Mouvement d'horlogerie à balancier-spiral
La présente invention concerne un mouvement d'horlogerie, plus particulièrement un mouvement comprenant un régulateur de type balancier-spiral et un échappement.
Pendant les oscillations du balancier d'un régulateur balancier-spiral traditionnel, le spiral se développe de manière excentrique en raison du fait que son centre de gravité n'est pas sur l'axe du régulateur et se déplace. Ce développement excentrique génère des forces de rappel importantes entre les pivots de l'arbre du régulateur et les paliers dans lesquels ils tournent, forces qui en outre varient en fonction de l'amplitude d'oscillation. Ces forces de rappel perturbent les oscillations du balancier et affectent l'isochronisme du mouvement, c'est-à-dire augmentent les variations de la marche en fonction de l'amplitude d'oscillation. Pour remédier à ce problème, la présente demanderesse a proposé dans son brevet EP 1473604 un régulateur balancier-spiral dont la spire extérieure du spiral comporte une portion rigidifiée agencée pour rendre le développement du spiral concentrique.
On sait cependant que la concentricité du développement d'un spiral n'est pas le seul facteur qui influence l'isochronisme. Monté dans un mouvement, le régulateur est perturbé par l'échappement, qui induit un retard de marche. En effet, pendant la phase de dégagement, le régulateur subit un couple résistant avant la ligne des centres, ce qui provoque un retard. Pendant la phase d'impulsion, le régulateur subit un couple moteur d'abord avant la ligne des centres, ce qui provoque une avance, puis après la ligne des centres, ce qui provoque un retard. Globalement, l'échappement produit ainsi un retard de marche et cette perturbation causée par l'échappement est plus grande aux petites amplitudes d'oscillation du balancier qu'aux grandes.
La présente invention vise à améliorer encore l'isochronisme d'un régulateur balancier-spiral et propose à cette fin un mouvement d'horlogerie
CONFIRMATION C0PY
comprenant un régulateur balancier-spiral et un échappement coopérant avec le régulateur, la spire extérieure du spiral comprenant une portion rigidifiée agencée pour rendre le développement du spiral plus concentrique, caractérisé en ce que la portion rigidifiée est également agencée pour compenser au moins partiellement la variation de la marche du mouvement en fonction de l'amplitude d'oscillation du balancier due à l'échappement.
Il a été constaté avec surprise qu'en jouant sur l'agencement de la portion rigidifiée de la spire extérieure du spiral, par exemple sa position, son étendue ou son épaisseur, l'isochronisme global du mouvement, tenant compte à la fois de la perturbation due à la non concentricité du spiral et de la perturbation due à l'échappement, pouvait être nettement amélioré par rapport au régulateur décrit dans le brevet EP 1473604.
Avantageusement, la portion rigidifiée est agencée pour produire une avance de marche d'au moins 2 s/j, ou d'au moins 4 s/j, ou encore d'au moins 6 s/j, ou encore d'au moins 8 s/j, à une amplitude de 150° par rapport à une amplitude de 300°, compensant au moins partiellement ladite variation de marche due à l'échappement.
Selon un premier mode de réalisation, la portion rigidifiée est plus proche de l'extrémité extérieure du spiral qu'une portion rigidifiée théorique qui rendrait le développement du spiral sensiblement parfaitement concentrique, l'épaisseur et l'étendue de la portion rigidifiée pouvant être sensiblement identiques à celles de ladite portion rigidifiée théorique.
Selon un deuxième mode de réalisation, la portion rigidifiée est moins épaisse qu'une portion rigidifiée théorique qui rendrait le développement du spiral sensiblement parfaitement concentrique, la position et l'étendue de la portion rigidifiée pouvant être sensiblement identiques à celles de ladite portion rigidifiée théorique.
Selon un troisième mode de réalisation, la portion rigidifiée est moins étendue qu'une portion rigidifiée théorique qui rendrait le développement du spiral
sensiblement parfaitement concentrique, la position et l'épaisseur de la portion rigidifiée pouvant être sensiblement identiques à celles de ladite portion rigidifiée théorique.
