Microcompartiment de cellules hématopoïétiques malignes et procédé de préparation d'un tel microcompartiment
L'invention a trait à un procédé de préparation de microcompartiments cellulaires comprenant des cellules hématopoïétiques malignes. L'invention a également trait à de tels microcompartiments cellulaires et à leur utilisation notamment dans le domaine pharmaceutique, pour le criblage et l'identification de molécules d'intérêt susceptibles de traiter une hémopathie maligne.
Les cancers des tissus hématopoïétiques, ou hémopathies malignes, se caractérisent par un trouble de la multiplication et de la différenciation des cellules d'une lignée sanguine. Parmi les hémopathies malignes les plus courantes, on peut citer les leucémies et les lymphomes.
La leucémie est un cancer des cellules de la moelle osseuse, qui se caractérise par une prolifération anormale et massive de précurseurs de globules blancs non complétements différenciés, au détriment notamment des globules rouges, globules blancs normaux et plaquettes. H existe quatre grands types de leucémie : la leucémie aiguë lymphoblastique (LAL), la leucémie lymphoïde chronique (LLC), la leucémie aiguë myéloblastique (LAM) et la leucémie myéloïde chronique (LMC).
Le lymphome est un groupe de cancers du système lymphatique qui prend naissance dans un organe lymphoïde secondaire et peut s'étendre à toutes les parties du système lymphatique. On distingue deux grands types de lymphomes : le lymphome de Hodgkin et les lymphomes non- hodgkiniens (LNH). Les LNH sont des cancers dont l'incidence est en augmentation depuis 40 ans dans les pays développés et qui se placent au lOème rang des cancers en termes de fréquence.
Les traitements actuellement disponibles, qui combinent le plus souvent chimiothérapie et immunothérapie, ne sont efficaces que chez une partie des patients, du fait de l'existence de nombreuses résistances ou rechutes. Cela s'explique notamment par l'absence de modèles cellulaires pertinents pour tester les molécules candidates. En effet, à l'heure actuelle, les molécules candidates sont testées in vitro sur des lignées cellulaires en suspension (pour les cellules non adhérentes) ou en monocouche (pour les cellules adhérentes). Ces modèles cellulaires, en deux dimensions (2D), ne sont pas représentatifs des lymphomes puisque, contrairement aux cellules au sein de la tumeur, toutes les cellules ont un accès identique tant aux nutriments et à l'oxygène, qu'aux molécules candidates. De plus, les lymphomes se forment
et évoluent au sein des organes lymphoïdes secondaires comprenant plusieurs types de cellules (cellules du microenvironnement et cellules lymphomateuses), qui interagissent entre eux au sein d'une matrice extracellulaire via des molécules solubles et membranaires, et sont soumis à des forces bio-mécaniques. L'ensemble de ces éléments impacte le développement des lymphomes, mais également la réponse aux traitements. Or, les modèles 2D ne permettent pas de reproduire ces phénomènes et ne sont donc que faiblement représentatifs des processus physio-pathologiques des lymphomes.
Pour pallier les inconvénients de ces modèles 2D, des modèles animaux ont été développés, dans lesquels des cellules cancéreuses humaines sont greffées ou injectées. De tels modèles animaux sont cependant coûteux, difficilement reproductibles, et généralement peu représentatifs des phénomènes physiologiques des hémopathies malignes humaines.
Récemment, des cultures de cellules cancéreuses en trois dimensions (3D) ont été développées. Ces cultures en 3D sont particulièrement intéressantes pour étudier les mécanismes de progression des cancers et mieux tester les traitements anti-cancéreux. En effet, les cellules cultivées en 3D au sein d'une matrice ou en agrégats, présentent une architecture plus proche du tissu et de la tumeur et montrent une expression de leurs gènes similaire à celle de la tumeur in vivo (Gravelle et al, 2014, Am. J. Pathol. 184 : 2082-295 ; Weiswald et al, 2009, Br. J. Cancer 101 : 473-482). De plus, des modèles de co-cultures en 3D mimant les interactions cellules cancéreuses/cellules stromales permettent de reproduire au moins partiellement la niche tumorale et d' en étudier les conséquences sur la progression tumorale ou la résistance aux drogues.
En ce qui concerne le développement de cultures 3D de lymphomes, plusieurs techniques ont ainsi été développées. Les modèles 3D de lymphomes sont généralement obtenus en utilisant des éponges de collagène (Kobayashi et al 2010. Trends Immunol. 31 : 422-428), la technique dite de la goutte pendante (Gravelle et al 2014. Am. J. Pathol. 184 :282-295) ou une architecture de polystyrène (Caicedo-Carvajal et al 2011. J. Tissue Eng 2011 : 362326). Cependant, ces techniques présentent de nombreux inconvénients, tant en termes de coûts que de reproductibilité, les rendant peu pertinentes pour l'étude à l'échelle industrielle de nouveaux médicaments. De plus, les cultures 3D développées n'intègrent pas d'élément du microenvironnement tumoral, limitant ainsi leur pertinence.
H existe donc toujours un besoin de système de culture cellulaire en 3D, qui soit représentatif au niveau physiopathologique et/ou en termes de propriétés mécaniques des hémopathies malignes, et qui puisse être produit à grande échelle, sans coût excessif.
Résumé de l'invention
En travaillant sur le développement d'un système de culture cellulaire en 3D qui soit le plus représentatif d'un lymphome et des phénomènes biologiques et mécaniques auxquels ils sont soumis in vivo, les inventeurs ont découvert qu'il est possible de fabriquer de manière automatisée et reproductible des microcompartiments cellulaires comprenant au moins des cellules hématopoïétiques malignes entourées par une capsule externe en hydrogel, en utilisant un système de coextrusion. Plus précisément, les inventeurs ont découvert qu'en coextrudant une solution d'hydrogel avec une solution de cellules comprenant des cellules lymphomateuses, et de manière optionnelle des cellules stromales de type lymphoïde, c'est-à-dire proches des cellules stromales qui infiltrent les lymphomes, et de la matrice extracellulaire, lesdites cellules s'agrégeaient au sein de la capsule d'hydrogel pour s'organiser en une masse cellulaire se rapprochant de l'organisation cellulaire au sein d'un lymphome. Par ailleurs, en fonction du type de cellules coextrudé avec les cellules hématopoïétiques malignes, les inventeurs ont découvert qu'il est possible de recréer une niche tumorale mimant une niche tumorale in vivo. Ainsi, il est possible d'obtenir des microcompartiments au sein desquels la nature des cellules et les interactions intercellulaires sont sensiblement proches de celles observées au sein d'une niche tumorale lymphomateuse, ou leucémique. Les microcompartiments cellulaires développés selon l'invention sont particulièrement pertinents comme modèles 3D d'hémopathies malignes, notamment pour le criblage et l'identification de nouvelles molécules candidates pour le traitement des lymphomes et/ou des leucémies. Par ailleurs, le procédé selon l'invention permet d'obtenir de très grandes quantités de microcompartiments de dimensions parfaitement maîtrisées. Les microcompartiments obtenus sont facilement manipulables, les rendant particulièrement adaptés à une utilisation à grande échelle, notamment dans le domaine pharmaceutique. L'invention a donc pour objet un procédé de préparation d'un microcompartiment cellulaire comprenant un agrégat de cellules contenant des cellules hématopoïétiques malignes encapsulé dans une couche d'hydrogel, selon lequel une solution d'hydrogel et une solution de cellules comprenant des cellules hématopoïétiques malignes sont co-extrudées concentriquement, puis réticulées. Avantageusement, la solution de cellules comprend des cellules lymphomateuses ou des cellules leucémiques.
