VIROLE DE COMPRESSEUR COMPRENANT UNE LECHETTE D'ETANCHEITE EQUIPEE D'UNE STRUCTURE D'ENTRAINEMENT ET DE DEVIATION D'AIR DE FUITE
DESCRIPTION
DOMAINE TECHNIQUE
L'invention se rapporte au domaine des compresseurs de turbomachines d'aéronefs. Elle concerne plus particulièrement la maîtrise de la température des pièces sensibles des compresseurs, et plus spécifiquement des pièces du compresseur haute pression.
L'invention s'applique à tout type de turbomachine, en particulier aux turboréacteurs et aux turbopropulseurs.
ETAT DE LA TECHNIQUE ANTERIEURE
Un compresseur haute pression de turbomachine d'aéronef comporte, en alternance selon la direction axiale, des roues tournantes aubagées et des redresseurs. Classiquement, le rotor du compresseur présente une virole reliant deux roues tournantes aubagées successives. Cette virole est située radialement au droit du redresseur agencé entre les deux roues, et présente des léchettes d'étanchéité coopérant avec un revêtement abradable embarqué sur le redresseur. Les léchettes d'étanchéité et le revêtement abradable forment ensemble un joint dit « joint à labyrinthe », permettant de diminuer significativement la recirculation d'air au sein du compresseur, cette recirculation étant bien entendu néfaste aux performances globales de la turbomachine.
Pour diminuer cette recirculation, il faut créer un jeu faible entre la partie stator et la partie rotor. Néanmoins, même si un jeu très faible permet d'améliorer les performances et l'opérabilité du moteur, l'intégrité des léchettes est souvent mise en péril en raison de leur éventuel contact avec le revêtement abradable, en fonctionnement. Pour diminuer ce risque, il peut être procédé à l'augmentation du jeu
entre la partie stator et la partie rotor, mais cela abaisse les performances et augmente les risques de pompage du compresseur.
Quoiqu'il en soit, il a été constaté la présence d'un point chaud sur la virole, en aval du groupe de léchettes, dans la direction d'écoulement de l'air de fuite à travers ces mêmes léchettes. La présence d'un tel point chaud est problématique d'une part parce qu'elle peut créer une dégradation accélérée de cette partie de la virole soumise à une température très élevée, et d'autre part parce qu'elle est susceptible d'engendrer un gradient thermique générant des contraintes mécaniques importantes. Dans les deux cas, c'est la résistance mécanique de la virole qui est affectée. EXPOSÉ DE L'INVENTION
L'invention a donc pour but de remédier au moins partiellement aux problèmes mentionnés ci-dessus, rencontrés dans les solutions de l'art antérieur.
Pour ce faire, l'invention a pour objet une virole de compresseur pour turbomachine d'aéronef, la virole étant destinée à être agencée entre deux roues tournantes aubagées et radialement au droit d'un redresseur situé entre lesdites deux roues tournantes du compresseur, la virole comportant un dispositif d'étanchéité comprenant une ou plusieurs léchettes d'étanchéité faisant saillie radialement vers l'extérieur en direction dudit redresseur, ledit dispositif d'étanchéité comportant, à son extrémité aval selon une direction d'écoulement de l'air de fuite à travers ce dispositif d'étanchéité, une léchette d'extrémité.
Selon l'invention, ladite virole comporte de plus, en saillie vers l'aval à partir de ladite léchette d'extrémité, une structure d'entraînement et de déviation d'air conçue pour redresser axialement l'air de fuite issu de la léchette d'extrémité.
Aussi, l'invention prévoit astucieusement de conditionner l'air de fuite en sortie du dispositif d'étanchéité, afin de réduire/supprimer le point chaud observé sur la virole, en aval de la léchette d'extrémité. En effet, des études ont permis de démontrer que dans les solutions classiques de l'art antérieur, le point chaud observé est essentiellement dû à une faible vitesse circonférentielle du débit d'air de fuite issu de la
léchette d'extrémité, ainsi qu'à la direction de ce débit d'air de fuite présentant une composante radiale très élevée.
Dans l'invention, l'air de fuite issu de la léchette d'extrémité entre au contact de la structure d'entraînement et de déviation, ce qui permet de bénéficier des avantages suivants. Tout d'abord, l'air de fuite est dévié pour être redressé axialement, ce qui l'empêche d'impacter directement la virole dans une zone confinée dans laquelle se trouvait antérieurement le point chaud. Ce redressement permet de changer l'écoulement de l'air de fuite, et favorise le contact de ce dernier avec une plus grande surface de la virole et de ses éléments tournants environnants. L'augmentation de la surface de contact réduit les coefficients d'échange et limite les risques d'apparition d'un point chaud sur la virole. A cet égard, il est noté que les contraintes mécaniques sont très sensibles au niveau et aux gradients de température, notamment dans les zones pour lesquelles des criques ont pu être observées dans l'art antérieur. Avec l'invention, il a été constaté qu'une diminution d'une ou plusieurs dizaines de degrés, par exemple de 10°C à 20°C, permet d'augmenter d'au moins 15% la durée de vie de ces pièces.
