VITRAGE OPTIQUEMENT ACTIF
L'invention concerne un vitrage optiquement actif, dont les caractéristiques de transmission, de diffusion, de réflexion et/ou de couleur sont variables de façon commandée.
Les vitrages de ce type sont utilisables notamment dans l'industrie automobile et dans le bâtiment et ont d'autres applications, très diverses et nombreuses.
On a déjà proposé des vitrages utilisant des effets électriques directs comme les effets électrochromes, mais qui n'ont pas permis d'obtenir les résultats attendus. D'autres systèmes connus sont basés sur des effets électrooptiques de cristaux liquides et sont complexes et onéreux.
On connaît également des systèmes d'affichage basés sur des effets électrophorétiques, dans lesquels des particules chargées sont déplacées par des champs électriques de commande, comme décrit par exemple dans les articles de John Rogers et al. Proc. Nat. Acad. Se. 48, 4835-4840 (2001 ) et d'Albert, Comiskey et al., Nature 394, 253-255 (1998) et dans les documents US-A-6120588 et US-A-5961804. Ces systèmes connus présentent toutefois quelques inconvénients, tels qu'un défaut de stabilité à long terme des charges des particules.
L'invention a notamment pour but un vitrage actif qui ne présente pas ces inconvénients et qui soit simple, peu onéreux et très fiable sur une longue période de temps. Elle propose à cet effet un vitrage optiquement actif, dont les caractéristiques optiques de transmission, de diffusion, de réflexion et/ou de couleur sont variables de façon commandée, caractérisé en ce qu'il comprend deux plaques de matière telle par exemple que du verre ou analogue, parallèles et délimitant entre elles un volume fermé, un fluide contenu dans ledit volume entre les plaques, une suspension de particules diélectriques dans le fluide, et des moyens commandés d'application de
gradients de champ électrique auxdites particules, permettant par action de forces diélectrophorétiques et par interactions entre particules de les déplacer et de les organiser dans des directions parallèles ou perpendiculaires aux plaques. L'invention est donc basée sur le déplacement commandé de particules diélectriques en suspension dans un fluide. Ces particules non chargées sont déplacées par un gradient de champ électrique qui agit sur le dipôle électrique des particules (effet diélectrophorétique) et elles sont rassemblées ou agglomérées par des interactions entre particules menant à des propriétés electro-rhéologiques. L'utilisation de particules non chargées électriquement permet d'éviter les problèmes de stabilité de charge inhérents aux systèmes électrophorétiques. L'agrégation des particules permet de les stocker dans des zones choisies entre les plaques pour obtenir des effets optiques d'ensemble, par exemple de coloration ou de transmission à contraste élevée. Par modification des gradients de champ électrique appliqués aux particules, on peut séparer ces particules et les réorganiser en d'autres zones entre les plaques, pour modifier l'effet optique d'ensemble et obtenir alternativement un affichage et la suppression de l'affichage. De plus, les variations de forces diélectrophorétiques ou d'interaction en fonction de la taille des particules, leurs propriétés diélectriques, la fréquence du champ électrique et les effets d'entraînement par le fluide permettent des séparations spécifiques de particules et des effets de contraste et de couleurs multiples, quand on utilise des particules aux propriétés diélectriques différentes.
En outre, de longs temps de rétention des particules après coupure de l'alimentation électrique permettent d'envisager un fonctionnement à très faible consommation électrique.
Selon une autre caractéristique de l'invention, les moyens d'application de gradients de champ électrique comprennent des électrodes placées dans ledit volume, et des moyens de liaisons de ces électrodes à
une alimentation électrique.
Les électrodes peuvent être disposées selon toute configuration souhaitée pour l'obtention des effets optiques recherchés. Elles peuvent être formées sur les plaques par différents moyens, par exemple par dépôt et gravure, par jet d'encre, par tamponnage ou autres.
Ces électrodes peuvent être soit opaques, soit semi-transparentes selon les effets recherchés.
Dans un mode de réalisation préféré de l'invention, chaque plaque porte au moins deux groupes d'électrodes. Les particules en suspension dans le fluide peuvent être de types très divers et sont réalisables en toute matière diélectrique en fonction des effets optiques souhaités et des propriétés diélectriques requises. Elles ont des dimensions typiquement comprises entre 10 nm et 50 μm et peuvent être à structure simple ou composite à base de matériaux inorganiques ou organiques, de polymères, de colorants, de métaux, etc.
Le fluide utilisé est de préférence un liquide diélectrique ou faiblement électroconducteur, par exemple de l'eau ou une huile silicone, ayant des propriétés diélectriques et une viscosité sélectionnées en fonction des effets recherchés. L'alimentation électrique peut être à courant continu, ou à courant alternatif de fréquence fixe ou variable.