H est également possible de prévoir dans la solution de cellules, des cellules stromales et de la matrice extracellulaire, afin d'obtenir un microcompartiment cellulaire qui se rapproche, au niveau des interactions cellulaires et de l'organisation, d'une niche tumorale.
L'invention a également pour objet un microcompartiment cellulaire susceptible d'être obtenu par le procédé selon l'invention, dans lequel ledit microcompartiment comprend un agrégat de cellules comprenant au moins des cellules hématopoïétiques malignes, encapsulé dans une couche d'hydrogel. Selon l'invention, un microcompartiment cellulaire est constitué d'un unique agrégat de cellules encapsulé dans une couche d'hydrogel.
Dans un mode de réalisation, ledit microcompartiment comprend un agrégat de cellules, constitué uniquement de cellules lymphomateuses, encapsulé dans une couche d'hydrogel. Dans un autre mode de réalisation, le microcompartiment comprend un agrégat de cellules, constitué uniquement de cellules leucémiques, encapsulé dans une couche d'hydrogel.
Dans un autre mode de réalisation, ledit microcompartiment comprend un agrégat de cellules composé notamment de cellules lymphomateuses et de cellules stromales de type lymphoïde, ainsi qu'une couche de matrice extracellulaire entre l'agrégat de cellules et la couche d'hydrogel. Dans un autre mode de réalisation, ledit microcompartiment comprend un agrégat de cellules composé notamment de cellules leucémiques et de cellules stromales de type médullaire, ainsi qu'une couche de matrice extracellulaire entre l'agrégat de cellules et la couche d'hydrogel.
L'invention concerne également un microcompartiment cellulaire comprenant un agrégat de cellules encapsulé dans une couche d'hydrogel, dans lequel l'agrégat de cellules comprend des cellules hématopoïétiques malignes, telles que des cellules lymphomateuses ou des cellules leucémiques, et des cellules stromales, ledit microcompartiment comprenant en outre une couche de matrice extracellulaire entre l'agrégat de cellules et la couche d'hydrogel.
L'invention a aussi pour objet une méthode de criblage ou d'identification d'un composé pour le traitement et/ou la prévention d'un lymphome comprenant les étapes de : (a) mettre en contact un microcompartiment cellulaire selon l'invention, éventuellement dépourvu de couche d'hydrogel, avec un composé à tester ;
(b) sélectionner le composé apte à inhiber au moins partiellement la croissance de l'agrégat de cellules dudit microcompartiment cellulaire et/ou à tuer au moins partiellement des cellules de l'agrégat de cellules dudit microcompartiment cellulaire. Avantageusement, une telle méthode de criblage est réalisée in vitro.
L'invention a aussi pour objet une utilisation d'un microcompartiment cellulaire selon l'invention pour le criblage ou l'identification d'un composé pour le traitement d'une hémopathie maligne, telle qu'un lymphome ou une leucémie.
Avantageusement, une telle utilisation pour le criblage est une utilisation in vitro. Brève description des figures
Figure 1 : Encapsulation de cellules lymphomateuses SUDHL4 et HLY1 dans une capsule d'alginate. Les cellules SUDHL4 et HLY1 expriment la GFP. La figure 1A montre des images des capsules en contraste de phase et en fluorescence à différents temps (Jl - Jl 1) après encapsulation, les images étant acquises avec un microscope Olympus CKX41 (objectif xlO). La figure 1B montre les courbes de croissance mesurées pour les amas de cellules à l'intérieur des capsules d'alginate à partir des photos, au moyen du logiciel ImageJ®.
Figure 2 : Formation de microcompartiments cellulaires selon l'invention, comprenant uniquement des cellules lymphomateuses ou leucémiques (A) ou des cellules lymphomateuses ou leucémiques, et des cellules stromales (B). 1 : capsule d'hydrogel, 2 : lumière de la capsule, 3 : cellules lymphomateuses, 4 : phase de croissance, S : capsule d'hydrogel contenant un amas de cellules lymphomateuses, 6 : étape de dissolution de la capsule d'hydrogel, 7 : amas de cellules lymphomateuses, 8 : couche de matrice extracellulaire, 9 : cellules stromales, 10 : phase de croissance, 11 : capsule d'hydrogel contenant un amas de cellules lymphomateuses et stromales, 12 : amas de cellules lymphomateuses et stromales. Figure 3 : Microcompartiments cellulaires comprenant un amas de cellules de lymphome folliculaire de lignée DOHH2 et de cellules stromales de type lymphoïde (RESTO, Ame- Thomas Blood 2007; 109:693) dans une capsule d'alginate recouverte d'une couche interne de Matrigel® à J9 après encapsulation. Les images ont été obtenues en contraste de phase au moyen d'un microscope Leica DMI8 (objectif xlO). Figure 4 : Dissolution de la capsule d'alginate de microcompartiments cellulaires comprenant un amas de cellules de lymphome folliculaire de lignée DOHH2 (A) et un amas de cellules de lymphome folliculaire de lignée DOHH2 et de cellules RESTO (B) à J9 après encapsulation.
Figure S : Analyse par cytométrie en flux des cellules mortes dans des amas de cellules comprenant des cellules lymphomateuses SUDHL4 (SA) ou des cellules lymphomateuses HLY1 (B) après différents temps d' encapsulation.
Figure 6 : Analyse de l'effet supplétif de la niche tumorale stromale sur la croissance des cellules lymphomateuses. Images de microcompartiments cellulaires dans une capsule d'alginate recouverte d'une couche interne de Matrigel® comprenant uniquement des cellules RESTO (A), uniquement des cellules lymphomateuses DOHH2 (B), des cellules RESTO et des cellules lymphomateuses DOHH2 (C). Les images ont été obtenues en contraste de phase au moyen d'un microscope Leica DMI8 (objectif xlO). La barre d'échelle est identique pour les trois images.
Figure 7 : Effets comparatifs de l'Etoposide (A) et du Cisplatine (B) sur la mort cellulaire après mise en contact, pendant 48h, d'une suspension de cellules HLY1 (suspension) ou d'un amas de cellules HLY1 issu d'un microcompartiment cellulaire selon l'invention, comprenant uniquement des cellules lymphomateuses, avec des doses croissantes d'étoposide (ug/mL) ou de cisplatine (uM).
Figure 8 : Microcompartiment cellulaire montrant la différenciation des cellules stromales en stroma lymphoïde pro-tumoral. Microcompartiments cellulaires comprenant un amas de cellules de lymphome folliculaire de lignée DOHH2 et de cellules stromales de type lymphoïde RESTO dans une capsule d'alginate recouverte d'une couche interne de Matrigel® à J8 après encapsulation. Les marquages CD20 (révélant les lymphocytes B), GFP (révélant les cellules RESTO) et TG2 ont été réalisés sur un sphéroïde fixé et inclus en paraffine. L'image a été prise au microscope confocal LSM510 objectif x20. L'image de droite correspond à la superposition des trois premières images. Les flèches indiquent les cellules RESTO (GFP+) exprimant la TG2.
Figure 9 : Etude de la diffusion de la doxorubicine dans les cellules SUDHL4 cultivées en suspension ou en sphéroïdes. Des cellules SUDHL4 cultivées en suspension ou après 7 jours en 3D en présence ou non de matrice extracellulaire (ECM) (Mg : matrigel) et de cellules RESTO sont traitées pendant 24h avec la doxorubicine (ΙμΜ). Après dissociation des cellules cultivées en 3D, l'intensité de fluorescence des cellules a été analysée en cytométrie de flux.
