Le domaine de la présente invention est celui de l'usinage des matériaux composites, et plus particulièrement celui de l'usinage des matériaux à matrice organique (CMO), à matrice céramique (CMC) ou à matrice métallique (CMM).
La tenue mécanique de pièces ayant une fonction structurale, telle par exemple que des aubes de compresseur d'une turbomachine, est généralement testée à l'aide d'éprouvettes réalisées dans le même matériau, qui sont soumises à des essais cycliques en traction pour évaluer leur résistance à la rupture en fatigue. Dans le cas de pièces métalliques les essais réalisés sur les éprouvettes donnent des résultats relativement répétitifs, ce qui permet de caractériser de façon précise la qualité du matériau ; il convient de noter qu'avec les matériaux métalliques la qualité de l'usinage qui a été effectué pour réaliser la pièce, ou son éprouvette, peut interférer de façon notable et à ce titre, l'influence de l'usinage sur la fatigue (ou de manière générale sur les propriétés fonctionnelles) a fait l'objet d'études longues et coûteuses par le passé. Dans le cas des matériaux composites, l'effet de l'usinage sur la tenue mécanique des composites est mal connu. Du point de vue de la production, des exigences conservatives sont souvent demandées et qui pénalisent la productivité, sans que ces exigences ne soient justifiées expérimentalement par une caractérisation exhaustive de l'influence de l'usinage sur la tenue mécanique. Un point dur rencontré jusqu'à présent est que cette caractérisation expérimentale est rendue délicate du fait de l'anisotropie et de la variabilité du matériau et du procédé ; il est donc difficile de déterminer la part due au procédé (outil choisi, paramètres de l'usinage, usure de l'outil) et celle due au matériau dans la dispersion constatée sur les résultats d'essais.
Pour remédier à cela, les éprouvettes utilisées pour la caractérisation de ces matériaux sont toutes usinées de la même façon, avec la réalisation d'une surface à très faible rugosité, c'est-à-dire quasiment polie, ce qui élimine les incertitudes sur la tenue mécanique qui proviennent des variations dues au procédé de découpe de l'éprouvette.
L'inconvénient est qu'avec ce procédé d'évaluation on ne reproduit pas la réalité de la tenue mécanique des pièces mises en production puisque celles-ci ne font pas l'objet d'une finition aussi parfaite. La présente invention a pour but de remédier à ces inconvénients en proposant une méthode d'évaluation de l'influence du type d'usinage mis en oeuvre pour la réalisation d'une pièce en matériau composite, sur la tenue mécanique de celle-ci. 10 A cet effet, l'invention a pour objet un procédé de caractérisation de l'influence de l'usinage utilisé pour la réalisation d'une pièce en matériau composite sur la tenue mécanique de celle-ci, ledit procédé comprenant la réalisation dans ledit matériau composite d'une 15 éprouvette de traction, la mise en traction de ladite éprouvette jusqu'à sa rupture en fatigue, l'identification du point d'origine de la rupture sur les éprouvettes et la mesure du nombre de cycles appliqués jusqu'à obtention de la rupture, caractérisé en ce qu'il comporte une étape de réalisation de plusieurs éprouvettes cylindriques à sections polygonales, deux au moins 20 des faces associées à chaque segment dudit polygone étant réalisées selon deux procédés d'usinage qui différent l'un de l'autre par au moins un paramètre, une étape de sollicitation en fatigue desdites éprouvettes jusqu'à leur rupture et une étape d'analyse statistique du nombre de faces à partir de laquelle s'est amorcée la rupture en fonction du paramètre 25 d'usinage mis en oeuvre pour la découpe desdites faces. Selon que les faces à partir de laquelle s'est initiée la rupture diffèrent d'un modèle d'éprouvette à l'autre, l'analyse permet de faire ressortir si des différences sont dues à l'usinage (cas des départs des ruptures situés majoritairement sur une face particulière) ou si ces 30 différences sont secondaires par rapport aux tolérances de fabrication (cas des départs répartis uniformément sur toutes les faces). Avantageusement le procédé comprend en outre une étape d'analyse statistique du nombre de cycles nécessaires pour atteindre la rupture en fonction du procédé choisi pour l'usinage de la face à partir de 35 laquelle s'est amorcée la rupture.5 3 On peut ainsi caractériser l'influence du choix du procédé sur la tenue en fatigue et si le paramètre choisi est un paramètre essentiel ou pas. De façon préférentielle le procédé d'usinage d'une des faces 5 inclut un polissage en fin d'usinage, de façon à fournir un procédé d'usinage de référence. Dans un mode particulier de réalisation le paramètre retenu est l'état d'usure de l'outil utilisé pour la découpe desdites faces. Dans un autre mode particulier de réalisation le paramètre 10 retenu est le choix d'un outil différent pour la découpe de chacune desdites faces. L'invention porte également sur une éprouvette de traction de forme cylindrique à section polygonale caractérisée en ce que deux au moins des faces associées à chaque segment dudit polygone sont 15 réalisées selon deux procédés d'usinage qui différent l'un de l'autre par au moins un paramètre. Avantageusement moins une des faces de l'éprouvette est polie en fin d'usinage. L' invention sera mieux comprise, et d' autres buts, détails, 20 caractéristiques et avantages de celle-ci apparaîtront plus clairement au cours de la description explicative détaillée qui va suivre, d'un mode de réalisation de l'invention donné à titre d'exemple purement illustratif et non limitatif, en référence au dessin schématique annexé. La figure 1 est une vue en coupe d'une éprouvette pour la 25 caractérisation de