En outre, la structure spécifique à l'invention permet d'entraîner l'air de fuite qui entre en contact avec elle, et augmente par conséquent le coefficient d'entraînement. Cela conduit à une augmentation de la vitesse circonférentielle de l'air, et participe donc aussi à la réduction des coefficients d'échange.
D'ailleurs, il est important de noter que les deux fonctions assurées par la structure d'entraînement et de déviation sont convergentes, puisque plus la déviation opérée conduira à augmenter la surface d'échange, plus la vitesse d'entraînement du débit d'air de fuite aura tendance à augmenter.
En résumé, l'invention prévoit de redresser le débit d'air de fuite et de l'accélérer, afin de réduire les coefficients d'échange et de limiter les risques d'apparition d'un point chaud sur la virole. Il en découle une meilleure résistance mécanique de celle- ci.
De préférence, ladite structure d'entraînement et de déviation d'air prend la forme, en demi-coupe longitudinale, d'un bras porté par la léchette d'extrémité.
De préférence, le bras est incliné axialement de manière à s'étendre radialement vers l'extérieur en allant vers l'aval, selon la direction d'écoulement de l'air de fuite.
De préférence, le bras est incliné d'un angle compris entre 20 et 60° par rapport à la direction axiale.
De préférence, la structure d'entraînement et de déviation d'air est réalisée d'un seul tenant avec la léchette d'extrémité.
De préférence, la léchette d'extrémité présente, à partir de sa base, une hauteur de léchette Hl, et la structure d'entraînement et de déviation d'air est raccordée à la léchette d'extrémité au niveau d'une base de la structure dont le centre se situe à une hauteur H2 à partir de la base de la léchette d'extrémité, de telle sorte que les hauteurs Hl et H2 répondent à la formule suivante : H2 > Hl / 3.
L'invention a également pour objet un compresseur pour turbomachine d'aéronef, comportant deux roues tournantes aubagées entre lesquelles est placé un redresseur, le compresseur comprenant également une virole telle que décrite ci-dessus, reliant les deux roues tournantes aubagées et située radialement au droit du redresseur, ce dernier comportant un revêtement abradable coopérant avec chaque léchette du dispositif d'étanchéité équipant la virole.
De préférence, la structure d'entraînement et de déviation d'air est dépourvue de contact avec le revêtement abradable.
De préférence, le jeu entre le revêtement abradable et la léchette d'extrémité est inférieur à la distance minimale entre la structure d'entraînement et de déviation, et le revêtement abradable.
Enfin, l'invention a pour objet une turbomachine d'aéronef comportant un tel compresseur, qui est de préférence un compresseur haute pression.
D'autres avantages et caractéristiques de l'invention apparaîtront dans la description détaillée non limitative ci-dessous.
BRÈVE DESCRIPTION DES DESSINS
Cette description sera faite au regard des dessins annexés parmi lesquels ;
- la figure 1 représente une vue schématique en coupe longitudinale d'une turbomachine, selon un mode de réalisation préféré de l'invention ;
- la figure 2 représente une vue en demi-coupe longitudinale d'une partie du compresseur haute pression de la turbomachine montrée sur la figure précédente ;
- la figure 3 représente une vue agrandie d'une partie du compresseur haute pression de la figure précédente ;
- la figure 4 représente une vue encore agrandie du compresseur, montrant de façon plus détaillée la virole spécifique à l'invention ;
- les figures 5a et 5b sont des vues comparatives schématisant l'écoulement de l'air de fuite avec les réalisations de l'art antérieur, et avec la conception selon l'invention montrée sur les figures précédentes ;
- la figure 6 est une vue agrandie de la léchette d'extrémité aval équipant la virole, et de la structure d'entraînement et de déviation d'air spécifique à l'invention ; et
- la figure 7 est une vue similaire à celle de la figure 4, montrant une alternative de réalisation.
