La présente invention a pour objet un réactif de lyse des érythrocytes.
Elle est en outre relative à un procédé d'isolement, de discrimination et de quantification des leucocytes, et de leurs différentes classes, au sein d'un échantillon sanguin.
Les analyses pratiquées en hématologie ont pour objet une identification et un comptage de plusieurs catégories de cellules, afin d'établir un diagnostic. Les cellules à reconnaître sont usuellement des leucocytes qui se répartissent en trois sous-populations principales à savoir les lymphocytes, les monocytes et les granulocytes. Ces derniers comprennent notamment les éosinophiles, les neutrophiles et les basophiles.
Elles sont généralement réalisées au moyen d'un dispositif utilisant l'effet Coulter. Ce dispositif consiste à faire passer des cellules dans un liquide conducteur à travers un orifice de petit diamètre, au niveau duquel est appliqué un courant électrique maintenu constant. Le passage d'une particule y provoque une variation transitoire de conductivité, représentative du volume occupé par la particule traversante.
Ces mesures de variations d'impédance sont cependant reconnues comme insuffisantes pour identifier les cellules. En effet, des cellules appartenant à des familles différentes ont parfois des volumes très voisins.
C'est pourquoi, ces mesures de variations d'impédance sont classiquement complétées par des mesures issues d'un dispositif optique, du type diode laser. Dans un tel dispositif, des cellules passant par un orifice de petit diamètre sont illuminées par un faisceau laser et réfléchissent de la lumière. La lumière réfléchie par une cellule a une intensité en corrélation avec l'indice de réfraction de cette cellule. La mesure de la lumière réfléchie permet ainsi d'obtenir des informations sur l'état de surface de la cellule.
On constate qu'à partir d'informations sur le volume et l'état de surface des cellules, on peut obtenir des analyses précises.
Quel que soit le dispositif utilisé pour effectuer des analyses en hématologie, il est nécessaire de préparer préalablement des échantillons de sang à analyser.
En effet, le comptage des leucocytes, ou globules blancs, ne peut être effectué sans une lyse préalable des érythrocytes, ou globules rouges, ces derniers étant en nombre très supérieur (1 pour 1000).
La saponine a été utilisée afin d'effectuer la lyse des érythrocytes mais elle présente un grand nombre d'inconvénients. D'une part, l'action de cette enzyme est étroitement liée à la température à laquelle est effectuée la réaction. D'autre part, la cinétique de sa réaction est telle qu'il est extrêmement difficile de déterminer le stade auquel les érythrocytes sont éliminés et les leucocytes ne sont pas encore endommagés. Ces deux inconvénients sont renforcés par le fait qu'il existe une grande hétérogénéité entre les différents lots de saponine.
Ainsi, une lyse par de la saponine seule risque d'endommager les leucocytes, en particulier leur noyau, du fait d'une absence de contrôle de la réaction enzymatique.
La saponine seule ne pouvant être utilisée, d'autres molécules, des composés d'ammonium quaternaires tels que les bromures ou chlorures de tétra-décyltriméthylammonium ou les chlorures ou bromures de dodécyltriméthylammonium ont été utilisés pour lyser les érythrocytes. Néanmoins, ces composés d'ammonium quaternaires ne permettent la distinction que de trois sous-populations de leucocytes, à savoir les lymphocytes, les monocytes et les granulocytes.
Avec l'apparition des cytomètres de flux, utilisant le système de focalisation hydrodynamique, une lyse conservant la morphologie et le volume des leucocytes s'est avérée nécessaire.
Les agents de lyse qui ont alors été développés sont constitués de deux réactifs différents:
- un agent lysant hypotonique, c'est-à-dire conférant au milieu une osmolalité comprise entre 50 et 100 milliosmoles, contenant par exemple de la saponine, et
- un agent stabilisant, sous la forme d'une solution saline, ayant pour effet de rééquilibrer le pH et l'osmolalité du mélange de l'échantillon sanguin et de l'agent lysant.