Figure 10 : Images représentatives montrant la pénétration des anticorps dans le microcompartiment cellulaire. A) Marquage avec Γ AC anti-CD19-PE. Aa) Microcompartiment contenant des cellules de lymphome folliculaire DOHH2 cultivées en 3D en présence d'ECM et de cellules stromales RESTO (SC-GFP+). Ab) Microcompartiment contenant des cellules de DLBCL SUDHL4 cultivées en 3D en présence d'ECM. B) Marquage avec le Rituximab (RTX)- 633. Ba) Microcompartiment contenant des cellules de lymphome folliculaire DOHH2 cultivées en 3D en présence d'ECM et de cellules stromales RESTO (SC-GFP+) visualisées en Bb). Les capsules sont incubées 12h avec les AC, puis elles sont imagées avec un microscope
confocal Zeiss LSMS10 à l'objectif x25. Les noyaux sont marqués au DAPI en bleu. Le contour des capsules est visible (trait à la périphérie sur les images).
Figure 11 : Comparaison des effets cytotoxiques de la doxorubicine et de l'étoposide sur des cellules de DLBCL SUDHL4 cultivées en 2D (suspension) ou en 3D ± ECM ± Resto. Les cellules ou sphéroïdes à J7 post-encapsulation sont traitées pendant 48h avec les drogues. A la fin du traitement, la viabilité cellulaire est mesurée à l'aide du kit CellTiter-Glo® 3D Cell Viability Assay_(Promega).
Figure 12 : Formation de microcompartiments cellaulires selon l'invention en fonction du temps à partir de lymphocytes T en culture primaire issus de patient atteint du lymphome de Sezary. A différents temps de culture après encapsulation, les cellules sont marquées avec la calcéine-AM pour visualiser les cellules vivantes et avec de l'iodure de propidium (PI), pour visualiser les cellules mortes. Les noyaux sont colorés au DAPI. On note une augmentation de la mort cellulaire lorsque le sphéroïde est très dense, 10 jours après encapsulation (D10).
Description détaillée Microcompartiment cellulaire
L'invention a pour objet un microcompartiment cellulaire, en 3D, comprenant un agrégat, ou amas, de cellules hématopoïétiques malignes encapsulé dans une enveloppe en hydrogel.
Dans le contexte de l'invention, les termes « couche d'hydrogel », « capsule en hydrogel » ou « enveloppe en hydrogel » désignent une structure tridimensionnelle formée à partir d'une matrice de chaînes de polymères gonflée par un liquide, et préférentiellement de l'eau. Avantageusement, le ou les polymères de la couche d'hydrogel sont des polymères réticulables lorsque soumis à un stimulus, tel qu'une température, un pH, des ions, etc. Avantageusement, l'hydrogel utilisé est biocompatible, en ce sens qu'il n'est pas toxique pour les cellules. En outre, la couche d'hydrogel doit permettre la diffusion d'oxygène et de nutriments pour alimenter les cellules contenues dans le microcompartiment cellulaire et permettre leur survie. Avantageusement, la couche d'hydrogel laisse également passer des molécules à tester, telles que des molécules pharmaceutiques. Les polymères de la couche d'hydrogel peuvent être d'origine naturelle ou synthétique. Par exemple, la couche externe d'hydrogel contient un ou plusieurs polymères parmi les polymères à base de sulfonate, tels que le polystyrène sulfonate de sodium, les polymères à base d'acrylate, tels que le polyacrylate de sodium, le polyéthylène glycol diacrylate, le composé gélatine méthacrylate, les polysaccharides, et notamment les polysaccharides d'origine bactérienne, tels que la gomme gellane, ou d'origine végétale, tels
que la pectine ou l'alginate. Dans un mode de réalisation, la couche externe d'hydrogel comprend au moins de l'alginate. Préférentiellement, la couche externe d'hydrogel ne comprend que de l'alginate. Dans le contexte de l'invention, on entend par « alginate » des polysaccharides linéaires formés à partir de β-D-mannuronate (M) et α-L-guluronate (G), des sels et dérivés de ceux-ci. Avantageusement, l'alginate est un alginate de sodium, composé à plus de 80% de G et moins de 20% de M, avec une masse moléculaire moyenne de 100 à 400 kDa (par exemple : PRONOVA® SLG100) et à une concentration totale comprise entre 0.5% et 5% en masse volumique (poids/volume).
Avantageusement, la couche d'hydrogel comprend des polymères aptes à limiter l'adhésion cellulaire (« cell-repellent »), tels que des polyosides naturels (par exemple l'alginate de sodium), ou des polymères comprenant des motifs polyéthylène glycol, afin de faciliter le cas échéant la séparation de ladite couche d'hydrogel de l'agrégat de cellules qu'elle enveloppe ou sa dégradation sans affecter la structure de l'agrégat de cellules.
Le compartiment cellulaire selon l'invention se caractérise par la présence, dans le volume interne de l'enveloppe d'hydrogel, d'un agrégat de cellules organisées en un amas cohésif au sein duquel les cellules interagissent.
Selon l'invention, l'agrégat de cellules comprend des cellules hématopoïétiques malignes. Par « cellules hématopoïétiques malignes », on entend des cellules cancéreuses issues de la différenciation de progéniteurs lymphoïdes (i.e., lymphocytes) ou myéloïdes (i.e., érythrocytes, leucocytes, plaquettes). Préférentiellement, dans le contexte de l'invention, les cellules hématopoïétiques malignes sont choisies parmi les cellules lymphomateuses et les cellules leucémiques.
Selon un mode de réalisation particulier de l'invention, l'agrégat de cellules contenu dans l'enveloppe externe en hydrogel comprend des cellules lymphomateuses. Dans le contexte de l'invention, les « cellules lymphomateuses » désignent des cellules lymphoïdes malignes. Avantageusement, les cellules lymphomateuses sont choisies parmi les cellules de lymphome folliculaire, de lymphome diffus à grandes cellules B, de lymphome de Burkitt, de lymphome du manteau, de lymphome T périphérique, de lymphome lymphoblastique, de lymphome anaplasique, de lymphome de la zone marginale, de lymphome du MALT (« Mucosa- associated lymphoid tissue »), de lymphome lymphoplasmocytaire, et/ou de lymphome de la rate, de lymphome T cutané, de lymphome B cutané.
Selon un autre mode de réalisation particulier de l'invention, l'agrégat de cellules contenu dans l'enveloppe externe en hydrogel comprend des cellules leucémiques. Dans le contexte de
l'invention, les « cellules leucémiques » désignent des cellules sanguines malignes. Notamment, les cellules leucémiques peuvent être choisies parmi des cellules de leucémies aiguës myéloblastiques, leucémies myéloïdes chroniques, leucémies lymphoïdes chroniques, leucémies aiguës. Selon l'invention, les cellules hématopoïétiques malignes peuvent provenir de modèles cellulaires, mais également être obtenues à partir de patients. L'utilisation de cellules lymphomateuses ou leucémiques provenant d'un patient particulier peut être particulièrement intéressant dans le cadre de la médecine personnalisée, pour l'identification de molécule(s) particulièrement adaptée(s) au traitement du lymphome ou de la leucémie dudit patient. Dans ce cas, les cellules tumorales du patient sont avantageusement purifiées avant utilisation. Avantageusement, la purification se fait par sélection négative, afin d'éviter l'introduction d'anticorps dans la culture cellulaire.
