"METHODE ET DISPOSITIF AUTONOME DE PRODUCTION DE GAZ DE SYNTHESE PAR OXYDATION PARTIELLE"
Domaine technique
L'invention concerne tant une méthode qu'un dispositif pour la production intégrée de gaz de synthèse (SYNGAS) par oxydation partielle catalytique sous pression d'un combustible hydrocarboné. Elle consiste en un dispositif energetiquement autonome mettant en oeuvre conjointement une source d'air comprimé, éventuellement enrichi en oxygène, un réacteur d'oxydation partielle catalytique avec injection de vapeur, une turbine de détente, un système de purification/séparation du gaz et générateur de la vapeur, et un recompresseur de gaz de synthèse. L'oxydation partielle est définie ici comme étant l'oxydation catalytique d'un combustible hydrocarboné en présence de vapeur d'eau et d'air, enrichi ou non en oxygène, l'oxygène étant en défaut par rapport à la quantité requise pour la combustion stoechiométrique.
Le système de purification est défini ici comme étant un système qui permet soit d'augmenter la concentration en hydrogène, soit d'ajuster les concentrations du gaz (suivant les différentes applications) en trois étapes :
1. en convertissant le CO en CO2 dans un réacteur réalisant la réaction de déplacement (shift reaction, en anglais) bien connue : CO + H2O => C02 + H2
2. en éliminant l'eau restante par condensation,
3. en éliminant le CO2 et éventuellement l'azote par une technique de séparation traditionnelle : absorption, PSA ou membrane.
Etat de la technique
Le SYNGAS est généralement produit par reformage (reforming, en anglais) de gaz naturel à la vapeur. Cette méthode met en œuvre une réaction endothermique dont l'énergie est fournie par la combustion totale d'une partie du gaz naturel pour chauffer, dans un four de reformage, le gaz naturel à transformer en hydrogène et CO. Ce four de reformage primaire est suivi par un réacteur catalytique de reformage secondaire. Cela implique, d'une part, qu'une partie de l'hydrogène du gaz naturel part à perte dans les fumées sous forme de vapeur d'eau, d'autre part qu'il faut une installation coûteuse, incluant de nombreux échangeurs et une turbine à vapeur, pour récupérer l'énergie excédentaire disponible dans les gaz de combustion et dans les gaz de synthèse. En conséquence, les installations de ce type sont généralement de grosse capacité. Une autre méthode de production est en cours de développement, elle est généralement appelée "production par réacteur autothermique" (Gas Heated Reactor ou GHR et Advanced Gas Heated Reactor ou AGHR, en anglais). Cette méthode utilise, elle aussi, deux réacteurs couplés par un échange de chaleur. Ge système permet d'atteindre un fonctionnement plus ou moins autonome d'un point de vue thermique, mais l'autonomie mécanique ne peut être mise en œuvre que par une turbine à vapeur qui récupère l'excès d'énergie du processus. L'ensemble est ici aussi relativement complexe.
Problèmes techniques à résoudre
La production d'hydrogène et d'autres gaz de synthèse (SYNGAS) au départ de gaz naturel nécessite une installation lourde et coûteuse, incluant un cycle avec turbine à vapeur. Dès lors, les installations
de petites tailles sont peu rentables.
D'autre part, le reformage utilisé nécessite la combustion d'une partie du gaz naturel dans un four à haute température, ce qui induit la formation de NOx et la perte, sous forme de vapeur dans les fumées sortant du four, d'une partie de l'hydrogène disponible dans le gaz naturel. Le rendement en hydrogène est donc réduit (environ 140 mol H2/kg de gaz naturel)
La production de SYNGAS est donc une grosse consommatrice d'énergie. De plus, il est aujourd'hui souhaitable de disposer, pour la production de gaz de synthèse, d'unités autonomes en énergie thermique et mécanique et de plus petites tailles permettant leur intégration dans des installations existantes de : hydrodésulfuration, ammoniac, méthanol, alcools supérieurs et autres applications de gaz de synthèse, dont les piles à combustible. D'un autre côté, le développement de la turbine à gaz à oxydation partielle a mis en évidence l'intérêt de la technique de l'oxydation partielle, mais ne valorise pas de façon optimale le SYNGAS produit et détendu en turbine, puisque celui-ci est simplement brûlé après détente, pour satisfaire des besoins thermiques.
