CELLULE ELECTRO- OPTIQUE MASSIVE AYANT UNE STRUCTURE FINE ET A BASE DE MATERIAUX A COEFFICIENTS ELECTRO - OPTIQUES GEANTS, SON PROCEDE DE FABRICATION
L'invention concerne le domaine de Γ électro-optique, notamment pour des applications 5 de modulation de lumière.
On connaît des cellules électro-optiques en structure dite « micro-massive ». Comme illustré sur la figure 1, une telle cellule comporte un substrat (1) de verre, de silicium ou tout autre type de substrat dont les propriétés de rigidité et de dilatation thermique sont 10 adaptées au fonctionnement de la cellule, qui supporte une couche de matériau massif ferroélectrique aminci (4). Une électrode (2) est prévue entre le substrat et la couche ferroélectrique, et une autre (5), plus étroite et en regard de la première, est prévue au dessus de la couche ferroélectrique. En fonction des applications, les épaisseurs de chacun des éléments peuvent varier.
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Une telle cellule est décrite notamment dans la thèse de Doctorat intitulée « MICRO MODULATEURS DE LUMIÈRE À BASE DE CRISTAUX ÉLECTRO-OPTIQUES À COEFFICIENTS GÉANTS » de Marc BOUVROT, soutenue le 08 février 2010 à l'Université de Franche-Comté, Besançon, France.
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Les modulateurs électro-optiques commerciaux utilisent le Niobate de Lithium. Il possède une température de Curie d'environ 1 134°C, ce qui permet la création de guides d'ondes par diffusion en surface, nécessitant une montée en température de l'ordre de 1000°C. En revanche, ses performances électro-optiques restent modestes.
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Il existe des matériaux électro-optiques dits à coefficients géants. Ce sont par exemple les matériaux dits SBN ou KTN, que l'on définira en détail plus loin. En revanche, leur température de Curie est basse, et proche de l'ambiante. La fabrication de la cellule peut néanmoins se faire en fixant le cristal (monocristal de type ferroélectrique) de matériau 30 électro-optique sur le substrat par une technique de soudure moléculaire à froid. Mais la Demanderesse a maintenant constaté que l'on ne tire pas complètement parti des avantages attendus des matériaux électro-optiques à coefficients géants.
La présente invention vient améliorer la situation.
Une cellule électro-optique, comportant, sur un substrat, une couche de matériau massif ferroélectrique, avec une électrode formant plan-masse, prévue entre le substrat et la couche ferroélectrique, et une autre électrode, filiforme montée en regard de la première au dessus de la couche ferroélectrique, comporte des sillons ménagés dans la couche ferroélectrique, de part et d'autre de l'électrode supérieure. D'autres avantages et caractéristiques de l'invention apparaîtront à la lecture de la description détaillée ci-après et sur les dessins annexés sur lesquels :
la figure 1 , déjà citée, est une vue en coupe schématique d'une cellule électrooptique connue,
la figure 2 est une vue en perspective de la cellule électro-optique de la figure 1 , couplée à deux fibres optiques, en montage expérimental,
la figure 3 est le même type de vue que la Figure 2, mais sans montrer le support, et en faisant en outre apparaître les orientations désirées du cristal, ainsi que les orientations des champs optiques et électriques traversant la cellule,
les figures 4a à 4d sont des vues en coupe schématique, illustrant la fabrication d'une cellule électro-optique proposée ici,
la figure 5 est une vue semblable à la figure 1, mais montrant une cellule multivoies, et
les figures 6a et 6b sont des représentations graphiques de l'intensité détectée normalisée en fonction de la tension appliquée respectivement en mode linéaire et en mode quadratique du KTN.
Les dessins et la description ci-après, avec ses annexes, contiennent, pour l'essentiel, des éléments de caractère certain. Les dessins représentent, pour partie au moins, des aspects difficiles à décrire autrement que par le dessin. Ils font partie intégrante de la description, et pourront donc non seulement servir à mieux faire comprendre la présente invention, mais aussi contribuer à sa définition, le cas échéant.