EXPOSÉ DÉTAILLÉ DE MODES DE RÉALISATION PRÉFÉRÉS
En référence tout d'abord à la figure 1, il est représenté une turbomachine 1 d'aéronef, selon un mode de réalisation préféré de l'invention. Il s'agit ici d'un turboréacteur à double flux et à double corps. Néanmoins, il pourrait s'agir d'une turbomachine d'un autre type, par exemple un turbopropulseur, sans sortir du cadre de l'invention.
Globalement, la turbomachine 1 présente un axe longitudinal 3 autour duquel s'étendent ses différents composants. Elle comprend, d'amont en aval selon une direction principale d'écoulement des gaz à travers cette turbomachine représentée par
la flèche 5, une soufflante 2, un compresseur basse pression 4, un compresseur haute pression 6, une chambre de combustion 8, une turbine haute pression 10 et une turbine basse pression 12.
En référence à présent aux figures 2 et 3, il est représenté une partie du compresseur haute pression 6, au sein duquel se situe l'invention. Néanmoins, celle-ci est également applicable au compresseur basse pression 4, sans sortir du cadre de l'invention.
Le compresseur 6 comporte plusieurs étages comprenant chacun un redresseur 12 formé d'une rangée annulaire d'aubes de stator portées par un carter 14 du compresseur, et une roue tournante aubagée 16 montée en amont de son redresseur associé.
Les deux roues 16 de deux étages directement consécutifs sont reliées par une virole 20, par exemple réalisée d'un seul tenant avec le disque 22 de l'une des deux roues 16. La liaison avec l'autre roue 16 s'effectue de préférence par des boulons 24, qui relient le disque 22 de cette autre roue 16 avec une bride 26 prolongeant la virole 20.
Le redresseur 12, situé entre les deux roues 16, est agencé au droit radialement de la virole 20 qu'il entoure. Au niveau de son extrémité annulaire interne, le redresseur 12 comporte un revêtement abradable 28, de préférence du type en nid- d'abeilles. Ce revêtement coopère avec un dispositif d'étanchéité 30 intégré à la virole. Le dispositif 30 est de préférence réalisé d'une seule pièce avec la virole, ou peut être rapporté sur celle-ci. Il est équipé d'une pluralité de léchettes 32 en saillie radialement vers l'extérieur, en direction du revêtement abradable 28. Les léchettes 32 sont espacées axialement les unes des autres, et peuvent être droites comme cela a été représenté sur la figure 3, ou inclinées par rapport à la direction radiale. Ensemble, les éléments 28, 32 forment un joint d'étanchéité dit joint à labyrinthe, permettant de diminuer significativement la recirculation d'air au sein du compresseur. Cette recirculation d'air correspond à un débit d'air de fuite 42 traversant le joint précité, dont la direction d'écoulement a été schématisée par la flèche 40 sur la figure 3. Cette direction 40 d'écoulement de l'air de fuite est de sens opposé à celui de la direction principale 5
d'écoulement des gaz à travers la turbomachine. A cet égard, il est noté que dans la suite de la description, les termes « amont » et « aval » seront utilisés en référence à la direction 40 d'écoulement de l'air de fuite, et non en référence à la direction principale 5 de sens opposé.
En référence à présent à la figure 4, il est montré l'une des particularités de l'invention consistant à prévoir une structure 44 d'entraînement et de déviation d'air de fuite, équipant la léchette 32a située à l'extrémité aval du dispositif d'étanchéité 30. Cette léchette d'extrémité 32a fait partie intégrante des trois léchettes 32 du dispositif 30, et correspond à celle située la plus vers l'aval. Elle est donc équipée d'une structure 44 en forme de bras dans la demi-coupe de la figure 4, ce bras étant en saillie vers l'aval à partir de cette léchette d'extrémité 32a. Le bras 44 est prévu pour être annulaire et pour s'étendre de façon continue autour de l'axe 5 du turboréacteur, ou bien prévu pour être constitué d'éléments espacés circonférentiellement les uns des autres, toujours autour de cet axe 5. De préférence, le bras 44 est réalisé d'une seule pièce avec la léchette d'extrémité 32a.
Les flèches 42 de la figure 4 montrent le débit d'air de fuite à travers le joint à labyrinthe 28, 32, puis son écoulement vers l'aval après sa sortie du joint. Lorsqu'il s'extrait du joint par la léchette d'extrémité 32a, ce débit d'air de fuite présente une composante radiale très importante, en direction de la virole 20. Néanmoins, cette virole n'est pas atteinte directement, puisque le débit d'air de fuite entre d'abord au contact du bras 44. Aussi, l'air de fuite est redressé axialement par le bras 44. Par redressement axial, il est à comprendre que la composante radiale du débit d'air de fuite est d'abord diminuée au profit de sa composante axiale en direction de l'aval. De préférence, le bras 44 est incliné de telle sorte que le débit d'air de fuite qui s'en échappe retrouve une composante radiale, mais cette fois-ci orientée radialement vers l'extérieur.