D'autres caractéristiques et avantages de la présente invention apparaîtront à la lecture de la description détaillée suivante faite en référence aux dessins annexés dans lesquels : N
- la figure 1 montre un spiral à portion de spire extérieure rigidifiée selon la technique antérieure, une virole associée à ce spiral étant montrée schématiquement par un trait pointillé ;
- la figure 2 montre une courbe d'isochronisme obtenue par simulation numérique des déplacements du centre géométrique du spiral illustré à la figure 1 , le régulateur ou oscillateur dont fait partie ce spiral étant considéré comme libre, c'est-à-dire non soumis à l'action d'un échappement ;
- la figure 3 montre des résultats de mesure d'isochronisme global obtenus sur un mouvement réel comportant un spiral tel qu'illustré à la figure 1 ;
- la figure 4 montre un spiral à portion de spire extérieure rigidifiée selon un premier mode de réalisation de l'invention ;
- la figure 5 montre une courbe d'isochronisme obtenue par simulation numérique des déplacements du centre géométrique du spiral illustré à la figure 4, le régulateur ou oscillateur dont fait partie ce spiral étant considéré comme libre, c'est-à-dire non soumis à l'action d'un échappement ;
- la figure 6 montre des résultats de mesure d'isochronisme global obtenus sur un mouvement réel comportant un spiral tel qu'illustré à la figure 4 ;
- la figure 7 montre un spiral à portion de spire extérieure rigidifiée selon un deuxième mode de réalisation de l'invention ;
- la figure 8 montre une courbe d'isochronisme obtenue par simulation numérique des déplacements du centre géométrique du spiral illustré à la figure 7, le régulateur ou oscillateur dont fait partie ce spiral étant considéré comme libre, c'est-à-dire non soumis à l'action d'un échappement ;
- la figure 9 montre un spiral à portion de spire extérieure rigidifiée selon un troisième mode de réalisation de l'invention ;
- la figure 10 montre une courbe d'isochronisme obtenue par simulation numérique des déplacements du centre géométrique du spiral illustré à la figure 9, le régulateur ou oscillateur dont fait partie ce spiral étant considéré comme libre, c'est-à-dire non soumis à l'action d'un échappement.
La figure 1 montre un spiral plan du type de celui décrit dans le brevet EP 1473604, pour un régulateur balancier-spiral d'un mouvement d'horlogerie. Ce spiral, désigné par le repère 1 , est en forme de spirale d'Archimède et est fixé par son extrémité intérieure 2 à une virole 3 montée sur l'arbre du balancier et par son extrémité extérieure 4 à un piton (non représenté) monté sur une pièce fixe du mouvement telle que le coq. L'ensemble spiral 1 - virole 3 peut être réalisé en une seule pièce, dans une matière cristalline telle que le silicium ou le diamant, par une technique de micro-gravure. La spire extérieure 5 du spiral 1 comporte localement une portion 6 de plus grande épaisseur e que le reste de la lame formant le spiral. Cette épaisseur e, qui peut être variable le long de la portion 6 comme représenté, rigidifie la portion 6 et la rend ainsi sensiblement inactive pendant le développement du spiral. La position et l'étendue de la portion rigidifiée 6 sont choisies pour que le centre de déformation du spiral, correspondant sensiblement au centre de gravité de la partie du spiral autre que la portion rigidifiée 6, soit sensiblement confondu avec le centre géométrique O du spiral, qui coïncide avec le centre de rotation de la virole 3. De la sorte, le développement du spiral est concentrique ou quasi concentrique. En pratique, la
portion rigidifiée 6 se termine avant l'extrémité extérieure 4 du spiral. Cette extrémité extérieure 4, plus précisément une partie terminale 7 de la spire extérieure 5 incluant la portion rigidifiée 6, est écartée radialement vers l'extérieur par rapport au tracé de la spirale d'Archimède pour garantir que l'avant-demière spire 8 reste libre radialement, c'est-à-dire ne touche aucun élément tel que le piton, la spire extérieure ou une goupille de raquette, pendant le fonctionnement du mouvement. L'écart entre la partie terminale 7 et l'avant-dernière spire 8 doit être supérieur à celui d'un spiral traditionnel, car du fait du développement concentrique du spiral, l'avant-dernière spire 8 se déplace radialement davantage vers le piton lors de l'expansion du spiral. La partie terminale 7 est en forme d'arc de cercle de centre C. L'étendue angulaire Θ de la portion rigidifiée 6 et sa position angulaire a (définie par exemple par la position angulaire du centre de la portion rigidifiée 6 par rapport à la position angulaire de l'extrémité extérieure 4) sont définies depuis ce centre C. L'épaisseur e est mesurée le long d'un rayon partant de ce centre C. Dans l'exemple représenté, les valeurs Θ et a sont respectivement égales à 85,9° et 72° et le maximum de l'épaisseur e est égal à 88,7 pm. L'épaisseur eo de la lame formant le spiral (mesurée selon un rayon partant du centre géométrique O du spiral), à l'exception de la portion rigidifiée 6, est égale à 32,2 pm.
