DISPOSITIF POUR LA MESURE TEMPORELLE DU VOLUME D'UN ECOULEMENT LIQUIDE
La présente invention concerne un dispositif pour la mesure temporelle du volume d'un écoulement de liquide électriquement conducteur, destiné notamment à la quantification de l'incontinence urinaire féminine.
Cette incontinence peut avoir diverses origines mais rien ne permet actuellement de les déterminer avec précision. Les tests généralement utilisés consistent à faire porter une couche à la patiente pendant une certaine durée et, pendant cette durée, de lui faire subir différents tests physiques pour plusieurs valeurs de la pression abdominale, ces dernières étant mesurées à l'aide d'une poire vaginale. La couche portée par la patiente est pesée avant et après le test et l'on en déduit la quantité d'urine émise.
Cette méthode présente en premier lieu l'inconvénient d'être peu précise. En outre, elle ne fournit aucune information sur l'instant où l'urine a été émise et, par conséquent, sur la fonction physiologique en cause.
On a également proposé, dans le document US-A-3 759 246, un dispositif pour la mesure de l'incontinence comprenant une feuille en matériau absorbant, deux électrodes adjacentes à cette feuille, et des moyens pour mesurer la conductance entre lesdites deux électrodes. Une autre feuille, moins absorbante, est disposée sur l'envers du dispositif pour faciliter l'absorption du liquide et son étalement dans la feuille absorbante. Un tel agencement présente l'inconvénient de ne pouvoir absorber qu'un faible volume total de liquide si l'on souhaite qu'il présente une sensibilité suffisante. En effet, si ce volume total est important, la feuille devra être épaisse, et il faudra une relativement grande quantité de liquide pour la traverser. D'une part le dispositif ne fonctionnera qu'après que cette quantité aura été écoulée, et d'autre part une faible quantité de liquide supplémentaire ne fera pas sensiblement varier la section conductrice de la couche absorbante, et donc sa conductance.
Par ailleurs, la disposition des électrodes prévue dans ce document ne permet pas d'obtenir une conductance sensiblement proportionnelle à la quantité de liquide écoulée.
La présente invention vise à pallier ces inconvénients.
Plus généralement, l'invention vise à fournir un dispositif permettant une mesure temporelle du volume d'un écoulement liquide, notamment d'un écoulement de fuites urinaires. L'invention a en particulier pour but de fournir un tel dispositif ayant d'une part un large domaine de mesure tout en présentant une sensibilité satisfaisante, et d'autre part un fonctionnement sensiblement linéaire.
A cet effet, l'invention a pour objet un dispositif pour la mesure temporelle du volume d'un écoulement de liquide électriquement conducteur, destiné notamment à la quantification de l'incontinence urinaire féminine, comprenant une première feuille en matériau absorbant, deux électrodes adjacentes à la première feuille, et des moyens pour mesurer la conductance entre lesdites deux électrodes, caractérisé par le fait qu'il comprend une deuxième feuille en matériau absorbant présentant un pouvoir absorbant relativement élevé, que la première feuille absorbante présente un pouvoir absorbant relativement faible, et que lesdites électrodes sont bidimensionnelles et perméables, lesdites feuilles et lesdites électrodes étant disposées selon un empilement formé d'une première électrode, de la feuille absorbante présentant un pouvoir absorbant relativement faible, d'une deuxième électrode, et de la feuille absorbante présentant un pouvoir absorbant relativement élevé.
En général, la feuille absorbante présentant un pouvoir absorbant relativement faible sera relativement mince, et la feuille en matériau absorbant présentant un pouvoir absorbant relativement élevé sera relativement épaisse. Pour simplifier, on se référera dans la suite à ce cas, mais cette disposition peut ne pas être nécessaire, en utilisant par exemple des matériaux de pouvoirs absorbants différents pour les deux feuilles absorbantes.