la tenue mécanique d'une pièce en matériau composite, selon un mode de réalisation de l'invention ; En se référant à la figure 1, on voit une éprouvette 1 destinée à être montée sur une machine de traction afin de tester sa résistance en fatigue à la traction et de déterminer le nombre de cycles à partir duquel 30 se produit une rupture. L'éprouvette comporte à ses deux extrémités longitudinales une partie renflée de section carrée dont le côté a pour valeur l'épaisseur dite totale de l'éprouvette et référencée et. La partie centrale de l'éprouvette est elle aussi carrée et est amincie pour faciliter la rupture ; elle présente un côté de largeur dite utile et référencée eu. 35 De façon non visible sur la figure, l'éprouvette 1 est usinée de façon différente sur chacune de ses faces. Une première face est polie 4 pour servir de face témoin, en éliminant ainsi le plus possible les incertitudes sur la rupture en fatigue qui proviendraient d'un usinage particulier. Une seconde face est usinée selon la gamme de fabrication des 5 pièces dont on veut tester la résistance, avec des paramètres d'usinage aux valeurs nominales, dits paramètres de référence. Les troisième et quatrième faces sont, quant à elles, usinées selon des paramètres de coupe qui diffèrent de ceux de la gamme de fabrication. A titre d'exemple les paramètres d'usinage de ces deux faces 10 correspondent, en plus et en moins, à une demi-amplitude ou à une amplitude entière, de la tolérance autorisée en fabrication pour ces paramètres. On obtient ainsi un échantillon qui reflète assez bien les dispersions des paramètres avec lesquels seront réalisées les pièces produites en série. 15 Dans une variante de réalisation de l'éprouvette la première face est une face polie et la seconde face est usinée aux paramètres de référence avec un outil quasiment neuf. Les troisième et quatrième faces sont usinées avec un outil usé respectivement à sa demi-durée de vie et en fin de vie. Une telle éprouvette est destinée à tester l'impact de l'usure 20 de l'outil sur la résistance de la pièce en matériau composite. Dans une seconde variante, la première face est toujours polie après son usinage, pour servir de face témoin. Les deuxième, troisième et quatrième faces sont en revanche usinées avec des outils différents, dans le but d'évaluer l'impact d'une modification de la gamme de fabrication 25 des pièces sur leur tenue mécanique.
On va maintenant décrire le déroulement d'une méthode de caractérisation des divers paramètres d'usinage pouvant influer sur la tenue mécanique des pièces en matériaux composites. 30 Après avoir choisi le type d'outil qui sera utilisé et défini des paramètres nominaux pour l'usinage en production de série de pièces en matériau composites, accompagnés de leurs intervalles de tolérance, la méthode porte sur la réalisation d'un nombre d'éprouvettes suffisants pour constituer un groupe statistique exploitable quant aux résultats des 35 essais à venir. Ce nombre varie en fonction de la susceptibilité des résultats à la variante considérée. De façon pratique le nombre d'éprouvettes telle que décrites ci-dessus, à réaliser en matériau composite pour des essais de fatigue en traction, se situe entre 15 et 60. Des ébauches sont d'abord réalisées sous la forme de barreaux de section carrée de largeur et. 5 Ces ébauches sont ensuite usinées pour faire apparaître la section utile eu sur sa partie centrale avec, de façon classique, pour chaque face, un rayon de raccordement r entre la partie centrale et les extrémités. La découpe de cette partie centrale est effectuée différemment pour ses quatre faces, une des faces étant polie pour servir de face témoin et les trois autres étant réalisées selon l'une des variantes exposées plus haut, en fonction du paramètre d'usinage dont on cherche à déterminer l'influence : les tolérances de réglage pour la fabrication dans la première variante, l'usure de l'outil dans la seconde et le type d'outil dans la troisième. Il convient de noter que ces variantes ne sont pas appliquées de façon simultanée sur les trois faces concernées, mais qu'elles peuvent faire l'objet d'une application l'une après l'autre, la méthode d'évaluation étant conduite à chaque fois sur un nombre suffisant d'éprouvettes. Des essais de fatigue en traction sont alors conduits sur la totalité de l'échantillon d'éprouvettes réalisées selon la variante considérée, et les éprouvettes sont analysées après rupture, tant au niveau du nombre de cycles qui ont été nécessaires pour atteindre la rupture que du lieu d'initiation de cette rupture. Une analyse statistique est ensuite conduite sur les résultats, qui consiste à comparer le nombre de faces dans lesquelles se trouve le site à partir duquel s'est amorcée la rupture, en fonction du paramètre d'usinage mis en oeuvre pour la coupe desdites faces. Selon que les sites de départ de la rupture ou les nombres de cycles diffèrent d'un modèle d'éprouvette à l'autre, l'analyse permet de faire ressortir si des différences sont dues à l'usinage (cas des départs des ruptures situés majoritairement sur une face particulière) ou si ces différences sont secondaires par rapport aux tolérances de fabrication (cas des départs répartis uniformément sur toutes les faces). L'analyse peut être complétée par une comparaison du nombre de cycles nécessaires pour atteindre la rupture en fonction du procédé choisi pour l'usinage de la face à partir de laquelle s'est amorcée la rupture.
Bien que l'invention ait été décrite en relation avec plusieurs modes de réalisation particuliers, il est bien évident qu'elle comprend tous les équivalents techniques des moyens décrits ainsi que leurs combinaisons si celles-ci entrent dans le cadre de l'invention.