Il en est de même pour les tableaux annexés à la présente description.
On emploiera ici le terme « longueur » pour la direction sensiblement parallèle à la direction de propagation de la lumière (vecteur X sur la figure 3). On emploiera ici les termes « largeur » pour la direction sensiblement perpendiculaire à la direction de propagation de la lumière et dans le plan de la cellule (vecteur Y sur la figure 3). Et le mot « étroit(es) » signifie de faible largeur. On emploiera ici les termes « dessus », « dessous », « supérieur » ou « inférieur » en référence à la direction de l'épaisseur de la cellule (vecteur Z sur la figure 3).
Telle qu'illustrée sur la figure 1, une cellule électro-optique en structure micro-massive comporte un substrat 1 de verre ou de silicium, qui supporte une couche de matériau massif ferroélectrique 4 aminci. Une électrode 2 est prévue entre le substrat et la couche ferroélectrique, et une autre électrode 5, de largeur plus étroite que la première et en regard de celle-ci, est prévue au dessus de la couche de matériau massif. La couche de matériau massif est ici amincie.
On retrouve ces éléments sur la figure 2, qui fait apparaître en outre une fibre optique d'entrée, OF1, et une fibre optique de sortie OF2, dont les cœurs sont couplés optiquement à la couche ferroélectrique 4 qui est comprise entre les électrodes 2 et 5. Cela définit un trajet optique LP10 dans la fibre d'entrée OF1 , puis LP1 1 dans la couche ferroélectrique 4, et LP12 dans la fibre de sortie OF2.
Les applications sont le traitement du signal, les télécommunications par fibres optiques sur courtes et longues distances, les capteurs optiques mais également les lasers, les commutateurs de polarisation ou encore les applications de sélection et d'isolation d'une impulsion optique parmi un train d'impulsion (« pulse-picking » en anglais) d'impulsions courtes, notamment. Le fonctionnement de la cellule repose sur le principe d'interférométrie biréfringente à deux ondes à travers une micro structure capacitive formée par les deux électrodes en vis-à-vis. L'onde électromagnétique optique incidente polarisée rectilignement à
l'entrée de la cellule se sépare en deux ondes indépendantes se propageant chacune sur les axes neutres du cristal (axes Y et Z de la figure 3). Les propriétés d'indices différents présents sur chacun de ces axes (n0 et ne) induisent des vitesses de propagation différentes des deux ondes. Ces dernières se recombinent en sortie de cellule pour former une seule onde électromagnétique optique dont l'état de polarisation est différent de celui à l'entrée de la cellule. La commande électrique (E) de la cellule permet de contrôler la différence d'indice (An=n0-ne) entre les deux axes neutres du matériau, et par conséquent de modifier l'état de polarisation de la lumière traversant la zone active localisée sous l'électrode supérieure 5.
La couche ferro électrique 4 est ici un cristal choisi, notamment selon les caractéristiques désirées pour la cellule.
On sait que les matériaux ferroélectriques forment un sous-groupe des matériaux pyroélectriques qui présentent, dans certaines gammes de températures, une polarisation électrique spontanée pouvant être annulée ou réorientée par application d'un champ électrique. Ils sont donc à la fois piézoélectriques et pyroélectriques. Ces matériaux ferroélectriques ont une polarisation globale, et donc une permittivité électrique relative, qui dépend à la fois de la température, des contraintes mécaniques et du champ électrique. De la coexistence de tous ces phénomènes combinés, il découle que l'étude des propriétés physiques de ces matériaux est difficile et progresse peu, malgré l'intérêt important que leurs applications potentielles suscitent depuis de nombreuses années. La thèse précitée est l'un des éléments de ces études. Considérant la structure cristallographique d'un matériau ferroélectrique donné, le chapitre 2 de la thèse montre comment définir un tenseur électro-optique qui représente mathématiquement les propriétés du matériau ferroélectrique, en fonction de l'anisotropie de son indice optique. La thèse montre aussi qu'il existe une orientation privilégiée pour le champ électrique appliqué permettant d'exciter le coefficient électro- optique le plus élevé et d'obtenir l'effet électro-optique le plus important, associée à un coefficient électro-optique noté conventionnellement r33, dont la valeur est plus grande que celle des autres coefficients. Les valeurs de ces tenseurs sont connus et propres à
chaque matériau. A titre d'exemple, les valeurs des tenseurs électro-optiques linéaires (effet Pockels) propres au Niobate de Lithium et au SBN sont données en annexe III. En régime linéaire, le Niobate de Lithium a une structure trigonale symétrie 3m tandis que le SBN a une structure tétragonale 4mm.
