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"Procédé de mise en forme d'une pièce en matière métallique ou céramique et pièce ainsi obtenue"
La présente invention est relative à un procédé de mise en forme d'une pièce en matière métallique ou céramique, comprenant - une formation d'un mélange comportant - une poudre métallique ou céramique, - un liant organique, et - un milieu de suspension qui est solvant pour le liant organique et dans lequel la poudre métallique ou céramique est en suspension, - un formage de ce mélange de façon à lui donner une forme semblable à celle de la pièce, - une gélification du mélange dans cette forme, et - une élimination du milieu de suspension, avec obtention d'une pièce autoportante métallique ou céramique ayant ladite forme.
L'invention concerne aussi les pièces obtenues à l'aide de ce procédé.
On connaît déjà un procédé de ce genre (voir par exemple US-A-4.721.599). Ce procédé permet la formation de pièces de formes compliquées par moulage par injection d'un mélange d'une poudre métallique, de méthylcellulose comme liant organique, et d'eau comme solvant. Ce mélange fluide à la température ambiante est injecté dans un moule qui présente au minimum une température de 80 C. La méthylcellulose ne gélifie toutefois que lorsqu'elle a atteint dans le mélange injecté une concentration suffisante à cet effet. Il est donc nécessaire dans ce procédé d'évaporer une partie de l'eau avant que la gélification ne puisse avoir lieu, ce qui ralentit le procédé et donne lieu à
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des perturbations dans la poudre en suspension, avec pour effet en particulier une densité non uniforme dans la pièce moulée.
Ce manque d'homogénéité de densité peut conduire à des fissurations et des déformations de la pièce.
Pour éviter ce genre de problèmes, on a déjà prévu de faire usage d'un liant organique gélifiant à une température proche de la température ambiante, par exemple un agaroïde, tel que de l'agar ou de l'agarose (voir par exemple US-A-6.126.873). On doit donc ici injecter le mélange à chaud, ce qui peut poser des problèmes, tandis que le moule est maintenu à une température plus basse à laquelle l'agar se gélifie.
Un gel de ce genre, comme d'ailleurs celui obtenu avec de la méthylcellulose, est réversible, c'est-à-dire qu'il se reliquéfie quand les conditions, notamment thermiques, de gélification ne sont plus rencontrées. Il est évident que le séchage des pièces gélifiées selon ce procédé présente une phase critique, car il doit être réalisé sans provoquer une refluidification du mélange gélifié.
On connaît aussi un procédé de mise en forme de pièce métallique, dans lequel un mélange, liquide à température ambiante, comprend la poudre métallique, un liant liquide et un dispersant (v.
EP-B-0356462). Le moule est refroidi avec solidification du liant liquide, qu'on élimine ensuite par sublimation, le dispersant étant éliminé par la suite au cours d'un cycle de déliantage, la pièce étant ensuite densifiée.
La présente demanderesse exploite un procédé de ce genre dans lequel le mélange contient en outre un liant solide qui améliore la tenue du produit semi-fini après sublimation et qui est éliminé ensuite en même temps que le dispersant. Si ces derniers procédés permettent d'obtenir des pièces de formes très complexes avec des tolérances étroites, ils sont relativement compliqués et consomment beaucoup d'énergie. Le manque de stabilité de la suspension ne permet aucun stockage du mélange de départ et la cadence de productivité est faible (stockage en congélateur et sublimation).
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On connaît enfin un procédé de production de corps solides comprenant un moulage à chaud d'une suspension de poudre métallique ou céramique dans une pâte aqueuse d'une substance protéinique capable de coaguler à chaud (EP-A-0767154).
La présente invention a pour but de mettre au point un procédé de mise en forme d'une pièce en matière métallique ou céramique, qui soit simple, économique en énergie, et qui permette la fabrication de pièces complexes avec des tolérances très étroites et une qualité supérieure, sans présenter les inconvénients énumérés ci- dessus.