La figure 2 est un diagramme d'isochronisme obtenu avec le spiral illustré à la figure 1 par simulation numérique. Plus précisément, le diagramme de la figure 2 est obtenu en considérant l'extrémité extérieure 4 fixe et l'arbre sur lequel sont fixés la virole 3 et le balancier libre (c'est-à-dire non monté dans des paliers), en calculant par éléments finis le déplacement du centre géométrique O du spiral lors des oscillations du balancier, puis en interpolant et intégrant la courbe , de déplacement en fonction de l'amplitude d'oscillation. En abscisses du diagramme est portée l'amplitude d'oscillation du balancier exprimée en degrés par rapport à la position d'équilibre et en ordonnées est portée la marche en secondes par jour. Comme on peut le voir, l'écart de marche entre une amplitude d'oscillation de 150°
et une amplitude d'oscillation de 300° est de l'ordre de 1 s/j, ce qui est excellent. Toutefois, ce diagramme ne tient pas compte des perturbations dues à l'échappement.
Des mesures ont été faites sur vingt mouvements de conception identique équipés du spiral tel qu'illustré à la figure 1 et d'un échappement traditionnel. Pour chaque mouvement, dans chacune de six positions différentes (VH : verticale haute, VG : verticale gauche, VB : verticale basse, VD : verticale droite, HB : horizontale basse et HH : horizontale haute), la marche du mouvement a été mesurée pendant la décharge de son ressort moteur et les mesures ont été reportées dans un graphe. A titre d'exemple, le graphe obtenu pour l'un de ces mouvements est montré à la figure 3. En ordonnées est portée la marche en s/j et en abscisses l'amplitude d'oscillation du balancier, qui diminue progressivement entre l'état complètement remonté et l'état dévidé du ressort moteur du mouvement en raison de la diminution de la force du ressort moteur. Comme on peut le voir, la marche diminue progressivement au fur et à mesure que l'amplitude d'oscillation diminue. Pour chaque position de chaque mouvement une courbe a été interpolée et l'écart de marche entre l'amplitude d'oscillation de 150° et l'amplitude d'oscillation de 300° a été déterminée. La moyenne des écarts de marche sur toutes les positions et tous les mouvements a été d'environ 6,7 s/j entre lesdites amplitudes. En d'autres termes, la marche à 150° a été en moyenne inférieure d'environ 6,7 s/j à la marche à 300°. Cette diminution de la marche, ou retard aux petites amplitudes par rapport aux grandes amplitudes, est essentiellement due à l'échappement.
Le(s) présent(s) inventeur(s) a (ont) observé que la diminution de la marche due à l'échappement pouvait, en partie au moins, être compensée en modifiant l'agencement de la portion rigidifiée 6, à savoir par exemple sa position a et/ou son étendue Θ et/ou son épaisseur e, par rapport à l'agencement de la figure 1 qui confère aux spires du spiral une concentricité parfaite ou quasi-parfaite.