Concernant les matériaux ferroélectriques à coefficients géants, la valeur du coefficient dominant varie en fonction de la composition du matériau. Pour le SBN typiquement entre 400 et 1400 pm/V. Jusqu'à présent, on a principalement utilisé le Niobate de Lithium, car sa température de Curie d'environ 1134°C est suffisamment élevée pour la création de guides d'ondes par diffusion en surface, nécessitant une montée en température de l'ordre de 1000°C. En revanche, son coefficient r33 reste modeste. II existe des matériaux dont le coefficient r33 est nettement plus favorable que celui du Niobate de Lithium. On les appelle des matériaux électro-optiques à coefficients géants. Ce sont par exemple les matériaux dits SBN (Strontium Baryum Niobium), KTN (Potassium Tantale Niobium). En revanche, leur température de Curie est basse, et proche de l'ambiante, ce qui pose problème. Comme l'expose le chapitre 3 de la thèse, l'un de ces problèmes peut être résolu en fixant le cristal massif de matériau électrooptique sur un substrat adapté par une technique de soudure moléculaire à froid. Cette fixation est à exécuter selon l'orientation voulue pour faire agir le coefficient dominant. Le coefficient dominant, Γ33, doit être orienté selon l'épaisseur de la cellule (vecteur Z sur la figure 3).
La figure 3 est une vue en perspective semblable à la figure 2, le substrat n'étant pas représenté. Elle illustre un positionnement du cristal tel que le coefficient r33 intervient dans la direction verticale Z faisant varier l'indice de polarisation ne (indice dit extraordinaire). Dans les deux autres directions X et Y, il s'agit du coefficient r13, agissant sur l'indice n0 (indice dit ordinaire).
Lorsque le matériau ne possède que deux indices différents, no et ne, il est classé dans la famille des milieux de propagation uniaxes. Lorsque ces trois indices sont tous
différents entre eux, le milieu est appelé biaxe. Dans tous les cas, l'indice de l'axe de propagation optique (vecteur X dans la figure 3) n'a aucun effet dans le comportement électro-optique global de la cellule. On procédera maintenant à un examen plus détaillé de l'art antérieur.
L'état de l'art comprend deux grands types de modulateurs par effet électrooptique fonctionnant sur Niobate de Lithium :
- les cellules de Pockels utilisées dans les lasers en général, ou pour les besoins de modulation dans l'espace libre, et
- les modulateurs intégrés exploités pour les besoins des télécommunications par fibres optiques à très haut débit.
L'effet électro-optique permet de modifier, sous l'effet d'un champ électrique E, l'indice de réfraction d'un matériau électro-actif, et par conséquent de contrôler l'état de polarisation de la lumière traversant la cellule.
Les cellules de Pockels exploitent une structure massive capacitive entre deux électrodes pour des applications en injection optique libre (sans guide d'onde). Cependant, ce type de composant impose des écarts importants entre les électrodes dus au matériau massif utilisé. Ceci induit des tensions de commande très élevées atteignant quelques milliers de volts, et par conséquent de faibles bandes passantes de modulation ou même le fonctionnement à une seule fréquence de modulation. Ceci induit également l'utilisation d'un circuit d'excitation ou pilote électrique (« driver » en anglais) particulier, adapté spécifiquement à chaque cellule dont le coût est en général du même ordre de grandeur que la cellule elle-même.