Pour résoudre ces problèmes, on a prévu, suivant l'invention, un procédé tel qu'indiqué au début, ce procédé étant caractérisé en ce que le mélange comporte en outre un agent de gélification, qui effectue une réaction chimique avec le liant organique et forme avec lui un gel irréversible, en ce que le mélange est effectué à une première température à laquelle ladite réaction chimique n'a pas lieu et en ce que ladite gélification est effectuée à une deuxième température, à laquelle ladite réaction chimique a lieu avec gélification instantanée du mélange. Avantageusement, la deuxième température est plus élevée que la première, sans pour autant atteindre un niveau qui provoquerait une évaporation brutale du milieu de suspension.
Etant donné que la réaction entre le liant organique et l'agent de gélification est quasiment instantanée, la gélification se fait sensiblement sans évaporation simultanée de milieu de suspension et la densité du mélange reste bien homogène. De plus, une fois que l'étape de gélification, particulièrement rapide, a eu lieu, la gélification est irréversible, même si des variations de température n'entraînant pas une décomposition de l'un ou l'autre des composants du gel prennent place pendant la suite du processus. Enfin, il faut noter que, en deçà de ladite deuxième température, c'est-à-dire la température de gélification, le mélange formé constitue une pâte fluide qui s'écoule bien, possède par
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exemple des caractéristiques rhéologiques compatibles avec un procédé de moulage par injection, et remplit bien le moule.
Au-delà de la température de gélification, la matière gélifiée ne mouille plus les parois et constitue un seul bloc qui permet un démoulage aisé.
Le procédé suivant l'invention offre en outre le grand avantage de pouvoir ajuster les proportions entre le liant organique et l'agent de gélification, afin de modifier les caractéristiques rhéologiques de la suspension. En effet, si l'on diminue la quantité de liant organique et qu'on augmente la quantité d'agent de gélification, on peut réaliser une suspension plus fluide, sans pour autant nuire à la résistance du gel obtenu après réaction. Cette propriété, impossible à obtenir selon les procédés de la technique antérieure, va permettre d'appliquer le procédé dans des techniques exigeant une pâte bien fluide, comme le coulage à la pression ambiante.
Il doit être entendu que si, d'une manière générale, la température de gélification sera plus élevée que la première température, et dans ce cas on parlera de gélification à chaud, il n'est pas impossible de prévoir une température de gélification plus basse que la première température, et alors on parlera de gélification à froid.
Suivant une forme de réalisation de l'invention, le liant organique est choisi parmi un groupe constitué des polysaccharides de haut poids moléculaire, de préférence anioniques et non ioniques, et des polyamides et polyacides (métha)cryliques et dérivés de ceux-ci et d'un mélange de ces substances. Les polysaccharides envisagés peuvent être d'origine naturelle, synthétique ou biosynthétique et peuvent être produits selon des procédés connus de l'homme de métier.
Comme exemples de tels polysaccharides, on peut citer entre autres de la gomme de xanthane (métabolite secondaire excrété lors de la fermentation aérobie de sucres par la bactérie Xanthomonas campestris), du glucane (plus particulièrement du scléroglucane (non ionique) ou du succinoglucane (polysaccharide anionique produit par une
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bactérie du genre Alcaligenes, Agrobacterium, Pseudomonas et Rhizobium), et de la gomme de galactomannane (plus particulièrement de la gomme de guar, qui est un polysaccharide non ionique extrait du guar)). La gomme de xanthane par exemple modifie sa conformation par élévation de température, en libérant des sites négatifs qui peuvent alors réagir par exemple avec des ions positifs qui vont provoquer la gélification.