Le dispositif selon l'invention est par conséquent constitué par un empilement d'une première électrode que l'on qualifiera ci-après d'électrode extérieure, d'une première feuille absorbante relativement mince que l'on qualifiera de feuille de mesure, d'une deuxième électrode que l'on appellera électrode intérieure, étant comprise entre les deux feuilles absorbantes, et d'une deuxième feuille absorbante que l'on qualifiera de feuille de drainage. Lorsqu'une quantité de liquide est versée à la surface de l'électrode extérieure perméable, elle la traverse et pénètre dans la feuille absorbante de
mesure. Si cette feuille possède une épaisseur suffisamment faible, ce qui pour l'avenir sera supposé, elle la traverse et atteint l'électrode interne. Le liquide traverse alors cette électrode interne et pénètre dans la feuille absorbante de drainage. II est fait en sorte que la feuille de mesure soit suffisamment mince pour que la quantité minimale de liquide que l'on souhaite mesurer traverse cette feuille. Une quantité quelconque de liquide versée, à travers l'électrode externe, à la surface extérieure de la feuille absorbante de mesure la traverse par conséquent pratiquement instantanément, traverse ensuite l'électrode interne et pénètre dans la feuille absorbante de drainage. Cette quantité de liquide provoque donc dans la feuille absorbante de mesure une "tache" d'un certain diamètre. Il en résulte, dans cette feuille, une surface transversale électriquement conductrice dont on peut mesurer la conductance. Cette conductance est directement dépendante de la surface humidifiée par le liquide et donc du volume de liquide répandu sur l'électrode externe.
Lorsqu'ultérieurement, une nouvelle quantité de liquide est déposée sur l'électrode externe, cette quantité de liquide traverse également la feuille absorbante de mesure et augmente le diamètre de la tache, et par conséquent la surface transversale électriquement conductrice. Il en résulte une augmentation de la conductance qui se traduit par une augmentation du courant qui traverse cette feuille pour une tension déterminée.
On observera que l'on entend ici par "pouvoir absorbant relativement élevé" et "pouvoir absorbant relativement faible", en ce qui concerne le matériau des feuilles absorbantes, un pouvoir absorbant relatif. Le pouvoir absorbant, et notamment l'épaisseur, de la feuille de mesure dépend de la sensibilité dont on souhaite doter le dispositif, la quantité minimale de liquide pouvant être mesurée étant celle qui permet une traversée de la feuille de mesure. Une quantité inférieure ne fournira évidemment aucun résultat.
Par ailleurs, la deuxième feuille absorbante, à savoir la feuille de drainage, devra posséder un pouvoir absorbant suffisamment élevé, notamment être suffisamment épaisse, pour permettre l'absorption du volume total de liquide qui aura été émis pendant toute la période de mesure.
Dans un mode de réalisation particulier, on prévoit de disposer un film étanche sur la face de la deuxième feuille opposée à la première feuille. Ainsi, le liquide faisant l'objet de la mesure, est retenu dans le dispositif qu'il ne peut traverser dans sa totalité.
De préférence, l'électrode externe est une grille métallique relativement rigide.
Il importe en effet que les contraintes exercées par cette électrode sur les feuilles absorbantes soient réparties le plus uniformément possible. La rigidité de l'électrode externe implique que tout effort exercé sur cette dernière se répartit sur toute la surface du dispositif.
Au contraire, on prévoit de préférence de réaliser l'électrode interne sous la forme d'une grille métallique relativement souple.
Cette souplesse permet d'assurer, entre les deux feuilles absorbantes, une cohésion garantissant la continuité de l'écoulement du liquide et assurant l'homogénéité des contacts électriques.
On a mentionné que l'électrode externe était relativement rigide alors que l'électrode interne était relativement souple. Il s'agit bien entendu d'une rigidité et d'une souplesse d'une électrode par rapport à l'autre. L'homme de métier déterminera ces paramètres en fonction du résultat recherché. La rigidité favorisera la stabilité du capteur. En revanche, sa souplesse favorisera son confort d'utilisation.
En outre, on réalise de préférence les électrodes de telle sorte que leur résistance électrique soit sensiblement nulle. Ainsi, le courant électrique d'excitation est réparti uniformément dans la section transversale de la zone humide de la première feuille absorbante.
Dans un mode de réalisation particulier, on prévoit en outre des moyens permettant au dispositif de conserver une épaisseur sensiblement constante. Ces moyens permettent d'éviter que des pressions exercées sur le dispositif entraînent un écrasement des feuilles absorbantes qui modifierait les conditions d'écoulement du liquide en leur sein.
Dans un mode de réalisation particulier de l'invention, les première et deuxième feuilles sont réalisées dans les mêmes matériaux et le rapport d'épaisseur des première et deuxième feuilles est compris entre 0, 1 et 0,5 et est de préférence de l'ordre de 0,3.
On comprend que ce rapport est le résultat d'un compromis. En effet, on a vu que l'épaisseur de la première feuille est déterminée par la quantité minimale de liquide à laquelle on souhaite que le dispositif soit sensible. Par ailleurs, l'épaisseur de la deuxième feuille est déterminée par le volume
maximal de liquide que l'on souhaite pouvoir mesurer au cours d'une période d'utilisation. On pourra donc être amené à faire varier le rapport des épaisseurs des première et deuxième feuilles en fonction de ces deux paramètres. Egalement dans un mode de réalisation particulier, le matériau absorbant est à base de fibres de cellulose.