Bases technologiques
La présente invention s'inspire des systèmes combinés utilisant une turbine à gaz à oxydation partielle catalytique pour produire un gaz de synthèse brut. On connaît ce type de turbine à gaz par les documents suivants, établis par la même société:
Brevet belge déposé sous le n° 09500879 le 20 octobre 1995 : "Procédé d'oxydation partielle catalytique de combustible sur turbine à gaz dans des systèmes énergétiques combinés et dispositifs de mise en oeuvre"
Brevet belge publié sous le n° 1009707-A6 délivré le 01 juillet 1997 :
"Système énergétique thermique à turbine à gaz avec oxydation partielle catalytique de combustible". Demande de brevet PCT/BE96/00112 :
"Système énergétique combiné à turbine à gaz avec oxydation partielle catalytique du combustible".
Ces documents définissent les moyens à mettre en oeuvre pour la production combinée d'électricité et de chaleur. Le SYNGAS y est produit en utilisant de l'air non enrichi en oxygène et est simplement brûlé dans une chaudière ou dans un four.
La présente invention constitue une proposition novatrice et réaliste pour utiliser de façon optimale le SYNGAS ainsi produit. Sa valeur chimique est en effet beaucoup plus importante que sa valeur énergétique.
Objet de l'invention
L'invention a pour but de fournir un dispositif généralement autonome comprenant au moins un générateur d'air comprimé enrichi ou non en oxygène, un réacteur d'oxydation partielle catalytique couplé à une turbine de détente et un système de purification des gaz. Ce dispositif peut être aisément installé dans une installation consommant du gaz de synthèse, en ce compris de l'hydrogène de pureté industrielle.
En premier lieu, la méthode mise en oeuvre dans le dispositif de l'invention et proposée ici se distingue des deux méthodes exposées ci- dessus, en premier lieu, par le caractère auto-suffisant en énergie thermique et mécanique. Ce caractère est obtenu par la combinaison des réactions d'oxydation partielle et de reformage à la vapeur (steam reforming, en anglais) dans le réacteur catalytique, et par la détente, du gaz
obtenu, dans une turbine dont la contre-pression est ajustée pour satisfaire les besoins mécaniques du système : compression d'air, production d'oxygène et recompression du SYNGAS après condensation de l'eau et purification. D'un point de vue thermique, l'autosuffisance est assurée par un préchauffage des réactifs (comprenant la production de vapeur d'eau utilisée comme réactif) qui est réalisé par échange de chaleur avec le gaz de synthèse en sortie de la turbine et dans la section de purification, ce qui permet de valoriser le caractère exothermique de ladite réaction shift. Les produits sont refroidis de manière à condenser l'eau qui est recyclée dans le processus. L'utilisation d'air enrichi en oxygène et de vapeur d'eau dans le réacteur d'oxydation partielle permet d'ajuster les concentrations du gaz de synthèse et autorise en même temps une certaine souplesse au niveau de la production d'énergie mécanique.
En second lieu, la méthode proposée n'utilise qu'un réacteur au lieu de deux (sans compter le réacteur de shift) et donc pas d'echangeur entre ceux-ci. Le dispositif a un meilleur rendement énergétique et ne nécessite pas de combustion externe, évitant ainsi l'utilisation d'une chaudière supplémentaire pour récupérer l'énergie des fumées.
En troisième lieu, l'ajustement des conditions opératoires permet d'ajuster la pureté de l'hydrogène au niveau optimal : la teneur en azote peut être réglée entre 80 et 0 % en fonction de l'enrichissement de l'air.
En quatrième lieu, la méthode proposée n'entraîne pas la production de NOx, et permet de réduire les émissions de CO2 gazeux, puisque tout le CO2 produit peut être récupéré, s'il y a lieu, par l'unité de décarbonatation : il n'y a pas de rejet de fumées dans l'atmosphère.
Enfin, comme le dispositif peut être rendu autonome, non seulement du point de vue thermique mais aussi du point de vue
mécanique, il est envisageable d'installer un dispositif de l'invention, pour par exemple la production d'hydrogène, sur tout lieu nécessitant une alimentation en hydrogène ou en gaz de synthèse, pourvu qu'il y ait une source d'hydrocarbure, comme du gaz naturel, et une alimentation en eau ou vapeur.
Le rendement énergétique d'un tel dispositif, en ce compris l'énergie mécanique, est de 165 mol de H2/kg de gaz naturel ce qui est supérieur au rendement obtenu avec les technologies classiques.
Des détails et particularités de l'invention ressortiront des revendications et de la description qui illustrent, à titre d'exemples non limitatifs, la méthode et le dispositif suivant l'invention.
Exposé de l'invention
La méthode proposée exploite efficacement la technologie mise au point pour la turbine à gaz à oxydation partielle à la production de SYNGAS. Elle en utilise le couple réacteur-turbine, mais en diffère par la préparation des réactifs et l'utilisation des effluents.