De plus, l'air de fuite est entraîné en rotation par son frottement avec la surface externe du bras tournant 44, ce qui augmente le coefficient d'entraînement.
Aussi, avec sa vitesse accrue et sa réorientation, l'air de fuite atteint les éléments tournants environnants situés en aval de joint, en particulier la roue tournante 16 et la partie aval de la virole 20. Comme cela a été schématisé sur la figure 4, l'air de
fuite s'écoule alors selon des lignes de flux sensiblement concentriques en épousant une surface importante des éléments environnants, à savoir une très grande partie de la virole située en aval du joint 28, 32, et une partie de la roue aval 16, à proximité des pieds d'aubes. Cela est également visible sur la figure 5b montrant l'écoulement 42 de l'air de fuite, tel qu'il a pu être observé via un logiciel de modélisation. En comparaison avec la figure 5a, l'écoulement 42 observé dans l'art antérieur est bien moins étendu, et reste confiné à proximité de la léchette d'extrémité 32a, sur une partie axiale restreinte de la virole 20 faisant l'objet du point chaud précité.
La plus grande amplitude de l'écoulement 42 observé avec la présente invention permet d'augmenter le coefficient d'entraînement, de réduire les coefficients d'échange, et donc de limiter les risques d'apparition d'un point chaud sur la virole. Il en découle une meilleure résistance mécanique de la virole 20.
En référence à présent à la figure 6, comme cela a été évoqué précédemment, il est montré que le bras 44 est incliné par rapport à la direction axiale de manière à s'étendre radialement vers l'extérieur en allant vers l'aval. Cela permet d'imposer à l'air de fuite, sortant du bras 44, une composante radiale orientée vers l'extérieur, par opposition à sa composante radiale vers l'intérieur observée à sa sortie de la léchette d'extrémité 32a. L'angle A d'inclinaison entre le bras 44 et la direction axiale est par exemple compris entre 20 et 60.
Sur la figure 6, d'autres paramètres géométriques préférentiels ont été représentés.
Il s'agit tout d'abord du jeu Jl entre le revêtement abradable 28 et l'extrémité de la léchette d'extrémité 32a. Ce jeu Jl est inférieur au jeu J2 entre le revêtement 28 et l'extrémité du bras 44 en regard radialement de ce même revêtement. Le rapport entre ces jeux est de préférence élevé, par exemple supérieur à cinq. Dans l'alternative de réalisation montrée sur la figure 7, le bras 44 s'étend axialement vers l'aval au-delà du revêtement abradable 28, pour un gain d'efficacité par augmentation de la surface d'entraînement de l'air. Néanmoins, ici encore, la distance minimale J2 entre ce bras 44 et le revêtement 28 reste supérieure au jeu Jl, de préférence dans les mêmes
proportions que celles mentionnées ci-dessus. Par conséquent, le bras 44 est dépourvu de contact avec le revêtement abradable 28, même en fonctionnement.
De retour à la figure 6, il est montré que la léchette d'extrémité aval 32a présente, à partir de sa base 50 située dans la continuité de la surface extérieure de la virole 20, une hauteur de léchette Hl. De plus, le bras 44 est raccordé à la léchette 32a au niveau d'une base 52 dont le centre 54 se situe à une hauteur H2 à partir de la base 50 de la léchette d'extrémité 32a. Pour limiter les risques de formation d'une poche de recirculation entre le bras 44 et la partie supérieure de la léchette d'extrémité 32a, dans laquelle l'air de fuite risquerait de s'échauffer, il est de préférence fait en sorte que la hauteur H2 soit supérieure au tiers de la hauteur Hl.
Enfin, toujours pour un gain maximal d'efficacité, il est fait en sorte que la distance axiale L2 entre l'extrémité distale du bras 44 et le centre de la léchette d'extrémité 32a, soit largement supérieure à la distance axiale Ll entre ce même centre et la paroi axiale 56 du revêtement 28, définissant la cavité 58 dans laquelle se trouve l'extrémité de la léchette 32a. En effet, la partie aval de l'abradable a tendance à freiner en rotation l'écoulement, c'est pourquoi l'extrémité du bras est située suffisamment loin pour redynamiser la vitesse du fluide en rotation.
Bien entendu, diverses modifications peuvent être apportées par l'homme du métier à l'invention qui vient d'être décrite, uniquement à titre d'exemples non limitatifs.