L'adjonction de cet agent stabilisant permet d'arrêter le processus continu de lyse, en inhibant la saponine. Un tel agent confère à la solution une osmolalité d'environ 300 milliosmoles.
Un fixateur, tel que du glutaraldéhyde peut ensuite être ajouté à cette solution, afin de stabiliser les leucocytes, comme décrit dans les brevets US 4.751 179 et FR 2.654 744.
Ce procédé de lyse nécessite donc l'utilisation d'au moins deux réactifs différents, et requiert de ce fait une machinerie plus complexe, un plus grand nombre de réactifs et une programmation plus complexe des diverses opérations, en particulier des temps d'addition et de mélange.
Cette solution présente de nombreux inconvénients dûs à la présence de deux réactifs différents l'un lysant les érythrocytes, l'autre inhibant cette lyse.
On rappelera que la numération des diverses souspopulations leucocytaires est un élément diagnostic très important.
Aucun des procédés de détermination des souspopulations leucocytaires décrits dans l'état de la technique n'apporte une solution fiable, simple à mettre en oeuvre et automatisable à ce problème de santé publique.
En effet, il ressort de l'état de la technique analysé ci-dessus que l'on connaissait bien des réactifs tels que les sels d'ammonium, mais que ceux-ci présentaient notamment l'inconvénient de ne pouvoir distinguer que trois souspopulations de leucocytes. En outre, la saponine seule n'était pas utilisable car elle risquait d'endommager les leucocytes, cellules que l'on cherchait justement à identifier.
La dernière solution décrite ci-dessus, nécessitait la présence de deux réactifs et de ce fait la mise au point de machineries plus complexes.
La demanderesse s'est donc attachée à résoudre ces multiples problèmes.
Elle a ainsi découvert qu'il était possible d'utiliser la saponine pour lyser les érythrocytes, tout en préservant l'intégrité des leucocytes, en déterminant par une simple mesure, le stade de la réaction de lyse auquel les érythrocytes sont lysés dans leur quasi totalité, mais auquel les leucocytes ne subissent pas de dommages, ou des dommages très limités, appelés point de lyse, et en inhibant la réaction de la saponine.
Elle a en outre développé un réactif particulier permettant une lyse efficace des érythrocytes, n'endommageant pas les leucocytes, et permettant une mesure du point de lyse.
La présente invention a donc pour objet un procédé d'isolement et de discrimination de sous-populations de leucocytes, au sein d'un échantillon de sang comprenant les étapes de
- lyse des érythrocytes par une solution, dont l'osmolalité et le pH ont été ajustés afin de conserver l'intégrité des leucocytes, contenant de la saponine,
- détermination du point de lyse, et
- inhibition de la lyse par dilution de l'échantillon au point de lyse par une solution présentant sensiblement la même composition mais ne contenant pas de saponine.
On considère pour la présente invention que le point de lyse est atteint, quand substantiellement tous les érythrocytes ont été lysés.
Les lysats issus de ce procédé d'isolement présentent de manière avantageuse quatre sous-populations de leucocytes, ayant subi peu ou pas de dommage et qu'il est donc possible d'identifier par les méthodes décrites ci-dessus. Ces quatre sous-populations sont
- les lymphocytes,
- les monocytes,
- les neutrophiles, et
- les éosinophiles.
De manière particulièrement avantageuse, la première étape de ce procédé, c'est-à-dire la lyse des érythrocytes est mise en oeuvre à l'aide d'un réactif comprenant de 0,1 à 2g/l, et préférentiellement de 0,7 à 1,4 g/l de saponine, et présentant une osmolalité comprise entre 200 et 400 millimoles, préférentiellement entre 280 et 320 millimoles, et un pH compris entre 6 et 8, préférentiellement entre 6,5 et 7,5.
La saponine utilisée dans la présente invention peut contenir 10 à 20% de sapogénine, qui est la forme nonglycosylée de la saponine. Elle peut être par exemple celle commercialisée sous la référence 84510 par la Société FLUKA.
Un tel réactif peut comprendre en outre des sels et diverses autres molécules destinés à maintenir l'osmolalité dans les valeurs indiquées ci-dessus et à assurer l'effet tampon.
