin qu'elles s'hybrident le moins possible sur elles-mêmes, avec elles-mêmes et entre elles en utilisant le programme sur Internet à l'adresse suivante :
http://www.Williamstone.com/primers/calculator/calculator.cgi Les échantillons PCR contiennent du tampon PCR 1 X, du MgCl2 1,5 mM, les 4 dXTP 0,2 mM, les amorces 5' et 3' 0,5 μ M, la Taq polymérase 25 U/ml et la matrice d'ADN 0,06%. Le programme PCR utilisé est le suivant (30 cycles) : dénaturation 5min 95°C, dénaturation 30s 95°C, amorçage 30s 51°C, synthèse d'ADN 2min 72°C et extension finale 10min 72°C.
Après PCR, les échantillons sont mélangés à une solution stop (bleu de Bromophénol 0,25%, Ficoll 10% et SDS 1%) et déposés sur un gel à 1,5% d'Agarose contenant du BET 0,5 μg/ml. La migration est réalisée dans une cuve d'électrophorèse contenant du tampon Tris-base 40 mM, acide acétique glacial 20 mM, EDTA 1 mM, pendant 15 minutes à 100V. Après migration, l'ADN est visualisé sous UV.
Résultats : Les souches de levures ont été identifiées par PCR à la fois en sortie de l'intestin grêle jusqu'à 6 h après leur introduction dans l'estomac et en sortie de côlon jusqu'à 48 H après leur introduction dans celui-ci (figure 6).
Exemple 5 : Suivi des levures recombinantes W(R)pP73Al dans les systèmes digestifs artificiels
Préparation des levures
Les levures sont mises en préculture 12h à 28°C, sous agitation, dans 30 ml de SGI (glucose 20 g/1, yeast nitrogen base 7g/l, bactocasamino acids 1 g/1 et tryptophane 20 mg/1). Puis, une culture de 48 h à 28°C, sous agitation, est réalisée dans 250 ml d'YPGE (glucose 20 g/1, yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1 et éthanol 3%). Pendant les dernières 12h, l'induction du CYP73A1 est provoquée par ajout de galactose (25 ml d'une solution à 200 g/1) jusqu'à atteindre une densité de 3 à 4 xlO7 levures/ml. La culture est ensuite centrifugée dans des tubes en plastique autoclaves à 3000 g, 10 min, 4°C. Le surnageant est jeté et les cellules sont lavées dans 15 ml d'eau physiologique (NaCI 9 g/1).
Après une nouvelle centrifugation (3000 g, 10 min, 4°C), les levures sont introduites dans le TIM 1 remises en suspension dans 300 ml de milieu de culture YPL (galactose 20 g/1, yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1) et sont introduites dans le TIM 2 remises en suspension dans 10 ml de milieu YPL.
Dénombrement des levures
- Prélèvement des échantillons dans TIM 1 : 1 ml de l'aliment de départ (contenant les levures) est prélevé avant introduction dans l'estomac (t = 0), puis 1 ml est prélevé à différents niveaux du tractus digestif : dans l'estomac au bout de 15, 30, 45, 60 et 90 min de digestion, dans le duodénum au bout de 15, 30, 45, 60, 75, 90, 120 et 150 min de digestion, dans le jéjunum au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 150, 180 et 240 min de digestion, dans l'iléon au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 150, 180 et 240 min de digestion et dans les sorties iléales cumulées sur 0-30 min, 30-45 min, 45-60 min, 60-90 min, 90-120 min, 120-180 min et 180-240 min à 30, 45, 60, 90, 120, 180 et 240 min. - Prélèvement des échantillons dans TIM 2 : 1 ml du contenu colique est prélevé avant introduction des levures dans le côlon (t = Ofec) ainsi qu'l ml de la suspension de levures avant introduction dans le côlon (t = 0), puis 1 ml du contenu colique est prélevé toutes les heures pendant 12h, puis 24h après introduction des levures,
- Culture des levures : les prélèvements sont dilués dans de l'eau physiologique et étalés sur du milieu SGI. De l'ampicilline (100 μg/ml) est rajoutée dans le milieu afin d'éliminer les contaminants provenant du système digestif et/ou de la flore fécale.