Dans un mode de réalisation, l'agrégat de cellules du microcompartiment cellulaire comprend uniquement des cellules lymphomateuses. L'organisation des cellules lymphomateuses en un amas cellulaire cohésif au sein de la capsule en hydrogel permet de conférer auxdites cellules une résistance à la pénétration de molécules externes qui se rapproche de la résistance observée au sein des cellules d'un lymphome.
Dans un autre mode de réalisation, l'agrégat de cellules du microcompartiment cellulaire comprend uniquement des cellules leucémiques. Dans un autre mode de réalisation, et afin de se rapprocher histologiquement des niches tumorales, l'agrégat de cellules comprend, en plus des cellules hématopoïétiques malignes, des cellules stromales. La nature des cellules stromales choisie dépend avantageusement de la nature des cellules hématopoïétiques malignes associées. Dans ce cas, le microcompartiment comprend en outre une couche de matrice extracellulaire. En effet, les inventeurs ont montré que la présence d'une matrice extracellulaire est nécessaire à l'adhésion et la survie des cellules stromales et à la formation de l'agrégat de cellules mixtes au sein de la capsule d'hydrogel. Selon l'invention, la couche de matrice extracellulaire tapisse avantageusement la face interne de l'enveloppe en hydrogel. La couche de matrice extracellulaire comprend un mélange de protéines et de composés extracellulaires favorisant la culture cellulaire, et plus particulièrement celle des cellules stromales. Préférentiellement, la matrice extracellulaire comprend des protéines structurelles, telles que des laminines contenant les sous-unités al, a4 ou aS, les sous-unités βΐ ou β2, et les sous-unités γΐ ou γ3, de l'entactine, de la vitronectine, de la fibronectine, des laminines, du collagène, ainsi que des facteurs de croissance, tels que du
TGF-béta et/ou de l'EGF. Dans un mode de réalisation, la couche de matrice extracellulaire consiste en, ou contient du Matrigel® et/ou de la Geltrex®.
Dans un mode de réalisation particulier, les cellules hématopoïétiques malignes sont des cellules lymphomateuses et les cellules stromales sont des cellules stromales lymphoïdes, telles que des cellules souches de tissu adipeux ADSC (adipose-derived stem cells), ou plus particulièrement, des cellules de type RESTO. Les cellules stromales de type RESTO s'entendent de cellules stromales lymphoïdes dérivées d'amygdales (« tonsil-derived stromal cells »). L'isolement et la caractérisation des cellules RESTO peut se faire selon le protocole décrit dans la publication Amé-Thomas et al. Blood 2007. Les amygdales sont coupées en morceaux puis incubées dans une solution contenant de la DNAse I et de la collagénase IV. La suspension cellulaire est ensuite déposée sur un gradient de Percoll®. Les cellules à l'interface de la fraction de Percoll® 15%/25% sont mises en culture. Après 48 heures de culture, les cellules stomales (RESTO) adhérent au plastique et les cellules en suspension sont éliminées. Les cellules RESTO se caractérisent par une morphologie fusiforme et par l'absence de marqueurs de cellules hématopoïétiques (CD4S) et la présence de marqueurs de cellules mésenchymateuses (CD10S, CD90 et CD73). Ces cellules se caractérisent également par leur potentiel de différentiation dans les lignages adipocytaire, chondroblastique et ostéoblastique. Les cellules RESTO sont connues pour présenter des caractéristiques proches de celles des cellules fibroblastiques réticulaires des organes lymphoïdes secondaires : sécrétion de chimiokines, de fibronectine et d'un réseau de transglutaminase en réponse au TNFa (Tumor Necrosis Factor) et à la LTaip2 (LymphoToxine).
Plus généralement, l'agrégat de cellules peut comporter, outre des cellules lymphomateuses, des cellules normalement présentes dans le microenvironnement d'un lymphome. Dans le contexte de l'invention, on désigne par « cellules du microenvironnement » les cellules présentes dans l'agrégat de cellules qui ne sont pas des cellules lymphomateuses. Ainsi, selon l'invention, l'agrégat de cellules peut également comporter outre des cellules stromales, des cellules du système immunitaire, telles que des macrophages.
Dans un mode de réalisation particulier, les cellules hématopoïétiques malignes sont des cellules leucémiques et les cellules stromales sont des cellules stromales médullaires, telles que des cellules de lignée HS-S, ou des MSC (« Mesenchymal Stromal Cells ») de moelle osseuse.
Avantageusement, le ratio cellules lymphomateuses/cellules stromales dans l'agrégat de cellules est compris entre 1/1 et 1000/1. Dans le cas de cellules lymphomateuses provenant de lignées cellulaires, le ratio peut varier dans le temps, la quantité de cellules lymphomateuses tendant à augmenter de manière exponentielle, comparativement aux cellules stromales. D'une
manière générale, une fois que le microcompartiment a atteint sa taille maximale, généralement dans les huit jours suivant l'encapsulation des cellules dans l'enveloppe d'hydrogel (J8), et que les cellules ne peuvent plus croître à l'intérieur de l'enveloppe d'hydrogel, le ratio cellules lymphomateuses/cellules stromales est compris entre 1/1 et 10000/1. Dans un mode de réalisation, la densité cellulaire dans le microcompartiment cellulaire à J8 est comprise entre une centaine et plusieurs milliers de cellules. Par exemple, un microcompartiment présentant un diamètre de 200μιη comprend préférentiellement 100 à 10000 cellules.
Préférentiellement, le microcompartiment cellulaire est clos. C'est la couche externe en hydrogel qui confère sa taille et sa forme au microcompartiment cellulaire. Le microcompartiment peut avoir n'importe quelle forme compatible avec l'encapsulation de cellules, notamment une forme sphéroïde, ovoïde ou tabulaire. L'agrégat de cellules est contraint dans le volume interne de ladite couche d'hydrogel, et une fois les cellules à confluence, l'agrégat ne peut plus augmenter en volume. Dans un mode de réalisation particulier, le microcompartiment cellulaire a un diamètre ou une plus petite dimension compris entre 50 μιη et 600 μιη. Par « plus petite dimension », on entend le double de la distance minimale entre un point situé sur la surface externe de la couche en hydrogel et le centre du microcompartiment. Avantageusement, l'épaisseur de la couche externe en hydrogel représente 5% à 30% du rayon du microcompartiment. Dans le contexte de l'invention, « l'épaisseur » d'une couche est la dimension de ladite couche s 'étendant radialement par rapport au centre du microcompartiment.
Dans un exemple de réalisation particulier, le microcompartiment cellulaire a un diamètre ou une plus petite dimension compris entre 50 μηι et 300 μηι. De telles dimensions garantissent que l'ensemble des cellules de l'agrégat de cellules, y compris celles situées au centre dudit agrégat de cellules, a un accès suffisant à l'oxygène et aux nutriments qui diffusent à travers la couche d'hydrogel. Ainsi, aucun phénomène d'hypoxie et/ou de nécrose n'est observé au sein d'un tel microcompartiment, toutes les cellules ayant un accès suffisant aux petites molécules qui diffusent à travers l'enveloppe d'hydrogel.
Dans un autre exemple de réalisation, le microcompartiment cellulaire a un diamètre ou une plus petite dimension compris entre 500 μηι et 600 μηι. Dans ce cas, les cellules situées au centre de l'agrégat de cellules n'ont pas ou peu accès à l'oxygène et aux nutriments qui diffusent à travers l'enveloppe d'hydrogel. De tels microcompartiments sont particulièrement
intéressants pour l'étude des phénomènes d'hypoxie et/ou de nécrose qui peuvent parfois se rencontrer dans un lymphome.