La réaction de lyse, c 'est-à-dire la première étape du procédé décrit ci-dessus, est effectuée à une température à laquelle la saponine présente une activité de dégradation des érythrocytes, préférentiellement entre 15 C et 45 C et de manière encore plus préférentielle à 37 C environ.
La première étape de ce procédé est mise en oeuvre en mélangeant l'échantillon de sang humain avec un réactif de lyse contenant de la saponine dans des rapports volumiques compris entre 1:20 à 1:40, et préférentiellement proches de 1:33.
I1 est possible d'utiliser des diluants pour diluer la saponine avant son mélange avec l'échantillon sanguin.
De tels diluants, appelés aussi réactifs de gaine, peuvent être le diluant Hematon Plus Hycel, commercialisé par la demanderesse, ou l'Isoton III commercialisé par la Société
COULTER.
L'inhibition de la réaction peut être effectuée par le même diluant, ou une solution présentant sensiblement la même composition.
Les rapports volumiques entre le lysat issu des deux premières étapes du procédé et la solution destinée à inhiber l'action de la saponine dans la troisième étape, sont avantageusement compris entre 2 et 4, et sont préférentiellement de l'ordre de 3.
La détermination du point de lyse peut être réalisée par tout moyen mais est préférentiellement effectuée par mesure de radiation lumineuse transmise au travers de l'échantillon.
Une telle détermination peut notamment être effectuée selon le procédé, et à l'aide des dispositifs, décrits dans la demande française 95 05 285 déposée le 3 Mai 1995 par la demanderesse pour " Procédé et dispositif de détection du point de lyse de globules rouges".
Un tel procédé consiste à:
- mélanger l'échantillon sanguin et la saponine, comme indiqué ci-dessus,
- émettre des radiations lumineuses en direction du mélange réactionnel,
- recevoir la lumière émise à travers ledit mélange, et
- comparer la quantité de lumière reçue à un seuil prédéterminé, le point de lyse étant atteint lorsque la quantité de lumière correspond audit seuil.
Le texte de la demande 95 05 285 est inclus dans le texte de la présente par référence.
Après inhibition de la lyse, c'est-à-dire après la troisième étape du procédé décrit ci-dessus, le lysat est analysé dans un cytomètre de flux utilisant une source laser par le passage des cellules dans une gaine cytométrique permettant une différentiation en taille (petits angles) et granulométrie (grands angles).
Le procédé selon la présente invention présente donc de nombreux avantages par rapport aux procédés déjà décrits dans l'état de la technique:
- il permet une maîtrise totale de la réaction de lyse de la saponine, et de ce fait d'obtenir des préparations sanguines substantiellement dépourvues d'érythrocytes, mais dont l'intégrité des leucocytes a été conservée.
- il ne nécessite que l'utilisation d'un seul type de diluant, dans lequel est effectuée la réaction de lyse et qui est aussi utilisée pour inhiber cette réaction, et
- il permet de distinguer quatre sous-populations leucocytaires, alors que le réactif utilisé en routine ne permet que de distinguer que trois sous-populations.
Les cytomètres de flux sur lesquels peuvent être mis en oeuvre le procédé selon l'invention sont en particulier 1'HYCEL type HEMA 5 commercialisé par la demanderesse, 1'ATC 3000 fabriqué par le Commissariat à l'Energie Atomique, le
FASCAN commercialisé par BECTON-DICKINSON, et 1'EPICS commercialisé par la Société COULTER.
La présente invention est illustrée par les exemples qui suivent.
Dans ces exemples les figures 1 à 5, et 7 représentent des cytogrammes d'échantillons sanguins. La diffusion est représentée sur l'axe des ordonnées, tandis que la taille des cellules est représentée sur l'axe des abscisses.
La figure 6 représente quant à elle un cytogramme dans lequel la fluorescence (en abscisse) est mesurée en fonction de la diffusion ( en ordonnée).
EXEMPLE 1
Analyse sur comPteur HEMA 5 d'un échantillon sanauin traité par le Procédé selon l'invention.