- Dénombrement : le dénombrement des boîtes est réalisé après 2 à 3 jours d'incubation à 30°C.
Résultats : Les expériences réalisées ont permis de démontrer la viabilité dans les systèmes digestifs artificiels des levures W(R)pP73Al.
Ces levures montrent une grande résistance aux sécrétions gastriques et intestinales puisque aucune différence significative n'est observée dans chaque compartiment digestif du TIM1 entre la courbe obtenue pour les levures et celle d'un marqueur de transit non absorbable (figure 7).
79% ± 13 (n=3) des levures recombinées introduites dans l'estomac sont retrouvées en
sortie d'iléon après 4 h de digestion (figure 8).
Le taux de survie des levures dans le côlon est plus faible puisque que l'on ne retrouve, après 12 h de fermentation, que 1% des levures introduites (n=3) (figure 9). Deux hypothèses ont été avancées mettant en cause la compétition exercée par la flore fécale et les conditions de quasi anaérobiose régnant dans le côlon artificiel.
Exemple 6 : Mesure de l'activité éthoxyrésorufine-O-déethylase (EROD) des levures W(hR)pHlAl après passage dans le TIM 1
La souche W(hR)pHlAl est utilisée pour démontrer le maintien de l'activité des levures recombinantes après passage dans le TIM1.
Le P450 1A1 possède l'activité éthoxyrésorufine-O-déethylase (EROD) et catalyse la transformation de la 7-éthoxyrésorufine en résorufine.
Culture des levures
Les levures sont mises en préculture 12h à 28°C, sous agitation, dans 30 ml de SGI (glucose 20 g/1, yeast nitrogen base 7g/l, bactocasamino acids 1 g/1 et tryptophane 20 mg/1). Puis, une culture de 48 h à 28°C, sous agitation, est réalisée dans 250 ml d'YPGE (glucose 20 g/1, yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1 et éthanol 3%). Pendant les dernières 12h, l'induction du P450 1A1 est provoquée par ajout de galactose (25 ml d'une solution à 200 g/1). La culture de levures est alors soit utilisée telle quelle pour le dosage de l'EROD sur cellules, soit subit différents traitements afin de préparer des microsomes (Pompon et al., 1996).
Teneur en P450 1A1
La teneur en P450 1A1 a été mesurée sur des microsomes de la souche W(hR)pHl Al après passage dans les systèmes digestifs .
Pour cela, on utilise la méthode d'Omura et Sato (1964), basée sur la propriété qu'a l'hémoprotéine de présenter un maximum d'absorption aux environs de 450 nm quand elle est réduite et liée au monoxyde de carbone. La suspension de microsomes est reprise dans du tampon Tris-HCl 50 mM, EDTA 1 mM, pH 7,4 afin d'obtenir une
DOôoonm d'environ 0,8, puis réduite par une pointe de spatule de dithionite de sodium. Le spectre d'absorption est enregistré avant et après barbotage de CO dans la suspension. La concentration en P450 1A1 (seul P450 détectable) est calculée d'après la loi de Beer-Lambert (ε448 nm = 91 mM^cm"1). Les protéines microsomales sont dosées avec le kit Protein Assay ESL (Boehringer Mannheim).
