Procédé pour la fabrication de disulfures organiques
Un des procédés connus pour la préparation de disulfures d'alkyles, d'aryles ou d'arylalkyles consiste en la sulfuration de mercaptans correspondants au moyen du soufre élémentaire. La réaction est alors catalysée par des substances basiques, et particulièrement par des a-mines aliphatiques, Cependant, cette méthode intéressante comporte des inconvénients qui rendaient, jusqu'à présent, son application industrielle peu économique.
En effet, Faction du soufre sur les mercaptans, selon cet art antérieur, conduit a des mélanges de disulfures et de polysulfures organiques, une partie assez importante du mercaptan mis en jeu n'étant pas transformée. On est donc toujours obligé d'avoir recours à la distillation pour séparer le disulfure cherché : d'autre part il est nécessaire de séparer par distillation l'hydrogène sulfuré formé du mercaptan restant.. En outre, l'emploi du soufre élémentaire solide impose le travail en discontinu. Lorsque des mercaptans volatils sont utilisés, le procédé connu oblige à l'application d'une pression suffisamment élevée pour maintenir ces matières premières à l'état liquide.
La présente invention a pour objet un procédé pour la fabrication de disulfures organiques par sulfuration de mercaptans au moyen du soufre élémentaire en présence d'une amine comme catalyseur ne présentant pas les inconvénients précités. Ce procédé est caractérisé en ce que l'on fait réagir le soufre alors qu'il est en solution dans un solvant organique, avec un mercaptan. Ainsi, au lieu d'entrer en contact avec du soufre solide, comme dans Fart antérieur, le mercaptan est mis en présence d'une solution de S.
Le nouveau procédé conduit notamment à l'obten- tion directe du disulfure d'alkyle, d'aryle ou d'arylalkyle pur, exempt de polysulfures, sans distillation du produit de la réaction. Un autre avantage important du procédé de l'invention est la possibilité qu'il offre de travailler aisément en continu. En outre, qu'il s'agisse de mercaptans volatils ou non, les opérations peuvent toujours avoir lieu sous la pression atmosphérique, si l'on applique le nouveau procédé. Tous ces avantages vont de pair avec une forte-amélioration du rendement par rapport au procédé connu, le rendement par rapport au mercaptan consommé pouvant avoisiner 100 o/o et être notamment d'environ 97 ouzo contre 80 /o dans l'art anté- rieur.
Suivant une forme d'exécution préférée de l'inven- tion, on emploie, pour dissoudre le soufre, un disulfure organique, et tout particulièrement le disulfure du même radical que celui du mercaptan, c'est-à-dire précisément le disulfure que l'on désire produire.
La réaction :
2RSH + S = R-S-SR + H2S S pourrait avoir lieu en présence des catalyseurs connus, notamment de substances basiques, mais la valeur du nouveau procédé prend toute son importance lorsque le catalyseur est une amine. Ceci résulte de la constatation tout à fait imprévue, à laquelle ont conduit les recherches ayant abouti à la présente invention, que la solubilité du soufre dans les disulfures organiques est considé- rablement augmentée par l'adjonction de faibles, quanti- tés d'une amine dans le disulfure.
On a trouvé par exemple qu'il devenait possible de dissoudre, dans 100 g de diméthyldisulfure, 150 g de soufre à 20 C, et 250 g à Sûs C, si le disulfure contient 1 ouzo d'une amine telle que la triéthylamine.
En conséquence, la forme préférée du procédé de l'invention consiste à faire réagir un mercaptan avec une solution concentrée de soufre dans une certaine quantité du même disulfure qu'il s'agit de fabriquer, cette solution contenant une faible proportion d'amine, par exemple 0, 5 à 5 /0.
La réaction peut avoir lieu à différentes températu- res, surtout entre 0 C et la température d'ébullition du disulfure, de préférence entre 50 C et ce point d'ébulli- tion.
La quantité de ladite solution de soufre dans le disulfure, employée par kg de mercaptan, est de préfé- rence telle que le poids de soufre dissous corresponde à l'équation de la réaction indiquée plus haut. Néanmoins, dans une opération en continu, la quantité de la solution de soufre peut varier, celui des réactifs qui se trouve en excès pouvant être aisément recyclé.
L'amine joue un double rôle : elle sert Ó accroître la solubilité du soufre dans le disulfure servant de milieu réactionnel, et à catalyser la réaction. Sa concentration peut varier, comme indiqué plus haut, pourvu que sa teneur par rapport au mercaptan soit suffisante pour l'effet catalytique, par exemple de 0, 04 à 1 /o, selon les poids moléculaires du mercaptan et de l'amine.
Le procédé suivant 1'invention peut s'appliquer à la fabrication de disulfures à partir de différents mercaptans correspondants, tels que, par exemple, méthylique, éthylique, n-propylique, isopropylique, n-butylique, isobutyliques, amyliques, hexyliques, benzyliques, etc. On obtient ainsi les dimethyl-, diethyl-, dipropyl-, dusoprop- yl-, diamyl-, dihexyl-, diphényl-, dibenzyl-disulfures, etc.
Parmi les amines pouvant être employées dans le disulfure, figurent par exemple les amines aliphatiques primaires, secondaires et tertiaires, en particulier celles des alkyles sus-indiqués, des alcanol-amines, notamment éthanol-amines, amines aromatiques ou autres.
Un mode opératoire tout particulièrement avantageux, pour la réalisation du nouveau procédé, consiste à faire passer à contre-courant, dans une colonne à garnissage ou à plateaux, le mercaptan à sulfurer et la solution de soufre dans le disulfure.