Procédés de préparation de microcompartiments cellulaires
L'invention a également pour objet des procédés de préparation de microcompartiments cellulaires permettant d'obtenir des microcompartiments cellulaires comprenant un agrégat de cellules contenant des cellules hématopoïétiques malignes encapsulé dans une enveloppe externe d'hydrogel. Après encapsulation des cellules, celles-ci vont se réorganiser au sein de l'enveloppe d'hydrogel, de manière à former un amas cohésif. L' encapsulation se fait au moyen d'un procédé de coextrusion concentrique, lors duquel la solution d'hydrogel est coextrudée avec la solution de cellules, avant d'être réticulée au moyen d'une solution de réticulation apte à réticuler l'hydrogel. Par « coextrusion concentrique », on entend que les solutions sont coextrudées de telle manière qu'une solution entoure l'autre solution. Dans le cas présent, la coextrusion concentrique est telle que la solution d'hydrogel entoure la solution de cellules. Dans un mode de réalisation, des gouttes de solutions coextrudées tombent alors dans la solution de réticulation, comprenant un agent de réticulation apte à réticuler l'hydrogel et ainsi à former une capsule d'hydrogel autour des cellules. Dans un autre mode de réalisation, les solutions sont coextrudées directement dans la solution de réticulation, de manière à former un tube externe en hydrogel dans lequel vont s'organiser les cellules. Dans un autre mode de réalisation, des gouttes de solutions coextrudées traversent un aérosol de réticulation (réalisé à partir d'une solution de réticulation) de manière à permettre une réticulation au moins partielle de la couche d'hydrogel autour de la goutte de solution de cellules. Avantageusement, les microcompartiments partiellement réticulés tombent ensuite dans une solution de réticulation où la réticulation se termine.
Tout procédé d'extrusion permettant de coextruder de manière concentrique de l'hydrogel et des cellules peut être utilisé. Notamment, il est possible de réaliser les microcompartiments cellulaires selon l'invention en adaptant la méthode et le dispositif microfluidique décrits dans Alessandri et al., (PNAS, September 10, 2013 vol. 110 no.37 14843-14848 ; Lab on a Chip, 2016, vol. 16, no. 9, p. 1593-1604) ou dans Onoe et al., (Nat Material 2013, 12(6):584-90). Par exemple, le procédé selon l'invention est mis en œuvre au moyen d'un dispositif d'extrusion à double enveloppe concentrique tel que décrit dans le brevet FR2986165.
Dans le contexte de l'invention, on entend par « solution de réticulation », une solution comprenant au moins un agent réticulant adapté pour réticuler un hydrogel comprenant au moins un polymère hydrophile, tel que de l'alginate, lorsqu'elle est mise en contact avec celui- ci. La solution de réticulation peut être par exemple une solution comprenant au moins un cation
divalent. La solution de réticulation peut également être une solution comprenant un autre agent réticulant connu de l'alginate ou du polymère hydrophile à réticuler, ou un solvant, par exemple de l'eau ou un alcool, adapté pour permettre une réticulation par irradiation ou par toute autre technique connue dans l'art. Avantageusement, la solution de réticulation est une solution comprenant au moins un cation divalent. Préférentiellement, le cation divalent est un cation permettant de réticuler de l'alginate en solution. H peut s'agir par exemple d'un cation divalent choisi dans le groupe comprenant Ca2+, Mg2+, Ba2+ et Sr2"1", ou d'un mélange d'au moins deux de ces cations divalents. Le cation divalent, par exemple le Ca24\ peut être associé à un contre- ion pour former par exemple des solutions de type CaCh ou CaCCh, bien connues de l'homme du métier. La solution de réticulation peut également être une solution comprenant du CaC03 couplé à du Glucono delta-lactone (GDL) formant une solution de CaCOs-GDL. La solution de réticulation peut également être un mélange de CaC03-CaS04-GDL. Dans un mode de mise en œuvre particulier du procédé selon l'invention, la solution de réticulation est une solution comprenant du calcium, notamment sous la forme Ca2+. La solution de réticulation peut également être une solution comprenant de la polylysine. L'homme du métier est à même d'ajuster la nature du cation divalent et/ou du contre-ion, ainsi que sa concentration aux autres paramètres du procédé de la présente invention, notamment à la nature du polymère utilisé et à la vitesse et/ ou au degré de réticulation désiré(e). Par exemple, la concentration de cation divalent dans la solution de réticulation est comprise entre 10 et 1000 mM. La solution de réticulation peut comprendre d'autres constituants, bien connus de l'homme du métier, que ceux décrit ci-dessus, afin d'améliorer la réticulation de la gaine d'hydrogel dans les conditions, notamment temps et/ou température, particulières.
Selon l'invention, la solution d'hydrogel est coextrudée avec une solution de cellules.
Avantageusement, la densité cellulaire dans la solution de cellules est comprise entre 1.106 et lOO.li^ ceUules/mL.
Dans un mode de réalisation particulier, la solution de cellules utilisée pour la coextrusion ne contient que des cellules lymphomateuses en suspension dans du milieu de culture.
Dans un mode de réalisation particulier, la solution de cellules utilisée pour la coextrusion ne contient que des cellules leucémiques en suspension dans du milieu de culture. Dans un autre mode de réalisation, la solution de cellules utilisée pour la coextrusion comprend des cellules lymphomateuses et des cellules stromales lymphoïdes, en suspension dans une matrice extracellulaire. Avantageusement, le ratio en nombre de cellules lymphomateuses / cellules stromales dans la solution de cellules est compris entre 1/1 et 1/2. Optionnellement,
une telle solution peut également comporter des cellules immunitaires, préférentiellement choisies parmi des macrophages. Dans ce cas, le ratio en nombre de cellules lymphomateuses/cellules du microenvironnement dans la solution de cellules est avantageusement compris entre 1/1 et 1/2. Dans un autre mode de réalisation, la solution de cellules utilisée pour la coextrusion comprend des cellules leucémiques et des cellules stromales médullaires, en suspension dans une matrice extracellulaire. Avantageusement, le ratio en nombre de cellules leucémiques / cellules stromales dans la solution de cellules est compris entre 1/1 et 1/2.
Lorsque la solution de cellules comprend de la matrice extracellulaire, la suspension cellulaire représente avantageusement entre 50 et 95% du volume de la solution, tandis que la matrice extracellulaire représente entre 5 et 50% dudit volume.
Dans un mode de réalisation particulier, la coextrusion implique également une solution intermédiaire, comprenant du sorbitol. Dans ce cas, la coextrusion est réalisée de manière à ce que la solution intermédiaire soit extradée entre la solution d'hydrogel et la solution de cellules. Dans un mode de mise en œuvre particulier, la vitesse d'extrusion de la solution d'hydrogel est comprise entre 5et 100 mlVh, préférentiellement entre 15 et 60 mIJh.
Dans un mode de mise en œuvre particulier, la vitesse d'extrusion de la solution de cellules est comprise entre 5 et 100 mIJh, préférentiellement entre 10 et 50mIVh.
Dans un mode de mise en œuvre particulier, la vitesse d'extrusion de la solution intermédiaire est comprise entre 5 et 100 mIJh, préférentiellement entre 10 et 50 mlVh.
La vitesse de coextrusion des différentes solutions peut être facilement modulée par l'homme du métier, de manière à adapter le diamètre ou la plus petite dimension du microcompartiment cellulaire et/ou l'épaisseur de la couche d'hydrogel. Préférentiellement, les vitesses d'extrusion de la solution de cellules et de la solution intermédiaire sont identiques. Avantageusement, la vitesse d'extrusion de la solution d'hydrogel est sensiblement égale à la vitesse d'extrusion de la solution de cellules et éventuellement de la solution intermédiaire.