Dosage de l'activité EROD
L'activité enzymatique éthoxyrésorufine-O-dééthylase (EROD) est caractéristique du cytochrome P450 1A1. Elle est mesurée sur la souche W(hR)pHlAl, après passage dans les systèmes digestifs artificiels. Cette activité est dosée selon la méthode fluorimétrique décrite par Burke et al. (1985) qui mesure l'augmentation de fluorescence liée à la formation de résorufine, produit de déalkylation de la 7- éthoxyrésorufine. L'activité EROD est mesurée sur microsomes ou sur cellules à 24°C. Dans le premier cas, 1 ml de tampon Tris-HCl 50 mM, EDTA 1 mM, pH 7,4, 5 μl de NADPH (10 mg/ml) et 2 μl d'une solution de 7-éthoxyrésorufine saturée dans l' éthanol sont mélangés. Après ajout des microsomes, l'augmentation de la fluorescence (λex = 530 nm ; λem = 586 nm) est enregistrée. Dans le second cas, après centrifugation (11000 g, 30 s, 4°C) d'I ml de culture à une DO oonm de 3 minimum, le culot cellulaire est repris dans 1 ml de tampon Tris-HCl 50 mM, EDTA 1 mM, pH 7,4. On enregistre l'augmentation de fluorescence (λex = 530 nm ; λem = 586 nm) consécutive à l'ajout de 2 μl d'une solution de 7-éthoxyrésorufme saturée dans l' éthanol.
Résultats : La souche W(hR)pHl Al possède toujours l'activité EROD, caractéristique du P450 1A1, en sortie de l'intestin grêle et dans le côlon, que celle-ci soit dosée sur microsomes (environ 20 pmol de résorufine par ml de suspension microsomale et par minute) ou sur cellules (environ 5 pmol de résorufine par ml de culture et par minute).
Exemple 7 : Suivi de l'activité cinnamate-4-hydroxylase des levures W(R)pP73Al
dans les différents compartiments du TIM 1 et dans le TIM 2
La souche de levure utilisée pour démontrer l'activité in situ est la souche W(R)pP73Al. Le P450 73A1 possède l'activité cinnamate 4-hydroxylase et catalyse la transformation de l'acide tram-cinnamique en acide 7-coumarique.
Préparation des levures
Les levures sont mises en préculture 12h à 28°C, sous agitation, dans 30 ml de SGI (glucose 20 g/1, yeast nitrogen base 7g/l, bactocasamino acids 1 g/1 et tryptophane 20 mg/1). Puis, une culture de 48 h à 28°C, sous agitation, est réalisée dans 250 ml d'YPGE (glucose 20 g/1, yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1 et éthanol 3%).
Pendant les dernières 12h, l'induction du CYP73A1 est provoquée par ajout de galactose (25 ml d'une solution à 200 g/1) jusqu'à atteindre une densité de 3 à 4 xlO7 levures/ml.
La culture est ensuite centrifugée dans des tubes en plastique autoclaves à 3000 g, 10 min, 4°C. Le surnageant est jeté et les cellules sont lavées dans 15 ml d'eau physiologique (NaCI 9 g/1).
Après centrifugation (3000 g, 10 min, 4°C), le surnageant est jeté et le culot cellulaire est remis en suspension dans l'aliment (300 ml de milieu YPL pour le suivi de la réaction de bioconversion dans le TIM 1 et 10 ml de milieu YPL pour le suivi de la réaction dans le TIM 2).
Déroulement de la digestion dans le TIM 1 Le substrat (l'acide tr ras-cinnamique) est introduit extemporanément dans l'estomac à la concentration de 670 μM (concentration dans l'aliment). La digestion est réalisée sur 240 minutes.
Des prélèvements (1 ml) sont réalisés à différents niveaux du tractus digestif : dans l'aliment (tO), dans l'estomac au bout de 15, 30, 45, 60 et 90 min de digestion, dans le duodénum au bout de 15, 30, 45, 60, 75, 90, 120 et 150 min de digestion, dans le jéjunum au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 150, 180 et 240 min de digestion, dans l'iléon
au bout de 30, 45, 60, 90, 120, 180 et 240 min de digestion et dans les sorties iléales cumulées sur 0-30 min, 30-45 min, 45-60 min, 60-90 min, 90-120 min, 120-180 min et 180-240 min à 30, 45, 60, 90, 120, 180 et 240 min.
