Chaîne d'amorçage de sécurité pour charge explosive
Le domaine de la présente invention est celui des chaînes d'amorçage d'une charge explosive.
D'une façon habituelle, une chaîne d'amorçage comporte un composant pyrotechnique d'amorçage (ou amorce), qui initie une charge relais en explosif secondaire, cette dernière assurant l'initiation de la charge explosive principale.
L'amorce est un composant pyrotechnique qui contient une faible quantité d'explosif primaire très sensible. La charge relais en explosif secondaire est moins sensible que l'amorce mais elle peut être initiée par cette dernière.
Le principal inconvénient des chaînes d'amorçage connues tient au caractère extrêmement sensible de l'amorce et des relais d'amorçage.
De plus pour initier des explosifs peu sensibles on est amené à mettre en oeuvre des chaines d'amorçages pouvant délivrer des énergies importantes.
Pour éviter des mises à feu intempestives des charges explosives on est conduit à concevoir des dispositifs de sécurité et d'armement qui permettent d'isoler l'amorce (ou le relais d'amorçage) du reste de la chaîne pyrotechnique.
Ces dispositifs sont des ensembles mécaniques complexes et coûteux.
Les chaînes d'amorçages seront d'autant plus délicates à réaliser (et seront encombrantes), que l'explosif à initier sera de type insensible, donc nécessitera des niveaux d'énergie d'amorçage importants.
C'est le but de l'invention que de proposer une chaîne d'amorçage de sécurité qui ne présente pas de tels incon¬ vénients. La chaîne d'amorçage selon l'invention permet notamment l'initiation d'une charge explosive sans utiliser de composants pyrotechniques à composition primaire et sans même utiliser d'explosifs d'amorçage.
L'invention a également pour but de fournir une chaîne d'amorçage particulièrement bien adaptée à l'amorçage en toute sécurité des explosifs insensibles.
Ainsi l'invention a pour objet une chaîne d'amorçage de sécurité pour une charge explosive qui est caractérisée en ce qu'elle comprend d'une part un bloc en matériau pyrotech-
niquement inerte, présentant sur une de ses faces une cavité disposée en regard de la charge explosive, et d'autre part des moyens permettant une percussion du bloc au niveau d'une face réceptrice sensiblement parallèle à celle sur laquelle est aménagée la cavité.
Avantageusement, les moyens de percussion comprennent une enceinte pressurisable qui peut être remplie avec un fluide compressible par l'intermédiaire d'un conduit d'alimen¬ tation, enceinte dont une extrémité disposée en regard de la face réceptrice du bloc est fermée par un piston coulissant qui est rendu solidaire de l'enceinte par des moyens de liaison pouvant être déverrouillés par l'action de moyens de commande.
Selon un mode particulier de réalisation, les moyens de liaison sont constitués par des goupilles explosives.
Selon un autre mode particulier de réalisation, les moyens de liaison sont constitués par des ergots rétrac¬ tables par l'action d'un actionneur.
Le fluide sera par exemple choisi parmi les gaz suivants: air, Hélium, gaz carbonique, Azote.
Selon un premier mode de réalisation, la cavité est recouverte par un revêtement en matériau ductile et le bloc est réalisé en un matériau dont l'impédance de choc est supérieure ou égale à celle du revêtement. On pourra par exemple choisir le matériau du bloc dans la liste suivante: Titane, Fer, Béryllium, Cobalt, Aluminium.
Le revêtement du bloc sera alors réalisé avantageusement en Aluminium ou en alliage d'aluminium.
Selon un autre mode de réalisation, la cavité n'est pas recouverte par un revêtement et le bloc est réalisé en un matériau ductile sous choc.
On pourra dans ce cas choisir le matériau du bloc dans la liste suivante: Aluminium, Uranium, Cuivre.
L'invention sera mieux comprise à la lecture de la description qui va suivre d'un mode particulier de réali¬ sation, description faite en référence à la figure annexée qui représente schématiquement une chaîne d'amorçage selon 1' invention.
En se reportant à cette figure,, une chaîne d'amorçage 1 selon l'invention est destinée à initier une charge explo¬ sive 2 qui est constituée par exemple par un mélange d'Octogène et de TATB ( tria ino trinitro benzène) disposé à l'intérieur d'une enveloppe 3.