On pourra notamment utiliser, pour réaliser les feuilles absorbantes, des empilements de feuilles de papier absorbant.
En ce qui concerne les moyens de mesure de la conductance entre les deux électrodes, on prévoit, dans un mode de réalisation particulier de l'invention, un générateur de signaux triangulaires relié à ces électrodes et des moyens de mesure du courant entre les électrodes.
Les moyens de mesure du courant sont de tout type connu, et peuvent notamment comprendre un convertisseur courant/tension suivi d'un redresseur, par exemple un redresseur bi-alternance ou un redresseur synchrone, et un filtre de lissage.
On a par ailleurs déterminé que la fréquence de la tension d'excitation était avantageusement comprise entre 0,5 et 10 kHz.
On décrira maintenant, à titre d'exemple non limitatif, des modes de réalisation particuliers de l'invention, en référence aux dessins schématiques annexés dans lesquels:
- la figure 1 est une vue en perspective éclatée du capteur du dispositif selon l'invention;
- la figure 2 est un diagramme de l'ensemble de ce dispositif ; - les figures 3a à 3c sont des courbes illustrant des résultats de mesures effectuées sur un dispositif selon un premier mode de réalisation de l'invention;
- les figures 4 et 5 sont des courbes similaires à celle de la figure 3a obtenues avec des dispositifs selon d'autres modes de réalisation; et - la figure 6 illustre l'influence de la dilution sur le niveau du signal fourni par le dispositif.
On voit à la figure 1 le capteur 1 d'un dispositif selon l'invention.
Ce capteur est composé pour l'essentiel d'un empilement de bas en haut d'une feuille étanche 2, notamment une plaquette relativement rigide,
d'une feuille 3 en matériau susceptible d'absorber les liquides, d'une électrode interne 4, d'une autre feuille 5 en matériau susceptible d'absorber les liquides et d'une électrode externe 6. Le matériau des feuilles absorbantes 3 et 5 est ici du papier absorbant mais il pourrait être un autre matériau à base de fibres de cellulose, ou tout autre matériau convenablement absorbant. De même, les électrodes 4 et 6 sont ici en laiton mais tout autre matériau suffisamment bon conducteur de l'électricité pour que la résistance électrique entre un point et un autre d'une même électrode soit sensiblement nulle conviendrait. Enfin, la plaquette étanche 2 est ici en matière plastique. Sa rigidité est fonction de celle de l'électrode externe, et est déterminée de manière à assurer la stabilité géométrique du capteur en utilisation.
Les électrodes 4 et 6 se présentent sous la forme de grilles. L'électrode externe 6 est relativement rigide de manière à peu se déformer lorsqu'un effort est appliqué localement en un de ses points. Au contraire, les mailles de l'électrode 4 sont réalisées en fil très fin et assez lâche, de manière que cette grille épouse le mieux possible la face supérieure de la feuille absorbante 3 et la face inférieure de la feuille absorbante 5 et ne présente aucun obstacle à l'écoulement du liquide. Les différents éléments de l'empilement qui vient d'être décrit sont amenés en contact et légèrement compressés pour assurer la continuité au niveau de l'interface entre les feuilles absorbantes 3 et 5. A cet effet, on prévoit ici de maintenir l'empilement à l'aide d'un cadre formé de cornières 7 en matière plastique, à section transversale en U. Une seule cornière est ici représentée mais on en prévoit au moins sur deux côtés opposés du rectangle formant l'empilement.
En variante, l'empilement peut être maintenu par une simple couture faisant le tour du capteur, quelle que soit la forme en plan de ce dernier.
Un fil conducteur 8 est soudé à l'électrode 4 et un fil conducteur 9 est soudé à l'électrode 6.
A l'aide d'un générateur de tension 10, on applique, entre les conducteurs 8 et 9 une tension alternative en dents de scie symétriques, de fréquence sensiblement égale à un kHz et d'amplitude crête à crête sensiblement égale à 50 millivolts. On relève le courant traversant le circuit, proportionnel à la conductance de la feuille absorbante 5 entre les électrodes
4 et 6.
A cet eltet, ce courant est transformé en tension dans un convertisseur courant/tension 1 1. La tension en résultant est redressée dans un redresseur 12 et filtrée dans un filtre 13 pour donner une tension continue U.
On peut en outre prévoir des moyens d'enregistrement pour enregistrer l'évolution de la tension U dans le temps ainsi que des moyens de numérisation, si l'on souhaite par exemple faire subir un traitement statistique aux évolutions de cette tension.