Suivant une forme avantageuse de réalisation de l'invention l'agent de gélification est choisi parmi le groupe constitué des agents générateurs d'ions métalliques multivalents et de polymères et protéines capables de réagir avec le liant organique. On envisage en particulier un sel trivalent de chrome, d'aluminium, de fer, ou de ruthénium, ou un mélange de ceux-ci, de préférence du nitrate de chrome. On peut aussi envisager un complexe organique de métal multivalent, comme du lactate de Zr, de Ti, de Cr. D'autres complexants de métal multivalent comme du malonate, du citrate, de l'oxalate, du malate, etc... s'avèrent également très avantageux, car ils se dégradent seulement à partir d'une certaine température et ne libèrent donc les ions concernés qu'à cette température.
Suivant l'invention, à ladite première température, le liant organique est incapable de réagir avec l'agent de gélification et/ou l'agent de gélification est incapable de réagir avec le liant organique et, à ladite deuxième température, le liant organique est capable de réagir avec l'agent de gélification et celui-ci est capable de réagir avec le liant organique. On peut citer comme exemples de systèmes liant-agent gélifiant suivant l'invention, de la gomme de xanthane et du nitrate de chrome, la gomme de xanthane ne libérant ses sites négatifs qu'à ladite deuxième température. On peut aussi citer comme liant un polyamide acrylique qui est capable de réagir à la température ambiante, et du malonate de chrome qui ne libère les ions chrome qu'à 60 C environ, lorsqu'il se dégrade en acétate.
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Suivant une forme perfectionnée de réalisation de l'invention, le milieu de suspension est de l'eau, de préférence désionisée, un alcool ou un autre solvant polaire ou un mélange de ceux- ci. Lorsque le milieu de suspension est de l'eau, on peut prévoir par exemple que la première température soit proche de la température ambiante, par exemple de 15 à 30 C, et que la deuxième température soit de l'ordre de 40 à 80 C.
Dans un tel procédé, il n'est nécessaire que de chauffer une petite quantité de mélange, celui-ci étant maintenu à la température ambiante avant moulage. Cela permet d'importantes économies d'énergie par rapport à certains procédés de la technique antérieure où il faut maintenir à haute température la totalité du mélange avant moulage.
L'utilisation de l'eau comme milieu de suspension offre l'avantage que celle-ci n'est pas toxique et qu'elle permet de respecter l'environnement.
Le mélange suivant l'invention peut évidemment contenir, en plus des composants indiqués ci-dessus, des additifs courants supplémentaires comme par exemple un dispersant, un lubrifiant, un agent pour ajuster le pH, un bactéricide, etc.
La poudre métallique ou céramique est n'importe quelle poudre courante appropriée pour effectuer un procédé de mise en forme de corps métalliques ou céramiques à partir d'une poudre. Par poudre métallique, il faut entendre non seulement une poudre d'un ou de plusieurs métaux, mais aussi des poudres d'alliages. Par le terme céramique, il faut entendre toute matière inorganique, non métallique.
Le procédé suivant l'invention permet la fabrication de pièces métalliques ou céramiques par moulage par injection. Dans ce cas, on injecte le mélange en suspension dans un moule qui est maintenu à la deuxième température susdite ou à une température supérieure à celle-ci, en cas de gélification à chaud, ou à une température inférieure à celle-ci, en cas de gélification à froid. En
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variante, on peut prévoir un coulage à la pression atmosphérique, comme indiqué précédemment.
On peut aussi envisager que le procédé se déroule dans une extrudeuse où le formage et la gélification ont lieu dans la vis d'extrusion. L'extrémité de celle-ci est maintenue à ladite deuxième température de façon que le produit extrudé soit obtenu sous forme gélifiée à la sortie de l'extrudeuse.
On peut avantageusement prévoir, après la gélification, un séchage au cours duquel le milieu de suspension est éliminé. Par exemple, lors de l'utilisation d'eau comme milieu de suspension, un séchage peut avoir lieu à une température de 60-90 C, de préférence de 80 C, pendant deux heures environ. Le séchage peut aussi être effectué par évaporation à la température ambiante.