Bien qu'un des avantages importants de l'invention soit la possibilité de travailler à chaud sous la pression atmosphérique avec des mercaptans volatils, comme par exemple le méthylmercaptan qui bout à 6 C, le procédé peut néanmoins être réalisé sous pression, notamment sous des pressions modérées de 2 à 15 Atm. Une forme d'exécution utile, dans le cas de mercaptans à haut point d'ébullition, consiste à maintenir dans l'appareil à réaction une dépression adéquate.
Le procédé de l'invention est illustré par les exemples ci-après, dans lesquels les abréviations suivantes sont employées :
DMDS-pour diméthyldisulfure, EtaN-pour triéthylamile.
Exemple 1
On travaille dans une colonne de 10 à 15 plateaux théoriques. La colonne est alimentée en tête par une solution de soufre dans le diméthyldisulfure contenant 170 p. S pour 100 de DMDS. Cette solution contient en poids 1 O/o de triéthylamine. En bas de colonne on envoie du méthylmercaptan gazeux. Les débits convenables étant établis, on obtient au bas de la colonne du diméthyldisulfure saturé de méthylmercaptan, soit environ 20% en poids. En tête de colonne on évacue de l'H2S contenant environ 10 ouzo en poids de CHgSH. Ceci correspond à une perte de 3 /o du CH3SH introduit, due à la réversibilité de la réaction de formation du disulfure.
La réaction se fait sur les plateaux centraux de la colonne où la température atteint environ 60 C. En bas de la colonne a lieu l'épuisement des polysulfures formés, par réaction de ces derniers sur le mercaptan avec formation de diméthyldisulfure. Les plateaux du haut de colonne servent à l'épuisement du méthylmercaptan dans le gaz, par réaction sur la solution de polysulfures.
Dans ces conditions le bilan réactionnel sur l'heure de fonctionnement se présente comme suit :
Produits introduits 4000 g -Gaz CHgSH 3000 g, soit 62, 5 moles -. Solution de polysulfures
1000 g comprenant
DMDS 369 g
Et3N 4 g
S 19, 6 moles 627 g
1000 g Produits obtenus 4000 g
Gaz 722 g, soit
H2-s 19, 6 moles 666 g
CHi, SH 1, 17 moles 56 g -liquide 3277 g soit
DMDS 2209 g introduit 369 g
produit 19, 6 moles 1840 g
, CH3SH 22, 2 moles 1064g
EtaN 4 g
Le taux de transformation molaire de CHSH en DMDS est de 62,
7 /o.
Le pourcentage de pertes en mercaptan par rapport au mercaptan transformé étant de 3 /o, le rendement de la fabrication ressort à 97 /o.
Exemple 2
La même colonne est montée sur un ballon servant de chaudière que l'on chauffe à 110 C, c'est-à-dire au point d'ébullition du DMDS. Les trois premiers plateaux servent à la distillation du CHaSH dissous dans le
DMDS, qui est ainsi directement recyclé dans la colonne. Le CHSH frais est introduit au-dessus du troi- sième plateau. Le haut de la colonne travaille dans les mêmes conditions.
Le bilan réactionnel est alors le suivant :
Produits introduits 4550 g -Gaz CHSH 3000 g, soit 62, 5 moles -Solution de polys. ulfure 1550 g, soit
DMDS 571 g Et, N 6g
S 30, 4 moles 973 g Produits obtenus 4550 g -Gaz 1113 g, soit
H2S 30, 4 moles 1033 g
CRASH 1, 7 moles 80 g -liquide 3437 g
Et, 6 g DMDS 3431g intmdfuit 571g
produit 30, 4 moles 2860 g
Le taux de transformation molaire du CHgSH en
DMDS est de 97, 3 /o.
Les pertes en CHaSH sont de 2, 7%, soit rendement de 97, 3 /o.
Un simple lavage à l'eau permet de débarrasser le
DMDS produit de l'amine qu'il contient.
Exemple 3
1 atome-gr de soufre (32g), en solution dans du diphényl-disulfure fondu est mélangé avec 2, 4 moles de thiophénol (264, 4 g), et on ajoute 1 /o en poids, soit 3 g, de triéthylamine. La réaction est instantanée et très vive ; en quelques minutes le dégagement de H2S est terminé.
La recristallisation du diphényldisulfure obtenu, et le dosage de l'hydrogène sulfuré formé, conduisent à un rendement de 80 ouzo par rapport au soufre.
Exemple 4
Les opérations de 1'exemple 3 sont répétées avec de la n-tripropylamine à la place de la triéthylamine. On obtient les mêmes résultats.
Exemple 5
A 2, 1 moles de n-butylmercaptan on ajoute 1 atomegr de soufre et 0, 01 mole de tributylamine en solution dans 0, 2 mol-gr (36 g) de n-dibutyldisulfure. On chauffe à reflux pendant environ 1 t/2 h, c'est-à-dire jusqu'à cessation de dégagement de HS. Du dosage du mercaptan non transformé on déduit que le rendement en n-dibutyl-disulfure était de 69, 5 < '/o.
Exemple 6
En faisant réagir 2, 1 moles de n-hexylmercaptan avec 1 atome-gr de soufre, dissous dans 0, 2 mol-gr de n-dihexyldisulfure, et 0, 028 mole de triéthylamine, comme dans 1'exemple 3, on obtient du n-dihexyldisulfure avec un rendement de 6511/o.