Les modulateurs intégrés sur Niobate de Lithium reposent sur une structure complexe, par exemple celle décrite dans FR0014804. Leur fonctionnement exploite le principe d'interféromètre de Mach-Zehnder. La modulation s'opère sur le déséquilibre d'un des bras du Mach-Zehnder par rapport à l'autre, modifiant les interactions lumineuses lors de la recombinaison des deux faisceaux en sortie d'interféromètre. Cette technologie
s'appuie sur une structure guidante diffusée en surface, permettant le guidage de la lumière dans les bras du Mach-Zehnder. En revanche, la nécessité de séparer le faisceau optique dans les bras ainsi que la valeur modérée du coefficient électro-optique r33 en jeu, nécessitent des grandes longueurs de puce, respectivement pour limiter les pertes par courbure du guide d'une part, et pour obtenir suffisamment d'effet électro-optique d'autre part sur toute la longueur d'interaction. Les longueurs d'interaction en jeu nécessitent un dessin (« design ») particulier d'électrodes à onde progressive, de façon à adapter les vitesses de propagation des champs électromagnétiques optiques et électriques. Cette adaptation permet en effet à l'onde optique de se trouver en présence de la même modulation d'indice tout au long de sa propagation dans les bras.
Toutefois, cette technologie reste incompatible avec les matériaux à coefficients géants pour des raisons de propriétés intrinsèques des matériaux. La principale limitation est la température de Curie des matériaux. Cette température correspond à une limite entre deux états du matériau. En dessous de cette température, le matériau possède une polarisation spontanée : c'est la phase ferroélectrique. Au dessus de cette température, le matériau change d'état en perdant cette polarisation : c'est l'état paraélectrique. Il est donc important de toujours rester en dessous de cette température, notamment lors des étapes technologiques de fabrication, pour conserver les propriétés initiales voulues. Le Niobate de Lithium possède une température de Curie d'environ 1134°C, ce qui permet la création de guide d'onde diffusé en surface nécessitant une montée en température jusqu'à environ 1000°C. Les matériaux à coefficients géants possèdent des températures de Curie variables en fonction de leur constitution, mais typiquement, celles-ci ne dépassent pas la centaine de degré Celsius, qui rend impossible la création de guides diffusés.
Niobate de Lithium (LiNbO )
Le Niobate de Lithium est actuellement l'un des matériaux les plus utilisés en optique intégrée grâce à la combinaison de ses nombreuses propriétés et caractéristiques. Ces caractéristiques permettent d'adapter la réponse du matériau. Le Niobate de Lithium permet la réalisation de divers composants photoniques. Il est en outre possible de faire
croître des cristaux aux excellentes qualités optiques. La méthode la plus répandue pour faire croître ce cristal, inexistant à l'état naturel, est la méthode Czochralski, qui permet la fabrication de cristaux très homogènes de plusieurs kilogrammes, et ce à relativement faible coût. De tels monocristaux possèdent des propriétés électro-optiques, piézoélectriques, photoélastiques et de non-linéarités optiques intéressantes.
Ce matériau est un composé chimique de Niobium, de Lithium et d'Oxygène (LiNb03) de structure cristalline trigonale, transparent pour des longueurs d'ondes entre 350 et 5000 nanomètres et exhibant un effet électro-optique Pockels. Sa biréfringence dépend fortement de la température : un ajustement précis de celle-ci permet de contrôler un éventuel accord de phase. Dans sa forme cristalline, il se présente sous la forme d'un matériau solide, chimiquement très stable à température ambiante faisant ainsi de lui un matériau particulièrement attractif pour des applications en optique spatiale ou intégrée. Sa température de Curie élevée lui permet de préserver ses propriétés ferroélectriques lors des processus technologiques de mise en forme. Ses tenseurs et coefficients électrooptiques, donnés en Annexe III, au point III.1 , restent faibles mais néanmoins suffisants grâce à la technologie de guides d'onde diffusés permettant d'obtenir de grandes longueurs d'interaction et de faibles distances entre électrodes (donc un fort champ électrique local).
