Procédé et dispositif de reconnaissance d'une combustion dans un filtre à particules
[0001 ] La présente invention revendique la priorité de la demande française 0853563 déposée le 30 mai 2008 dont le contenu (texte, dessins et revendications) est ici incorporé par référence.
[0002] L'invention a trait au domaine de la dépollution des moteurs à combustion, et plus particulièrement au contrôle des filtres à particules pouvant équiper la ligne d'échappement des moteurs, afin de piéger les particules issues de la combustion dans le moteur.
[0003] Un moteur à combustion interne produit lors de son fonctionnement des gaz d'échappement issus de la combustion du carburant, et contenant un certain nombre de polluants réglementés. Les polluants issus de la combustion d'un moteur peuvent notamment comprendre des particules solides carbonées. A défaut de pouvoir calibrer le moteur afin qu'il ne rejette qu'une quantité de polluants réglementés admissible, les gaz d'échappement doivent subir un traitement afin de réduire ces polluants à un niveau inférieur aux seuils normalisés.
[0004] Le moyen de traitement des gaz est généralement situé dans le circuit d'échappement du moteur. On parle alors de post-traitement des gaz. Ce moyen de traitement peut être constitué d'un ou plusieurs éléments, et peut notamment comporter un filtre à particules.
[0005] Un filtre à particules automobile permet d'éliminer par filtration les particules solides présentes dans les gaz d'échappement des moteurs, généralement Diesel. Une fois piégées au sein du filtre, les particules doivent être éliminées périodiquement par élévation de la température de 450 jusqu'à 7000C au sein du filtre afin d'entraîner leur combustion. Cette opération est couramment appelée « régénération » du filtre à particules. Classiquement, l'énergie nécessaire à la régénération est fournie par une élévation pilotée de la température des gaz d'échappement.
[0006] Classiquement le surplus d'énergie à l'échappement nécessaire, pendant les phases de régénération, à l'élévation de température par rapport au fonctionnement normal du moteur est fourni par l'utilisation de post-injections, c'est-à-dire d'injections de carburant tardives, après le point mort haut du cycle, ou par une dégradation du
rendement de la combustion, ou encore par une injection de carburant directement dans la ligne d'échappement.
[0007] Dans le cas de l'utilisation d'une post-injection celle-ci peut brûler totalement ou partiellement dans le moteur, générant une élévation de la température des gaz d'échappement ou, si elle est suffisamment tardive, entraîner une augmentation des quantités de CO et d'HC à l'échappement qui s'oxydent en arrivant sur le catalyseur d'oxydation afin de générer de la chaleur. C'est ce dernier phénomène qui est également mis en jeu si l'on effectue une introduction directe de carburant sous forme pulvérisé ou de vapeur dans la ligne d'échappement du moteur.
[0008] Cependant, les particules charbonnées piégées par le filtre sont des matières combustibles, et leur combustion peut s'entretenir d'elle-même au-delà d'une température d'environ 45O0C si le filtre met en jeu un additif d'aide à la régénération, ou 6000C sinon, et dès lors que du comburant est disponible en quantité suffisante.
[0009] De l'oxygène étant généralement présent dans les gaz d'échappement des moteurs, la combustion des particules de suies peut ainsi s'emballer en cas de charge importante du filtre à particules en suies, menant à un dégagement important d'énergie dans le filtre, pouvant provoquer son endommagement (par exemple sa fissuration) ou sa destruction.
[0010] Une charge en suie importante du filtre peut être notamment observée lorsque le véhicule automobile muni du filtre effectue majoritairement des roulages dits urbains, c'est- à-dire à faible vitesse et avec des arrêts fréquents. Dans ces conditions, il est extrêmement difficile de régénérer un filtre à particules, car les gaz d'échappement sont très loin de la température de régénération du filtre, ou n'atteignent une température suffisante pour déclencher une régénération que lors d'intervalles temporels trop courts pour finaliser cette régénération. Typiquement, rappelons que la température des gaz d'échappement d'un moteur automobile Diesel suralimenté par un turbocompresseur, et mesurée en sortie du turbine du turbocompresseur, est de l'ordre de 1500C et qu'il faut au minimum environ 45O0C pour entamer une régénération d'un filtre additivé.