Dans un mode de mise en œuvre particulier du procédé selon l'invention, la solution d'hydrogel, la solution intermédiaire et la solution de cellules sont chargées dans trois compartiments concentriques d'un dispositif de coextrusion, de manière à ce que la solution d'hydrogel, formant le premier flux, entoure la solution intermédiaire qui forme le second flux, qui elle- même entoure la solution de cellules qui forme le troisième flux. La pointe du dispositif
d'extrusion, par laquelle sortent les trois flux, débouche au-dessus de la solution de réticulation. Par exemple, la pointe du dispositif d'extrusion est située à environ 50 cm, +/- 10cm, de la solution de réticulation. Un champ électrique est généré au sortir du dispositif de coextrusion, afin de permettre la formation des microgouttelettes. Pour cela, par exemple, un anneau de cuivre est disposé à environ 1 cm au sortir du dispositif de coextrusion. Des microgouttelettes tombent ainsi de manière séquentielle dans le bain de réticulation où la couche d'hydrogel est réticulée, formant une enveloppe externe autour des cellules. De manière alternative ou additionnelle, la pointe du dispositif d'extrusion débouche dans un aérosol de réticulation, formé de microgouttes de solution de réticulation, de sorte que la couche d'hydrogel des microgouttelettes commence à se réticuler au contact des microgouttes de l'aérosol. La réticulation peut, le cas échéant, se poursuivre dans une solution de réticulation dans laquelle les microgouttelettes sont réceptionnées.
Afin d'améliorer la polydispersité des gouttes au sortir du dispositif de coextrusion, et éviter ainsi que les microgouttelettes fusionnent avant d'atteindre la solution de réticulation, il est possible d'appliquer un potentiel de +1 à +5kV, et notamment un potentiel de +2kV, à la solution d'hydrogel, par exemple au moyen d'une électrode disposée dans la solution d'hydrogel.
Le procédé selon l'invention permet d'obtenir très rapidement plusieurs milliers de microcompartiments sensiblement identiques en termes de dimensions et de composition. Le procédé selon l'invention permet d'encapsuler des cellules hématopoïétiques malignes, telles que des cellules lymphomateuses, dans une enveloppe externe en hydrogel. Après seulement quelques heures, les cellules contenues dans l'enveloppe d'hydrogel se réorganisent, de manière à s'agréger et former un amas de cellules qui devient cohésif au bout de quelques jours. Avantageusement, le microcompartiment cellulaire obtenu par coextrusion est maintenu dans un milieu de culture adapté pendant deux à douze jours avant d'être utilisé, préférentiellement entre quatre et dix jours. Ce temps de latence permet avantageusement aux cellules de s'agréger et de former un amas cellulaire mimant l'amas de cellules au sein d'un lymphome.
Selon l'invention, il est possible d'utiliser le microcompartiment cellulaire obtenu par coextrusion tel quel, c'est-à-dire avec l'enveloppe externe d'hydrogel. H est autrement possible de procéder préalablement à toute utilisation à une hydrolyse de l'enveloppe d'hydrogel, afin de récupérer l'agrégat de cellules. H est également possible de congeler le microcompartiment cellulaire obtenu par coextrusion (avec l'enveloppe d'hydrogel) pour une utilisation ultérieure.
Applications
Les microcompartiments cellulaires selon l'invention peuvent être utilisés pour de nombreuses applications, notamment à visées pharmacologiques.
Les microcompartiments cellulaires selon l'invention peuvent notamment être utilisés pour des tests d'identification et/ou de validation de molécules candidates ayant une action sur les hémopathies malignes. En fonction des cellules hématopoïétiques malignes contenues dans le microcompartiment cellulaire, il est possible de cibler un type d' hémopathies malignes particulier.
Selon l'invention, il est possible d'utiliser directement les microcompartiments cellulaires, c'est-à-dire avec l'enveloppe externe d'hydrogel. Notamment, la perméabilité de certains hydrogels, tels que l'alginate, est suffisante pour laisser passer des molécules ayant un poids moléculaire inférieur ou égal à 200 kDa. Il est donc possible d'étudier ces molécules directement sur les microcompartiments cellulaires. Dans le cas de molécules de poids moléculaire plus important, il est possible d'hydrolyser l'enveloppe externe d'hydrogel avant de pratiquer les tests . Ainsi, Γ étude se fait directement sur Γ amas de cellules . Avantageusement, l'hydrolyse de l'enveloppe d'hydrogel est réalisée 6 ou 10 jours après la coextrusion, de manière à garantir que l'amas de cellules s'est bien formé et que les cellules sont cohésives.
Les microcompartiments cellulaires selon l'invention peuvent également être utilisés en médecine personnalisée, en utilisant des cellules d'un sujet présentant un lymphome ou une leucémie, afin de tester spécifiquement la réaction dudit sujet à différents traitements, avant de sélectionner le traitement le plus adapté pour ledit sujet.
EXEMPLES
Exemple 1 : Procédé d'obtention des microcompartiments cellulaires Matériel & méthode Cellules :
Lignées humaines de type lymphomes diffus à grande cellules B (DLBCL) (SUDHL4 et HLY1) Lignées humaines de type lymphome folliculaire (DOHH2)
Lymphocytes B issus de biopsies de patients purifiés par sélection négative (Maby-El Hajjami et al. Can Res 2009 : 69 (7) 3228 :37)
Cellules stromales de type « RESTO » (Aîné-Thomas et al. (Blood 2007)) Solutions : Solution de réticulation : CaCfc 100mM à 37°C Solution intermédiaire : Sorbitol 300mM
Solution d'hydrogel : alginate 2,5% w/v (LF200FTS) dans 0,5mM SDS
Matrice extracellulaire : Matrigel® classique (sans rouge phénol et avec facteurs de croissance)
Dispositif de œextrusion - 3 seringues hamilton 12ml contenant respectivement de Γ alginate 2,5% stérile et les deux autres du sorbitol 300 mM stériles
-tuyau standard Teflon de diamètre 13mm
- pompe à seringues neMESYS® (de la société Cetoni) et logiciel associé
- puce d'injection imprimée en 3D (voir publication Alessandri K et al., 2016) Procédé de œextrusion
Les capsules d' alginate sont obtenues selon le procédé décrit dans Alessandri et al (PNAS 2013, DOI: 10.1073/pnas.1309482110 et LOC 2016 DOI: 10.1039/c61c00133e) et dans la demande WO2013113855.
Plus précisément, environ 1.106 cellules sont re-suspendues dans une solution de sorbitol et de Matrigel® pour obtenir un volume final de 100|xL à 50% en volume de Matrigel®. Cette solution de cellules est conservée à 4°C.
Le dispositif de coextrusion micro fluidique pour la production de capsules est disposé à environ 50cm au-dessus d'une boîte de Pétri contenant la solution de réticulation.
La solution d'alginate, la solution de sorbitol et la solution de cellules sont alors co-injectées dans le dispositif de coextrusion microfluidique, afin de former des gouttelettes composites qui sont réticulées en tombant dans le bain de calcium. Le dispositif de coextrusion est mis en fonctionnement pendant 10 secondes, et produit environ 5000 capsules d'alginate par seconde, soit au total environ 50.000 capsules. Les capsules d'alginate sont alors récupérées en filtrant le bain de calcium avec une passoire à cellules maille 40μπι qui retient les capsules. Celles-ci sont rincées avec de la base de milieu puis re-suspendues dans le milieu définitif.