Depuis plusieurs décennies, il existe des systèmes commerciaux électro-optiques tels que les modulateurs rapides utilisés dans les télécommunications optiques. Les développements récents permettent d'atteindre des fréquences de modulation autorisant des débits supérieurs à 40 Gb/s. Par ailleurs, on trouve aujourd'hui de nombreux composants en optique intégrée sur LiNb03, tels que des commutateurs, des coupleurs, des interféromètres Mach-Zehnder exploitant les propriétés électro-optiques de ce matériau.
La Demanderesse a comparé le Niobate de Lithium à d'autres matériaux ferroélectriques, dont les cristaux KTN et SBN. L'essentiel de cette comparaison figure dans le tableau I annexé.
Niobate de Tantale et Potassium (KTN)
Ce composé, très utilisé pour ces propriétés non-linéaires, résulte d'un assemblage de composés solides de KNb03 et KTa03 dont les proportions peuvent être choisies. La grande différence de température de Curie Te entre ces deux composés (7c = 428°C pour KNb03 contre Te = -260°C pour KTa03) permet, en ajustant les proportions de Tantale et de Niobium, d'obtenir une température de Curie de l'ensemble KTaNb03 qui se situe entre -38 et 428°C. Le matériau ferroélectrique possède donc une température de Curie inférieure à 1000°C. En phase paraélectrique, le matériau KTN possède une maille cristalline cubique : le matériau est isotrope. L'application d'un champ électrique au matériau va avoir pour effet de modifier la maille cubique en une maille tétragonale, et ainsi faire apparaître la nature biréfringente du cristal, via l'effet électro-optique. Sous la forme de cristal massif, le KTN est un cristal transparent sur la fenêtre 400-4000nm, possédant la particularité d'exciter un effet électro-optique quadratique Kerr.
Ainsi, le KTN est généralement connu pour un usage en mode quadratique par opposition au mode linéaire. Le mode linéaire est observable aux températures inférieures à la température de Curie, proche de 0°C. L'intensité optique détectée en fonction de la tension appliquée est représentée en figure 6a. Le comportement en régime linéaire présente un motif, de type sinusoïdal, répété par pas constant de tension appliquée. Les pentes d'efficacité sont identiques pour les différentes plages de tension appliquée. Mais la Demanderesse a observé que l'on peut le faire travailler en mode linéaire local' tout en étant en mode quadratique, c'est-à-dire au-dessus de la température de Curie. En mode quadratique, l'intensité optique détectée en fonction de la tension appliquée est visible en figure 6b. Le comportement en régime quadratique présente des motifs dont la période diminue lorsque la tension appliquée augmente. Les pentes d'efficacité augmentent donc significativement lors de l'augmentation de la tension appliquée, cf. partie droite de la figure 6b. En régime quadratique, la pente ρβ pour une tension appliquée proche de 40 Volts est plus importante que la pente β pour une tension appliquée proche de 10 Volts qui est elle-même plus importante qu'une pente a pour une tension appliquée proche de 10 Volts dans un régime linéaire. La cellule à base de KTN peut donc être excitée de sorte que le matériau ferroélectrique soit utilisé
en régime linéaire. L'intérêt de ce matériau porte sur les faibles tensions nécessaires pour augmenter la pente d'efficacité qui reste tout de même linéaire.
Ainsi, il est possible d'utiliser le KTN en régime linéaire, dont le coefficient est de l'ordre de plusieurs centaines de picomètres par volt, très nettement supérieur à celui du Niobate de Lithium, en se plaçant dans sa phase ferroélectrique sous la température de Curie.
Niobate de Strontium et Baryum (SEN)
Le SrBaNb206 est un cristal ferroélectrique très utilisé de nos jours pour ses propriétés piézoélectriques, pyroélectriques, électro-optiques et en règle générale d'optiques non linéaires du second ordre, pour des besoins de photoréfractivité par exemple dans la création de guides par effet photoréfractif enterrés ë rnais temporaires car dégradables à la lumière visible.