[001 1 ] Par ailleurs, si, consécutivement à un chargement en suies extrême du filtre à particules, le moteur est soumis à un roulage prolongé sous forte charge, la température des gaz d'échappement peut déclencher spontanément la combustion des suies dans le filtre. Par ailleurs, dans certaines circonstances une combustion des suies débutée avant l'arrêt du moteur peut se poursuivre après son arrêt, voire s'initier peu après cet arrêt si le
circuit d'échappement est particulièrement chaud et le filtre n'est plus refroidi par le flux des gaz d'échappement.
[0012] Ces combustions de suies incontrôlées peuvent endommager le filtre, si elles se produisent à une température importante ou si elles entrainent une élévation trop rapide de la température dans le filtre. Un tel endommagement est préjudiciable à plus d'un titre. D'une part, l'efficacité du système de post-traitement est remise en cause, et d'autre part, selon les réglementations actuelles et à venir en matière de diagnostique embarqué (fonction « OBD »), il est nécessaire de garantir l'efficacité des systèmes de posttraitement pendant une durée d'utilisation (typiquement 160 000 km selon les normes EURO 5) ou de pouvoir alerter le conducteur d'un véhicule en cas de défaillance du système de post-traitement.
[0013] Le brevet FR2814498 de Renault SA présente un moyen de diagnostiquer la défaillance d'un filtre à particules ou de calculer sa charge par observation de l'énergie dégagée lors d'une régénération du filtre. S'il est donc connu de contrôler par diverses stratégies les régénérations d'un filtre à particules, il n'est pas connu dans l'art antérieur de procédé visant à contrôler l'occurrence de ce type de combustions spontanées des particules dans le filtre, ainsi que les défaillances du filtre qu'elles peuvent engendrer.
[0014] En outre, l'effet de ce type de combustion incontrôlée des particules sur la charge en suies du filtre n'est actuellement pas pris en compte dans les modèles de détermination de cette charge.
[0015] L'objet du présent brevet est de proposer un procédé de reconnaissance d'une combustion, et notamment d'une combustion incontrôlée, dans un filtre à particules équipant la ligne d'échappement d'un moteur à combustion. Cette reconnaissance et la caractérisation de la combustion détectée permet ainsi de diagnostiquer une défaillance du filtre ou de prendre en compte l'effet de cette combustion sur la charge en suies du filtre, et ce pendant toute la phase de fonctionnement du moteur. L'invention permet un contrôle du filtre pendant toutes ses phases d'utilisation, et non pas uniquement lors de ses régénérations commandées tel que connu dans l'art antérieur.
[0016] Pour cela, le procédé proposé comporte une étape de mesure ou d'estimation de paramètres représentatifs d'une combustion dans le filtre et une étape de traitement de ces paramètres afin de diagnostiquer l'occurrence d'une combustion et d'en déterminer l'intensité, procédé dans lequel ces étapes sont mises en œuvre pendant toute la phase de fonctionnement du moteur et notamment hors des phases de régénération commandée
du filtre, et, dans une variante, également pendant une durée prédéterminée successive à l'arrêt du moteur.
[0017] Préférentiellement, les paramètres représentatifs considérés sont respectivement la température à l'entrée du filtre à particule et la température à la sortie du filtre à particules.
[0018] L'estimation ou la mesure de ces paramètres et leur traitement ont donc pour originalité d'être effectués également en dehors des phases de régénération commandée du filtre. En outre, l'estimation ou la mesure et le traitement des paramètres considérés sont poursuivis après l'arrêt du moteur.
[0019] Par un tel procédé, on peut conclure à l'occurrence d'une combustion incontrôlée des particules dans le filtre à particules (6) si la température en sortie du filtre (6) excède la température en entrée du filtre d'un seuil prédéterminé pendant une durée prédéterminée, tandis que le contrôle moteur ne commande pas de régénération.
[0020] Dans une variante, on estime le gradient de température dans le filtre (6) grâce à l'évolution des températures à l'entrée et à la sortie du filtre, et conclut à l'occurrence d'une combustion des particules dans le filtre à particules (6) si le gradient de température estimé est supérieur à un maximum prédéterminé.
[0021 ] Lorsque l'occurrence d'une combustion dans le filtre est détectée, on peut également évaluer la quantité de suies brûlées lors de cette combustion grâce à l'évolution des températures en entrée et en sortie du filtre pendant cette combustion et grâce à la durée de cette combustion.