Pour améliorer la polydispersité, un potentiel de +2kV a été appliqué via une électrode dans l'alginate. Un anneau de cuivre à la masse de 3cm de diamètre est positionné à environ 1cm de la pointe du dispositif microfluidique de coextrusion pour générer le champ électrique nécessaire à l'éléctro-formation des gouttelettes.
A] Microcompartiments cellulaires comprenant uniquement des cellules lymphomateuses SUDHL4 ou HLY1
Avant l'encapsulation, les cellules lymphomateuses sont cultivées dans du milieu DMEM additionné de 10% de sérum de veau fœtal (SVF) en atmosphère humide à 37°C en présence de 5% de C02.
Au moment de l'encapsulation, les cellules sont centrifugées et re-suspendues dans du sorbitol (300mM) à raison de 10.106 à 100.106 ceUules/mL.
Après encapsulation, le nombre de cellules par capsule varie entre 30 et 100. Les capsules sont cultivées en milieu DMEM additionné de 10% de SVF dans une étuve à CO2 à 37°C. Le milieu est changé tous les 2 à 3 jours.
Pour quantifier la croissance des amas de cellules, les capsules sont réparties en plaques de 96 puits, à raison d'une capsule par puits. Les amas de cellules sont ensuite imagés régulièrement (tous les 2 jours) en contraste de phase et en fluorescence si la lignée cellulaire exprime une protéine fluorescente. Ainsi on obtient une série de photos représentant la croissance d'un amas de cellules unique au cours du temps. A partir de ces photos, l'aire des amas de cellules est mesurée à l'aide du logiciel ImageJ® et des courbes de croissance sont établies (figure 1B).
On observe ainsi que les amas de cellules sont constitués entre J4-J10 après l'encapsulation. Plus précisément, entre J6 et J10, on observe que les cellules s'agrègent et forment une masse unique dans la capsule d'alginate (figure 1A).
B] Microcompartiments cellulaires comprenant des cellules lvmphomateuses et des cellules stromales
Afin de se rapprocher du microenvironnement d'un ganglion lymphatique, des cellules lvmphomateuses (DOHH2) sont co-cultivées avec de la matrice extracellulaire Matrigel® et des cellules stromales de type « RESTO ».
Les cellules RESTO ont été préalablement cultivées en milieu DMEM supplémenté avec 10% de sérum de veau fœtal en atmosphère humide à 37°C avec 5% de CCh. Au moment de l'encapsulation, les cellules sont détachées du support par action de la trypsine, puis elles sont re-suspendues dans la matrice extracellulaire en présence de cellules lymphomateuses selon un ratio 1/1.
La densité cellulaire des cellules RESTO et des cellules lymphomateuses peut varier de 10- 50.106 cellules /mL.
La méthode d'encapsulation par coextrusion permet d'obtenir un revêtement de la paroi interne des capsules d'alginate par la matrice extracellulaire. Ce revêtement permet l'adhésion des cellules stromales et favorise la formation de la niche tumorale. En quelques jours, les cellules s'organisent librement et forment un amas de cellules cohésives après 4-10 jours de culture (figure 3).
C] Microcompartiments cellulaires réalisés à partir de cellules de patients
Des microcompartiments ont été réalisés selon l'invention à partir de cellules lymphocytaires issues de patient atteints de syndrome de Sezary (Forme leucémique du lymphome T cutané). Après encapsulation, les cellules croissent à l'intérieur des capsules d'alginate et forment un amas de cellules au bout d'une dizaine de jours (Figure 12). Cela confirme que le procédé selon l'invention permet d'obtenir des microcompartiments cellulaires à partir de cellules primaires de patients, ce qui permet d'envisager l'utilisation de ce procédé en médecine personnalisée. Exemple 2 : Analyse des microcompartiments cellulaires
A] Imagerie en temps réel
Des capsules contenant des amas de cellules SUDHL4 ou HLY1 sont placées dans des puits d'agarose recouverts de milieu DMEM sans rouge de phénol (à J1-J6). L'acquisition des images se fait au microscope confocal ZEISS lsm 510. Deux types d'analyses sont réalisés: une analyse à un temps t après marquage des microcompartiments avec un fluorophore, et une analyse en
imagerie intermittente, après marquage ou non des cellules avec un fluorophore. Les cellules sont marquées avec de la calcein-AM et de l'iodure de propidium, afin de visualiser les cellules mortes ; les noyaux cellulaires sont marqués en bleu avec du Hoechst 33342.
H est ainsi possible de suivre la migration des cellules au sein de la capsule, ainsi que les interactions entre cellules.
B] Immunofluorescence en coupe de paraffine
Pour pouvoir étudier l'expression ou la régionalisation des protéines dans les cellules au sein des amas de cellules, la technique d' immunofluorescence sur coupe de paraffine a été adaptée à l'analyse des capsules : des capsules contenant les amas de cellules sont prélevées et incluses dans une solution gélifiée d'agarose à faible point de fusion à 2 %. Une fois gélifié, le bloc d'agarose contenant les capsules est plongé dans un fixateur de type paraformaldéhyde à 4% pendant 30 min. Après fixation, les échantillons sont traités selon les protocoles classiquement décrits pour rimmunohisto fluorescence.
L'expression de la protéine Ki67, qui est un marqueur de l'activation cellulaire, et l'expression de la caspase 3 clivée, qui permet d'évaluer la mort cellulaire, ont été évaluées. Les marquages ont été réalisés sur des coupes d'amas de cellules correspondant à peu près au centre de ceux- ci.
On constate l'absence de régionalisation de mort ou de prolifération cellulaire au sein des amas cellulaires. Ces observations sont tout à fait comparables à celles effectuées dans des tumeurs de cellules SUDHL4 obtenues après xénogreffe dans des souris immunodéficientes.
C] Analyse de la matrice extracellulaire dans les amas de cellules
Une des caractéristiques du microenvironnement ganglionnaire est la présence de matrice extracellulaire sécrétée par les cellules stromales et les lymphocytes B tumoraux. La matrice extracellulaire est constituée principalement de fibronectine, de collagène I et de laminine. Une analyse par immunofluorescence a permis de montrer la présence de ces trois types de matrice dans les amas de cellules des microcompartiments, alors que les mêmes cellules cultivées en suspension n'expriment pas ces matrices.
D] Dissolution des capsules d'alginate
Pour l'analyse qualitative et quantitative à haut débit des amas de cellules, il est important de pouvoir récupérer les cellules contenues dans la capsule d'hydrogel. Une fois récupérées, il est possible de les trier et/ou de les analyser en cytométrie en flux ou par toute autre méthode d'analyse appropriée, comme le séquençage à haut débit, les dosages biochimiques, etc.
Des microcompartiments (à J9 après encapsulation) sont prélevés et la capsule d'alginate est dissoute en plongeant les microcompartiments dans un tampon phosphate additionné de 1 mM d'EGTA. La Figure 4 montre un exemple de dissolution d'une capsule contenant un amas de cellules comprenant uniquement des cellules lymphomateuses SUDHL4 (figure 4A) et d'une capsule contenant un amas de cellules comprenant des cellules lymphomateuses DOHH2 et des cellules stromales (figure 4B).