Ce cristal correspond à un assemblage de composés solides de BaNb206 et de SrNb206, pour aboutir finalement au cristal complet SrxBa1-xNb206. Ce matériau possède une structure cristalline tétragonale 4mm, dont la concentration partielle en Baryum (Ba) par rapport au Strontium (Sr) peut-être ajustée de 20 à 80 %. Le tenseur de cette structure ainsi que les valeurs de ses coefficients électro-optiques sont donnés en Annexe III, au point III.2. A titre d'exemple, le SBN:61 aura la composition Sr0 6iBa0 39Nb2O6 et le SBN:34 la composition Sr0.34Ba0.66Nb2O6. Sa température de Curie Te est très faible par rapport au LiNb03 : elle varie de l'ambiante (environ 22°C) pour une composition riche en Strontium, à 80°C pour les compositions riches en Baryum.
Le Niobate de Strontium et Baryum possède un régime de fonctionnement paraélectrique lorsqu'il est maintenu à une température supérieure à celle de Curie, et un régime ferroélectrique lorsque sa température est inférieure Te.
Les propriétés électro-optiques de ce cristal sont très sensibles à sa composition. Les
valeurs des coefficients r33 peuvent ainsi varier de 400 à 1400 pm/V soit environ 12 à 40 fois celles de LiNb03. Dans le cas du SBN par exemple, plus la concentration en Strontium est importante plus le coefficient r33 est fort, mais plus la température de Curie est basse. En fonction des utilisations, le meilleur compromis sera choisi.
Il est proposé ici d'exploiter les « propriétés géantes » des matériaux ferroélectriques à coefficients géants en structure micro massive, réduisant considérablement les tensions de commande ainsi que les longueurs d'interaction nécessaires. Le matériau ferroélectrique pourra comprendre l'un au moins des matériaux dits SBN, KTN, KNSBN, et leurs mélanges.
Comme on peut le voir dans les figures 1 à 3, la structure est composée d'une lame fine du matériau massif ferroélectrique 4 choisi entre deux métallisations 2 et 5 réalisant la fonction d'électrodes d'excitation électrique très large bande de type capacitives. Cette excitation génère un champ électrique en V/d, V étant le potentiel appliqué et d l'épaisseur de la lame. Ce champ est donc d'autant plus important que l'épaisseur est fine. La modulation obtenue correspond à une modulation de biréfringence électro- optiquement induite se traduisant par une modification de l'état de polarisation de la lumière en fonction de la longueur d'interaction L. Il apparaît un décalage de phase ou déphasage Δφ entre les deux composantes de l'onde optique. Ce déphasage est proportionnel à la longueur d'interaction, au champ électrique appliqué ainsi qu'au coefficient r33 et inversement proportionnel à l'épaisseur de la lame de matériau massif ferroélectrique :
Δφ a r^.L. V/d.
On définit ainsi les principaux paramètres :
- Rapport géométrique de la structure créée ( /d),
- Propriété tensorielle du matériau choisi (r33),
- Tension de commande nécessaire Vn (pour obtenir un déphasage de π) Détail de l'invention
De façon à améliorer les performances de la cellule, celle-ci peut également comporter
des sillons 6 dans la couche ferroélectrique 4 entourant l'électrode supérieure 5 de part et d'autre de cette électrode.
On décrira maintenant un procédé de réalisation de ce type de modulateur. Ce procédé comporte pour l'essentiel les opérations suivantes :
a. Réalisation d'un dépôt métallique sur le substrat choisi (verre/silicium/matériau rigide) : l'épaisseur de ce substrat est variable.
b. Réalisation d'un dépôt similaire sur le matériau ferroélectrique ; en fonction des applications, différents matériaux sont privilégiés.
c. Report du matériau ferroélectrique sur le substrat par soudure moléculaire à froid par pression.
d. Amincissement du matériau massif ferroélectrique par rodage, polissage ou par usinage ultrasonore. L'épaisseur finale du matériau ferroélectrique est définie en fonction des performances souhaitées de la cellule électro-optique.
e. Réalisation d'au moins une électrode de surface par photolithographie.
f. Réalisation de sillons de part et d'autre de l'électrode de surface. Ces sillons sont obtenus par ablation de matière, par usinage au laser femto-seconde, par usinage ultrasonore ou par trait de découpe à la scie.
g. Découpe et polissage des accès optiques en entrée et sortie de la cellule.