[0022] Le procédé proposé peut servir au diagnostic de défaillance d'un filtre à particules équipant la ligne d'échappement d'un moteur à combustion. On conclut en effet à une défaillance du filtre à particules si la température en aval du filtre excède la température en amont du filtre d'une valeur prédéterminée pendant une période prédéterminée.
[0023] On conclut également à une défaillance du filtre si le gradient de température observé dépasse une limite prédéterminée.
[0024] Dans le cadre d'un véhicule comportant un moteur à combustion muni d'une ligne d'échappement comportant un filtre à particules, et également muni d'un module « on board diagnostic » (OBD), on peut alors consigner dans le module une information de défaillance du filtre à particules si on détecte une défaillance du filtre à particules.
[0025] Si le véhicule comporte en outre un dispositif d'alerte lumineux d'anomalie du filtre à particule, par exemple dans son habitacle, on commande le dispositif lumineux si on détecte une défaillance du filtre à particules afin d'alerter l'utilisateur de la défaillance.
[0026] L'invention porte également sur un dispositif permettant la mise en œuvre du procédé décrit. Ce dispositif comporte un moteur à combustion muni d'une ligne d'échappement comportant un filtre à particules, des moyens de commande de régénération du filtre, des moyens d'estimations de paramètres représentatifs d'une combustion dans un filtre à particule, des moyens de traitement de ces paramètres permettant de diagnostiquer l'occurrence d'une combustion ainsi que d'en estimer l'intensité, et est caractérisé en ce que lesdits moyens sont activés périodiquement pendant l'ensemble du temps de fonctionnement du moteur, et non pas seulement lors des régénérations pilotées du filtre comme c'est le cas dans l'art antérieur.
[0027] Préférentiellement, le dispositif sera muni d'un moyen d'estimation ou de mesure de la température à l'entrée du filtre à particules, et d'une sonde de température à la sortie du filtre.
[0028] L'invention est décrite plus en détail ci-après et en référence à la figure unique représentant schématiquement un dispositif permettant la mise en œuvre du procédé et selon un mode de réalisation préférentiel.
[0029] La figure 1 représente schématiquement l'ensemble constitué par un moteur à combustion et sa boucle d'air principale, c'est-à-dire son circuit d'admission et d'échappement, ainsi que les moyens de post-traitement des gaz d'échappement, et les dispositifs nécessaires à la mise en œuvre de la stratégie de diagnostic du filtre à particules selon le mode de réalisation préférentiel de l'invention.
[0030] Un moteur 1 de type Diesel est suralimenté à l'aide d'un turbocompresseur 2. L'admission de l'air dans le moteur est réalisée via un conduit d'admission 3. L'échappement des gaz après combustion est réalisé par un conduit d'échappement 4.
[0031 ] Dans l'exemple ici représenté, le post-traitement des gaz d'échappement met en jeu un catalyseur d'oxydation 5 et un filtre à particules 6.
[0032] Un calculateur moteur 7 (ici représenté comme un ensemble, mais pouvant être constitué de plusieurs éléments ou divisé en de multiples cartes ou boîtier électroniques) pilote les diverses lois de commande du moteur, les stratégies d'injection de carburant, ainsi que le pilotage des moyens de post-traitement, et notamment le suivi du remplissage
du filtre à particules. Le calculateur 7 intègre également les moyens de commandes appropriés pour commander la régénération périodique du filtre à particules 6. Le calculateur moteur 7 comporte également une fonction OBD (On Board Diagnostic) 8 qui répertorie et enregistre les principales défaillances ou anomalies de fonctionnement du moteur et de ses périphériques, et peut par exemple déclencher une alerte en cas de dysfonctionnement, sous la forme d'un dispositif lumineux 9 d'alerte de l'opérateur du moteur ou du conducteur du véhicule ainsi équipé.
[0033] Dans le mode de réalisation préférentiel ici représenté, une sonde de température 10 est positionnée dans le conduit d'échappement 4 entre le catalyseur d'oxydation 5 et le filtre à particules 6, à l'entrée du filtre à particules 6. Une sonde de température 1 1 est positionnée dans le conduit d'échappement 4 en sortie du filtre à particules 6.