Déroulement de la fermentation dans le TIM 2
Le substrat (l'acide tr πs-cinnamique) est introduit dans le côlon à la concentration de 1.7 mM (concentration initiale dans le côlon). Des prélèvements (1 ml) sont réalisés à tO puis 15, 30, 45, 60, 75, 90, 120, 150, 180, 240, 300 et 360 min après introduction simultanée des levures et du substrat dans le côlon. Les échantillons sont dilués au lA avant d'être traités comme décrit ci-dessous.
Traitement des échantillons
100 μl d'acide trifluoroacétique (25% dans l'eau w/v) sont ajoutés à 1 ml d'échantillon pour arrêter la réaction enzymatique. Après microcentrifugation (3 min, 10000 rpm), le surnageant est récupéré et filtré (0.45 μm). Les échantillons sont conservés à -20°C avant analyse.
Analyse HPLC
Après filtration, 10 μl des échantillons sont injectés dans la colonne Merck Lichrospher 100 RP-18 (5 μm, 12.5 cm*4 mm). Un gradient entre 2 phases A et B est réalisé sur 34 min avec un débit de 1 ml par minute, comme décrit ci-dessous :
Phase A : Eau 95, Méthanol 5 et acide acétique 0.1 (v/v),
Phase B : Acétonitrile 95, Méthanol 5 et acide acétique 0.1 (v/v),
0-16 min : 90% A, 10% B, 16- 18 min : gradient linéaire jusqu' à 80% A, 20%> B,
18-32 min : 80% A, 20% B,
32-34 min : gradient linéaire jusqu'à 90% A, 10% B.
La détection est réalisée par spectrophotométrie à 314 nm entre 0 et 16 min, puis à 280 nm entre 16 à 34 min. Le temps de rétention des composés est de 6 + 0.5 min pour l' acide 7-coumarique et de
22 ± 0.5 min pour l'acide trαns-cirmamique.
Résultats
L'activité enzymatique cinnamate 4-hydroxylase a été détectée dans tous les compartiments digestifs du TIM 1 (estomac, duodénum, jéjunum et iléon). Des digestions témoins ont permis de s'assurer de la stabilité du substrat et du produit dans le TIM 1, ainsi que de la spécificité de la réaction de bioconversion. La figure 10A représente un bilan de la réaction de bioconversion de l'acide trans- cinnamique en acide -coumarique (n=3), au cours du temps, dans l'ensemble des compartiments du TIM 1. Ainsi 41 % ± 6 (n=3) de l'acide tr πs-cinnamique introduit dans l'estomac est converti en acide
dans le TIM 1 sous l'action des levures W(R)pP73 Al.
La figure 10B représente l'acide /?-coumarique produit dans les différents compartiments du TIM 1 au cours du temps (n=3), en % de l'acide trαras-cinnamique introduit dans l'estomac au début de la digestion. C'est dans le duodénum que a plus grande quantité d'acide >-coumarique est produit par les levures.
Une activité enzymatique, quoique très faible, a également été détectée dans le côlon artificiel (résultats non présentés). Des témoins ont permis de s'assurer de la spécificité de la réaction. Le faible taux de survie des levures dans le côlon, ainsi que l'existence de voies métaboliques secondaires (métabolisme de l'acide tr ra-cinnamique et de l'acide /?-coumarique par les bactéries du côlon) pourraient expliquer que l'activité cinnamate 4-hydroxylase soit très faible dans le côlon.