Grâce à ce procédé de réalisation on obtient des cellules électro-optiques fonctionnant avec des tensions de commande de l'ordre de 5 volts pour une bande passante de modulation d'environ 1 GHz. Sans sillons, la tension est plutôt de l'ordre de 15 volts. Les sillons réalisés à l'opération f. permettent d'améliorer ces performances d'un facteur au moins égal à trois. Les sillons permettent tout d'abord de confiner le champ électrique sous l'électrode de surface, en éliminant les lignes de champ de fuite parasites qui dégradent la bande passante. Ils ont également pour effet d'augmenter l'intégrale de recouvrement des champs électrique et optique, ce qui favorise l'interaction électro -optique et permet de réduire la tension de commande. Ils ont encore pour effet de créer un pseudo-guide d'onde optique de type guide d'onde nervuré (« ridge waveguide » en anglais), ce qui améliore le couplage optique dans la structure
et permet de réduire les pertes d'insertion du composant.
La figure 4a illustre le substrat 1 avec une couche métallique 2 en face supérieure, et, séparément, un corps cristallin massif de matériau ferroélectrique 3, avec une couche 2 du même métal en face inférieure. Comme l'indiquent les flèches, on presse les deux l'un sur l'autre, pour obtenir un soudage à froid au niveau des deux couches 2, qui fusionnent sans dépassement de la température de Curie du corps cristallin 3. Le substrat peut être en verre, silicium, ou autre matériau rigide. Dans un exemple la couche métallique est en or déposé, qui se prête bien au soudage à froid.
La figure 4b illustre l'amincissement du corps cristallin massif 3, qui perd de l'épaisseur, comme illustré en trait tireté, et par les flèches, pour devenir la lame ferroélectrique 4. La figure 4c illustre le dépôt de l'électrode supérieure 5, qui peut elle aussi être en or.
La figure 4d illustre la réalisation de deux sillons 6, dans la lame ferroélectrique 4, au droit de l'électrode supérieure 5 et de part et d'autre de celle-ci. Des exemples de dimensionnement des différentes parties de la cellule sont donnés dans le tableau II annexé. On peut obtenir des cellules électro-optiques dont la distance entre les électrodes est inférieure à 300 micromètres environ. La largeur de l'une au moins des électrodes est inférieure à la distance inter-électrodes. La distance inter-électrodes peut descendre jusqu'à des valeurs d'environ une dizaine de micromètres.
Des variantes de l'invention permettent d'obtenir des cellules fonctionnant au choix en modulation de phase ou d'intensité. A partir du dispositif proposé, il devient possible de réaliser un modulateur de lumière intégré à N voies indépendantes. Ceci est illustré sur la figure 5. Les éléments sont les mêmes que sur la figure 4d, à ceci près que l'on a réalisé N = 5 voies sur le même substrat et à partir du même corps de matériau électrooptique massif aminci.
L'écartement entre les axes centraux des électrodes 5 dépend directement de l'environnement extérieur dans lequel le composant est placé (fibres optiques, réseau laser...). Par exemple au moins écartées entre elles d'environ 250 micromètres, largeur standard d'une fibre optique.
Les compositions et dimensions peuvent être les mêmes que dans le tableau II.
Même sans pousser la bande dans le domaine micro-onde, on peut raisonnablement penser qu'un tel produit miniature à N voies de modulation dans la centaine de MHz est intéressant dans des systèmes relevant de domaines variés : télécommunications, transmission et traitement de signaux dans des applications industrielles et/ou scientifiques. Un nombre N de voies de l'ordre de 10 est réalisable sur un seul substrat et pour une seule couche ferroélectrique. Les N voies indépendantes pourront être choisies telles que N soit supérieur ou égal à 2.
Deux modes de travail sont possibles, non limitativement : la modulation de phase, et le commutateur de polarisation (« polarisation switch », en anglais).