On constate qu'après dissolution de la capsule, les cellules constituant l'amas de cellules ne se dispersent pas et montrent une cohésion qui est compatible avec la présence de matrice extracellulaire. E] Cytométrie en flux
Afin d'accéder au nombre de cellules au sein des amas de cellules et au pourcentage de cellules mortes aux différents stades de croissance, les capsules d'alginate sont dissoutes et les amas de cellules dissociés avant d'être incubés avec un marqueur de l'apoptose (TMRM) puis analysés au cytomètre en flux en présence de billes de comptage (Figure S). Au cours du temps, on observe que le nombre de cellules augmente, alors que les proportions de cellules mortes au sein des amas de cellules diminuent entre J3 et J10, ce qui est en corrélation avec l'augmentation du volume du sphéroïde décrit en figure 1A.
F] Effet supplétif de la niche tumorale sur la croissance des cellules de lymphomes
Les lymphocytes B tumoraux issus de patients, ainsi que certaines lignées cellulaires, ne sont pas capables de survivre et/ou de former des amas de cellules lorsqu'ils sont cultivés seuls. Comme cela est visible sur la figure 6 (A-C), la reconstitution d'une niche tumorale proche de celle retrouvée dans le ganglion lymphatique (C : cellules RESTO + DOHH2), favorise la croissance des lymphocytes B tumoraux.
G] Différenciation des cellules stromales en stroma lvmphoïde pro-tumoral
Au cours de la formation de la niche tumorale du lymphome folliculaire, les cellules stromales se différencient en stroma lymphoïde pro-tumoral (Thomazy et al, 2003 ; Ohe et al., 2016) exprimant, entre autres, la transglutaminase 2 (TG2) qui a un rôle dans la stabilisation de la matrice extra-cellulaire et l'adhésion cellulaire.
Comme cela est visible sur la figure 8, la culture de cellules stromales de type Resto (FRC) en présence de cellules B tumorales et de matrice extra-cellulaire entraine l'expression de la TG2, révélée par immunomarquage. Ceci montre que le modèle 3D de culture cellulaire selon l'invention reproduit les principales caractéristiques d'une niche tumorale lymphomateuse, à savoir l' effet supplétif du stroma sur les lymphocytes B et la différenciation du stroma en stroma pro-tumoral.
Exemple 3 : Criblage de molécules anti-cancéreuses
H est reconnu que la chimiorésistance de certains lymphomes est en partie liée à une mauvaise pénétration des drogues au sein des structures 3D et à la présence de cellules du microenvironnement.
L'efficacité de deux chimiothérapies conventionnelles (cisplatine et étoposide) a été testée de manière parallèle sur des cellules cultivées en suspension (2D) et sur des amas de cellules issus de microcompartiments cellulaires selon l'invention (3D), traités avec des concentrations croissantes de ces molécules. Après 48h d'incubation, les cellules sont marquées au TMRM (les capsules d'alginate sont préalablement dissoutes et les amas de cellules dissociés) puis analysées au cytomètre afin d'évaluer le pourcentage de mort cellulaire pour chaque dose de molécule.
Les résultats montrent que les cellules organisées en amas de cellules (3D), qui présentent une structure plus proche de la structure d'une tumeur, sont moins sensibles aux chimiothérapies conventionnelles que les mêmes cellules cultivées en suspension (Figure 7). Cela confirme que le modèle 3D selon l'invention est plus pertinent pour faire du criblage de drogues anticancéreuses que des cellules en suspension.
Exemple 4 : Diffusion des drogues dans le microcompartiment cellulaire
A] Chimiothérapies conventionnelles
La recherche de médicaments contre le cancer au niveau préclinique a le pire taux de succès de tous les essais thérapeutiques, avec moins de 5% de composés candidats passant la phase m des essais cliniques. Une des explications à ces échecs est l'absence de modèle pertinent capable de reproduire la diffusion des drogues au sein d'une tumeur. En effet, une des hypothèses pour expliquer la diminution de l'efficacité des molécules lors du passage de tests pré-cliniques vers les essais cliniques serait que la densité cellulaire au sein des tumeurs freinerait la pénétration et la diffusion des drogues, diminuant d'autant leur efficacité. Comme montré à l'exemple 3 ci-dessus, le modèle 3D selon l'invention est pertinent pour étudier la diffusion des drogues au sein d'une niche tumorale lymphomateuse.
Pour effectuer des tests de diffusion de drogues, les propriétés auto-fluorescentes de la doxorubicine (qui est par ailleurs utilisée dans le traitement standard des lymphomes B) ont été utilisées. Ainsi, des cellules SUDHL4 cultivées en suspension ou en 3D en présence ou non de matrice extracellulaire (ECM) et ou de cellules stromales de type RESTO ont été incubées 24h en présence ou non de Doxorubicine (ΙμΜ).
L'intensité de fluorescence des cellules a ensuite été mesurée par cytométrie en flux.
Les résultats montrent que les cellules cultivées en 3D dans le microcompartiment selon l'invention sont moins fluorescentes que les cellules cultivées en 2D, suggérant donc que dans un contexte 3D, les cellules sont moins exposées à la chimiothérapie. De façon très intéressante, on observe que la diffusion de la drogue est davantage freinée lorsque les cellules sont cultivées en 3D en présence de matrice et de cellules RESTO (Figure 9). Ainsi, en freinant la diffusion des molécules au sein des sphéroïdes selon l'invention (et par analogie des tumeurs) on montre comment le microenvironnement peut exercer un rôle dans la résistance aux drogues.
B] Anticorps
Le traitement standard des lymphomes B consiste en une polychimiothérapie conventionnelle associée à une immunothérapie dirigée contre le CD20 exprimé à la surface des lymphocytes B matures.
Pour pouvoir tester le potentiel thérapeutique de certaines immunothérapies dans le système de culture cellulaire 3D selon l'invention, il est intéressant de montrer que les anticorps (AC) sont capables de pénétrer dans le microcompartiment.
Pour tester cela, les sphéroïdes ont été incubés à J7-J9 post-encapsulation en présence - d'AC anti-CD19 directement couplé à la phycoérythrine (PE) (très fortement exprimé dans les lymphocytes B), ou
- de Rituximab, qui est TAC thérapeutique utilisé pour les lymphomes B, qui a été directement couplé avec un fluorophore (lex=633nm).
Après une nuit d'incubation avec les AC, on observe un marquage des cellules au sein des sphéroïdes (Figure 10). Cela montre que le modèle 3D selon l'invention est adapté pour faire du criblage d'AC thérapeutiques.
C] Réponse aux drogues
Comme démontré ci-dessus, la diffusion des drogues est altérée dans les structures 3D selon l'invention. Le but de la présente expérimentation est de vérifier si cette altération est corrélée à une chimiorésistance. Pour cela, l'efficacité de deux chimiothérapies conventionnelles (doxorubicine et étoposide) a été testée de manière parallèle sur des cellules cultivées en suspension (2D) et sur des amas de cellules issus de microcompartiments cellulaires selon l'invention, contenant des cellules lymphomateuses seules ou en présence d'ECM, avec ou sans cellules stromales RESTO, traités avec des concentrations croissantes de ces molécules de chimiothérapie.
Après 48h d'incubation, la survie cellulaire a été évaluée par la mesure de Γ ATP intracellulaire à l'aide du kit CellTiter-Glo® 3D Cell Viability Assay.(Promega).
Les résultats montrent que les cellules organisées en amas de cellules (3D), qui présentent une structure plus proche de la structure d'une tumeur (cellules lymphomateuses + ECM ± RESTO), sont moins sensibles aux chimiothérapies conventionnelles que les mêmes cellules cultivées en suspension (Figure 11 et tableau 1).
Cela confirme que le modèle 3D selon l'invention est plus pertinent pour faire du criblage de drogues anticancéreuses que des cellules en suspension.
Tableau 1 : IC50 des différentes drogues selon le modèle d'étude utilisé.