La méthode proposée consiste à effectuer l'oxydation partielle du combustible hydrocarboné (par exemple du gaz naturel, du gaz combustible, un combustible liquide ou du biogaz), sous pression, en présence de vapeur d'eau et d'un défaut d'air, généralement enrichi en oxygène.
Après compression de l'air et enrichissement, celui-ci est préchauffé puis mélangé à un mélange de gaz naturel et de vapeur d'eau produite par récupération de chaleur produite par le processus.
On réalise ensuite l'oxydation partielle du combustible carboné.
Le gaz à haute température obtenu en sortie du réacteur
catalytique est un mélange d'hydrogène, de CO, de vapeur d'eau et, en quantité ajustée, d'azote. Ce gaz est détendu dans une turbine dont la contre-pression en sortie est ajustée pour optimaliser le bilan énergétique, en général pour rendre le système autosuffisant : la turbine produit l'énergie mécanique requise pour l'installation d'air enrichi et pour la recompression de l'hydrogène à la pression requise. Dans certains cas, le dispositif peut être générateur d'énergie électrique ou mécanique.
Le SYNGAS sortant de la turbine est refroidi pour préchauffer les réactifs puis est purifié. La concentration en CO peut être ajustée, voire très fortement réduite dans un réacteur shift rendu pseudo-isotherme par un échangeur de chaleur produisant la vapeur pour le processus. Ce réacteur permet la production supplémentaire d'hydrogène. Le mélange est ensuite refroidi pour préchauffer l'eau et les réactifs. Le refroidissement supplémentaire permet d'éliminer l'eau par condensation. Le gaz de synthèse résiduel peut, le cas échéant, être purifié par les systèmes classiques : PSA, membrane, unité de décarbonatation. Le gaz de synthèse amené ainsi dans les bonnes conditions stoechiométriques est ensuite recomprimé en utilisant l'énergie de la turbine de détente.
Description de quelques manières d'appliquer l'invention
La présente invention peut être appliquée pour la production non seulement d'hydrogène (pour les tâches de désulfuration des hydrocarbures ou pour les piles à combustibles par exemple), mais aussi pour la production de gaz de synthèse (SYNGAS), intermédiaire pour la synthèse de plusieurs produits chimiques importantes : NH3 (après conversion totale du CO), CH3OH (méthanol, utilisable aussi dans les piles à combustibles), alcools oxo, éthylène glycol après ajustement de la concentration en CO, etc..
La figure 1 représente un schéma d'un dispositif l'invention permettant la production d'hydrogène de pureté industrielle.
L'air A est comprimé en C1 et mélangé avec l'oxygène 02 dans un mélangeur M1 (M = Mixer) pour obtenir l'air enrichi EA (= Enriched Air) (ou bien l'air enrichi et sous pression est obtenu d'une autre manière). EA est préchauffé dans l'échangeur E1 (E = Exchanger) puis mélangé au flux de combustible et de vapeur FS (= Fuel + Steam) préchauffé lui aussi en E1 par l'effluent de la turbine T. Ce mélange réactionnel alimente le réacteur catalytique CR (= Catalytic Reactor), le flux d'entrée de celui-ci étant préchauffé par son flux de sortie en E2. le gaz de processus sortant de la turbine T passe dans E1 avant d'alimenter le réacteur de shift SR (= Shift Reactor), refroidi par vaporisation de l'eau PW (= Process Water) préalablement préchauffée en E3. Le combustible F (= Fluel) est aussi préchauffé en E3. Le combustible F et la vapeur S (= Steam) sont mélangés en M3 pour produire le mélange FS. A la sortie de E3, le gaz de processus est débarrassé de l'eau dans deux condenseurs COND1 et COND2. Cette eau est partiellement recyclée, via M4 qui reçoit l'eau fraîche de processus. Le gaz produit peut être purifié dans l'unité PUR (= PURification) et comprimé en C2. II doit être entendu que l'invention n'est nullement limitée aux formes de réalisation décrites et que bien des modifications peuvent être apportées à ces dernières sans sortir du cadre des revendications.
A titre d'exemple, le tableau 1 ci-après montre comment régler la teneur en azote dans une production d'hydrogène, en jouant sur la concentration en oxygène, cela pour une installation autonome.
Tableau 1
Calcul pour un débit de 1 kg/s de gaz naturel, préchauffé à 700°C, pression dans le réacteur = 30 bar et pression de l'hydrogène produit = 35 bar. Température du réacteur de shift = 242 °C
Note : RC = réacteur catalytique