La chaîne d'amorçage et l'explosif sont disposés à l'intérieur d'une munition non représentée, par exemple une bombe ou un missile lancé par une plateforme de tir tel un avion. La chaîne d'amorçage 1 comprend un bloc 4 sensiblement cylindrique et réalisé en un matériau pyrotechniquement inerte. On pourra par exemple réaliser le bloc en Titane.
Ce bloc 4 présente une cavité sensiblement conique 5, sur laquelle est fixé un revêtement 6 par exemple par collage. La cavité pourra présenter un autre type de profil concave (par exemple sphérique).
Pour qu'un jet puisse se développer, le profil de la cavité devra avoir en tout point un rayon de courbure qui soit inférieur au demi-diamètre maximum de la cavité. Le revêtement 6 sera réalisé en un matériau ductile et dont l'impédance de choc sera choisie inférieure ou égale à celle du matériau constitutif du bloc 4. On pourra par exemple choisir un revêtement réalisé en Aluminium ou en alliage d'aluminium. II serait possible de ne pas disposer de revêtement dans la cavité. On réalisera alors de préférence le bloc en un matériau ductile sous choc, c'est à dire présentant une contrainte d'écoulement plastique inférieure à 500 MPa. Les matériaux répondant à un tel critère sont par exemple: l'Aluminium, l'Uranium (non allié) et le Cuivre.
La mise en place d'un revêtement permet d'obtenir un jet en appliquant au bloc un niveau d'énergie inférieur à celui nécessaire pour obtenir un jet en l'absence de revêtement. A titre d'exemple on pourra ainsi associer un revêtement en aluminium avec un bloc dont le matériau sera choisi dans la liste suivante: Titane, Fer, Béryllium, Cobalt, Aluminium.
La cavité 5 est disposée en regard de la charge explosive 2, et à une distance de l'ordre de 20 à 50 mm. On fixera par exemple le bloc 4 sur l'enveloppe 3 au moyen de brides.
La chaîne d'amorçage 1 comporte également des moyens de percussion 7. Ces moyens comprennent un piston 8 qui ferme une extrémité 9 d'une enceinte pressurisable 10.
Le piston est rendu solidaire de l'enceinte 10 par des moyens de liaison qui peuvent être déverrouillés par l'action de moyens de commande 11. Ces derniers comprendront une électronique programmable qui assurera la libération des moyens de liaison à l'instant choisi pour l'initiation de la charge explosive 2. Cette électronique sera activée par le tir ou le larguage de la munition. Elle assurera les fonctions de sécurité^ en particulier en interdisant la libération des moyens de liaison pendant un délai suffisant pour assurer une distance de sécurité entre la munition et la plateforme de tir.
L'électronique commandera la libération des moyens de liaison en réponse à une information de commande qui pourra être un signal fourni par une fusée de proximité ou bien par une chronométrie. De tels moyens de commande sont bien connus de l'homme du métier et ne seront donc pas décrits plus en détail.
Les moyens de liaison sont ici constitués par trois goupilles explosives 12 régulièrement réparties angulai- reraent et qui sont initiées par les moyens de commande.
On pourrait envisager des moyens de liaison comprenant des ergots rétractables par l'action d'un actionneur.
Cet actionneur pourra être à commande électrique et comprendre notamment un moteur ou un électro-aimant.
En variante, l'actionneur pourra avoir une commande pneumatique.
L'enceinte peut être remplie avec un fluide compressible par exemple de l'Hélium qui présente également l'avantage de n'être pas explosible.
Le fluide est amené dans l'enceinte par un conduit d'ali¬ mentation 13 qui peut être fermé par une vanne 14, un manomètre 15 permettant de contrôler le niveau de pression à l'intérieur de l'enceinte 10. Les moyens de percussion 7 sont disposés au voisinage du bloc 4, le piston 8 présente une face externe 16 qui est sensiblement parallèle à une face réceptrice 17 du bloc 4.
Le fonctionnement de la chaîne d'amorçage selon l'inven¬ tion est le suivant. Lorsque la munition doit être rendue opérationnelle, par exemple lors de sa fixation à un avion, l'enceinte 10 est remplie du fluide compressible qui est amené à la pression de fonctionnement désirée.
Le fluide pourrait éventuellement être mis en place dans l'enceinte 10 par le pilote de l'avion peu de temps avant le tir de la munition.
On programme les moyens de commande en plaçant dans des mémoires de ce dernier les différents paramètres souhaités: distance de sécurité d'armement, mode de fonctionnement (percussion, proximité, chronométrique) , délai d'auto- destruction.