Selon encore une autre caractéristique de l'invention, le volume entre les plaques est cloisonné en une pluralité de petits volumes séparés de façon sensiblement étanche les uns des autres, pour éviter les effets de sédimentation à longue distance qui empêcheraient les mouvements à courte distance sous l'effet des forces diélectrophorétiques et des interactions. Ces petits volumes ont typiquement des dimensions comprises entre quelques μm et 1 cm. Les cloisons sont réalisées en un matériau diélectrique quelconque, par exemple en verre ou en polymère et sont formées par tout moyen approprié, par exemple par estampage ou autre.
Les plaques du vitrage sont identiques ou non et sont réalisées en toute matière appropriée, notamment en verre ou en matière plastique. Une des plaques peut être transparente et l'autre opaque, par exemple métallique, dans le cas d'un fonctionnement en réflexion. De façon générale, l'invention est applicable aux vitrages actifs ainsi qu'aux afficheurs passifs (non-émissifs).
L'invention sera mieux comprise et d'autres caractéristiques, détails et avantages de celle-ci apparaîtront plus clairement à la lecture de la description qui suit, faite à titre d'exemple en référence aux dessins annexés dans lesquels : la figure 1 est une vue schématique partielle agrandie, en coupe transversale, d'un vitrage selon l'invention ; la figure 2 est une vue de dessus d'une cellule élémentaire du vitrage ; - les figures 3, 4 et 5 sont des vues partielles schématiques illustrant des modes de fonctionnement d'un vitrage selon l'invention.
Le vitrage de la figure 1 comprend deux plaques 10, 12 d'une matière diélectrique transparente telle que du verre ou une matière plastique, qui sont parallèles et séparées d'une distance faible, comprise par exemple entre 0,01 et 1 mm environ, ces deux plaques 10, 12 étant identiques ou différentes l'une de l'autre.
Le volume interne défini entre ces plaques est partagé en une pluralité de petits volumes indépendants ou cellules élémentaires 14 séparés de façon sensiblement étanche par des cloisons 6 en matériaux diélectriques, par exemple en matière plastique.
Les cellules élémentaires 14 sont remplies d'un fluide, de préférence un liquide diélectrique ou faiblement électroconducteur 18, qui contient une suspension de particules 20 identiques ou différentes de matière diélectrique, ces particules ayant une taille comprise entre 0,01 et
50 μm environ.
Les faces en regard des plaques 10, 12 portent des électrodes 22, 24 qui sont par exemple de même nature et disposées face à face comme représenté en figure 1 , mais qui peuvent être différentes ou disposées de façon décalée dans certaines zones du vitrage ou dans certaines réalisations. Ces électrodes sont en un matériau électroconducteur approprié et ont des dimensions (épaisseur, largeur) qui sont typiquement comprises entre 1 μm et quelques mm environ. Elles ont toute configuration voulue (fils, rubans, peignes, etc.). Elles sont formées sur les plaques 10, 12 par tout moyen approprié (dépôt et gravure, jet d'encre, tamponnage, etc.).
Ces électrodes sont reliées à des moyens 26 d'alimentation électrique associés à des moyens de commande 28. Les moyens d'alimentation électrique 26 peuvent être à courant continu ou alternatif à fréquence variable. Typiquement, les tensions d'alimentation sont comprises entre 0,5 et 500 V et la fréquence est comprise entre 0 et 1
MHz.
Lorsque les électrodes 22, 24 sont alimentées en courant continu, les particules 20 se déplacent toutes dans le même sens en l'absence de mouvements de convection du fluide avec des vitesses différentes en fonction de leur nature et de leur dimension, et avec des seuils différents (valeur du champ électrique à partir de laquelle les particules commencent à se déplacer). Si certaines particules contenues dans le fluide ne sont pas électriquement neutres, un effet électrophorétique dépendant des polarités de la charge et du champ électrique s'ajoute aux effets diélectrophorétiques et d'interaction précités.
Lorsque les électrodes sont alimentées en courant alternatif, les particules peuvent se déplacer dans des sens différents en fonction de leur nature et de leur dimension, selon la fréquence du courant en raison de la dépendance en fréquence du facteur de Clausius osotti qui donne le dipôle effectif d'une particule immergée dans un fluide diélectrique (voir par exemple la figure 4 de l'article de N. G. Green et H. Morgan dans J. Phys.
D; Appl. Phys. 31 , 1998, L25-L30). Si certaines particules contenues dans le fluide sont chargées électriquement, aucun effet électrophorétique ne s'ajoute à l'effet diélectrophorétique.
De façon générale, les électrodes 22, 24 peuvent être opaques ou semi-transparentes. Le fluide (liquide) 18 peut être transparent ou coloré, selon les applications. Les particules 20 peuvent être identiques ou non, elles ont une même couleur ou des couleurs différentes et des caractéristiques optiques de transmission, de réflexion et de diffusion qui sont sélectionnées en fonction des applications. Elles peuvent également être soumises à des traitements spécifiques destinés à les rendre indépendantes les unes des autres ou au contraire à favoriser leur agglutination. Enfin, il est possible d'ajouter des particules chargées aux particules diélectriques en suspension dans le fluide.