Ensuite on procède avantageusement, de manière courante, à un déliantage, c'est-à-dire à une élimination du liant organique à une troisième température à laquelle le liant organique se décompose en composés volatils, et à laquelle il se produit un préfrittage entre les particules de la poudre métallique ou céramique.
Enfin, la pièce préfrittée, mise en forme, est densifiée de manière courante, avec obtention d'un produit fini.
Etant donné les faibles quantités de liant à utiliser suivant l'invention (par exemple de 1 à 8 % en poids par rapport à la masse de solvant), le déliantage est de courte durée, et le procédé permet donc de produire de manière rentable des pièces de grande dimension.
Il faut noter que la teneur en liant organique du mélange à mettre en forme n'a pas besoin, suivant l'invention, d'être modifiée si l'on désire obtenir un gel plus consistant et ferme, après gélification. Par exemple dans un système gomme de xanthane-nitrate de chrome, il suffit d'augmenter la teneur en agent gélifiant, ce qui n'a pas d'influence sur la viscosité du mélange non gélifié.
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D'autres détails et particularités de l'invention sont indiquées dans les revendications annexées.
L'invention va à présent être expliquée de manière plus détaillée à l'aide d'exemples de réalisation donnés à titre non limitatif.
Exemple
Dans un mélangeur à haut cisaillement, on prépare une pâte homogène par hydratation de 40 g (0,48 % en poids de la masse totale de la composition) de gomme de xanthane (de marque Keltrol) dans 846 g (10,15 % en poids) d'eau désionisée. Ensuite on ajoute successivement 100 g (1,2 % en poids) de glycérine, à titre de lubrifiant, et 7333 g (88 % en poids) de poudre métallique (de marque 17-4 PH Mitsubishi 271), et enfin 14,24 g (0,17 % en poids) de nitrate de chrome.
La préparation de cette pâte fluide est effectuée en environ une heure.
L'addition de nitrate de chrome peut être postposée. La composition obtenue auparavant est stockable indéfiniment. Par ailleurs, la pâte obtenue après addition du nitrate de chrome offre le grand avantage de ne pas sédimenter.
La pâte est ensuite alimentée à la température ambiante (environ 17 C) dans un nez d'injection d'un moule. Le moule est porté à 70 C, c'est-à-dire à une température supérieure à la température de gélification, et la pâte est injectée sous une pression d'injection d'environ 150 bar. Lorsque la pâte est ainsi injectée dans le moule, la gélification est quasi instantanée (quelques secondes), et donc sans évaporation perturbatrice d'eau pendant la gélification. On laisse ensuite sécher les pièces démoulées et autoportantes, dans une étuve à 80 C.
Les pièces séchées sont ensuite passées dans un four sous atmosphère réductrice, pour éviter toute oxydation de la poudre métallique. A la température du four d'environ 600 C, le liant organique est thermiquement dégradé et à environ 940 C un préfrittage des
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particules de métal a lieu en surface, ce qui permet aux pièces de rester autoportantes.
Ensuite les pièces déliantées sont densifiées sous hydrogène à une température de 1375 C.
Les pièces densifiées présentent les propriétés suivantes : - Teneur résiduelle en C en % : moyenne : < 0,05 %; - Densité moyenne : 7,60 g/cm3, soit 97,7 % de la densité théorique (= 7,78 g/cm3).
- Dureté HRA (Rockwell) :moyenne : 66,39.
Il doit être entendu que la présente invention n'est en aucune façon limitée aux modes de réalisation décrits ci-dessus et que bien des modifications peuvent y être apportées sans sortir du cadre des revendications annexées.
Il faut noter qu'évidemment l'invention porte également sur les produits directement obtenus par le procédé revendiqué, et donc notamment sur les pièces moulées, séchées, sur les pièces déliantées, préfrittées, ainsi que sur les pièces densifiées.
On pourrait aussi envisager que la poudre de départ soit un mélange de poudre métallique et de poudre céramique.