Il a notamment été découvert qu'un paramètre de la portion rigidifiée 6 ayant une influence particulière sur l'isochronisme est sa position a. En déplaçant la portion rigidifiée 6 vers l'extrémité extérieure 4 du spiral, on crée une avance de marche aux petites amplitudes par rapport aux grandes amplitudes d'oscillation du balancier. Ainsi, un écart de marche d'environ 6,7 s/j, mais de signe opposé par rapport à l'écart de marche mesuré moyen susmentionné, peut être obtenu entre les amplitudes de 150° et de 300° en déplaçant la portion rigidifiée 6 à la position α' = 62° et en conservant constantes les autres caractéristiques de la portion rigidifiée 6 (étendue, épaisseur). La variation de la marche due à l'échappement peut ainsi être sensiblement entièrement compensée. La figure 4 montre le nouveau spiral obtenu, avec sa portion de spire extérieure rigidifiée désignée par le repère 6'. Le déplacement de la portion rigidifiée 6 modifie bien entendu le développement du spiral, qui n'est plus aussi concentrique. Mais, d'une part, cette modification est faible, le spiral se développant encore de manière plus concentrique qu'un spiral traditionnel (c'est-à-dire un spiral sans portion rigidifiée), et, d'autre part, cette modification contribue à améliorer l'isochronisme global du mouvement. Dans le diagramme de la figure 5 a été dessinée la courbe d'isochronisme 14 du spiral illustré à la figure 4, obtenue selon la même méthode qu'à la figure 2. On voit que l'augmentation de la marche entre l'amplitude de 300° et l'amplitude de 150° est sensiblement linéaire et de pente inverse de la pente de la variation de la marche due à l'échappement. On a également reporté sur cette figure 5 la courbe d'isochronisme 11 du spiral illustré à la figure 1 à titre de comparaison. A la figure 6 sont représentés des résultats de mesure de la marche d'un mouvement identique â celui sur lequel les mesures de la figure 3 ont été effectuées, mais équipé du spiral illustré à la figure 4 au lieu de celui de la figure 1. Ces résultats montrent que la variation de la marche a été significativement réduite par le déplacement de la portion rigidifiée à la position α', en particulier dans la plage d'amplitudes allant de 180° à 300° où l'allure générale du graphe est plate.
Un autre paramètre de la portion rigidifiée 6 ayant une influence sur l'isochronisme est son épaisseur e. En diminuant l'épaisseur e, on crée une avance de marche aux petites amplitudes par rapport aux grandes amplitudes d'oscillation du balancier. Ainsi, par exemple, un écart de marche d'environ 6,4 s/j, mais de signe opposé par rapport à l'écart de marche mesuré moyen mentionné en relation avec la figure 3, peut être obtenu entre les amplitudes de 150° et de 300° en diminuant le maximum de l'épaisseur e de la portion rigidifiée 6 (et le reste de l'épaisseur en proportion) à la valeur e' = 44,2 μητι et en conservant constantes les autres caractéristiques de la portion rigidifiée (position, étendue). La figure 7 montre le spiral obtenu, avec sa portion de spire extérieure rigidifiée désignée par le repère 6", et la figure 8 montre la courbe d'isochronisme 17 correspondant à un tel spiral.
Encore un autre paramètre de la portion rigidifiée ayant une influence sur l'isochronisme est son étendue Θ. En diminuant l'étendue Θ, on crée une avance de marche aux petites amplitudes par rapport aux grandes amplitudes d'oscillation du balancier. Ainsi, par exemple, un écart de marche d'environ 6,9 s/j, mais de signe opposé par rapport à l'écart de marche mesuré moyen mentionné en relation avec la figure 3, peut être obtenu entre les amplitudes de 150° et de 300° en diminuant l'étendue angulaire Θ de la portion rigidifiée à la valeur θ' = 43,9° et en conservant constantes les autres caractéristiques de la portion rigidifiée (position, épaisseur ou maximum d'épaisseur). La figure 9 montre le spiral obtenu, avec sa portion de spire extérieure rigidifiée désignée par le repère 6"', et la figure 10 montre la courbe d'isochronisme 19 correspondant à un tel spiral.
Dans des variantes, on pourra bien entendu combiner les modes de réalisation décrits ci-dessus, c'est-à-dire modifier au moins deux des paramètres a, e et Θ.