Dans son application à la quantification de l'incontinence urinaire féminine, le capteur 1 est disposé comme une serviette hygiénique, de telle sorte que l'électrode 6 soit au contact du méat urinaire, et la tension U est relevée pendant toute la durée d'un examen effectué selon un protocole prédéterminé. La tension U relevée au cours de cet examen est représentative du volume total d'urine émis depuis le début de l'examen (le dispositif se comporte comme un intégrateur du débit). Les figures 3 à 5 illustrent les résultats d'essais effectués ex vivo.
Dans le cas des figures 3a à 3c, le rapport d'épaisseur de la feuille de mesure à la feuille de drainage était de 3 épaisseurs de papier à 1 1 pour un total de 14 épaisseurs. L'injection d'urine sur l'électrode externe a été effectuée millilitre par millilitre à raison d'un millilitre toutes les 20 minutes. La tension a été mesurée en sortie, environ 10 secondes après l'injection.
On constate sur la figure 3a une bonne linéarité entre la quantité d'urine injectée et l'amplitude du signal de sortie. Le dispositif se comporte bien comme un intégrateur du débit.
La figure 3b illustre l'évolution dans le temps de la tension de sortie du dispositif après l'injection sur l'électrode externe d'un volume d'urine égal à 1 millilitre. De même, en ce qui concerne la figure 3c, pour un volume de 5 millilitres. On constate que la durée séparant l'injection de la tension de sortie n'est pas critique, cette dernière restant sensiblement constante pendant une durée d'au moins 60 minutes. Ce dernier résultat semble signifier que le diamètre de la tache humide sur la feuille de mesure ne diminue pas sensiblement dans le temps. Ceci provient vraisemblablement de la présence de la feuille de drainage sous- jacente à l'électrode interne, qui réalimente la feuille de mesure au fur et à mesure de son évaporation. Il s'agit là d'un autre avantage de la feuille de drainage.
Dans le mode de réalisation de la figure 4, le rapport αes épaisseurs de la feuille de mesure à la feuille de drainage était de 6 épaisseurs de papier à 20, pour un total de 26 épaisseurs. Le test a consisté à injecter sur l'électrode externe toutes les 20 minutes, une quantité d'urine telle que le volume cumulé soit respectivement toutes les 20 minutes de 0, 1 , 1 , 5, 10 et
20 millilitres. La mesure de tension en sortie a été effectuée 30 secondes après l'injection, mais il a été vu ci-dessus que ce délai n'était pas critique.
On voit à la figure 4 que la relation entre le signal de sortie et le volume total injecté est encore sensiblement linéaire. Le rapport d'épaisseur adopté dans le cas de la figure 5 a été de 6 épaisseurs de papier pour la feuille de mesure pour 40 épaisseurs de la feuille de drainage, soit 46 épaisseurs au total. Les injections d'urine sur l'électrode extérieure ont été effectuées toutes les 10 minutes, de manière que le volume injecté cumulé soit à chaque fois respectivement de 0, 1 , 1 , 5, 10, 15, 20, 30, 40 et 50 millilitres.
On constate ici que les résultats s'écartent sensiblement de la linéarité. Ceci peut s'expliquer de la manière suivante.
Dans le cas des figures 3 et 4, les rapports d'épaisseurs étaient d'environ 0,3 alors qu'ils sont d'environ 0, 15 dans le cas de la figure 5. Il semble que l'on s'éloigne ainsi de la valeur optimale.
On souhaitait en effet, dans le cas de la figure 5, pouvoir absorber une grande quantité de liquide et donc disposer d'une feuille de drainage épaisse. On souhaitait par ailleurs conserver une bonne sensibilité initiale et donc utiliser une feuille de mesure suffisamment mince pour être traversée par une faible quantité de liquide. On a donc été amené à diminuer le rapport d'épaisseur, ce qui a provoqué la non linéarité. On notera toutefois que cette non linéarité peut aisément être corrigée par l'électronique de traitement.
Enfin, on a représenté à la figure 6 le niveau du signal de sortie d'un dispositif selon l'invention, en fonction de la concentration de l'urine utilisée lors de l'expérimentation (ce niveau de sortie est ici ramené à 1 ). On a débuté avec une concentration de 100% (1 sur le graphique), puis procédé à une dilution progressive jusqu'à une concentration de 10% (0, 1 ).
On constate que le niveau de sortie ne varie pas sensiblement jusqu'à une concentration de l'ordre de 40%. Le dispositif selon l'invention est donc relativement peu sensible à la concentration du liquide conducteur dont l'écoulement est mesuré.