Dans le premier cas, on obtient un composant de contrôle dynamique de la phase de N voies indépendantes. Une telle fonction est utile par exemple dans un système de laser à fibre, utilisant de manière active la combinaison de puissance de N voies. On peut alors réaliser un composant comprenant par exemple 64 modulateurs intégrés soit sur une unique puce, soit sur plusieurs puces juxtaposées. L'autre fonction identifiée concerne la commutation optique entre lignes à retard pour la commande d'antennes hyper-fréquences. La bonne extinction optique (25-30dB) et la stabilité en courant continu mesurées sont des atouts indéniables. Grâce à la structure simplifiée du microruban (« microstrip » en anglais) de faible longueur et de très faible capacité, le fonctionnement hyperfréquence est possible mais pas forcément nécessaire pour ce type d'applications. Les contraintes géométriques ne représentent donc pas un verrou technique, et permettent de réduire les tensions de commande électrique jusque dans la gamme de quelques volts.
Ce type de composant peut se fabriquer à partir du procédé de fabrication des cellules déjà décrit. Ce procédé est modifié au niveau du dessin (« design ») du masque pour le dépôt de l'électrode supérieure : on reproduit répétitivement les motifs initiaux sur toute la largeur disponible du matériau électro-actif aminci.
Il est proposé ici un modulateur de lumière exploitant les propriétés massives des matériaux ferroélectriques à coefficients géants en structure amincies, dont l'épaisseur varie en fonction des performances du composant souhaitées. Sous l'effet d'un champ électrique, l'indice de réfraction de matériau est modifié. Il est donc possible grâce à l'invention, de réaliser des applications de modulation externes de façon électro-optique avec des composants de dimensions submillimétriques. Par exemple, les deux électrodes pourront être séparées d'une distance inférieure à 300 micromètres environ. Le champ électrique pourra être obtenu par l'intermédiaire d'un circuit d'excitation 9 connecté à l'une et l'autre des électrodes de la cellule pour la faire fonctionner en modulateur de phase et/ou de polarisation de la lumière. Le circuit d'excitation 9 pourra également être agencé pour un fonctionnement en modulateur d'intensité ou en commutateur de la lumière.
Le dispositif proposé présente des avantages marqués. Par exemple, pour une même tension de commande et pour des cristaux de même épaisseur, la même efficacité électro-optique est obtenue avec une longueur d'interaction de 10cm dans un cristal de Niobate de Lithium, contre une longueur d'interaction de seulement 5mm dans un cristal de SBN.
Les avantages apportés sont donc :
- forte augmentation de l'efficacité de modulation optique,
- forte miniaturisation de la longueur d'interaction,
- bande passante de modulation en radiofréquence,
- structure électro-optique simplifiée (interféromètre biréfringent sans guide d'onde),
- technologie de réalisation collective, avec intégration de composants multi modulateurs indépendants sur un même composant.
ANNEXES A LA DESCRIPTION
Tableau I :
Tableau II :
Dimensions
Parties Nature
Longueur Largeur Epaisseur
Verre, Silicium ou
500μη à 800μιη à 500μηι à
1 Substrat matériau rigide (électro4mm 2mm 2mm
optique ou non)
Couche métallique / 500μιτι à 800μπι à
2 2000Â Chrome-Or
électrode de masse 4mm 2mm
Matériau électro500μιη à 800μηι à 500μιτι à Ferroélectriques :
3
actif massif initial 4mm 2mm 1mm SBN, KTN, KNSBN.
Matériau électro500μπι à 800μιη à ΙΟμιη à Ferroélectriques :
4
actif massif aminci 4mm 2mm 200μm SBN, KTN, KNSBN.
Electrode 500μπι à ΙΟμπι à
5 2000Â Chrome-Or
supérieure 4mm 200μιη
80% de
500μηι à 100 à Air ou matériau d'indice
6 Sillons l'épaisseur
4mm 300μιη faible
de 4
Annexe III
III.1 LiNb03
III.2 SBN:60