Exemple 8 : constructions génétiques de souches de levures sécrétant un peptide modèle "taggé" (souche WppVsHô) et une protéine modèle "taggée" (souche WppGSTV5H6)
Choix du signal de sécrétion
Une séquence signal provenant du peptide α, peptide naturellement sécrété par les levures de type sexuel α, a été choisie comme signal de sécrétion. La séquence signal du peptide α se découpe en trois domaines, situés directement en amont du peptide α et nécessaires à sa maturation et à sa sécrétion :
1- la séquence d'adressage du peptide vers le réticulum endoplasmique : séquence Pre,
2- une séquence dont la glycosylation permet une sécrétion efficace du peptide : séquence Pro, 3- la région de coupure des protéases Kex2, Stel3 et Kexl .
Une séquence signal constituée des séquences Pre et Pro et de la séquence codant pour les deux acides aminés lysine-arginine (KR), site de coupure de Kex2, a été retenue (notée PreProKR). En effet, dans ce cas, la fonction de la protéine Stel3 n'est pas requise (activité devenant limitante en cas de surexpression de protéines hétérologues) et la protéase Kex2 est suffisante pour l'obtention d'un peptide mature.
Construction des plasmides ppVsHβ et ppGST V5H6
Le vecteur navette bactérie/levure pYES2-CT (plasmide commercial, Invitrogen) a servi de base à la construction des plasmides ppV H6 et ppGSTV5H6 (Figure 11A et 1 IB). pYES2-CT porte une cassette d'expression comportant le promoteur fort GAL 1 (inductible par le galactose) et le terminateur du gène CYCl. Ce vecteur présente par ailleurs, sous le contrôle de GAL 1, une séquence codant pour un épitope dit V5 et pour une chaîne polypeptidique de 6 histidines. Ces deux séquences forment un tag (multi- tag V5H6) qui pourra être reconnu par le biais de son épitope V5 (reconnu par des anticorps spécifiques), notamment lors d'une analyse par Western Blot. Construction du plasmide ppVjHk Le plasmide ppV5H6 a été construit par insertion de la séquence codant pour le PreProKR en amont de la séquence codant pour l'épitope V5. Pour ce faire, les sites de restriction BamHl et EeoRl ont été ajoutés, par amplification PCR, respectivement aux extrémités 5' et 3' de la séquence codant pour le PreProKR. Le produit PCR a ensuite été sous-cloné dans le vecteur pYes2/CT, ouvert par double digestion BamHl - ΕcoRl.
Construction du plasmide ppGSTVjHk La construction a été réalisée à partir du plasmide ppV5H6 dans lequel la séquence de la phase codante de la GST a été insérée, en amont de la séquence V5H6. Cette insertion a été effectuée par recombinaison homologue directement dans la levure hôte.
Pour cela, des séquences homologues ont été ajoutées, par amplification PCR, aux extrémités de la phase codante de la GST (GST de Schistosoma japonicum).
Obtention des souches de levures pVsHβ et WppGSTVsHβ Les plasmides ppV5H6 et ppGSTV5H6 ont été introduits par transformation dans la souche de levure W303 de signe sexuel MAT α (leu 2, his 3, trp 1, ura 3 et ade 2), donnant respectivement les souches WppV H6 et WppGSTV5H6. Le peptide modèle "taggé" (noté peptide- V5H6) sécrété par la souche WppV5H6 à une taille de 42 acides aminés (PM calculé : 5.7 kDa). La protéine modèle "taggée" (notée GST-V5H6) sécrétée par la souche WppGSTV5H6 a une taille de 29.7 kDa (PM calculé).
Exemple 9 : Suivi des produits de sécrétion des levures WppVsHβ et WppGSTV5H6 en erlen-Meyer
Préparation des levures
Les souches WppV5H6 ou WppGSTV5H6 sont mises en préculture (24h, 30°C, 210 rpm) dans du milieu minimum SRAI (bactocasamino acids lg/1, yeast nitrogen base 7g/l, adénine 2 mg/ml et raffinose 20 g/1), jusqu'à être en phase stationnaire. Ensuite, une culture de croissance (12 h, 37°C, 210 rpm) est réalisée dans du milieu complet YPRA (yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1, adénine 2 mg/ml et raffinose 20 g/1), jusqu'à être en phase stationnaire. La culture est centrifugée (2000 g, 6 min, température ambiante), le surnageant est enlevé, puis le milieu d'induction YPLRA (yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1, adénine 2 mg/ml, galactose 20 g/1 et raffinose 10 g/1) est ensemencé soit à haute densité cellulaire (DO6oonm de 4), soit à faible densité cellulaire (DO6nonm de 0,6). La culture d'induction est réalisée 6 h, à 37°C, sous agitation (210 rpm).