Un échantillon sanguin est traité par un réactif de lyse comprenant de la saponine à une concentration de 0,9 g/l en solution dans du réactif HEMATON PLUS commercialisé par la
Société HYCEL.
Le réactif de lyse est porté à une température de 370C puis 30p1 d'échantillon sanguin sont mélangés avec 1 ml de ce réactif.
Le mélange obtenu est agité.
La lyse complète est obtenue après 3 à 20 secondes, selon les échantillons.
Des mesures photométriques sont effectuées afin de déterminer le point de lyse.
Dès qu'il est atteint, c'est-à-dire dès que la coloration des échantillons est stable et que tous les érythrocytes sont lysés, la réaction est bloquée par l'addition de 3 ml d'HEMATON PLUS ( réactif de gaine) qui stoppe l'effet lysant de la saponine.
Les échantillons ainsi traités sont alors analysés sur le compteur HEMA 5.
Les figures 1 à 4 représentent des cytogrammes de quatre échantillons sanguins traités comme indiqué ci-dessus.
On distingue clairement sur ces cytogrammes quatre populations cellulaires correspondant aux leucocytes, aux monocytes,aux neutrophiles et aux éosinophiles.
Ces cytogrammes montrent une excellente corrélation avec des analyses des mêmes échantillons sanguins effectués sur un compteur COULTER STKS.
EXEMPLE 2:
Analyse sur compteur ATC 3000 d'échantillons sanguins traités par le procédé selon la présente invention.
Des échantillons sanguins ont été lysés par une composition comprenant 0,3 g/l de saponine dans du réactif
HEMATON PLUS HYCEL.
33 yl de sang ont été ajoutés à 5 ml de ce réactif de lyse.
La lyse a été effectuée à 20 C pendant au maximum 140 secondes.
Les échantillons ainsi traités ont été analysés sur un compteur ATC-3000.
La figure 5 représente l'analyse d'un échantillon sanguin.
Les quatre sous-populations de leucocytes peuvent être aisément distinguées.
Le même échantillon a été analysé sur un compteur STKS de la Société COULTER.
Une bonne corrélation des analyses effectuées sur les deux compteurs est observée.
EXEMPLE 3:
Analyse d'échantillons sanguins traités selon la présente invention sur un cytomètre FASCAN.
Des échantillons sanguins ont été lysés par un réactif de lyse contenant 3 g/l de saponine dans du réactif HEMATON
PLUS HYCEL.
100yl de sang humain ont été ajoutés à 6 ml de ce réactif de lyse puis, après agitation, l'échantillon a été analysé sur le cytomètre de flux.
Le FASCAN, commercialisé par la Société BECTON
DICKINSON, est un cytomètre de flux à source laser (excitation à 488 nm) qui permet de mesurer la fluorescence.
La figure 6 représente la fluorescence des échantillons sanguins ainsi traités. La partie de cette figure entourée par des traits pointillés correspond aux éosinophiles.
La figure 7, qui correspond à la mesure de la taille des cellules, permet de distinguer quatre sous familles de leucocytes, numérotées 1 à 4 et correspondant respectivement aux lymphocytes, aux monocytes, aux neutrophiles et aux éosinophiles.
Ces résultats présentent une bonne corrélation avec ceux obtenus sur les mêmes échantillons sanguins avec l'appareil SYSMEX NE-8000.
D'autres expérimentations ont permis de montrer que la lyse est d'autant plus rapide que la concentration en saponine est élevée, et que l'élévation de la température accélère la lyse et permet une lecture dans un temps très court.
EXEMPLE 4:
Analyse d'échantillons sanguins traités Par le procédé selon la Présente invention sur un compteur EPICS.
Le réactif de lyse utilisé dans ces exemples est constitué d'un réactif HYCEL dans lequel est dilué 0,9 g/l de saponine.
100 p1 d'échantillons sanguins ont été traités par 1 ml du réactif de lyse, à 37 C.
Les résultats obtenus présentent une très bonne corrélation avec ceux obtenus sur d'autres cytomètres.