Dans la forme de réalisation de la figure 2, les électrodes de chaque plaque sont formées par des peignes 22, 23 et 24, 25 respectivement imbriqués les uns dans les autres, les électrodes de deux peignes imbriqués pouvant être à des tensions électriques de polarités identiques ou opposées. En outre, en fonction des effets d'ensemble souhaités (effets d'affichage, d'opacité, de réflexion, de diffusion ou de transmission), les jeux d'électrodes 22, 23, 24, 25 peuvent être identiques ou différents. En particulier, les électrodes 22, 23, 24, 25 peuvent différer les unes des autres par leurs natures, leurs formes, leurs dimensions, leurs emplacements et/ou par les polarités des tensions électriques qui leur sont appliquées. Trois modes de fonctionnement possible d'un vitrage actif selon l'invention sont représentés schématiquement aux figures 3, 4 et 5.
En figure 3, les électrodes 22, 23, 24, 25 des plaques 10, 12 sont identiques et transversalement alignées d'une plaque à l'autre, les distances entre les électrodes formées sur une même plaque étant supérieures aux largeurs des électrodes.
Quand les électrodes ne sont pas alimentées, les particules
20 en suspension dans le fluide sont dispersées de façon plus ou moins uniforme et aléatoire entre les plaques sur le trajet de la lumière et donnent un effet optique d'ensemble qui est déterminé par leur nature et leurs propriétés (le vitrage étant par exemple globalement réfléchissant quand les particules 20 ont des propriétés réfléchissantes, ou plus ou moins opaque dans le cas de particules non réfléchissantes).
Quand les électrodes sont alimentées en courant continu, les électrodes 22, 23 étant par exemple à une tension positive et les électrodes 24, 25 à une tension négative, les particules 20 sont rassemblées entre les électrodes alignées de polarité opposée et forment des voiles 30 entre ces électrodes comme représenté, les voiles 30 étant perpendiculaires aux plaques. Les particules libèrent la majeure partie du volume compris entre les plaques et on obtient alors un effet d'ensemble « transparent » (ou de la couleur du fluide 18 dans lequel les particules sont en suspension), les particules étant rassemblées et maintenues hors du trajet de la lumière qui passe à travers les plaques 10, 12.
En figure 4, seules les électrodes 22 et 23 de la plaque 10 sont alimentées électriquement et chaque électrode 22 a une polarité opposée à celle des deux électrodes 23 voisines. Il se forme alors des voiles 32 de particules entre les électrodes 22 et 23, ces voiles étant parallèles à la plaque 10, et l'effet d'ensemble obtenu est dû aux propriétés optiques des particules (aspect réfléchissant ou opaque par exemple), les particules étant rassemblées et maintenues sur le trajet de la lumière.
En variante, quand les électrodes 24, 25 sont alimentées de la même façon que les électrodes 22, 23 et quand les électrodes 24 qui se trouvent en regard des électrodes 22 ont une tension de même polarité que ces électrodes 22, il se forme également des voiles de particules entre les électrodes 24, 25 le long de la plaque 12.
En figure 5, la disposition et l'alimentation des électrodes 22, 23, 24, 25 correspondent à celles décrites en référence à la figure 3, mais la largeur des électrodes est supérieure à la distance entre électrodes
formées sur une même plaque. Quand ces électrodes sont alimentées comme représenté, des nappes 34 denses de particules se forment entre les électrodes en regard des deux plaques, avec un effet d'ensemble qui est par exemple plus ou moins opaque ou réfléchissant ou diffusant en fonction de la nature des particules et de la largeur des électrodes, cette largeur pouvant de plus varier d'une zone à l'autre dans le vitrage. Dans ce cas, les électrodes sont semi-transparentes.
On peut donc obtenir des effets d'ensemble très différents, en particulier d'affichage, par la commande de l'alimentation électrique des différents groupes d'électrodes 22, 23, 24, 25 et on peut renforcer et affiner ces effets en différenciant les électrodes, par leurs formes, leurs dimensions, leurs emplacements, etc. En utilisant des fréquences différentes d'alimentation des électrodes, on peut séparer des particules différentes et les stocker séparément sur des jeux d'électrodes, puis les relâcher sélectivement pour obtenir un affichage avec des effets particuliers souhaités (absorption, diffusion, couleur, réflexion métallique, etc.).
Les résultats obtenus aux figures 3, 4, 5 peuvent aussi être obtenus quand les électrodes sont alimentées en courant alternatif, avec des variations dues aux effets dépendant de la fréquence (signe de la force diélectrophorétique dû au signe du facteur de Clausius-Mosotti, effets électromécaniques sur les particules différentes entre champ électrique continu et champ électrique alternatif, etc.).