Des échantillons sont prélevés dans la culture de croissance et dans la culture d'induction à tO, t2h, t4h et t6h, dans les deux conditions de concentration cellulaire.
Traitement des échantillons
Précipitation des protéines Après centrifugation (3000 g, 10 min, 4°C) pour éliminer les cellules, les protéines contenues dans le surnageant sont précipitées par ajout de trichloro acetic acid (TCA) (concentration finale 10%). Les échantillons sont incubés à 4°C pendant lh puis centrifugés (10000 g, 10 min, 4°C). Les culots protéiques sont ensuite rincés 2 fois avec de l'acétone 100%. Après séchage, les culots sont repris dans du tampon de charge et chauffés 5 min à 95°C.
Electrophorèse des protéines Pour chaque échantillon, on dépose les protéines du surnageant, correspondant à un volume de culture contenant 5*107 levures. Les protéines sont séparées par electrophorèse sur gel de polyacrylamide 12 % (GST-V5H6) ou 16.5 % (peptide-V H6), en conditions dénaturantes (ajout de SDS). Un tampon de migration contenant de la tricine, plus adapté à la séparation de protéines de faible poids moléculaire, a été utilisé dans le cas du peptide- V5H6 (Shagger H. et Von Jagow G., 1987). Les paramètres de la migration sont les suivants : 30 mA, 150 V, lh (GST-V5H6) ou 3h (peptide- V5H6).
Western-Blot Après electrophorèse, les protéines sont transférées sur membrane polyvinyldifluorène (PVDF). Les paramètres du transfert sont les suivants : 350 mA, 100 V, lh (GST- V5H6) ou 20 min (peptide- V5H6).
Le peptide- V5H6 et la GST-V5H6 sont révélés après incubations successives des membranes avec l'anticorps spécifique anti-V5 et un anticorps secondaire couplé à la phosphatase alcaline (Kit Western-Breeze, Invitrogen, WB7103). L'ajout du substrat (BCIP/NBT) provoque la formation d'un précipité violet.
Résultats
La figure 12 représente les Western-Blot obtenus avec la souche WppV5H6 (12A) et avec la souche WpρGSTV5H6 (12B).
Dans les 2 cas, le niveau basai de sécrétion obtenu sur raffinose est trop faible pour être visible sur Western-Blot. Les produits de sécrétion sont détectables dès 2h après induction du promoteur GAL1 par le galactose. Au vu des Western-Blot, la sécrétion
semble plus importante lorsque la culture d'induction est réalisée à faible densité cellulaire, que soit pour le peptide- V5H6 ou pour la GST-V5H6. Dans les 2 cas, les produits de sécrétion sont détectables également sous forme de précurseurs (avec la séquence Pre-Pro-KR) et sous forme glycosylée ou hyperglycosylée.
Exemple 10 : Suivi des produits de sécrétion des levures WppVsHβ et WppGSTV5H6 dans les différents compartiments du TIM 1
Préparation des levures Les souches WppV5H6 ou WppGSTV5H6 sont mises en préculture (24h, 30°C, 210 rpm) dans du milieu minimum SRAI (bactocasamino acids lg/1, yeast nitrogen base 7g/l, adénine 2 mg/ml et raffinose 20 g/1), jusqu'à être en phase stationnaire. Ensuite, une culture de croissance (12 h, 37°C, 210 rpm) est réalisée dans du milieu complet YPRA (yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1, adénine 2 mg/ml et raffinose 20 g/1), jusqu'à être en phase stationnaire. La culture est centrifugée (3000 g, 10 min, température ambiante) et le culot cellulaire est remis en suspension dans 300 ml du milieu d'induction YPLRA (yeast extract 10 g/1, bactopeptone 10 g/1, adénine 2 mg/ml, galactose 40 g/1 et raffinose 20 g/1), constituant ainsi l'aliment qui sera introduit dans le
TIM 1.