Lorsque les moyens de commande initient les goupilles explosives, le piston 8 se trouve désolidarisé de l'enceinte 10. Il est poussé par la pression du fluide et vient percuter la face réceptrice 17 du bloc 4.
L'onde de choc que reçoit le bloc 4 se transmet au revêtement 6 qui se déforme et produit un jet de matériau qui est projeté sur la charge explosive 2 et initie cette dernière. Dans le cas de l'absence de revêtement, c'est le matériau constitutif du bloc lui même qui se déforme au niveau de la cavité et produit un jet.
Le phénomène physique mis en jeu est analogue à celui rencontré lors de la formation d'un jet de charge creuse. Le bloc inerte 4 jouant ici le rôle d'un chargement explosif sur lequel est mis en place un revêtement.
L'énergie développée par le jet est inférieure à celle mise en oeuvre dans les charges creuses comprenant un bloc d'explosif, elle est cependant suffisante pour permettre l'initiation d'un chargement explosif. A titre d'exemple, un chargement du type Octogène/TATB peut être initié par un jet d'aluminium animé d'une vitesse de 6000 m/s. Un tel jet peut être obtenu avec un bloc cylindrique de 0,5 kg (diamètre 60mm, hauteur 50mm) en titane, qui est percuté par un piston animé d'une énergie de 60 kJ. Il est facile d'obtenir une telle énergie au moyen d'une enceinte remplie d'un fluide à la pression de 100 MPa.
L'homme du métier pourra dimensionner les différents éléments de la chaîne d'amorçage selon l'invention en fonction de l'énergie nécessaire pour initier la charge explosive.
On notera que la chaîne d'amorçage selon l'invention ne met en oeuvre aucun explosif d'amorçage. Les seuls éléments pyrotechniques sont constitués par les goupilles explosives, mais l'énergie qu'elles développent est à elle seule insuffisante pour permettre l'initiation de la charge explosive 2. De plus le bloc 4 joue alors le rôle d'écran de protection et isole la charge explosive de projections éven¬ tuelles pouvant provenir des goupilles.
L'énergie permettant l'initiation est fournie par le fluide sous pression. Or ce dernier n'est mis en place dans l'enceinte 10 qu'au moment de l'emploi de la munition.
On notera donc que pendant le stockage de la munition, l'enceinte 10 est vide. Dans ce cas l'initiation des gou¬ pilles explosives ne peut pas entraîner celle de l'explosif de chargement.
En effet, les goupilles libèrent alors le piston qui n'est pas poussé par le fluide et ne peut donc pas impacter le bloc 4 pour provoquer la formation d'un jet.
Si on cherche ensuite à remplir de fluide l'enceinte 10, le piston 8 n'étant plus solidaire de l'enceinte, il n'est pas possible d'obtenir la pression nécessaire au bon fonctionnement de la chaîne d'amorçage.
On pourra alors constater la défaillance du piston par la fuite de fluide qui s'écoulera vers l'extérieur de la munition par une ou plusieurs ouvertures 18 aménagées à cet effet. La chaîne d'amorçage selon l'invention permet donc d'obtenir un niveau de sécurité très important.
L'invention permet également d'une façon simple et sûre d'assurer l'amorçage d'explosifs peu sensibles, comme des explosifs composites tel les mélanges Octogène/Polyuréthane ou Héxogène/Polybutadiène.
L'invention permet également de définir une chaîne d'amorçage modulaire qui est facilement adaptable à diffé¬ rents types de chargements. Il suffira par exemple de modifier la pression d'emploi du fluide pour obtenir une énergie d'impact différente et une puissance d'initiation également différente, sans pour autant modifier les diffé¬ rents éléments constituant la chaîne.
Il est possible à titre de variante d'utiliser comme moyens de percussion du bloc plusieurs modules pyrotech- niques solidaires de la face réceptrice du bloc.
Ces modules seront choisis de telle sorte que l'énergie délivrée par un seul soit insuffisante pour provoquer la formation d'un jet pouvant initier la charge explosive.
Ils seront également choisis de telle sorte qu'il soit nécessaire d'initier tous les modules pyrotechniques simul¬ tanément pour assurer la formation d'un jet et la détonation de la charge.
Un moyen électronique de commande approprié assurera l'initiation simultanée des modules au moment souhaité. On assure ainsi un niveau de sécurité excellent puisqu'un module pyrotechnique seul est insuffisant pour initier la charge. Ce module se trouve en outre isolé de la charge par l'écran constitué par le matériau du bloc.