[0034] Notons que la sonde de température 10 à l'entrée du filtre peut-être aisément remplacée par un modèle numérique d'estimation de la température en amont du filtre à particules, stocké dans le calculateur moteur. Cette variante présente un intérêt économique certain, au prix d'une moindre précision, qui reste cependant compatible d'un usage automobile classique.
[0035] La sonde de température 10 en entrée du filtre 6 et la sonde de température 1 1 en sortie du filtre 6 communiquent avec le calculateur moteur 7, par exemple par l'intermédiaires de bus 12 et 13, calculateur qui intègre en outre le procédé proposé. Globalement, le procédé développé consiste à comparer la température en amont et la température en aval du filtre à particules 6, ainsi que l'évolution de ces températures, pendant l'utilisation du moteur 1 et pendant une durée prédéterminée, par exemple d'une minute, après son arrêt. Les températures ne sont donc pas uniquement comparées pendant les régénérations du filtre 6 déclenchées par le contrôle moteur.
[0036] Le diagnostic proposé, par le suivi de ces deux températures et de leur évolution, permet d'une part la reconnaissance des combustions spontanées dans le filtre à particules 6, et d'autre part le diagnostic de dégradation du filtre 6 du à un dégagement d'énergie trop intense ou trop rapide.
[0037] Typiquement, si la température mesurée par la sonde en sortie du filtre 1 1 excède la température de la sonde en entrée du filtre 10 d'un certain seuil pendant une certaine durée, tandis que le contrôle moteur 7 ne commande pas de régénération (par postinjection de carburant par exemple), la stratégie conclut à une combustion incontrôlée des suies dans le filtre 6. Ces seuils température et de durée permettent de discriminer un cas
d'une combustion dans le filtre 6 d'un cas de réduction de la charge du moteur 1 , qui entraine des gaz d'échappement moins chaud, ce qui, en fonction de l'inertie thermique du filtre peut entrainer transitoirement une température mesurée par la sonde 10 inférieure à la température mesurée par la sonde 1 1. On comprend donc aisément que le seuil de température et la durée en question dépendent du filtre employé, ainsi que du moteur et de ces points de fonctionnement autorisés par le contrôle moteur.
[0038] Par ailleurs, le suivi des températures à l'entrée et à la sortie du filtre 6 permet d'estimer le gradient de température dans le filtre. Un gradient de température important est un bon indicateur d'une combustion incontrôlée dans le filtre 6.
[0039] La détection d'une telle combustion incontrôlée, et l'observation des températures en amont et en aval du filtre à particule et leur évolution pendant cette combustion spontanée, peut en outre permettre de corriger le niveau de charge estimé dans le filtre à particules 6, en prenant en compte la quantité de particules oxydées lors de la régénération incontrôlée.
[0040] Par ailleurs, que l'on soit dans le cadre d'une régénération commandée ou incontrôlée du filtre à particules, la comparaison des températures en amont et en aval du filtre 6 permet de conclure à des cas de dégradation du filtre. Si la température mesurée par la sonde 1 1 excède la température de la sonde 10 d'une certaine valeur (potentiellement différente du seuil utilisé pour la détection d'une combustion incontrôlée) pendant une certaine période (potentiellement différente de la durée utilisée pour la détection d'une combustion spontanée), il est alors conclu qu'une dégradation du filtre a eu lieu.
[0041 ] De même, si le gradient de température estimé dans le filtre 6 est supérieur à un maximum prédéterminé, il est alors conclu qu'une dégradation du filtre a eu lieu.
[0042] Si la stratégie conclut qu'une dégradation du filtre s'est produite, le module OBD 8 du calculateur moteur 7 est alors averti. Conformément aux législations en vigueur et futures, l'information peut être consignée dans une mémoire du calculateur 7 ou du module OBD 8, et un dispositif lumineux de défaillance 9 avertit le conducteur de l'anomalie rencontrée.
[0043] Ainsi, dans le cadre d'une application automobile et conformément aux réglementations actuelles et à venir, qui imposent par exemple de surveiller l'efficacité de filtration du filtre sur 160 000 km dans le cadre de la norme européenne EURO 5, il devient
possible d'alerter l'utilisateur qu'une régénération critique du filtre à particules, pilotée ou incontrôlée et éventuellement spontanément déclenchée par les conditions de roulage du véhicule, a été détectée et que ses performances peuvent être dégradées.