Déroulement de la digestion dans le TIM 1
La digestion est réalisée selon un protocole classique de digestion (cf exemple 3) mais sans les protéases digestives (pour éviter la dégradation des produits de sécrétion).
Des prélèvements sont réalisés à différents niveaux du tractus digestif : dans l'aliment avant introduction dans le système (tO), dans l'estomac au bout de 90 et 120 min de digestion, dans le duodénum au bout de 90, 160 et 210 min de digestion, dans le jéjunum au bout de 90, 160 et 210 min de digestion et dans l'iléon au bout de 90, 160,
210 et 270 min de digestion.
Des dénombrements sont réalisés dans l'aliment et dans les sorties iléales cumulées sur 0-90, 90-180 et 180-270 min, à 90, 180 et 270 min, par dénombrement sur milieu
Sabouraud contenant de l'ampicilline (100 μg/ml).
Un témoin positif en Erlen-Meyer est réalisé en parallèle pour les deux souches.
Traitement des échantillons
Précipitation des protéines Le protocole de précipitation est celui décrit dans l'exemple 9. Les échantillons issus de l'estomac sont préalablement neutralisés avec du bicarbonate de sodium 1M.
Electrophorèse des protéines Le protocole d'électrophorèse est celui décrit dans l'exemple 9. La totalité des protéines contenues dans le surnageant des prélèvements est déposée (correspondant à un volume de 2 ml dans le TIM 1, sauf pour l'estomac et le duodénum où le volume des prélèvements est de 4 ml, et 600 μl dans l'Erlen Meyer).
Western-Blot Le protocole de Western-Blot est celui décrit dans l'exemple 9. L'anticorps anti-GST a été utilisé à la place de l'anticorps anti-V5 afin de réaliser une semi-quantification de la GST-V5H6 sécrétée.
Semi-quantification de la GST-VjH Afin d'apprécier de façon approximative la quantité de GST sécrétée dans l'environnement digestif, nous avons comparé l'intensité des signaux de détection d'une gamme étalon avec celle d'échantillons issus du TIM 1. 20 ng, 10 ng et 1 ng de GST pure à 85 % ont été déposés sur le même gel que les protéines d'échantillons issus de prélèvements dans le TIM 1. Après transfert sur membrane PVDF, la présence de GST a été mise en évidence avec un anticorps primaire anti-GST et le kit de détection WesternBreeze (Invitrogen, WB7103).
Résultats
Les figures 13 et 14 représentent les Western-Blot obtenus lors de la digestion dans le TIM 1 en présence respectivement des souches WppV5H6 et WppGSTV5H6. Le peptide V5H6 a été mis en évidence dans tous les compartiments du TIM 1 dès 90 minutes après le début de la digestion. La quantité de peptides décelée augmente au cours de la digestion et le long du tractus digestif (de l'estomac à l'iléon) pour un temps
de digestion donnée. La GST-V5H6 a été décelée dans tous les compartiments sauf l'estomac. La quantité de protéines sécrétées augmente également au cours de la digestion.
La figure 15 représente une semi-quantification de la GST-V5H6 produite lors d'une digestion dans le TIM 1 en présence de la souche WppGSTV5H6. La concentration de la GST-V5H6 dans les échantillons digestifs peut être évaluée à : - < 1 ng/ml pour les échantillons duo, jej et ile 90 min, lo 10 ng/ml pour les échantillons jej et ile au temps 160 et 210 min.
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